28 juin 2010

A chaque jour son scandale

Foin des scandales générés par l'équipe de football. Même s'ils altèrent quelque peu le prestige de la France ils ne sont le fait que d'un jeu après tout (encore qu'il y aurait beaucoup à dire sur la consternante versatilité des commentaires que madame Bachelot se crut obligée de faire  à cette occasion).
Ils semblent de toute façon bien dérisoires comparés à ceux qui remuent le pays jour après jour. Et qui commencent à peser singulièrement sur une République déjà bien mal en point.
Après les tempêtes dans un verre d'eau liées aux logements de fonction de quelques ministres, sont venues les affaires concernant certains salaires et cumul d'émoluments extravagants, en vigueur dans le gratin de la Fonction Publique. Le problème ne vient d'ailleurs pas tant de leur montant, que de la légèreté apparente avec laquelle ils sont attribués.
A propos de la HALDE par exemple (Haute Autorité de Lutte Contre les Discriminations et pour l'Egalité !).
On pouvait s'interroger sur l'utilité de cette très pompeuse agence d'état, qui poussa le zéle anti-discrimination jusqu'à remettre en cause les poèmes de Ronsard. Mais il y a vraiment de quoi hurler lorsqu'on prend connaissance des prébendes dont bénéficie sa présidente Jeannette Bougrab, et probablement un certain nombre de dignitaires qui gravitent dans l'ombre.
Peut-on vraiment parler à propos de ces machins administratifs d'inspiration soviétoïde, qui peu à peu sont devenus légions, d'organismes indépendants et sans but lucratif ? Combien de temps continuera-t-on d'entretenir ces armées mexicaines, aussi dispendieuses qu'inefficaces, aussi chamarrées que vaines ? Combien de temps faudra-t-il pour que l'Etat se sépare enfin de ces innombrables pseudopodes qui lui pompent tant de sève, en pure perte ?



La cerise sur le gâteau c'est toutefois assurément l'imbroglio liant les époux Woerth à la richissime famille Bettencourt. ll témoigne d'une telle imprévoyance, d'une telle inconséquence, qu'on croit presque rêver. Monsieur Woerth qui annonçait il y a quelques mois une chasse sans merci à l'évasion fiscale, qui se targuait d'avoir mis la main sur une liste de 3000 contribuables ayant des comptes en Suisse, monsieur Woerth, alors ministre du budget, qui jetait un doute teinté d'opprobre sur des citoyens, au seul motif qu'ils avaient déposé de l'argent hors de France, monsieur Woerth n'avait oublié qu'un détail : son épouse ! Qui gérait benoîtement le patrimoine d'une de ces contribuables particulièrement nantie, et qui ne pouvait raisonnablement pas ignorer qu'une partie non négligeable de la fortune de sa cliente était placée sur des comptes helvétiques non déclarés au fisc...
Cette histoire n'est pas sans rappeler le précédent tragique de M. Beregovoy au cours des années 90. Ce dernier avait pris ses fonctions de premier ministre en se faisant le chantre de la lutte contre la corruption affairiste et politique. Comme M. Woerth, il avait cru bon pour donner du poids à son propos, d'affirmer qu'il détenait une liste de personnalités douteuses. Hélas, il s'était sans doute trop avancé et avait négligé quelques détails discutables concernant sa vie privée. Il chuta quelques mois plus tard sur une stupide embrouille de prêt « sans intérêt », contracté auprès d'un homme d'affaire de réputation plutôt sulfureuse...

Dans l'affaire présente, rien désormais n'y fera. Aucune dénégation n'enlèvera le doute mortel qui s'est insinué dans les esprits. Monsieur Woerth est-il innocent de toute combine ? Peut-être, mais au fond qu'importe. Le moins que l'on puisse dire est que celui qui se présentait comme le gardien intraitable de la rigueur fiscale, fut peu regardant sur ce qu'il faut bien considérer comme un fâcheux mélange des genres. Et c'est suffisant pour empester tout ce qu'il touchera maintenant. Très ennuyeux vu l'enjeu de la réforme qu'il est chargé de mener sur les retraites.

Comment se fait-il que les Politiques dans notre pays n'aient toujours pas compris qu'ils se doivent d'être exemplaires, et si possible, au moins cohérents avec eux-mêmes. Lorsque M. Woerth se dit « très serein dans la tourmente », qu'il affirme pour sa défense n'avoir «jamais déclenché ni empêché de contrôle fiscal», se rend-t-il compte qu'il est complètement à côté de la plaque ?
Il ne suffit pas de respecter à la lettre la loi, pour éviter d'en violer l'esprit (le pire étant d'ailleurs dans ce contexte fuligineux, l'annonce toute récente par M. Baroin, le successeur de M. Woerth, que madame Bettencourt, comme par hasard, ferait prochainement l'objet d'un contrôle fiscal !)
Pour ma part, j'avoue que je ferais facilement mon deuil de ce genre de ministre si raide et surtout peu si peu inspiré (il avait entre autres bévues, défendu « avec conviction », le projet piteux de taxe carbone...).
En somme, il y a des jours où l'on se prend à penser que l'équipe gouvernementale ne vaut guère mieux que celle de foot...

Aucun commentaire: