18 juillet 2009

L'âme du jasmin et la vanité du Monde


Cette année notre jasmin semble avoir décidé de livrer toute la quintessence de son âme de fleur. Est-ce le fait de lui avoir fait goûter l'air frais du dehors pendant quelques semaines ? Est-ce l'effet des belles journées qui ont salué par ici l'arrivée de l'été ? Toujours est-il qu'il est couvert depuis quelque temps d'une magnifique floraison blanche dont les effluves nous envahissent dès le matin. Ah ce parfum entêtant mais enivrant qui paraît venir d'un autre monde... Il pourrait presque, à l'image du mythique népenthès, noyer dans un doux oubli les soucis et peines du quotidien...
Depuis notre retour d'Amérique je dois pourtant dire que je suis presque indifférent aux choses de l'actualité. Ce n'est pourtant pas qu'elle soit creuse mais elle me semble de plus en plus vaine.
Que s'est-il passé durant ces derniers mois qui vaille d'être retenu ?
Sont-ce les élections européennes qui témoignent une fois encore de la médiocrité du débat politique dans notre pays ? Un parti socialiste à bout de souffle incapable d'émettre la moindre idée neuve, cramponné à une idéologie déliquescente. Un soi-disant Centre situé en fait au milieu de nulle part, et qui s'engloutit dans le délire monomaniaque d'un chef aussi creux et infatué qu'obtus. Des extrêmes en morceaux ressassant opiniâtrement leurs vieilles haines recuites et leur sombre ritournelle d'imprécations revanchardes. Enfin, le parti du Président, bien rangé, qui lui non plus ne brille pas par l'originalité, mais dont l'apparente unité s'avère en définitive le meilleur argument électoral. Ah, j'oubliais cette subite flambée écologique dont les médias se gargarisent avec délectation. Le tour fut assurément bien joué par ce vieux renard de Cohn-Bendit, mais faut-il voir dans le conglomérat hétéroclite qui s'agite aux basques de l'ex-révolutionnaire d'opérette autre chose qu'une habile farce sans lendemain ?
Pendant ce temps, le gouvernement fait mine d'agir, mais on s'interroge sur le bien fondé des quelques mesures engagées de ci de là sans ligne stratégique claire. Plus grave, les dernières lois promulguées font craindre un nouveau renforcement de la bureaucratie. Ainsi en est-il par exemple des textes ruisselant de bonnes intentions baptisés emphatiquement HADOPI pour la protection des droits des artistes et HPST pour la nième réorganisation de l'Hôpital. Leur infernale complexité, et l'invraisemblable arsenal administratif sur lequel elles appuient leurs objectifs grandiloquents sont de fort mauvais augure.
D'une manière générale, la crise a hélas réduit à néant tout embryon d'audace, tout pragmatisme et tout esprit critique. Après avoir une fois encore sacrifié le libéralisme sur l'autel de la Justice Sociale, l'Etat est revenu plus fort que jamais, et tout particulièrement sa fâcheuse tendance à dépenser sans compter. Non content d'avoir approfondi dramatiquement la dette du pays, non content d'avoir négligé toute rigueur en laissant flamber les déficits, voici qu'il propose un grand emprunt, sans même donner l'impression d'avoir une idée de ce qu'il pourrait bien en faire ! Au point d'estimer indispensable de mettre sur pied une commission chargée de déterminer à quoi l'hypothétique manne devrait être dépensée ! Et en y mettant à sa tête deux des plus calamiteux représentants du microcosme technocratique. On croit parfois rêver...
Et le Monde dans tout ça ?
Il tangue au gré de la Crise. Partout les dettes se creusent. A la fin de l'année, Barack Obama aura multiplié le déficit budgétaire de l'Amérique par quatre ! Tous les repères s'estompent. Les experts ont doctement prétendu que le Krach était l'expression d'excès en matière de crédit, mais jamais on a autant hypothéqué la richesse des nations, en invoquant le retour d'une croissance qu'on qualifie dans le même temps de fléau du capitalisme...
Le Monde découvre que le nouveau président américain n'est pas un messie. La crise se moque de ses mesures pharaoniques de relance.
Quant à sa politique extérieure d'apaisement, elle ne produit pas l'esquisse de l'ébauche du changement escompté. La Corée du Nord, de plus en plus folle ignore avec forfanterie ses avertissements mollassons. L'Afghanistan vit toujours sous la menace des barbares et il faut bien se résoudre à accroître la pression armée sous peine de perdre les fragiles résultats obtenus. Selon le même principe, en Irak, le retrait des troupes engage le pays dans un avenir très incertain. Le processus de règlement du conflit Israelo-Palestinien quant à lui n'a pas avancé d'un iota. Le Pakistan est au bord du chaos. L'Iran n'hésite plus à montrer au grand jour les griffes de son abominable dictature. Certains font mine de s'en apercevoir, mais depuis 30 ans qu'elle dure, il fallait vraiment être myope ou de très mauvaise foi pour ne pas la voir. Au total si le président US se refuse à qualifier tous ces gens d'axe du mal, pour eux à l'évidence, il est toujours l'incarnation du grand Satan.
Michael Jackson a décidé lui, de tirer sa révérence. A l'instar des fleurs, il a vécu de manière spectaculaire mais brève. Paradoxalement, en dépit du charme et de la grâce dont la Nature l'avait doté, il était profondément insatisfait de son apparence physique. Pour y remédier et comme pour donner raison à cette époque qui privilégie de plus en plus la forme sur le fond, il se servit de tous les artifices techniques de la chirurgie esthétique pour transformer son corps. Il était devenu une sorte de dérisoire Prométhée du showbiz. Mais un titan très seul et plus contraint que quiconque, par le poids des chaines dorées qu'il s'était inconsciemment mises aux pieds.
Happé par un destin fulgurant et brutal, il n'eut pas le loisir de se faner derrière son masque de star aseptisée. Et puisque rien n'était plus naturel dans sa manière de braver la réalité, sa mort même avec tout ce qui l'entoure, paraît factice. Après un éblouissant et dernier feu d'artifice, il est probable que ses gentilles chansons se dissolvent sous peu en scories, dans le vide de l'univers brillant mais vain du monde contemporain...

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