19 juillet 2011

Jour de fête

L'épisode pourrait prêter à rire. Peut-être restera-t-il dans les annales politiques françaises, tant il est grotesque et déconnecté des réalités.
La contestation soudaine du bien fondé des festivités militaires du 14 juillet par Eva Joly, candidate fraîchement désignée par la nébuleuse écologiste à l'élection présidentielle (Europe Ecologie Les Verts), est si l'on peut dire "la cerise sur le gâteau" du consternant débat politique actuel.
La polémique qui s'en est suivie est révélatrice de l'absurdité de l'époque. Le fait que le premier Ministre ait cru bon de réagir à une telle ineptie est déjà un sujet d'étonnement, bien que ses propos au demeurant, n'avaient assurément rien de choquant ni d'incongru. C'est vraiment méconnaître en profondeur l'esprit français que de remettre en cause le 14 juillet, symbole s'il en est, d'une nation imprégnée autant du mythe révolutionnaire que du culte des traditions.
En rétorquant à François Fillon qu'elle connaît ce pays puisqu'elle y vit "depuis 50 ans", madame Joly n'arrange pas son cas, car non seulement elle ne convainc pas ("le temps n'fait rien à l'affaire" disait Brassens...), mais elle révèle pour ceux qui ne s'en seraient pas aperçu, qu'elle n'est pas une candidate de première fraîcheur. Mais peu importe, car il y a vraiment peu de risques qu'elle accède à la magistrature suprême.
S'agissant des Socialistes, ils ont une fois de plus raflé haut a main, la palme de l'imbécillité arrogante. Alors qu'ils désapprouvaient à l'évidence peu ou prou la suggestion évanescente, ils se sont crus obligés de se livrer à une affligeante charge contre le chef du gouvernement, accusé selon les mots de Martine Aubry de "bafouer les fondements et les valeurs de notre République". Non contente de cette énormité, cette dernière surenchérit même en affirmant que "si elle avait été présidente, elle aurait demandé au premier ministre de partir". De son côté le décidément très versatile Manuel Valls s'insurgeait contre des propos qui "puent la xénophobie..."
Faut-il que ces gens soient dépassés et totalement dépourvus de perspectives, pour focaliser leur "indignation" sur de telles peccadilles, tandis que tant d’événements graves secouent le quotidien !

Quant à la fête nationale, peuplée de drapeaux et de cocardes, de défilés martiaux, de bals populaires et de feux d'artifice, que signifie-t-elle au fond ? On ne sait pas même ce que ce jour commémore. De toute façon, qu'il s'agisse de la prise de la Bastille, marquant le début d'une sanglante anarchie, ou bien de l'insignifiante fête de la Fédération, il est bien difficile d'y voir quoi que ce soit de fondateur. La France n'a pas commencé en 1789 que diable. Faut-il ajouter qu'en à peine plus de deux siècles, malgré pas moins de 4 révolutions, 2 retours à la royauté, 2 empires, et 5 républiques, elle n'a toujours pas trouvé satisfaction ! Y a-t-il vraiment dans cette succession, de quoi être fier ?

12 commentaires:

Anonyme a dit…

pour une écologiste pure et dure ainsi que se prétend Mme JOLY , il eut été mieux inspiré de sa part de respecter au moins le " folklore" local.
Quant aux interprétations quasi terroristes de propos ministériels somme toute ,bien indulgents, ils donnent la mesure du niveau à redouter de la campagne à venir

Philippe POINDRON a dit…

Encore une excellente analyse cher Pierre-Henri. Décidément, nous sommes sur la même longueur d'onde. Je vous invite à regarder les deux billets que j'ai consacrés à cette affaire. Mon opinion rejoint la vôtre. En fait, je crois que le défilé du 14 juillet traduit plus l'amour des Français pour tout ce qui est l'uniforme, l'amour des grandes parades que tout autres considérations. Madame JOLY aurait mieux fait de se taire. Madame AUBRY est d'une rare imbécillité (mais la chose est connue). Maladroit et inélégant sur la forme, monsieur FILLON a raison sur le fond. Tout cela est dérisoire. L'euro va à la dérive. L'Europe est en quenouilles. Nous perdons des soldats tous les jours sur le théâtre d'opérations dont on ne sait plus bien quels buts elles visent. Notre compétitivité est en berne, nos jeunes s'expatrient, les PME sont exangues à force d'impôts et de contrôles. Mais madame AUBRY parade, glose, condamne, juge, vilipende... Elle est ridicule. Elle est fatigante, ennuyeuse, doctrinaire et finalement elle est dangereuse.

Pierre-Henri Thoreux a dit…

Merci pour ces commentaires bienvenus.
Ces petites polémiques lassent manifestement pas mal de Français. Venant de politiciens totalement désarmés face à une crise qu'ils ont contribué à provoquer par leur démagogie, et qui sont manifestement complètement dépassés par les défis du monde contemporain, c'est même assez révoltant...

De rire, Périclès périclita a dit…

Le commentaire d’Eva Joly est ridicule.
Celui de François Fillon relève du bon vieux répertoire raciste.
La légèreté, le manque de clairvoyance ( à moins que ce ne soit un assentiment profond) avec lesquels vous traiter cette "polémique" fait peur.
En outre , sur l’attachement au 14 juillet, arrêtons de rêver : la majorité des français est incapable d’en saisir la force symbolique, sur le plan des valeurs comme de l’histoire, du fait de l’inculture généralisée … Il s’agit plutôt d’un réflexe, d’une habitude confortable …
La fascination de l’uniforme ne traduit pas un vague culte de l’armée, mais simplement le résultat de son très universel pouvoir érotique !

Pierre-Henri Thoreux a dit…

A de Rire : Eh bien n'ayez pas peur, ce que j'ai voulu dire recoupe très largement votre opinion. Le titre même du billet dit bien ce que le 14 juillet est selon moi dans l'imaginaire public. Et les cocardes, les défilés et les uniformes y ont leur place. C'est la French Touch en quelque sorte. Ce que Eva Joly ne comprend manifestement pas (comprend-elle quelque chose d'ailleurs ?)... Et qui justifie la remarque (superflue) de Fillon, dans laquelle il faut plus qu'un soupçon de parti pris pour voir du racisme !

De rire, Périclès périclita a dit…

« Eva Joly n'a pas une culture très ancienne des traditions françaises, des valeurs françaises, de l'histoire française »
explication de texte : EJ n’est pas née française ; elle l’est devenue ; sa culture nationale n’est pas assez ancienne (héritage familiale) pour avoir une bonne perception des traditions françaises, des valeurs françaises, de l'histoire française. Elle se trompe car elle n’est pas française depuis très longtemps. Plusieurs degrés d’appartenance à la nation ?
Comprendre aussi : il n’existe qu’une seule perception juste des traditions françaises, des valeurs françaises, de l'histoire française, coulant de source lorsque l’on est un vrai français (ou un français accompli) : être français impliquerait donc par essence le soutien à des symboles types 14 juillet et défilé militaire …

Ainsi, la phrase de FF ne traduit absolument pas une vision essentialiste de l’appartenance nationale, qui écarterait de la vraie francité …une partie des citoyens…

Mais bon Pierre-Henri, les propos du premier ministre « au demeurant, n’avaient assurément rien de choquant ni d’incongru ». Surtout placé dans un contexte médiatico-politique fleurant bon la xénophobie (Christian Jacob etc ..).

Tout cela n’est qu’un vif parti pris !

Permettez que pleure.
Cordialement.

Anonyme a dit…

Encore une qui s'est auto-détruite en plein vol (même pas en pleine ascension...)!!!! RAMONE

Philippe POINDRON a dit…

Pour De rire Périclès, une question : que veut-dire être Français : vivre en France ? en parler la langue ? y payer ses impôts ? connaître, aimer et propager sa culture ? connaître son histoire et en accepter les conséquences ? y être né ? Pas facile de répondre à ces questions. Et ne faisons pas semblant de croire que le fait de dire "Je suis Français" implique nécessairement de l'être, en un sens acceptable par le plus grand nombre de nos concitoyens. Je peux dire aussi "Je suis martien"', le croire fermement, être sincère, et pourtant être dans l'erreur. C'est que le mots ne font pas le réel.
Quant au patriotisme de madame Joly, on peut s'interroger. Quand elle a quitté la magistrature, elle est retournée en Norvège. Nul ne saurait lui reprocher. J'ignore pourquoi elle est revenue en France. Mais tout de même ce choix de vie qui n'est pas en soi illégitime (elle venait de prendre sa retraite) interroge sur l'amour profond qu'elle porte à patrie d'adoption. Voilà les nuances, les questions, les doutes qu'il convient de mentionner dans cette affaire ridicule. Mais c'est bien connu : "France, ton café fout le camp !" Et tout le monde feint de ne pas voir le désastre sociétal, culturel, politique et économique qui se profile à l'horizon proche.

