13 juillet 2014

Deux poids, deux mesures

Au pays du système métrique on n'a pas toujours le sens de la mesure.
Lorsque l’on évalue certains gouffres financiers notamment, et qu’on juge de leurs causes et de leurs conséquences...

Chacun se souvient du scandale impliquant en 2008 la Société Générale, dite affaire Kerviel du nom du courtier maudit qui aurait fait perdre à la banque qui l’employait, la somme astronomique de 4,82 milliards d’euros
Quel tohu bohu ! Près de 7 ans après on en parle encore…. L’occasion était trop belle. On vit évidemment dans cette histoire le symbole des méfaits du capitalisme débridé, de l’ultra-libéralisme et tutti quanti…

Il serait intéressant de connaître la quantité d’encre déversée à ce sujet, le nombre exact d’émissions, de débats détaillant férocement par le menu les malversations ayant abouti à une telle faillite. Transformé en bouc émissaire le trader fou fut jugé, non sans raison sans doute, coupable. Mais on lui fit endosser sans beaucoup d’états d’âme la quasi intégralité de la responsabilité écrasante de ce désastre, et on voulut même lui faire rembourser personnellement les milliards évaporés ! Après maints rebondissements, il a finalement été condamné à 5 ans de prison, dont 4 fermes, tandis qu’aucune charge n’était retenue contre la banque et qu’un simple constat de carence fut adressé par Bercy aux autorités de contrôle qui n’avaient rien vu venir...

Tout autre est le traitement de l’affaire de la BNP qui a éclaté il y a quelques mois. Cette banque a été épinglée par la justice américaine pour avoir négocié en dollars de juteux contrats avec le Soudan, l’Iran et Cuba, violant ainsi l’embargo qui frappait ces pays “voyous”. Là encore l’énormité des sommes en jeu donne le vertige. Aujourd’hui même on apprend que la banque, qui reconnaît les faits, est condamnée à une amende de 8,9 Milliards de dollars, soit environ 6,5 milliards d’euros ! La banque française est aussi interdite de paiements en dollars pendant un an, de janvier 2015 à décembre 2015 et devra obtenir une dérogation pour continuer à exercer l’activité très lucrative de gestion d’actifs aux Etats-Unis.

Mais qui Cloue-t-on au pilori en l’occurrence ? Personne…
Pourtant si dans l’affaire de la Société Générale il ne s’agissait en somme que de placements hasardeux (pour lesquels il n’y avait rien à redire tant qu’ils rapportaient…), avec la BNP c’est une fraude caractérisée qui est en jeu.
Non seulement personne n’est nommément inquiété, mais c’est une vraie mansuétude qui entoure la BNP, face à l’ogre américain. Le gouvernement français,si prompt d’habitude à flétrir les banques, a même fait mine de voler à son secours. François Hollande en tête a tenté, en vain, de négocier un arrangement avec le président Obama, venu en France pour commémorer le débarquement allié ! Le chef de l’état commentant alors les sanctions envisagées, les avait qualifiées de « totalement disproportionnées ». Plus fort, Michel Sapin, ministre des Finances, se livrant à un chantage à peine déguisé, souligna que l'affaire risquait d’affecter les négociations en cours sur le traité transatlantique (Trans-Atlantic FreeTrade Agreement, Tafta).
La réponse du président américain fut claire ne cachant pas un certain mépris pour les coutumes de notre pays : "la tradition aux Etats-Unis est que le président ne se mêle pas des affaires de justice".
Pan dans l’amour propre ! ça tombe bien, en France on n’en a pas, ou si peu... Quelques semaines plus tard, M. Sapin essayant sans doute de faire rire un parterre d’économistes distingués, proclama benoîtement à contre-pied des discours vengeurs du candidat Hollande, que “ La bonne finance était l’amie du gouvernement”. Faut-il donc comprendre qu’à ses yeux, il y a de bonnes fraudes ?

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