23 janvier 2017

De l'Âme

Y a-t-il un sujet plus difficile à aborder que celui de l’âme ? Premier écueil, on ne sait pas même si elle existe…
Et en admettant qu’elle soit une réalité, de quoi s’agit-il en définitive ?
C’est pour répondre à cette question, et pour complaire à une amie qui la lui posait, que François Cheng entreprit de rédiger sous forme épistolaire ce petit ouvrage.
Le challenge n’était pas fait pour désarçonner cet écrivain très sensible à qui l’on doit déjà de belles réflexions sur la mort, sur la beauté et sur d’autres thèmes a priori indicibles.
Né en Chine il y a près de 90 ans, il fut naturalisé français en 1949 alors que sa famille avait été contrainte de fuir le communisme qui s’installait dans son pays.
Il épousa sa nouvelle patrie avec tant d’affection, qu’il en apprit vite la langue, et si bien qu’il compte depuis 2002 parmi les sages qui siègent sous la coupole de l’Académie française !

Bien sûr il ne faut pas attendre que soit levé ici le mystère de l’âme. M. Cheng nous invite simplement à méditer sur le concept en l’inscrivant dans le cadre de l’histoire de la pensée philosophique et religieuse. La problématique est en effet consubstantielle à l’être humain. Elle naît très tôt dans son esprit et n’aura de cesse de le harceler jusqu’à la fin des temps.
En remontant ce fleuve et en se dirigeant vers l’Orient, c’est sans doute avec le Tao Te King qu’on en trouve l’approche la plus élaborée.
Parlons peu, mais parlons bien, selon le Tao, l’Homme procède de la Terre, la Terre procède du Ciel, le Ciel procède du Tao et le Tao de lui-même... Magnifique tautologie qui fond toute chose dans l’universel. Ce qui n’empêche dans cette conception, que l’âme comme le Yin et le Yang ait deux faces. Elle procède pour sa partie inférieur de la Terre (Po) et pour sa partie supérieure du Ciel (Hun).
Les différentes écoles philosophiques de l’Antiquité n’apporteront pas beaucoup plus de lumière. Surtout elles ont toutes tendances à invoquer la dualité que Descartes magnifiera plus tard. Ainsi pour Platon, le corps est tombeau de l’âme ou a minima la cage dans laquelle elle se trouve enfermée. Aristote voit s’élever le concept par degré, chez les être vivants : il y a l’âme nutritive des végétaux et des animaux, l’âme sensitive des animaux, et pour finir, l’âme pensante, propre à l’homme.
En matière religieuse, le soufisme et sa croyance en la réincarnation établit lui-aussi un parcours initiatique menant à l’élévation par stations, vers l’Absolu. Pour le Talmud l’âme est donnée pure à l’homme au moment de sa naissance et doit être rendue telle à Dieu.
Le Christianisme qui a hérité de nombreux concepts du judaïsme, met quant à lui en valeur la personne et l’unicité de chaque être, de chaque destin. Point de réincarnation, mais la résurrection “qui relève d’un autre ordre, marqué par la transfiguration de l’expérience vécue éprouvée par l’amour.”

A côté de cette exégèse conceptuelle, on lit avec plaisir les réflexions, parfois légères, parfois énigmatiques, toujours poétiques auxquelles se livre l’écrivain. Certaines paraissent s’inscrire curieusement dans une vision matérialiste, notamment lorsqu’on apprend “que le corps et l’âme sont solidaires, que sans âme le corps n’est pas animé, et que sans corps l’âme n’est pas incarnée…”
S’il est évident que nos pensées, notre conscience vivent au gré des pulsations, des plaisirs et des souffrances de notre chair, le débat n’est pas tranché de savoir si l’esprit peut ou non exister à l’état pur.
Ne pouvant répondre à cette interrogation fondamentale, M. Cheng procède par touches subtiles pour cerner ce que serait l’âme, totalement désincarnée.
Il commence, par remplacer la dualité classique par une triade distinguant corps, esprit et âme, et qui constitue selon lui l’intuition la plus géniale des premiers siècles du christianisme. Avec une élégante formule il tente de faire comprendre la différence fondamentale entre les deux dernières entités : “L’esprit raisonne, l’âme résonne…”
Plus loin, ctant Jacques de Bourbon Busset, il emploie la métaphore musicale pour décrire l’âme comme étant “un peu la basse continue du chant natif qui est en nous…”

Au bout de compte ce qui reste de l’âme apparaît bien ténu, si ténu même qu’on se demande ce qui la sépare du néant. M. Cheng renforce ce sentiment en citant cette supplique qu’aurait faite Simone Veil alors qu’elle sentait la mort toute proche : “Accorde moi de devenir rien... “
Heureusement cet étrange désir d'annihilation est contrebalancé par le vers célèbre de John Donne selon lequel “No man is an island, entire of itself” (Nul n’est une île, un tout en soi). Bien sûr il donne avant tout une clé morale pour guider notre existence ici bas. Mais on peut également interpréter son message comme l’indication rassurante que la mort d’un être n’est pas la mort de tout, et qu’en somme, personne n’étant venu de nulle part, personne ne va nulle part.
En somme, à la fin, lorsque tout semble s’effacer, il reste l’âme...

19 janvier 2017

L'effet Trump

Au moment où Donald Trump s’apprête à entrer à la Maison Blanche les gloussements des cocottes “indignées” redoublent d’intensité.


Si le personnage ne laisse manifestement pas indifférent, et si comme il en fait lui-même l'aveu, il adore la polémique, la question se pose tout de même de savoir pourquoi on assiste à un tel déferlement d’opinions à sens unique, lors de l’élection de chaque nouveau président américain.
Ce consensus témoigne tantôt d’une ferveur béate, confinant à la niaiserie comme l’Obamania de 2008, mais le plus souvent, il s’agit d’un incoercible torrent d’invectives et de mépris déversé sur la tête de turc désignée.
Pourquoi donc tant de haine au sujet d’un homme qui vient pourtant d’être élu dans un des systèmes les plus démocratiques du monde ?

Grégarisme, lâcheté, crédulité, mauvaise foi et ignorance participent à ce concert de réprobations dont l’unisson est proprement assourdissant. 
Avec le bal des faux-culs du Show biz on a atteint des sommets de ridicule. Pour sûr, ils ne sont pas nombreux ceux qui osent à ce jour s’afficher en présence du nouveau président. Et encore moins à accepter de participer à la fête de son investiture. Après nombre de déclarations imbéciles précédant son élection, on dut encore se farcir la morale à la petite semaine de Meryl Streep, s’érigeant en dame patronnesse devant un parterre embourgeoisé, réuni à l’occasion de je ne sais quelle ronflante distribution de trophées .
Exceptions notables à cette résistance de salon, Clint Eastwood, John Voigt, ou Nicole Kidman qui demandent de donner sa chance au nouveau président…


S’agissant des intellectuels, ils ne sont pas en reste, et après beaucoup d’autres, il fallut par exemple supporter les sentencieuses appréciations d’Alain Finkielkraut et d’Alexandre Adler, qualifiant le nouveau président d’imbécile inculte, et prévoyant doctement son échec, allant même jusqu’à envisager son impeachment avant la fin de son mandat (émission Zemmour & Naulleau sur Paris Première mercredi 18/01)!


Dans la Presse écrite, on insiste surtout sur le fait que M. Trump est le président “le moins populaire depuis 40 ans” (Figaro), moins même que George W. Bush surenchérit l’Express, ce qui n’est pas peu dire !

Suite à une récente interview qu’il donna aux magazines The Times et Bild, le futur “homme le plus puissant du monde” est qualifié d’anti-européen et de germanophobe.

Or que dit-il ? Que l’Europe est devenue l’instrument au service de l’Allemagne, et qu’elle ne tient en réalité plus que grâce à sa tutelle. Humiliant pour la France qu’il ne cite même pas… Mais M. Hollande a beau agiter sa carcasse grassouillette et se fâcher vigoureusement, si le constat est cru, il n'en est pas moins tristement vrai.

D’Angela Merkel, il dit à la fois qu’il la considère comme une grande dirigeante, et qu’elle a fait une erreur catastrophique avec sa politique d’ouverture subite au flux migratoire venu d’on ne sait d’où et d’on ne sait qui. Quoi de si choquant puisqu’elle même a reconnu explicitement que geste fut imprudent ?

Il juge que l’OTAN est devenue obsolète. Sacrilège ! Du coup tous ceux qui ne cessaient de dénigrer cet organisme à la botte des Américains, s’insurgent, alors qu’il demande simplement aux Européens de prendre davantage leur destin en main...

Du Brexit, il affirme qu’il sera profitable au Royaume Uni, ce qui est probablement exact. On peut comprendre en creux que ce sera bénéfique pour les échanges entre les USA et la Grande Bretagne, et préjudiciable à l’Europe, mais cela relève de l’évidence...

A ceux qui l’accusent de protectionnisme, il dit enfin qu’il n’est pas un adversaire du libre échange mais qu’il préfère qu’il se fasse de manière équitable… Rien de très choquant dans tout cela en définitive, mais quel tohu bohu !


Paradoxe étonnant, Donald Trump en dépit de la répulsion qu’il inspire, est le premier président dont on peut déjà tirer un bilan avant son entrée en fonction ! Et plutôt positif !

Passons sur les réactions internationales qui entourent son arrivée, notamment celles plutôt accommodantes de la Russie, et d’Israël, et celle plus mitigée de la Chine qui commence à comprendre qu’il lui faudra se confronter à un négociateur coriace.


Penchons nous plutôt sur les signes avant coureurs objectifs déjà encourageants de son action à venir !

Il n’est que de voir pour se convaincre d’un effet Trump, la courbe du Dow jones dont la récente ascension coïncide précisément avec l’élection présidentielle.


Quelle surprise également, de voir les entreprises qui semblent déjà obtempérer de bonne grâce à sa politique volontariste en matière de relocalisation : Plusieurs multinationales, épinglées publiquement par le président élu, ont décidé de ramener une partie de leur production sur le territoire des États-Unis (Figaro). Après Ford qui annonce son intention de rapatrier une usine qui devait initialement s’installer au Mexique, ce sont General Motors, Fiat Chrysler, Walmart, et l’opérateur téléphonique Sprint qui vont procéder à des mesures identiques. Du coup, on mesure déjà un effet Trump sur la fameuse courbe du chômage qu’Hollande n’est pas parvenu quant à lui à “inverser” en 5 ans, en dépit de ses promesses mirobolantes !
Même le FMI s’y met, en annonçant déjà une croissance américaine plus forte sous Trump (La Croix)
.

Pendant ce temps Barack Obama fait ses derniers ronds de jambe. Il "soigne sa sortie" comme titre BFM TV. Discours emphatiques, ponctués de petites larmes comme il sait si bien les sortir sur commande pour émouvoir les bobos confits dans la dévotion, et les communautés crédules qu’il a si bien bernées. “Yes we did” se félicite-t-il, sans préciser quoi...
Un seul chiffre donne la mesure de l'effet Obama : le quasi doublement de la dette américaine, qui est passée de 10.000 milliards de dollars à 19.000 sous sa présidence...
 

17 janvier 2017

What Now ?

Quoiqu’on en pense, Donald Trump est un sacré bonhomme ! Un sacré dur à cuire assurément.


On a dit tant de choses sur lui, on l’a tant agoni d’injures depuis qu'il a fait irruption dans le champ politique que pas grand monde n’aurait parié sur son avenir dans le domaine.
Mais c’était méconnaître son extraordinaire charisme et son étonnante capacité à rebondir et à tirer profit de tout ce qui se présente à lui.


Au moment où il s’apprête à investir la Maison Blanche, il n’est pas sans intérêt de tenter d’aller au delà de ce qu’on connaît de lui par les raccourcis simplistes diffusés avec délectation par les médias réunis. Il suffit pour cela par exemple de se pencher sans trop d’a priori sur ses écrits, et notamment sa profession de foi pré-électorale. Parue en 2015 sous le titre Crippled America (L’Amérique Paralysée*) elle ne cache pas grand chose de ses motivations et de ses intentions.

Au risque de sortir une fois encore des rails de la Correction Politique, je l’ai fait ! Le moins qu’on puisse dire est que je n’ai pas été déçu du voyage !


Certes le personnage ne manque pas d’air pour vanter ses mérites personnels, et rien que cela peut en énerver plus d’un... En tant que bâtisseur, son métier de base, il estime en toute modestie “qu’il a accompli des choses que personne d’autre n’a accomplies.../… et son nom, qui est sa marque, est selon lui, “un des grands symboles de qualité et d’excellence dans le monde.”

De lui-même, il affirme en toute simplicité qu’il est “un mec gentil”, mais qui a “la mauvaise habitude que les politiciens professionnels n’ont pas, celle de dire la vérité, et de ne pas avoir peur de dire exactement ce qu’il pense…”

Son franc-parler et même son goût de la provocation sont ainsi parfaitement assumés, et probablement même exacerbés par le mépris que l’on manifeste à son égard. Il prétend, non sans quelques raisons, qu’il est “l’homme que les médias adorent détester depuis un bout de temps.” Son comportement ne serait que la conséquence de cette exécration : “Je n’hésite jamais à faire parler de moi en étant polémique ou en contre attaquant.../… Il m’arrive de faire des commentaires choquants, leur donnant ainsi ce qu’ils attendent…./…. Ils savent ce que j’ai dit, ils savent ce que j’ai voulu dire, mais ils en font des citations tronquées ou bien les interprètent de manière à en donner un sens différent.../… J’ai toujours attiré une foule de journalistes qui attendaient comme des requins que je fasse couler le sang… J’essaie d’honorer cette attente !”


Lorsqu’il décida sérieusement d’entrer en politique, il avait déjà prévu l’accueil qu’on lui ferait : ”je savais que tous les défaitistes impitoyables et incompétents, apôtres du statu quo, paniqueraient et se dresseraient contre moi…”

L’idée de départ était pourtant simple : “ faire en sorte que notre pays retrouve sa fierté et riposte.” “Make America Great Again” comme dit le slogan officiel.

Pas plus bête après tout que le “Yes We Can” d’Obama, mais qui ne suffit pas à prouver qu’il fera mieux que le lamentable pschiiit, du président sortant…


Son programme, Donald Trump est capable de le résumer en une seule phrase : “Nous devons renforcer notre armée, aider nos anciens combattants, nous confronter à nos ennemis, dissuader l’immigration illégale, reconstruire nos infrastructures, réorganiser notre code fiscal et notre système éducatif, et nous débarrasser des mesures stupides du passé, y compris l’Obamacare et l’accord sur le nucléaire iranien.”


Au long des quelques 230 pages de l’ouvrage il détaille ces grand axes, sans donner certes toujours des réponses précises aux problématiques qu’il entend solutionner, mais sans annoncer non plus la révolution ni les terrifiantes mesures dans lesquelles certains voient déjà se profiler le spectre du fascisme.


Premier sujet d’importance, celui de politique internationale. A ce propos, il n’y a aucun doute pour lui : “traiter avec la Chine, aussi bien qu’avec la Russie, va constituer le plus grand défi à long terme.”

Sans désigner quiconque comme ennemi, il plaide pour aborder les négociations à venir en position de force. Et pour pouvoir peser, rien ne remplace à ses yeux la puissance militaire : “nous avons besoin d’une armée si forte que nous n’aurions pas besoin de nous en servir”.
Il ne fait là que reprendre le bon vieux précepte des anciens “si vis pacem para bellum”, ce qui lui permet d’égratigner au passage Obama “qui essaie de jouer les gros bras et fixe des limites, mais lorsque la ligne rouge est franchie, il n’a pas de réaction…”

Pour Trump, c’est la doctrine de Théodore Roosevelt qui prévaut : “user de douceur et brandir un gros bâton...” et d’une manière générale, “le camp qui a le plus besoin de négocier doit repartir avec le moins...”


En matière de politique intérieure, les questions sociétales font l’objet de développements fournis. L’éducation notamment constitue une de ses préoccupations essentielles. Il déplore la baisse régulière du niveau des collèges et écoles primaires et souhaite faire évoluer les choses vers un système qui “laisse jouer la concurrence entre les écoles pour attirer les enfants.../… car le problème avec les écoles publiques est que pour nombre d’entre elles, il n’est pas possible d’évaluer ce qu’elles font. Si une école privée sous contrat ne fait pas son boulot, elle ferme…”

S’agissant de l’enseignement supérieur, ce n’est en revanche pas la qualité qui le soucie, puisque selon lui, les Etats-Unis dispensent le meilleur enseignement supérieur du monde, mais le coût croissant des études. S’il ne propose hélas guère de solution concrète, il évoque "le programme fédéral de prêts étudiants, qui a fait un profit de 41,3 milliards de dollars en 2013….”

M. Trump pour finir, insiste sur le rôle primordial de la famille. A son avis, “la plupart des problèmes de discipline commencent à la maison. Tous les parents devraient se demander : quel genre d’exemple est-ce que je donne ?”


Pour le système de soins, il espère la mise en oeuvre d’un système raisonnable et responsable, dans le cadre d’un marché compétitif, mais il peine à proposer des solutions précises en dehors de l’abrogation de l’obamacare et le rejet de la bureaucratie qui a est devenue selon lui envahissante.

S’agissant de l’avenir des retraites, il le voit inscrit dans un programme fondé en partie sur la Sécurité Sociale, mais également sur l’économie de marché, "qui fonctionne". Il rappelle à ce sujet “que les fonds spéculatifs et les gestionnaires de fonds sont importants pour les fonds de pension et pour l’épargne retraite par capitalisation.”


En matière économique, Donald Trump exprime une conception libérale pragmatique, c’est à dire qu’il ne se gêne pas pour enfreindre certains dogmes, par exemple celui du libre échange. Mais il s’agit à l'évidence davantage de promouvoir une stratégie du donnant-donnant que de se faire le chantre du protectionnisme.

Sur la fiscalité, c’est une diminution tous azimuts qu’il préconise. Il souhaite la suppression des niches fiscales et la simplification d’un code fiscal, lourd de 74608 pages. En contrepartie, ne persisteraient que 4 tranches d’imposition : 0-10-20-25% et pas de taxation supérieure à 15% pour les entreprises. Les droits de succession seraient quant à eux purement et simplement supprimés…

Fidèle à sa ligne anti-système, il en profite pour dénoncer l’incurie des politiciens : “nous ne devrions pas recevoir de conseils en fiscalité de la part de membres du Congrès, incapables de présenter un budget, ni attendre d’eux qu’ils tiennent leurs promesses de créer des emplois…”

Il défend enfin ardemment un vaste programme national de relance, sous réserve qu’il passe avant tout par la rénovation des infrastructures publiques qu’il juge en état de quasi délabrement : selon lui les routes sont surchargées, semées de nids de poules, les voies ferrées ne sont plus fiables et un pont sur neuf serait structurellement défaillant.


Beaucoup d’autres problématiques passent au tamis de sa réflexion décapante, et bien sûr les thèmes par lesquels il a provoqué le scandale.

A propos de son attitude envers les femmes, il tente de convaincre que sa prétendue misogynie n’est qu’une accusation non fondée : “Aucun de ceux qui se lamentent sur la manière dont je parle des femmes ne mentionne le fait que j’ai travaillé à promouvoir la parité des sexes dans une industrie dominée par les hommes. Et de rappeler que pour le projet de Trump Tower à New York, il est fier d’avoir confié, dès 1983, la responsabilité à une femme de 33 ans.”

S’agissant de l’immigration, qui fut l’objet de tant de controverses, il s’explique sans détour : “On a entendu dire que Trump affirmait que tous les immigrés étaient des criminels. Ce n’était pas du tout ce que j’avais dit mais cela faisait un meilleur sujet pour les médias.../… J’éprouve un grand respect pour les Hispaniques mais ce n’est pas ce dont les médias ont rendu compte.../… Je ne m’oppose pas à l’immigration. J’aime l’immigration. ce que je ne peux pas tolérer c’est l’idée même de l’immigration clandestine.../… même si je sais bien que la vaste majorité des immigrés clandestins sont honnêtes, très travailleurs et qu’ils sont venus ici pour améliorer leur vie et celle de leurs enfants.”

Il déplore en définitive que “les lois actuelles soient faites à l’envers : qu’elles rendent la vie difficile aux gens dont nous avons besoin et la vie facile aux gens dont nous ne voulons pas…”

Parmi les mesures qu’il propose, figure la remise en question du droit du sol qui fait de toute personne née aux Etats-Unis un citoyen de droit de ce pays. Toujours enclin aux formules lapidaires, il résume sa position en disant “non aux anchor babies”. S’agissant du fameux mur entre les USA et le Mexique, dont il confirme qu’il souhaite sa prolongation et son renforcement, il résume sa position avec un adage : “Les bons murs font les bons voisins…”


Le climat : “Je ne crois tout simplement pas que le changement climatique soit causé par l’homme…” Considérant que les sources d’énergies renouvelables ne sont pas suffisantes, onéreuses (solaire) ou dégradantes pour l’environnement (éoliennes), il préconise de continuer faute de mieux, à exploiter les formidables réserves de carburant fossile (ne différant pas dans les actes d’Obama, qui derrière ses belles paroles, laissa libre cours à l’exploitation du gaz de schiste).


Au sujet du port des armes, il cite un Pères Fondateurs de la république américaine, James Madison considérant qu’il s’agit “d’un avantage dont jouissent les Américains par rapport à presque tous les autres pays, où les gouvernements ont peur de faire confiance à un peuple avec des armes…”

En bref, il “n’est pas besoin d’interdire aux citoyens honnêtes l’accès aux armes à feu, mais de sévir contre les criminels professionnels…./…. Quelle pratique ridicule et inutile que celle des médias qui associe systématiquement un crime à une arme à feu plutôt qu’à un criminel…”


Enfin, alors qu’on aurait pu le croire à mille lieues de préoccupations spirituelles, il exprime un intérêt inattendu vis à vis de la religion. Sans prendre partie pour l’une plutôt qu’une autre, il célèbre “la foi inébranlable qui a rendu ce pays si grand, et ces croyances issues des enseignements de la bible [qui] ont beaucoup à voir avec notre développement et notre succès.”


Au total, il s’agit d’une profession de foi volontariste, qu’on peut certes trouver un peu simpliste, mais qui n’est pas sans rappeler le programme défendu autrefois par Ronald Reagan (qui fut critiqué par l’intelligentisia de l’époque, à peine moins sévèrement que Trump). Derrière la provocation, il y a donc surtout le bon sens et beaucoup d’esprit pratique, dont on imagine qu’il usa pour faire prospérer ses affaires. C’est donc sur sa capacité à mettre en oeuvre ce projet qu’il faudra le juger.
Pour conforter la légitimité controversée que les urnes lui ont donnée, il lui faudra sans doute également modérer ses ambitions et son auto-satisfaction, tout en faisant preuve de mansuétude face au mouvement anti-démocratique très médiatisé, qui conteste haineusement son élection.
On ne pourra en tout cas pas lui retirer une passion sincère pour son pays, qu’il exprime à plusieurs reprises et qui trouve son point d’orgue dans ce cri du cœur (il en aurait donc un…) : “Je sais à quel point j’ai de la chance. le jour où je suis né, j’avais déjà gagné à la plus grande loterie de la planète : je suis né aux Etats-Unis !


A suivre : L'effet Trump...
*L'Amérique Paralysée. Donald Trump. Editions du Rocher 2016

06 janvier 2017

Nuit de Janvier


D'étoile et de neige, la nuit
Se joue de la brume élégiaque
Emplissant le silence opaque
D'un indéfinissable ennui

A la fin tout ici bas nuit
Que cela vienne du zodiaque
Ou bien d'un fatum démoniaque
D'hier, demain ou d'aujourd'hui

Plus rien ne reste et tout s'estompe
Au sein d'un monde évanoui
Qu'aucune effusion ne détrompe

Seul erre le sens inouï
D'une évidence qui dérange
Cette pénombre très étrange...

28 décembre 2016

La couleur des rêves

On dit d’Odilon Redon (1840-1916) qu’il fut un peintre symboliste.

Sans doute est-ce vrai, mais alors c’est au sens où Baudelaire l’entendait dans ses fameuses Fleurs du Mal, lorsqu’il évoquait le mystère du Monde, et la place de l’homme entre rêve et réalité :
“La Nature est un temple où de vivants piliers

Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.”


Dans la vision que le peintre en propose, ce monde est en effet peuplé de mille choses et créatures imaginaires, qui entrent en symbiose avec lui. De toute évidence, la réalité sensible est aussi importante à ses yeux que le royaume de la pensée.
Le spectacle est parfois inquiétant, par exemple lorsque l’on rencontre des araignées à tête humaine ou bien des démons grimaçants surgis d’une noirceur d’encre. Mais à d’autres moments, il est parfaitement rassurant, quand la lumière inonde la toile et que des myriades de couleurs se répandent en prenant des formes ailées, vaporeuses ou florissantes.


Pour notre plus grand bonheur, Odilon Redon qui commença sa carrière sur le mode quasi exclusif du clair-obscur, dont il nommait lui-même les productions des “noirs”, fit un beau jour, le choix de la lumière et de la couleur. Comme s’en est réjoui le critique et ami du peintre Marius-Ary Leblond en 1907, il “se lassa de cette sorte d’enfer spiralant et noir où il s’était enfermé.../... il éprouva le besoin de la lumière et monta vers la couleur comme vers un paradis.”


De fait, au travers de cette nouvelle optique, se dégage une sérénité rayonnante où le rêve se confond avec la réalité et où le jour apparaît aussi resplendissant que la nuit. C’est ainsi qu’on peut les découvrir sous forme de deux larges fresques exposées dans la bibliothèque enchantée de l’abbaye de Fontfroide. Tels de vastes horizons lumineux, ces panoramas sont tous deux propices à l’évasion spirituelle, même si la clarté a l’incandescence de l’or dans l’une, et la profondeur aquatique de tourmalines dans l’autre.
Il souffle dans ces compositions un grand vent de liberté, mais si calme, si émouvant, qu’on ne peut que se laisser emporter par ses volutes apaisantes.



En s’élevant au dessus de la brutalité de la matière, Redon tend vers l’abstraction pure même s’il reste parfaitement figuratif.

La figure humaine emplit d’ailleurs une bonne partie de ses tableaux.

Elle est souvent empreinte d’une gravité hiératique. Yeux mi-clos, expression songeuse, voire énigmatique, elle interroge le monde et participe de son mystère poétique. Qu’il s’agisse d’un doux visage féminin ou d’une silhouette d’inspiration religieuse, c’est à la sagesse que ces êtres nous invitent avec une sollicitude infinie.




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Et c’est avec un émerveillement sans cesse renouvelé que l’on admire ces fantasmagories aériennes multicolores où la grâce côtoie la beauté. On peut ainsi s’imaginer échapper au monde sensible, sans pour autant s’égarer dans de vaines divagations.

Quoi de mieux pour passer sans appréhension et le coeur léger, d'une année dans l’autre ?


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27 décembre 2016

Sleep and Poetry

Il y a un peu plus d'un mois, disparaissait Leonard Cohen (1934-2016).


Avec quelques dernières chansons à la beauté plus grave et ténébreuse que jamais, il s’éteignait comme une bougie, dans une ambiance sépulcrale, où se mêlaient confusément la nostalgie amoureuse, la tristesse du départ et l’espérance secrète d’une indicible éternité.

Me reviennent alors quelques mots, écrits à l’occasion d’un précédent album, Ten New Songs, sorti au tout début des années 2000 et qui marquait presque joyeusement son retour, après un silence prolongé dans le confinement extatique d’une retraite bouddhique.
Jamais je n’avais apprécié le chant de cet homme autant qu’à travers ces mélopées chaudes et sourdes, qui parlent de tout et de rien, avec un art ineffable de donner l’impression, comme un funambule sur son fil, de progresser sur une seule note, bleue bien sûr...



Avant d'écouter Leonard Cohen, il est impératif de se mettre en condition. Il faut faire le calme en soi, ne rien attendre de précis, se dépouiller de toute les turbulences du quotidien, et se laisser glisser sans retenue dans une sorte de mol abandon.

Alors et seulement alors, peut se produire un petit miracle : la montée lente et majestueuse d'une extase languide, faite de quiétude et de détachement, qui vous envahit délicieusement et vous entraîne dans une subtile lévitation intellectuelle. Avec ce nouvel album, des plus intimistes et dépouillés, plus que jamais l'effet est au rendez-vous, à condition de vouloir le saisir.

"In my secret life" constitue une introduction idéale à ce monde étrange. Une humble mélodie sous tendue par une rythmique veloutée, au dessus de laquelle comme un murmure, une voix s'élève et vient planer avec une chaude gravité. Elle vous dit des choses douces, intemporelles, totalement dénuées de passion et de vanité.

Et lorsque l'allumage a eu lieu, le temps se met à défiler avec une exquise régularité, comme les grains de sable au travers d'un sablier. Ça paraît indéfini, sans heurt aucun, sans stress, et empreint de plénitude. Beau et parfait comme un minuscule jardin japonais...

A la fin, lorsque les dernières notes du magnifique Land of Plenty se dissipent dans l'air immobile, on se sent un peu engourdi, comme émergeant du sommeil ou bien comme si un court instant, on avait transcendé la réalité... 

Adieu, doux poète….

NB : Sleep and poetry est le titre d'un poème de John Keats

24 décembre 2016

Jeux de langues

La langue est ce qu’on a trouvé de mieux pour exprimer la pensée. Mais cette dernière est si foisonnante et si insondable que la première se révèle pour la tâche, un outil bien rudimentaire. Celui qui sait manier plusieurs langues a sans doute un avantage. Non pas tant de savoir traduire des phrases d’un idiome à l’autre, mais surtout de pouvoir mieux mesurer à partir de plusieurs points de vues, la richesse de l’expression humaine.
C’est en quelque sorte à cette expérience que l’écrivain Michael Edwards tente de nous initier dans ses dialogues singuliers sur la langue française.
Il faut préciser tout de suite qu’élevé à Cambridge, il est tombé sous le charme de la France et du français qu’il maîtrise au moins aussi bien que sa langue maternelle. Preuve en est qu’il siège depuis quelques années à l’Académie Française !

Son domaine de prédilection, c’est la poésie qui est selon lui “le lieu où l’on devine tout le possible de la langue, tout ce qui demeure inexploré dans les échanges habituels.”
A partir son expérience personnelle, il propose ici une réflexion en forme de dialogue, qu’il mène tout seul, en se dédoublant pour la circonstance. Sa partie francophone est “moi”, sa partie anglophone est “me”. On pourrait trouver le procédé un tantinet artificiel et le fait est que certaines digressions semblent parfois se perdre en conjectures, agréables mais un peu exégétiques.
On trouve toutefois dans ces pages où l’érudition le dispute à l’esthétisme des considérations intéressantes. La comparaison du français avec l’anglais tout d’abord qui donne l’occasion de décrire le premier comme “une langue rangée, surveillée, où l’on se plaît à multiplier les difficultés.../… une langue mieux ordonnée que la réalité qu’elle tient  délicatement à distance”, tandis que l’anglais manifeste “une capacité à créer un sens complet et souvent complexe avec une grande économie de moyens.”
Evoquant les études linguistiques d’un certain Charles Bally, Michael Edwards, rappelle toutefois que “la construction française est restée souple voire capricieuse, rebelle aux règles inflexibles, accueillante pour les exceptions et les variétés susceptibles de rendre  les nuances délicates de la pensée…”
En un mot, plutôt flatteur, si l’anglais est “la langue universelle dans le sens grossier du mot (on la parle partout), le français est universel de manière bien plus noble. Affranchi des conjonctures, il domine dans l’ordre de l’idée, de l’esprit…”

Selon Michael Edwards, maîtriser une langue c’est voir à travers : “La langue disparaît comme intermédiaire. C’est écrit quand on ne voit plus la langue, seulement la chose dans toute sa netteté…”
Pourtant à force d’être précise la langue française frise parfois l’absurdité, notamment comme le fait remarquer Michael Edwards, lorsqu’elle entend faire “le partage de tous les objets du monde et de la pensée entre les genres masculin et féminin.” Cela tourne même à la manie lorsqu’on applique au langage les stupidités de l’idéologie égalitaire, en féminisant de manière affreuse tous les mots qui ne connaissaient qu’un genre qu’on aurait pu qualifier de “neutre” (professeure, auteure, sapeuse-pompière). L’Académie Française s’est d’ailleurs élevée contre cette mode, déniant même au gouvernement « le pouvoir de modifier de sa seule autorité le vocabulaire et la grammaire du français. »

Si la langue maternelle, qu’on imagine aussi naturelle que l’air qu’on respire, contribue à rendre familier tout ce qui nous entoure, l’acquisition d’un nouveau mode d’expression est comme un débarquement en terre inconnue. Cette sensation inspire à Michael Edwards une belle réflexion aux prolongements philosophiques : “Par le français, je suis entré avec bonheur dans l’étranger, mais aussi avec appréhension.../… C’est d’abord le vocabulaire qui bascule, les mots qui disparaissent pour être remplacés, alors qu’ils semblaient contenir toute la réalité ou presque.”
Lorsque la réalité perd son caractère intangible, c’est l’être lui-même qui vacille. Ainsi la langue nouvelle insinue l’étrangeté dans le moi :”Si l’on change en plongeant dans les eaux d’une autre langue, le moi n’est pas stable, on peut se demander qui l’on est.../… Nous habitons une planète qui ne parle pas notre langue. il suffit d’un changement d’optique pour que tout bascule.../…”

Méditer sur la langue mène très loin. Jusqu’à Dieu pourquoi pas, si l’on se réfère à l’évangile selon Saint-Jean qui stipule “qu’au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu.”
D’où cette conclusion en forme de questionnement panthéiste, attachant aussi bien le langage à l’homme que l’homme à Dieu, de manière pourrait-on dire consubstantielle :
  • “Quand Dieu créa l’univers, le ciel et la terre, la création se trouvait-elle en dehors de lui ?
  • Je nage complètement , ou plutôt je me noie dans ce qui me dépasse tout à fait, mais je présume que Dieu projeta  l’univers hors de lui.
  • Mais si Dieu est omniprésent, comment peut-il exister quelque chose en dehors de lui ? Où trouver un endroit qui soit hors de Dieu ?”

19 décembre 2016

Game Over

Les Historiens se pencheront sans doute objectivement sur les faits et actions marquant le double mandat de Barack Obama, qui fut à la tête des Etats-Unis de 2008 à 2016.

Porté par un élan confinant parfois à l’extase mystique, le “premier président noir” a-t-il été à la hauteur de ce que les foules enthousiastes attendaient de lui ?

Le moins que l’on puisse dire est que cette épopée annoncée un peu trop emphatiquement, s’achève en fiasco.

Le dernier discours du Président, révèle que même dans les mots, il n’est plus très efficace, lui qui savait si bien manier le verbe pour émouvoir le bon peuple.
Les médias pourtant si indulgents à son égard ont surtout retenu ses vaines piques vengeresses adressées à la Russie. Pourquoi donc, alors qu’il s’apprête à quitter la Maison Blanche, se lance-t-il ainsi dans une charge nécessairement dérisoire et potentiellement désastreuse à l’encontre d’un pays avec lequel son successeur aura la délicate tâche de composer ?


Sans doute est-il déçu de n’avoir pas réussi à faire triompher son ex-rivale et coreligionnaire Hillary Clinton; sans doute est-il quelque peu humilié par l’influence grandissante de Wladimir Poutine sur la scène internationale.
Mais y a-t-il encore un admirateur assez béat pour prendre au sérieux les accusations de piratage informatique, responsables paraît-il de la déstabilisation de la candidate démocrate au profit de Donald Trump ?

Si c’était vrai, ce serait la preuve d’une inquiétante faiblesse de l’Amérique, et d’une tragique impuissance des services de contre-espionnage. La CIA et la NSA seraient donc tombées si bas, qu’elles ne parviendraient même pas à contrer de bien banales cyber-attaques ?


Les menaces qu’aurait adressées Obama à Poutine, pour le contraindre à faire cesser ces agressions, relèvent de la tartarinade : « Je lui ai dit qu'il y aurait des conséquences sérieuses s'il ne le faisait pas... »
Hélas, le futur ancien président américain a beau monter sur ses grands chevaux virtuels, il ne convainc personne, et ses admonestations tournent à l’infantilisme, notamment lorsqu’il traite la Russie de « petit pays qui ne produit que du pétrole, du gaz et des armes... »

Une aussi stupide provocation ne peut que le couvrir de ridicule, à l’heure où l’Amérique fait si pâle figure face à la Russie, notamment en Syrie. Il est bien loin le temps où l’on qualifiait l’Amérique de George W. Bush d’hyperpuissance (Hubert Védrine).


Par son inaction, Barack Obama a laissé en toute connaissance de cause s’opérer d’épouvantables massacres. A côté de l’horrible guerre civile dont la tragédie d’Alep est le point d’orgue, on a vu proliférer un peu partout au Proche-Orient la gangrène du terrorisme islamique, étouffant les grandes espérances de liberté qu’avaient fait naître les printemps arabes.

De ce feu contagieux la Russie de Poutine est en train peu à peu de tirer les marrons, sans qu’on puisse dire où tout cela va mener. Pour l’heure, son influence grandit chaque jour tandis que celle des Etats-Unis s’étiole. Il y a lieu de s’inquiéter de cette évolution. Si les desseins de Poutine restent assez impénétrables, le fait est que sa politique n’a guère d’états d’âmes.

M. Obama tente de se défausser sur d’autres de ses propres erreurs et ses lâchetés et invoque des périls imaginaires. Il tente un peu naïvement de se construire une posture, mais elle fait de plus en plus penser à celle de Don Quichotte qui combattait les moulins à vent...

02 décembre 2016

Cul-de-sac

Les évènements se précipitent. Les échéances se succèdent. Et le grand nettoyage politique est à l’oeuvre.
Aujourd’hui François Hollande prend enfin une sage décision. Il renonce à se représenter à l’élection présidentielle !
Un soupir de soulagement parcourt le microcosme politique. Comme titre Le Figaro : “Le retrait de Hollande est unanimement salué !”

On ne voyait pas bien ce qu’il pouvait faire d’autre, au vu de la conjoncture, mais que d’atermoiements, pour en arriver là ! Que de longueurs dans ce feuilleton en forme de glauque soap-opera.

C’est évidemment un terrible aveu d’échec. Le Chef de l’Etat a beau d’une voix blanche, égrener les soi-disant réussites de son mandat et affirmer n’avoir qu’un seul regret (le débat en eau de boudin sur la déchéance de nationalité), c’est évidemment l’impression d’un monumental ratage qui s’impose.
Victime d’une impopularité précoce, profonde et durable, il n’a jamais réussi à incarner un vrai projet, donnant l’impression de mener le “pédalo” gouvernemental au jour le jour, sans but, sans boussole, avec le seul espoir de pouvoir à un moment ou un autre, profiter d’une bénéfique vague porteuse. Tout ça pour échouer lamentablement sur le banc de sable de la Primaire de la Gauche...

