07 mai 2009

Un printemps américain (4)


8 Avril. Aujourd'hui, voyage dans le voyage, nous entreprenons une virée de trois petits jours à New York. Ce n'est pas vraiment la porte à côté (189 miles soit environ 300 kms). J'imaginais y aller en train. Hélas, une seule compagnie dessert cette destination à partir de Baltimore : Amtrak. Les tarifs sont assez élevés et le trajet n'a rien de particulièrement attrayant.
Heureusement nos amis qui ont déjà été confrontés au problème, nous proposent une solution beaucoup plus économique et de surcroît plus originale : le bus !
Pas les fameux GreyHound, mais une entreprise moins connue, jouissant ici d'une meilleure réputation en terme de confort et d'agrément : megabus.com.

Nous avons pu ainsi trouver le meilleur horaire et réserver nos billets sur le net, ce qui s'est avéré des plus faciles. Le plus délicat est de se rendre à l'arrêt de bus, curieusement situé à plus de 20 km du centre de Baltimore, dans le parking d'un grand centre commercial, le White Marsh Park and Ride. Grâce à l'inlassable dévouement de nos hôtes, nous nous y rendons avec armes et bagages en profitant une fois encore du standing douillet de leur Mercury Grand Marquis.
Le bus n'est pas vraiment à l'heure. Il arrive avec près d'une demi-heure de retard. Mais il va s'avérer très confortable, disposant de toutes les commodités et même d'une connexion internet wifi !

Le trajet est un peu monotone. Nous longeons dans un premier temps la rive ouest de la baie de Chesapeake. De l'autre côté de l'eau, s'étend la péninsule Delmarva qui comme son nom le suggère, appartient à trois états différents. La moitié occidentale est dans le Maryland, l'autre moitié faisant face à l'Atlantique, constitue la plus grande partie du Delaware, enfin la pointe au sud est en Virginie.
Juste avant d'abandonner la baie, au moment où elle se termine en donnant naissance au fleuve Susquehanna, nous apercevons une pancarte au nom évocateur : Havre de Grace. Nous ne verrons pas plus hélas de ce petit bourg prometteur...
Nous traversons un petit bout du Delaware, en croisant notamment Wilmington, port industriel que nous apercevons au loin. Le Delaware est un minuscule état sans beaucoup de charme. Il est surtout réputé pour ses élevages de poulets et pour sa fiscalité très avantageuse qui lui vaut d'attirer un grand nombre d'entreprises offshore.
Nous abordons brièvement la Pennsylvanie, en passant non loin de Philadelphie, et enfin le New Jersey.
Le but n'est pas loin. Tout à coup nous voyons surgir au loin la ligne crénelée des buildings de New York ! Encore quelques grands noeuds routiers puis le Lincoln tunnel, et nous arrivons à Manhattan après 3 bonnes heures de route.

Le bus nous dépose auprès du Madison Square Garden.
On a beau être prévenu et quelque peu déniaisé par les photos, films et séries télévisées, la fameuse grosse pomme s'impose à nous dans toute sa splendeur. Première impression, les immeubles gigantesques ne sont ni écrasants, ni rebutants. Ils s'inscrivent dans une perspective majestueuse. De l'endroit où nous débarquons, c'est à dire le carrefour entre Seventh Avenue et West 33rd st, nous apercevons d'emblée l'Empire State Building sans même y prêter vraiment attention. C'est en regardant le plan que j'en fait le constat. Cette flèche élancée qui perce le ciel me disait bien quelque chose mais je la trouve presque petite par rapport à l'idée que je m'en faisais.
Nous faisons une halte dans un McDonald's pour étancher une petite faim et faire un peu le point. Nous devons paraître vraiment empotés devant le panneau du comptoir, à ne pas trop savoir quoi choisir. Nous nous excusons en baragouinant que nous sommes Français. Le gars de l'autre côté très patient, sourit : « you're welcome ». Double sens peut-être...
Mon fils cherche désespérément les énormes Big Mac qu'il était sûr de trouver ici en pagaille. Quant à moi, ce doit être la seconde fois que je pénètre dans cet antre de la prétendue malbouffe américaine. Non décidément, il n'y a guère de différence avec les hamburgers trouvés chez nous, et ils se laissent bien manger ma foi...

