28 janvier 2018

Au rythme capricieux des affaires

Quel bonheur pour les médias affamés de scoops qu’une bonne affaire, prometteuse de virulentes polémiques et de croustillantes péripéties judiciaires. Peu importe au fond qu’elle aboutisse ou non, qu’elle soit grave ou insignifiante, pourvu qu’elle capte l’attention des gogos, si possible le plus longtemps possible, ouvrant ainsi de lucratives perspectives d’audience.
Et de ce point de vue, le tempo de la justice étant calqué sur celui des plus lents gastropodes, le sujet peut devenir ce qu’on appelle un marronnier, meublant de manière récurrente et sans trop de souci l’actualité…

Parmi les faits divers qui ont défrayé la chronique, et dont les échos reviennent régulièrement sur le devant de la scène, on peut évoquer naturellement le calamiteux projet d’aéroport de Notre Dame des Landes. Il a fallu cinquante ans de réflexions, de délibérations, de controverses, de décisions de justice, et de référendums pour aboutir finalement à l’abandon pur et simple de ce chantier qui restera comme une chimère. Qui saurait dire combien cette fantaisie a coûté à l’Etat ? Qui saurait comptabiliser l’énergie dépensée en pure perte ?
Et qui pourrait recenser le nombre de projets du même genre, avortés, ou qui le seront à l’avenir, eu égard à ce précédent désastreux, révélateur de l’incurie et l’impuissance de l’Etat dit Providence. On ne saurait oublier par exemple l’écotaxe et ses ruineux portiques…

Dans un autre genre, comment ne pas être excédé par les incessants retours sur d’atroces affaires criminelles, dont il paraît évident que l’espoir de dénouement ne fait que s’éloigner à mesure que le temps passe. La plus ancienne, revenue une n-ième fois sous le feu des projecteurs est sans doute celle du petit Gregory, horriblement assassiné en 1984. Tragique histoire dont on aura sans doute jamais le fin mot mais pour laquelle on suppute qu’elle cache de sordides règlements de comptes familiaux.
La disparition de la petite Maëlys et le sort tragique de la famille Dupont de Ligonnès semblent devoir s’inscrire dans pareils interminables et sordides feuilletons. Dans ces circonstances, les révélations et les prétendus rebondissements sont nombreux mais vains pour la plupart, et chacun ne peut s’empêcher de donner son avis ou de juger, sans connaître autre chose que les informations évasives et parfois contradictoires que les médias distillent à plaisir.

Les réflexes sont à peu près les mêmes autour des imbroglios judiciaires impliquant des politiciens. Beaucoup de bruit pour rien serait-on tenté de dire pour qualifier par exemple l’affaire Fillon. En l’occurrence, on peut s’interroger sur l’inhabituelle célérité avec laquelle la justice entama ses procédures et par là même ruina la réputation d’un homme au moment le plus crucial de sa campagne électorale. On peut s’interroger pareillement sur la nature des faits qui lui étaient reprochés et donc sur la disproportion flagrante entre leur bénignité apparente et la brutalité de l’action judiciaire. La perplexité grandit encore lorsqu’on voit que près d’un an après la chute du malheureux candidat ainsi épinglé, plus rien n’avance et qu’on en reste à des broutilles qui seront probablement classées sans suite ou quasi…
En plus de son inefficacité, la justice serait-elle partisane, voire délétère ? On pense aux accusations qui poursuivent sans relâche depuis plusieurs années Nicolas Sarkozy au sujet du financement de sa campagne pour la Présidentielle de 2007 et de l’implication prétendue du colonel Kadhafi. On pourrait rappeler également l’incroyable acharnement frappant Bernard Tapie à propos de son différend avec le Crédit Lyonnais. Après le fiasco des affaires Clearstream, Bygmalion, et Bettencourt, après la révélation du scandaleux "mur des cons", comment ne pas douter de l’objectivité des magistrats et des médias ? Sont-ils là pour donner une information utile et faire régner l’état de droit ou bien pour assouvir quelque obscur désir de nuire ? En tout état de cause leur crédibilité s’effrite au fil de toutes ces histoires lancées avec fracas et qui se terminent si souvent en eau de boudin.

On pense enfin aux scandales mettant en cause des laboratoires pharmaceutiques ou des entreprises alimentaires. Les exemples récents de Servier et de Lactalis sont révélateurs d’une manière de faire des plus discutables. On commence à faire grand tapage autour de potentielles victimes qu’on n’hésite pas à chiffrer en grand nombre, avant de merdoyer dans une enquête de plus en plus imprécise et pauvre en preuves. On a ainsi parlé de plus de 2000 morts causés directement par le Mediator et après plusieurs années d’analyses, d’expertises en tous genres, on ne sait si le décès d’un seul patient est seulement établi...
On se souvient à l’inverse de l’affaire AZF à Toulouse qui fit plus de 30 morts et 2500 blessés en 2001 et pour laquelle il fut impossible de déterminer quoi que ce soit de précis en termes de responsabilité…

Moralité : Sauf à détenir des éléments tangibles et graves, médias et justice pourraient faire preuve de plus de modération, d’humilité et de discrétion.

2 commentaires:

claude a dit…

il y a des choses qui ne devraient jamais se melanger la religion et la politique la justice et la politique mais hélas c'est notre pain ou plutot notre bouillon amer quotidien

extrasystole a dit…

faire appel à l’objectivité des magistrats et des médias fait fit de leur missions respectives bien différentes quant à leur devoir d'objectivité ou de subjectivité