1957 Noir et Blanc, avec Chishu Ryu, Setsuko Hara, Ineko Arima
25 avril 2024
Le Mois Ozu 8
1957 Noir et Blanc, avec Chishu Ryu, Setsuko Hara, Ineko Arima
24 avril 2024
Le Mois Ozu 7
Il en est à peu près de même pour l'homme vieillissant que tous les gestes et toutes les nécessités du quotidien rattachent à sa fille.
Par la force des choses, la raison gagnera et le déchirement s'accomplira, non sans peine.
Ozu dépeint cette confusion des sentiments avec un lyrisme aussi poignant qu'épuré. Il n'y a rien de trop dans ce récit d'une grande sensibilité et lorsque la fin du film approche, les plans fixes sur les extatiques jardins japonais, sur les intérieurs vides impeccablement rangés, et sur le mouvement répétitif des vagues au bord d'une plage, font ressentir la vanité des choses et l'éternité de l'amour, tout à la fois...
1949 Noir et Blanc avec Setsuko Hara et Chishu Ryu
21 avril 2024
Le Mois Ozu 6
1962, Couleurs avec Chishu Riyu, Keiji Sada, Shima Iwashita, Mariko Okada
19 avril 2024
Le Mois Ozu 5
Elle apparaît profondément unie, mais se trouve confrontée aux mutations de la société, évoluant entre tradition et modernité.
Cet opus, filmé pour la première fois en couleurs, décrit les difficultés de compréhension inter générationnelles. On y voit s'amender le schéma patriarcal classique, et l'homme contraint de s'incliner peu à peu devant la douce et parfois malicieuse mais inflexible volonté des femmes. On y perçoit également, à travers le conflit opposant un père à sa fille, puis leur réconciliation, l'irrépressible émancipation de la jeunesse, vue par une lorgnette résolument optimiste.
Comme toujours, le récit est lent et minimaliste mais à condition d'avoir la patience de rentrer dedans, on peut savourer la sérénité, l'élégance et même l'humour distancié dont il est imprégné.
17 avril 2024
Le Mois Ozu 4
Au prétexte d’une banale histoire de mariages arrangés, la caméra explore avec grâce et sérénité, les tréfonds de l’esprit humain et la relativité des sentiments et notamment des bonnes intentions. Des vues intérieures cadrées avec un art savant de la géométrie, aux tenues élégantes et soignées des personnages, en passant par leur jeu tout en retenue polie et sourires affables, tout est ordonné, clair et calme, quasi intemporel. Il y a de la gravité, de la finesse dans ces petits drames du quotidien, ce qui n’exclut pas, comme à l'accoutumée, une touche subtile d’humour.
15 avril 2024
Le Mois Ozu 3
12 avril 2024
Le Mois Ozu 2
Introduite par ce titre un brin désinvolte, il s'agit d'une charmante compilation de saynètes familiales se déroulant dans un village japonais traditionnel.
L'époque est marquée par l'irruption du modernisme incarné par les lave-linges, sujets de convoitise, de jalousie et de malentendus, jusqu'à provoquer de vaines querelles de voisinage, et surtout la télévision, qui fascine les enfants et interroge les parents.
Filmée de manière très minimaliste, c'est une sorte d'ode à la vie simple, bornée par des repères relevant de la sagesse et du bon sens. Le récit de ces microscopiques aventures est traité avec humour, tout en explorant, plus en profondeur qu'il n'y paraît, l'âme humaine.
10 avril 2024
Le Mois Ozu 1
Opportunément signalée par un ami, la rétrospective de son œuvre, donnée par ARTE, permet de s’en faire une belle idée (disponible sur arte.tv jusqu’au 29 avril).
18 janvier 2023
Ludwig
Près de 4 heures extatiques pour cette déchirante élégie dédiée à la beauté utopique et à une liberté inaccessible, incarnées par un prince fantasque, passionné, voire illuminé, mais très énigmatique y compris pour lui-même. "Venu trop tard dans un monde trop vieux", pour paraphraser Musset, il a voulu vivre son idéal sans rien concéder à la réalité lorsqu’elle lui répugnait.
A travers les paysages enneigés de Bavière, on chevauche à travers les rêves empanachés mais hélas terriblement vains de ce roi égaré dans le temps à la lisière séparant le monde ancien des temps modernes. Le règne de la technique et de l’industrie s'annonce à l’horizon, qui chassera bientôt l’esprit par la pointe impitoyable du progrès, noyant l’idéal dans le bien être matériel. La fuite en avant ne pouvait être que désespérée, mais d’un lyrisme poignant. Pris dans cette spirale tragique, Helmut Berger est Ludwig. Il habite le personnage avec une présence fascinante. Ce fut évidemment le rôle de sa vie. Romy Schneider est rayonnante en Sissi, plus vraie que nature, sensible au désarroi de son cousin mais trop réaliste pour l’accompagner dans ses frasques insensées. Les autres personnages, bien qu’esquissés constituent une galerie d’époque, parfaitement dépeinte. Mention spéciale pour Trevor Howard qui joue un Wagner très crédible mais fort peu sympathique. Tout le film est évidemment imprégné de sa musique, mais dans le genre intimiste plutôt qu'opératique. Mêlés à quelques thèmes schumanniens, les mélodies sont là pour illustrer le romantisme incurable du héros, notamment le thème emprunté à Tannhauser, O du, mein holder abendstern, qui revient régulièrement, comme une antienne enivrante. Émule du Roi Soleil, Ludwig finit, à l'instar du poète Novalis, par succomber au charme vénéneux des ténèbres. O toi, ma belle étoile du soir...
31 mars 2021
In Memoriam Bertrand Tavernier
Il y a toutefois quelques films qui valent le détour, dans lesquels il s'est laissé allé sans trop de scrupules ni de préjugés mais avec le souci tout simple de rendre une atmosphère, un climat, ou de saisir par petites touches le cours fluctuant d'existences plus ou moins contrariées, plus ou moins passionnées. Il en est ainsi des charmantes saynètes familiales d’Un Dimanche A La Campagne, des subtiles notes bleues d’Autour De Minuit, ou de la plongée poisseuse Dans La Brume Électrique du bayou de Louisiane
La télévision nous a donné l’occasion de revoir à l’occasion des hommages rendus au cinéaste récemment disparu, le caustique Quai d’Orsay, un de ses derniers films, daté de 2013.
Cette satire de la vie à la Cour Républicaine met en scène un clone survitaminé de Dominique de Villepin, en pleine crise “lousdémistanienne”, alors que lui et ses conseillers préparent fiévreusement un important discours onusien. Le parallèle avec l'affaire irakienne est clair.
Tiré d’une bande dessinée, ce long métrage peine à en transcrire les ressorts comiques. Mais on ne s’y ennuie pas et, derrière les outrances et le cabotinage jubilatoire de Thierry Lhermitte dans le rôle principal, on trouve une satire de tout ce qui fait la folie française. Lourdeurs bureaucratiques, confusion dantesque des administrations, coutumes protocolaires archaïques, fastes inutiles, et pour finir, grandiloquence et boursouflure dans le verbe à défaut d’action. Tout cela conduit à une théâtralisation grotesque de la vie politique qu'incarnait à merveille le sémillant ministre des affaires étrangères de l'époque, mais dont on retrouve bien des travers aujourd’hui encore, en pleine pandémie de COVID-19.
“Responsabilité”, “Unité”, “Efficacité” sont les 3 piliers idéologiques, plus vrais que nature, autour desquels s’articule la fameuse oraison qui fut prononcée à New York, devant l’aréopage des nations. Elle se voulut point d’orgue de la diplomatie française, et se révéla chef d’œuvre de la vacuité politique !
En cette occasion comme dans beaucoup d’autres, l’État fit le contraire de ce qu’il annonçait pompeusement à la pointe de ses grandes charges rhétoriques, aussi clinquantes que vaines. On vit, en l’occurrence, jetés dans une exaltation féroce à la face des États-Unis d’Amérique, de grands principes, non seulement lâches mais totalement irresponsables, qui contribuèrent grandement à rompre l’unité fragile de la Communauté Internationale. S’ils n’empêchèrent pas au bout du compte, le déroulement d’une intervention militaire rapidement couronnée de succès, ils la rendirent inefficace à long terme, faute d’une détermination unanime des acteurs impliqués. En même temps qu'il avait trahi ses amis, le "vieux pays" avait instillé un poison dévastateur dans les esprits et dans l'opinion publique...
Dans ce film, comme dans d’autres, Tavernier aurait pu se faire imprécateur, mais faute d’avoir osé attaquer en profondeur, il est resté dans l’écume, brillant mais éphémère...
22 septembre 2020
Joker pour rien
C’était sans compter sur l’imagination des scénaristes et sur leur ineffable capacité à s’imprégner puis à refléter les lubies et poncifs de leur époque.
Avec ce nouvel opus, tiré de la légende de Batman, c’est l’anti-héros qui devient le centre de l’intrigue. Et puisqu’on est dans une logique binaire, c’est donc le mal auquel on s’intéresse désormais. Rien d’étonnant dans un siècle où l’on assiste à l'inversion systématique des repères, des dogmes et des canons moraux.
L’ennui, c’est que la transgression des règles et la débauche de moyens techniques s’avèrent parfois impuissantes à produire quelque chose d’intéressant.
C’est exactement ce qui se passe avec ce glauque remake-à-rebours du mythe du justicier chauve-souris. Tout y est grotesque et répugnant. En premier lieu le personnage du Joker qui constitue l’épicentre obsédant de cette sinistre comédie.
La tâche confiée à Joaquin Phoenix contraint ce dernier à se livrer à un épuisant one-man-show où se mêlent dans une sorte de cabotinage dément, rictus effrayants, rires débiles, gesticulations insanes, maquillage outrancier et tenues vestimentaires clownesques ridicules.
On aurait pu espérer un peu de recul pour analyser la déroute des valeurs et la déconfiture du modèle démocratique auxquelles le réalisateur fait lourdement allusion. Au lieu de cela, le scénario s’enlise, au gré de longueurs inutiles et usantes, dans une monstrueuse théâtralisation de la violence urbaine dont l’absurdité est supposée faire écho aux convulsions d’une société rongée par les inégalités sociales, la corruption et la cupidité. Autrement dit, on assiste à une nouvelle resucée du procès du capitalisme libéral. Rien de bien nouveau, et hormis le numéro ébouriffant d’acteur, il n’y a strictement rien à retenir de ce film surfait aux messages simplistes ou incohérents, assénés à coups de marteau pilon.
Pour preuve de l’inanité de l’entreprise, Michael Moore a beaucoup aimé ! A l’instar du célèbre Joseph Prudhomme, ce pseudo-cinéaste “engagé”, grassouillet, conformiste et sentencieux, emblématique de la sottise auto-satisfaite, nous a habitués à enfoncer les portes grandes ouvertes de l’imbécillité bien pensante. Il n’est donc pas étonnant qu’il s’extasie devant ce sanglant racolage, célébrant de manière orgiaque la décadence d’un monde atteint d’une liquéfaction contagieuse des cervelles....
08 août 2017
Un poète très américain
* Balades au paradis (Cruising Paradise). Sam Shepard. Laffont Pavillon Poche.
10 octobre 2014
Michael Cimino, dantesque et dérisoire
Précisément, son Voyage au bout de l'Enfer portait déjà pour qui voulait les voir, les symptômes annonciateurs de cette incommensurable folie artistique. Pour quelques scènes impressionnantes voire terrifiques, que de longueurs inutiles, que d'interminables tergiversations, que de scènes ennuyantes ! Et finalement pour ne rien dire ou quasi sur le fond...
Sans doute l'encensement un tantinet excessif de ce film fut pour le réalisateur le pire des cadeaux. Dopé par une gloire subite, il crut pouvoir s'affranchir de toute contingence susceptible de brider son inspiration. Le résultat fut cette lourde Porte du Paradis, colossal navet, qui consterna les critiques autant que le public, et ruina ses producteurs en même temps que sa propre réputation.
A la fois splendide et décadent, sublime et nullissime, il désarme la critique, tant il s'apparente à un morceau de bravoure totalement vain. Un fantastique coup d'épée dans l'eau en somme.
Pour celui qui a le courage de résister à ce torrent narratif de plus de trois heures trente, tel qu'il est présenté à l'occasion de sa sortie en DVD/BLURAY que reste-t-il ?
Ce récit est bien loin de revisiter l'histoire de l'Amérique comme on le lit parfois, notamment en France où l'on connaît si mal ce pays. Le cinéaste est certes parti de faits réels, à savoir un obscur épisode de la lutte opposant propriétaires et voleurs de bétails dans le Wyoming, à la fin du XIXè siècle, mais il les a déformés de manière monstrueuse, cherchant à l'évidence, à leur donner la dimension épique d'une légende. Il tenta dans un effort désespéré de conférer à ces événements crapuleux une double symbolique grandiloquente, où se télescopent sur un champ de bataille héroïque, la haine viscérale de l'étranger en même temps que la brutalité sauvage de la lutte des classes. Bref, tout le contraire de l'essence américaine, fondée précisément sur l'immigration et le melting-pot, et sur une société sans classes et sans privilèges.
Sans doute Cimino avait-il à l'esprit le fameux Autant en emporte le vent, mais la portée dramatique de la guerre de Sécession était toute autre, et ce qu'en fit Victor Fleming fut autrement moins manichéen, et surtout plus subtil, plus humain, plus intense, et in fine, beaucoup plus grandiose.
Cimino s'est fourvoyé donc totalement dans son rêve d'épopée. Sans doute parce que son histoire ne tient pas debout, mais plus encore parce qu'il n'est pas parvenu à donner à ses personnages la puissance émotionnelle qui pourrait en faire des héros. Aucun des trois personnages principaux ne suscite la moindre sympathie, la moindre compassion, ni pour tout dire le moindre intérêt. L'histoire d'amour qui les relie est des plus glauques et décousues et ils errent dans ce tourbillon insensé comme des zombies à la fois prédéterminés et versatiles. Isabelle Huppert profite de son rôle de femme de petite vertu pour exhiber ses formes avantageuses. Mais elle n'exprime aucun sentiment même lorsqu'elle pleure. Kris Kristofferson manifeste une exquise et hautaine indifférence à tout ce qui l'entoure. Il ne s'en départit qu'à la fin mais l'essentiel est déjà joué. Seul Christopher Walken parvient à jeter un certain trouble sur le personnage ambigu et contradictoire qu'il incarne de manière inquiétante.
Le reste n'est qu'une mêlée confuse d'où émergent tantôt de magnifiques paysages, tantôt de somptueuses scènes de foules (la fameuse scène violon-patins à roulettes), et une reconstitution admirable de l'ambiance d'une époque, qui sauvent au moins sur la forme ce foisonnant bouillonnement cinématographique. Cimino se consolera un peu en voyant quelques snobs un peu attardés se mettre après coup, à crier au chef d'oeuvre...
18 décembre 2011
Entre Grâce et Nature, un grand vertige...
29 avril 2010
Katyn, pour l'Histoire
Il montre tout d'abord la tragédie de la Pologne, abandonnée de tous, et sacrifiée, dès le début de la seconde guerre mondiale, aux effroyables ambitions de ses deux ogres de voisins, national socialiste d'un côté, socialiste soviétique de l'autre.
A la faveur de l'ignoble pacte germano-soviétique, le pays sera déchiré en deux dès septembre 1939. Comme son drapeau, dont on voit les soldats de l'Armée Rouge arracher une moitié pour en faire un fanion rouge tandis qu'ils nettoient leurs bottes avec l'autre moité, blanche...
Andrej Wajda montre dans une mise en scène épurée, sobre, le caractère affreusement planifié de ce génocide. Il montre aussi la forfaiture ignominieuse qui a consisté non seulement à cacher cette élimination massive, mais à en faire porter la faute aux Allemands et à tenter d'inculquer par la force ce mensonge à un peuple martyr et asservi. Non content de ces ignominies, en 1944, Staline qui se disait l'ami des Polonais, laissera les derniers combattants d'une résistance héroïque se faire anéantir à Varsovie par les Allemands, sous les yeux de l'Armée rouge à laquelle il avait ordonné de ne pas bouger.
Aujourd'hui encore les faits sont bien souvent édulcorés, minimisés ou à peine réprouvés du bout des lèvres. Il faut espérer que le film de Wajda fasse date pour l'histoire, autant que tous les témoignages sur la Shoah, pour que jamais plus ces horreurs ne se reproduisent.
La mort au cours d'un accident d'avion du président polonais Lech Kacsynski et de toute une délégation, venus rendre hommage aux victimes des massacres, contribue à renforcer le sentiment dramatique attaché à ce sombre épisode...
Photo : memorial pour Katyn à Baltimore (Maryland, USA) aimablement communiquée par Jeff Schraeder.
10 octobre 2009
Un Moghol très libéral
Je ne connaissais pas bien l'histoire de l'Inde. J'avais vaguement entendu parler de la dynastie des Moghols mais j'étais loin de réaliser qu'ils étaient les artisans de l'unification en un seul gigantesque pays, de la multitude de petits royaumes belliqueux qui s'étendaient jusqu'au XVè siècle d'Ouest en Est, entre le Sind et le Bengale et du Nord au Sud entre le Cachemire et le Dekkan. Je n'imaginais pas non plus que l'islam avait très largement inspiré tous ces conquérants.
J'ai découvert une partie de cette aventure fortuitement, grâce à un film indien récent prêté par un bon ami.
Issus des studios de Bombay (communément désignés du nom de Bollywood), ce long métrage, de plus de 3 heures, est une excellente surprise. Réalisé par Ashutosh Gowariker il démontre la grande maitrise acquise dans le 7è art par l'Inde et la puissance narrative impressionnante de certaines réalisations, quasi impensable désormais en Occident.
La magnificence des images est absolument époustouflante et colle littéralement le spectateur à son siège. La mise en scène au cordeau déroule de spectaculaires scènes de bataille à dos d'éléphants, et montre un univers chatoyant, fait de foules colorées, de costumes chamarrés et de palais rutilants. Les décors sont évidemment très chargés, mais ils gardent toujours une esthétique de bon goût et de très grande classe.
Le récit, épique et passionnant, relate le règne d'un monarque surprenant, Jalaluddin Muhammad Akbar (1542-1605). Septième descendant de Tamerlan, musulman comme ses prédécesseurs, et grand conquérant, il fut surtout un puissant rassembleur et un souverain très éclairé. Il manifesta notamment une ouverture d'esprit assez extraordinaire pour l'époque. Après la régence brutale de Bairam Khân, il accéda au pouvoir à 18 ans après s'être débarrassé de son encombrant et rétif mentor. Dès lors, il entreprit une œuvre fabuleuse, faisant en quelque sorte écho à la Renaissance qui éclatait à la même époque en Europe.
Il commença par réduire les rébellions permanentes des tyranneaux alentour (Bihar, Bengale, Goujerat, Balouchisthan, Sind, Orissa), scella une forte unité avec les autres plus sensés (Rajasthan), et institua un gouvernement fort mais décentralisé. Avec l'aide de conseillers judicieusement choisis, il créa des institutions solides, mit sur pied une brillante politique économique qui amena la prospérité à son royaume. Surtout, il fut attentif à la diversité des populations qui constituaient son empire. En matière religieuse tout particulièrement, il institua la liberté de culte, interdit les conversions forcées, les circoncisions rituelles avant que l'enfant n'ait atteint un âge lui permettant de donner son avis (12 ans), et mit fin aux impôts qui frappait les pèlerinages non musulmans. Il proposa même une sorte d'incroyable syncrétisme spirituel autour des valeurs de plusieurs religions : islam, hindouisme, christianisme, Jainisme, boudhisme, Zoroastrisme, resté sous le nom de Din-I-Ilahi.
