31 juillet 2009

Blues d'été


A emporter en vacances quand on aime le blues et les sonorités pas trop formatées, stéréotypées, calibrées...
Tout d'abord le nouvel opus de Madeleine Peyroux , Bare Bones : Du jazz qui déploie sa douce musique à la manière de la caresse languide et chaude du soleil à travers les persiennes au coeur de l'été... C'est tamisé, distillé, retenu mais ça irradie le bonheur discret d'exister, lorsque les soucis sont comme par magie évaporés. Madeleine Peyroux joue avec volupté des subtiles intonations de sa voix ensorcelante. Elle se promène sur les délicieuses mélodies et un quatuor idéal l'accompagne dans cette infinitésimale odyssée. On retrouve notamment Vinnie Colaiuta qui du bout de ses balais effleure le rythme avec sensualité. De leur côté Jim Beard au piano et Dean Parks à la guitare libèrent avec tendresse tout le jus de leur instrument. O temps suspends ton vol...

Ensuite l'éternel compagnon des âmes errantes, Bob Dylan qui invite toujours au voyage, Together Through Life. C'est un vrai bonheur de constater qu'avec l'âge, il ne perd manifestement pas sa verve créatrice. Elle prend au contraire une saveur de plus en plus troublante et attachante. Comme celle d'alcools délicatement imprégnés des parfums du chêne dans lequel ils vieillissent, et qui grâce à une mystérieuse alchimie révèlent une infinité d'arômes subtils. Ce nouvel album est assurément de la même veine que ceux qui le précèdent. Comme le magnifique Modern Times il cache ses trésors derrière une modeste pochette illustrée d'une très suggestive photo noir et blanc. Cette fois-ci un bref moment de tendresse au fond d'une auto filant sur le bitume, capturé par Bruce Davidson, donne l'atmosphère.



La musique quant à elle, s'inscrit dans cet univers fugace du temps qui passe, avec une indicible prégnance. Comme souvent avec Dylan, elle n'a l'air de rien au premier abord, mais elle imprime profondément son sillon. Sur des rythmiques tendues ou chaloupées, admirablement servies par des musiciens épatants, le chanteur pose tranquillement sa poésie si particulière, en jouant à merveille de sa voix enjôleuse, à la fois nasale et pointue, écorchée mais un peu grasseyante, trainante, lointaine et si proche...
Les chansons sont toutes simples. Elles tiennent parfois du blues (life is hard, my wife's home town) mais aussi plus souvent de la ballade amoureuse (Beyond here lies nothin, Jolene, the dream of you). On y trouve aussi des réminiscences de rêves passés : I feel a change comin' on... L'ambiance est un rien feutrée, avec ce qu'il faut d'acidité. Quelques beaux riffs de guitare électrique, une pincée de douceur apportée par la pedal steel, les volutes ensorcelantes du banjo, de la mandoline et surtout d'un accordéon qui rappelle parfois les bonnes vieilles sonorités du Band...
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Un rescapé des sixties ensuite, qui semble renaître de ses cendres depuis quelque temps, Jeff Beck. L'homme n'a jamais été attiré par les feux de la rampe, mais il a fait une exception il y a quelques mois, pour une parenthèse enchantée dans un petit club londonien le Ronnie Scott's.
Guitariste éphémère des Yardbirds pendant les sixties, c'est un artiste plus que discret. Les aficionados de Brit Blues et de Jazz Rock connaissent son nom mais sont sans doute peu nombreux à mesurer vraiment ce dont il est capable. Avec cette prestation extatique, il faut espérer qu'il gagne enfin la place qui lui revient de toute évidence au panthéon des rock stars : celle d'un géant !
C'est tout simplement une révélation. Ce qu'il fait sur scène est diablement sioux. Pas à cause du collier plus ou moins indien qu'il arbore modestement, mais parce qu'il fait preuve d'un toucher de guitare absolument unique, quasi indicible. Il n'a pas son pareil en effet pour pincer, tirer, marteler, pousser, griffer, effleurer les cordes afin d'en extraire un jus incroyable. Tantôt ce sont des stridulations qui vrillent l'air comme les fusées d'un festival pyrotechnique, tantôt c'est une plainte qui meurt en feulant sous la caresse du bottleneck. Et tout ça totalement maitrisé, pétri avec amour par des doigts nerveux et agiles qui n'ont que faire d'un médiator mais semblent faire corps avec le bras du vibrato.
Dans le cadre de ce fameux petit club de jazz de Londres, quoi de plus naturel à entendre que du jazz ? Mâtiné de blues, de rock et de rythmes funky c'est bien du jazz en quelque sorte qu'on entend. Jazz rock avant tout, sous tendu par les arpèges d'une jeune bassiste prodige Tal Wilkenfeld. Elle a la pêche de Jaco Pastorius ou de Stanley Clarke, avec en plus un air malicieux de ne pas y toucher, qui fait manifestement l'admiration attendrie de son mentor. A la batterie Vinnie Colaiuta assure le tempo comme une horloge suisse, tandis que Jason Rebello tient sans faiblir les claviers comme un chef ses fourneaux.

Comme Jeff ne chante pas, les mauvaise langues pourraient dire qu'il ne lui manque que la parole... C'est vrai mais à la place, il a l'heureuse idée de donner la vedette à des artistes bourrées de charme et de talent : Joss Stone, et Imogen Heap. La première revisite de manière très convaincante un titre de Curtis Mayfield (People get ready), et la seconde sur une composition personnelle, se lance avec Jeff à la strat, dans un duo irradiant qui est un des sommets du concert (Blanket), puis donne une version décapante du fameux Rollin' and Tumblin'. Sans oublier Eric Clapton en personne qui vient faire le boeuf sur deux blues bien juteux à la fin du concert.
En, prime on a même droit en intersession, à une savoureuse séquence typiquement rockabilly avec les Big Town Playboys.
Au total, ce DVD/Blu ray est un enchantement. Signalons enfin qu'il est remarquablement filmé et doté d'une prise de son impeccable, chaude, précise, détaillée. Bref, une belle euphorie...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Merci d'avoir un blog interessant