De rire, Périclès périclita a dit…

Bonjour Philippe Poindron,
Heureusement, la somme des opinions de chaque français ne suffit à faire la France, la République …
Des hommes, des femmes ont refusé, refusent et refuseront de considérer comme appartenant à la communauté nationale des personnes comme (pêle-mêle) : Marie Curie, les Poniatowski, Catherine de Médicis, Yves Montand, ce franco-espagnolo-autrichio-florento de Louis XIV, …………., Eva Joly et De rire, Périclès périclita. Parmi eux, certains ont dit Je suis la France. D’autres ont dit Je suis français. D’autres ont fait la France : au nombre desquels Eva Joly qui, en tant que magistrat, a incarné le temps d’une carrière une facette de l’Etat français. Est-ce à ce point accessoire pour ne pas lui reconnaître le droit de se considérer française, et le droit de dire des âneries sans voir remettre en question sa nationalité (implicitement) revendiquée ?
Je crois fermement que le « Je suis français » est en grande partie « performatif» …
Car la nationalité est également élective dans la tradition française (et oui, pas que le droit du sang ou du sol, mais un mélange des trois) …
Car le choix de son appartenance nationale est un acte de liberté individuelle, autant qu’une part intime de la construction de soi.
Car enfin, il y a quand même du mérite à ne pas vaciller une seconde sur cet élément identitaire lorsque beaucoup par raisonnement ou par bêtise le conteste.
Et oui : dire, c’est déjà être. En politique comme ailleurs, le discours et la volonté est essentiel.
Est-ce à dire que l’opinion des concitoyens n’ a pas de valeur ? Oui, quand elle est fondée sur des a priori et des apparences et souvent exprimée de façon péremptoire. Ce ne sont que des blessures qui renforcent les convictions profondes.
Cordialement (bien que convaincue de combattre les moulins à vent …)

PS : PHT, c'est un grand délassement de venir dissonner sur votre blog ...

Philippe POINDRON a dit…

Cher "Et de rire Périclès", je suppose que vous avez lu comme moi le livre remarquable de J. AUSTIN "Quand dire c'est faire". Il analyse fort bien la valeur performative de nombreux actes du discours. Et je ne suis pas loin de penser que madame JOLY, quand elle revendique d'être française (ce qu'elle est incontestablement), est parfaitement sincère et qu'elle est ce qu'elle affirme être. Mais suffit-il toujours de dire pour être à un certain niveau de qualité ? Vous remarquerez que j'ai posé des questions et que j'ai souligné la difficulté d'y répondre. Pierre LAVAl ou PETAIN disaient aussi qu'ils étaient Français, et ils l'étaient effectivement. Mais nous jugeons qu'ils étaient de mauvais Français. En fait ce qui rend difficile toute appréciation c'est que l'affirmation "Je suis français" n'est pas seulement un constat mais un jugement. Ainsi, pour les esquimaux une eau à 15° sera déclarée "chaude", alors qu'un marseillais la dira "glaciale". Et je me demande si tout le débat ne vient pas de là. En somme, nous rentrons dans le domaine des valeurs et refusons de rester dans celui de l'état. Madame JOLY peut débiter des âneries sans cesser d'être ce qu'elle déclare être, une française (qui est aussi norvégienne).
J'affirmerai donc avec vous que dire ou parler, c'est toujours énoncer une certaine vérité. Je ne sais pas si cette explication vous satisfait. J'espère que oui.

De rire, Périclès périclita a dit…

Y aurait-il des niveaux de qualité en matière d’appartenance nationale ? La nationalité serait-elle une question d’opinion (sujette aux passions …) ?

Nous serons en accord si en la matière, vous acceptiez la proposition suivante : dire c’est énoncer une vérité certaine (la résultante étant un fait, et non une opinion …).
(je n’ai pas lu le livre de J.Austin)
Cordialement.

Pierre-Henri Thoreux a dit…

Et bien ! Le débat qui s'est installé révèle en somme que le sujet est brûlant.
Derrière le caractère assez inopportun de la proposition de Mme Joly, ce qui me gêne le plus, c'est le positionnement un peu bancal de la candidate verte.
il semble que cette personne soit dévorée d'une ambition qui passe au dessus des convictions. Sa vocation écologique n'est guère convaincante. Et au plan politique elle se situe à cheval entre deux pays, l'un, le nôtre, qui est situé au cœur de la Communauté européenne, l'autre la Norvège, qui a refusé d'y adhérer.
Il faut parfois faire des choix, dussent-ils être difficiles. Daniel Cohn-Bendit qui est à la fois allemand et français n'a jamais cultivé ce genre d’ambiguïté. Sa position de "citoyen européen", avant tout, me semble de nature à faire avancer l'idée à laquelle personnellement j'aspire, d'une vraie fédération, abolissant enfin les nationalismes qui ont fait tant de mal à nos nations.
Merci en tout cas de ces contributions stimulantes.