Se heurtant à la rigidité des traditions il fut confronté comme dans tout grand drame historique, à des trahisons au sein de sa propre famille et dut affronter vers la fin de sa vie les révoltes de son propre fils, qui allait lui succéder à sa mort.
Le réalisateur choisit de faire de l'union - très politique - d'Akbar avec la princesse Jodhaa, hindoue d'origine rajput, le centre de l'intrigue. Il en fait une belle histoire d'amour associant avec bonheur, tact, pudeur et noblesse des sentiments. Les acteurs de cette fresque étonnante sont très bons, et les deux héros sont au surplus d'une beauté radieuse. Leur jeu n'a rien d'outrancier ou de stéréotypé, bien au contraire. A voir absolument pour la splendeur du spectacle et une vision originale et très réconfortante de l'islam.
08 novembre 2008
Au dessous du Volcan
John Huston (1906-1987) parvint à le sublimer sans en dénaturer l'esprit, grâce à une mise en scène parfaitement maîtrisée, à la fois rigoureuse et profondément poétique.
Il faut préciser qu'il fut aidé par des acteurs littéralement habités par leurs personnages, en particulier Albert Finney et Jacqueline Bisset.
Cette luxuriante descente aux enfers prend en effet une signification aigüe, tout en conservant l'exubérance et la magie originelles. Le Mexique est omniprésent dans ses excès, ses arcanes, et sa magnificence, à la fois mystique (la fête des morts), brutal (les sinarquistes), indicible (une veille femme jouant aux dominos avec un coq), et vulgaire (le nain cupide et libidineux).
Toutes les tentatives que fera Yvonne, son admirable épouse, pour le comprendre et le reconquérir, se briseront sur cet irrémédiable fatum. Yvonne est résignée. Elle se sait entrainée sans retour mais elle essaie de trouver la force de remonter le courant. Jusqu'au bout elle veut croire que quelque chose peut encore contrarier le destin et lui redonner l'espoir de jours apaisés. Quand elle comprend qu'il n'y a rien à faire c'est déjà trop tard... La vie est tragique, l'amour est désespéré, c'est bien là le fin mot de cette histoire à l'envoûtant parfum de déchéance mortifère.
A ceux qui auraient été rebutés ou désarmés par la touffeur du livre, il est recommandé d'aborder un tel chef d'oeuvre par le biais de ce film exceptionnel. Ils en sortiront profondément et durablement bouleversés.
04 septembre 2008
Des souris et des hommes, et de l'Irak...
Des souris et des hommes est un récit simple. Trop simple peut-être pour les amateurs d'intrigues alambiquées ou de métaphysique en forme de jus de cervelle. Pourtant, l'histoire de George et de Lennie est de celles qui s'impriment en profondeur dans la conscience du lecteur et qui ne le quittent plus de sa vie.
L'itinéraire rustique, plein de sueur et de poussière de ces deux cul-terreux est exemplaire. Il est fait de presque rien en apparence, tout au plus une amitié dérisoire dans l'Amérique profonde des immensités agricoles au début de l'ère industrielle, entre un géant débile et un raté astucieux que tout oppose a priori et qu'un fil mystérieux relie pourtant à la vie à la mort.. Il n'est pas difficile de voir en filigrane à travers leur destinée, quelques unes des plus poignantes problématiques humaines.
Evidemment, là réside la cause du drame, qui s'avère aussi inéluctable que celui qui sous-tend une tragédie antique. Malgré toute la tendresse que George porte à son compagnon d'infortune, malgré tous les efforts qu'il fait pour le maintenir à peu près droit dans le chemin de la vie, le malheur viendra briser leur rêve trop inaccessible.
Au surplus, si justice doit être rendue, George veut qu'elle soit absolument dénuée de tout sentiment de vengeance, de toute passion, de toute méchanceté. Et lui seul peut en être garant. Ce drame est aussi celui de la solitude. Solitude terrible du héros de western...
17 novembre 2007
L'esthétisme glacé de Stanley Kubrick
Le mélange très kitsch des genres, qui constitue la marque de fabrique de la petite chaîne culturelle, donne l'occasion de réévaluer l'importance réelle de ce réalisateur hors norme. Et de constater hélas comme a mal vieilli cette oeuvre dans l'ensemble assez boursouflée.
Si l'on résume la période Noir et Blanc du cinéaste au film le plus célèbre, Docteur Folamour, on ne peut être qu'affligé. Bien qu'il soit encore souvent qualifié de « farce irrésistible et désopilante », avec le recul du temps il relève surtout de la caricature grotesque. Le triple jeu de Peter Sellers est ridicule. Le savant fou est particulièrement gratiné dans le genre. Si certains parviennent à rire aux érections intempestives en forme de salut hitlérien, du bras mécanique, ils ne sont vraiment pas difficiles. Bref objectivement, l'ensemble se hisse à peine au niveau d'une pochade telle Mars Attacks, en beaucoup plus prétentieux...
En dépit du caractère assez hermétique du message qu'ils véhiculent en règle, ces derniers ont tous été largement encensés à la fois par la critique et par le public.
En gloire, 2001, l'Odyssée de l'Espace est probablement celui qui domine cette production. Près de 40 ans après sa création il garde une place éminente dans les mémoires. Pour un film de science-fiction c'est une prouesse exceptionnelle. La réalisation extrêmement soignée, la crédibilité des décors et de l'intrigue, qui n'exclut toutefois pas la dimension philosophique voire métaphysique, le choix judicieux de l'ambiance musicale, tout se conjugue pour faire de ce film un véritable chef d'oeuvre.
A côté de ce spectacle impressionnant, les autres longs métrages paraissent presque falots, à l'exception notable de Shining, totalement sublimé par la composition extraordinaire de Jack Nicholson. Mais ni la violence théâtralisée d'Orange Mécanique, ni la beauté glacée de Barry Lyndon, ni les outrances de Full Metal Jacket ne parviennent à ébranler le mythe de l'aventure cosmique de 2001. Il y a trop d'artifice et de complaisance dans le premier, de mièvrerie et de longueurs monotones dans le second, et pas assez d'humanité ni de hauteur de vue dans le troisième.
C'est en somme un peu la faiblesse de Kubrick. Incontestablement il possédait une grande maîtrise technique, un style original et une vraie vision esthétique, mais il lui manquait la sensibilité qui lui aurait permis de leur conférer une vibration émotionnelle. Son art, qui consista le plus souvent à adapter à l'écran des livres écrits par d'autres, reste ainsi souvent froid, sans âme, comme désincarné. Le pire étant hélas son dernier opus Eyes Wide Shut dont le propos oiseux s'enlise interminablement dans une mélasse rococo de fort mauvais goût.
08 août 2007
Raisons d'Etat
Un obscur agent des services secrets américains, est partagé entre les exigences de son pays et celles de sa famille. Ambiance de complot permanent, scènes en clair-obscur, dialogues à mots couverts, sentiments en demi-teintes et secrets d'alcôve. Robert de Niro crée une atmosphère. Mais hélas celle-ci s'étire interminablement, épuisant le spectateur en incessants flashbacks, et en intrigues confuses. Matt Damon est plus inexpressif que jamais et autour de lui, pas un personnage ne se détache de la triste grisaille dans laquelle se noue un drame un peu dérisoire. La reconstitution des années de plomb de la guerre froide est très soignée, mais il y a au moins une heure de trop dans cette satire pesante des méthodes de la CIA. D'autant qu'elle n'apprend pas grand chose sur le fonctionnement de ce type d'administration et compte beaucoup de clichés et d'invraisemblances.