Une fois rassasiés, nous nous dirigeons vers Broadway, que nous allons remonter ébahis, jusqu'à Times Square. Je dois dire que c'est un véritable enchantement. J'aime le contraste des arbres fleuris qui détachent délicatement leurs contours graciles sur les façades en se reflétant dans les vitres. J'aime les drapeaux et longues banderoles accrochés un peu partout qui apportent de subtiles touches colorées à ces grandes masses grises. La rue et les trottoirs vibrionnent d'une foule débonnaire. Encore une fois je suis naïvement, spontanément, indiciblement heureux...
Plus nous remontons, plus l'ambiance s'égaie. Les enseignes multicolores, même en plein jour sont éblouissantes. Dans la rue, taxi jaunes et bus rouges se fondent avec les affiches, les néons, les diodes colorées, dessinant des images en perpétuel renouvellement et nous nous abandonnons à ce délicieux tourbillon.
Nous rejoignons notre hôtel, le Washington Jefferson dans West 51st st. D'apparence discrète, il s'avère de très bon standing. Hélas nous ne comprenons pas tout ce que nous dit l'hôtesse en nous accueillant. Il paraît qu'une chambre ne serait pas tout à fait prête et qu'on nous en aurait donné une autre.... Je me lamente sur mon si médiocre niveau en anglais.
Nous découvrons les chambres avec plaisir. Elles sont très belles et confortables. Celle des enfants comporte deux lits jumeaux et s'avère un meilleur choix que la nôtre, plus petite...

Après avoir pris connaissance des lieux, nous redescendons bien vite pour profiter de la fin de l'après-midi. Direction Fifth Avenue. Nous croisons le Rockefeller Center et sa fameuse patinoire, surplombée par une représentation dorée de Prométhée attaché à sa montagne. De l'autre côté, une colossale statue d'Atlas portant le Monde fait face à travers l'avenue, à la cathédrale Saint-Patrick. Cette église, érigée il y a un siècle et demi dans le style gothique flamboyant, la plus grande de tous les Etats-Unis, paraît en dépit de sa taille , un peu à l'étroit entre les immenses buildings qui l'entourent.
Plus loin c'est la Trump Tower qui attire notre attention. Sa base est découpée en terrasses carrées dont chaque niveau est planté d'arbustes fragiles qui semblent monter à l'assaut de la sombre façade vitrée.

En remontant l'avenue, les belles vitrines se succèdent : Celles de Colehaan et de Kenneth Cole, avec leurs lourdes portes couvertes de dorures et de bas-reliefs, puis Vuitton, Cartier, Rolex, Alfred Dunhill, Gucci, Abercrombie et Fitch, Prada...

Puis nous débouchons sur Central Park, au pied du Plazza Hotel. Le long du parc les taxis voisinent avec une nuée de vélos triporteurs cherchant à alpaguer d'éventuels clients, tandis que de rutilantes calèches colorées, menées par des chevaux placides, se fraient tranquillement leur chemin ponctué du son sec et régulier des sabots heurtant la chaussée.
Nous passons devant une grande statue représentant un homme à cheval. A ma grande surprise, il s'agit du poète et homme politique cubain José Marti (1953-1898), héros de l'indépendance de son pays. Il ne parvint toutefois pas à l'obtenir de son vivant par l'insurrection.
Ironie de l'Histoire, ce cavalier représenté dans un style quelque peu emphatique, rappelle indirectement que les Etats-Unis furent en définitive les artisans de cette libération, obtenue par les armes contre l'Espagne en 1898...
Nous descendons dans le parc et flânons autour de l'étang d'où nous pouvons jouir d'un magnifique spectacle Les immeubles vus en contre plongée affirment leur puissance et leur modernité dans les rayons obliques du soleil. On dirait une armée de géants bienveillants autour de ce grand parc qui s'assoupit dans les derniers feux du jour. Nous repérons ça et là quelques oiseaux inhabituels : notamment quelques red-wing blackbird que je retrouverai plus tard dans Google sous la référence française de carouge à épaulettes et un joli cardinal bariolé.
Mais le jour qui tombe assez rapidement ne nous donne pas l'occasion de poursuivre plus avant la découverte de cette agréable « campagne » new yorkaise. Nous remontons vers les lumières et empruntons la 6è avenue ou Avenue of the Americas. Nous passons devant le célèbre Radio City Music Hall qui occupe une partie du Rockefeller Center.

En croisant la 42è rue au niveau de Bryant Park, nous apercevons au loin le Chrysler Building et son élégante flèche faites d'écailles lumineuses. La crise est là, Chrysler est en quasi faillite mais la tour brille encore et à ses pieds les New Yorkais s'affairent comme si de rien n'était. Juste devant nous l'étoile rouge géante de Macy's, « le plus grand magasin du monde », celui qui ne ferme jamais ses portes, est comme un étonnant pied de nez à la morosité et aux idéologies.
Nous entrons. Une foule s'y presse mais l'ambiance est feutrée, parfumée. Partout des fleurs. En bouquets, en pots, en arbustes savamment arrangés, c'est une féerie marchande. Combien d'étages y a-t-il, je ne me souviens plus bien mais nous ne verrons qu'une petite partie de cet empire qui s'étend sur tout un quartier.
Avant de rentrer fourbus à l'hôtel il nous reste encore à découvrir Times Square by night. Deux soirées ne seront pas de trop pour s'emplir de cette fête permanente...

Aucun commentaire: