12 août 2010

Des mots contre des maux

Pourquoi faut-il que le sujet récurrent de la violence urbaine mène, dès qu'il est évoqué dans notre pays, aux pires excès et à la radicalisation quasi systématique des arguments ?
Après les récentes échauffourées de Grenoble et de Saint-Aignan, le Président de la République cherche manifestement à reprendre la main sur un thème qui paraît lui échapper. Chacun se souvient pourtant qu'il sut l'exploiter habilement en faisant beaucoup de promesses, ce qui lui valut en retour pas mal de suffrages et sans doute aussi quelques controverses...
Pour l'heure, face à la montée de la violence urbaine, il s'agit surtout semble-t-il de "muscler le discours"...
Mais à l'évidence c'est un peu l'affolement et la surenchère qui prévalent, au détriment du pragmatisme.
Le limogeage brutal d'un préfet dont rien ne dit clairement qu'il a démérité; la descente, sous l'oeil ravi des caméras, de plus de 100 policiers surarmés pour pincer 4 malheureux bougres, relâchés faute de preuve deux jours après leur interpellation, tout ça n'a probablement qu'un intérêt très limité. Pire, c'est susceptible de renforcer le sentiment d'impunité ressenti par les voyous et de les encourager à la provocation, ne serait-ce que pour le fun...
D'autant que les nouvelles idées et propositions, relèvent semble-t-il davantage de l'effet d'annonce et du populisme racoleur, que de l'efficacité durable. Prétendre déchoir de la nationalité française les délinquants (et pourquoi pas les polygames, les fanatiques, les exciseurs et tutti quanti), pourrait prêter à rire tant cela semble dérisoire, utopique et inapproprié. Pourquoi tout simplement ne pas punir ces exactions, comme il se doit ? En tout cas, l'effet immédiat et désastreux est de relancer le vacarme idéologique sur un thème démagogique mais à peu près complètement vidé de vraie signification (que pourrait-on faire de tous les nouveaux sans papier que ce genre de mesure promet de faire ?)...
Tout se passe comme si le chef de l'Etat cherchait à couvrir la voix du FN, par crainte panique de le voir reprendre vigueur. Cela ne suffit pas pour faire une politique.
Une fois encore, toutes ces billevesées ronflantes auront bien du mal à se concrétiser sur le terrain. Où en est par exemple, la menace cuite et recuite, de suspendre les allocations familiales des parents trop laxistes ? Et quand verra-t-on une action concrète, confirmant sans ambiguïté la volonté affichée du Président qu'aucun crime ne soit impuni (après l'odieux assassinat de M. Germaneau au Mali, entre autres) ?

S'agissant des Opposants, notamment de gauche, ils ne valent guère mieux. Les médias tout particulièrement, qui se livrent une surenchère peu ragoûtante, dont le magazine Marianne rafle la palme avec sa couverture grotesque, qualifiant le chef de l'Etat de "voyou de la République". Quant aux Socialistes, ils s'étranglent de colère feinte et dénoncent le caractère anti-républicain des mesures. Mais qu'ont-ils donc à proposer ? Rien. Ils restent en effet cramponnés à leurs vieilles lubies, aussi coûteuses que vaines: plus de fonctionnaires, une police de proximité, et bien sûr, la sacro-sainte politique de prévention...

Saura-t-on un jour enfin s'inspirer des recettes simples et de la détermination sans faille mises en oeuvre il y a une vingtaine d'années par Rudolph Giuliani à New-York ? Le cas de cette ville était jugé désespéré par un très large consensus, à la fin des années 80, et la montée de la violence était considérée comme une fatalité contre laquelle on ne pouvait rien. On ne comptait plus les articles, livres et films qui évoquaient l'inexorable déchéance de la Grosse Pomme.
Grâce à la volonté de deux hommes, la cité fut pourtant transfigurée en quelques années. Avec la nomination de William J. Bratton à la tête du New York City Transit Police Department, puis l'élection comme maire de Giuliani en 1993, la fameuse "tolérance zéro" devint une réalité, sans qu'il fusse besoin de faire de grands moulinets médiatiques ni de bruyantes mais inconséquentes déclarations de guerre. Elle fut chaque jour appliquée avec obstination sur le terrain. Chaque délit fut sanctionné, chaque vitre cassée remplacée.
Les résultats ne se firent pas attendre, comme en atteste la seule courbe, spectaculaire, des meurtres dont le nombre annuel diminua des deux tiers. D'une manière plus générale, le nombre des délits fut réduit de plus de la moitié. Le plus fort est que cette amélioration n'entraina pas de dépenses supplémentaires. Au contraire, les déficits laissés par le maire précédent M. Dinkins, furent résorbés. Et la ville qui avait perdu plus de 300.000 emplois la dernière année du mandat de celui-ci les regagna et au delà.
Grâce à cette stratégie, New-York est redevenue une ville où il fait bon vivre, en même temps qu'une destination touristique de premier plan. Son métro est l'un des plus sûrs du monde et une grande majorité des personnes interrogées dès la fin du premier mandat de ce maire étonnant, considéraient que la qualité de vie s'était grandement améliorée (M. Giuliani fut réélu avec 59% des suffrages, dans une ville traditionnellement à forte majorité démocrate).
Moralité : les actes doivent toujours suivre les paroles. Et même les gens résolument opposés par principe à une politique, en viennent souvent à la respecter si elle témoigne d'une conviction sincère, et si ce qu'elle propose est en cohérence avec les actions entreprises, pour peu naturellement que cela soit sensé et efficace...

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Allez dire tout cela aux juges qui sont censés appliquer la loi et qui relâchent avec des excuses des multi-récidivistes obligés de dealer par une société cruelle qui ne les materne pas assez

Contre-Regards a dit…

Epatant!