Au risque de passer pour partisan, on peut avant tout évoquer l’inanité de cette politique, errant entre socialisme à l’eau de rose et tiède social-démocratie. On peut considérer comme normal, que rien de bien ne soit sorti d’une telle accumulation de voeux pieux, de mesures à la Dubout, et d’a priori idéologiques surannés. Le Socialisme, ça ne marche décidément pas, comme le disait Giscard dans un éclair de lucidité.
En plus d’un défaut d’ambition politique, le personnage manque singulièrement de charisme et de panache. Il apparaît plus que jamais évident que son accession aux plus hautes marches du pouvoir ne fut que la conséquence d’un concours de circonstances. Divine surprise pour les uns, erreur de casting pour les autres
Sa lente décrépitude qui s’achève aujourd’hui n’a pas grand chose à voir avec le départ choisi et assumé du général De Gaulle, qui avait lié son sort au résultat d’un référendum. Hélas, François Hollande n’a pas l’occasion de partir avec dignité. C’est sur la foi de sondages désastreux et dans une ambiance pestilentielle qu’il est contraint de s’effacer piteusement.
Après son retrait, qui finit de le décrédibiliser, il persiste néanmoins à vouloir végéter encore cinq long mois, sans plus de légitimité qu'un acte notarial, dans le lugubre cul-de-sac dans lequel il s’est lui-même fourvoyé, et le pays avec. Triste fin...

Cela dit, s’il laisse un Parti Socialiste dévasté, cela n’empêchera pas ses coreligionnaires éparpillés “façon puzzle”, de tenter de nous resservir les mêmes plats, soit en rajoutant un peu de vinaigre de gauche, soit au contraire une pincée d’épices libérales.
Les Français auront-ils enfin un peu plus d’exigences; vont-ils montrer leur dégoût pour ces mixtures dégoulinant d’huile démagogique c’est là toute la question...

30 novembre 2016

En marche ?

La primaire de la Droite et du Centre a donc rebattu les cartes du jeu politique, qu’on croyait déjà distribuées…


Ce scrutin très ouvert, qui a passionné le pays s’est déroulé dans une ambiance un peu étrange mais somme toute très démocratique et rassurante pour l’avenir. Le pire n’est donc pas certain et c’est le grand mérite des organisateurs de cette confrontation, d’avoir relevé le défi. Thierry Solère en fut un des principaux artisans. Ses manières simples, sans emphase ni artifice, cachent évidemment une belle détermination. Elles révèlent également une nouvelle approche politique, marquée par le souci de dire les choses telles qu’elles sont et non telles qu’on voudrait que le peuple croie qu’elles soient.

François Fillon
a été désigné comme le nouveau porteur des espérances de celles et ceux qui se sont exprimés avec enthousiasme. Ils ne représentent qu’une partie du pays, mais n’en doutons pas, le succès de l’opération révèle une aspiration profonde. L’essai ne demande désormais qu’à être transformé.

La personne même de François Fillon semble taillée pour les épreuves à venir. Il a le calme et le sang froid des vieilles troupes. Il a une expérience trempée au feu de l’action, nul ne peut le contester, et il paraît savoir où il veut emmener le pays, ce qui n’est pas la moindre des qualités, en ces temps de trouble et de confusion.


S’agissant de son programme, il a de quoi séduire tout amoureux de la liberté. On entend évidemment déjà les voix de ceux qui crient à l’ultra-libéralisme, qui s’effarouchent par avance de la “casse sociale” qu’il serait susceptible de provoquer. La rengaine est si caricaturale, si éculée qu’elle devrait faire honte à ceux qui osent encore l'entonner.
Ces gens ont-ils donc de la m…. dans les yeux pour ne pas voir le lent dépérissement de la nation, pour être aveugle au malheur de toutes les personnes sans emploi ou qui végètent dans une misère entretenue par un Etat Providence déresponsabilisant ? Sont-ils donc pétris de mauvaise foi pour occulter les déchirements qui traversent notre société, pour réclamer toujours plus de bureaucratie, qui asphyxie les initiatives ?


Dans quel monde est-on lorsqu’on refuse aux gens la liberté de travailler comme bon leur semble ? Lorsqu’on ne voit d’autre perspective au problème de l’emploi que celle de la Fonction Publique ? Lorsqu’on n’imagine d’autre horizon pour l’éducation des enfants que celui de l’Etat ? Lorsqu’on ne parvient à penser l’assurance maladie autrement qu’à travers le dogme monolitihique de la Sécurité Sociale ? Lorsqu’on considère la famille comme une référence relevant du fascisme ?


Pour l’heure François Fillon veut échapper à cette gangue conservatrice confinant au gâtisme. Il veut avancer en éradiquant un à un les tabous idéologiques qui forment autant de mirages trompeurs sur le chemin du progrès.
On ne saurait toutefois se réjouir trop vite ayant tant été échaudés par le passé.
Il reste en effet à savoir dans quelle mesure il appliquera tout ce qu’il propose, et comment il fera passer la pilule amère à des Français drogués aux promesses et aux illusions...

22 novembre 2016

Le combat de trop

Ainsi s’achève donc la trajectoire politique de Nicolas Sarkozy...


Même s’il ne faut jamais jurer de rien en matière de politique, cette fois le destin national de l’ancien Président de la République paraît scellé pour un moment, si ce n’est pour toujours.
Ce parcours incandescent, brisé une première fois en 2012, s’achève donc abruptement ce 20 novembre 2016, à l’issue d’une primaire organisée par son propre parti, et dont il fut bon gré mal gré l’artisan ! Ce parti qu’il avait conquis, fasciné, mené à la victoire, puis sévèrement déçu, avant finalement de le sauver de l'auto-destruction, à l’occasion d’un improbable et risqué retour.
..

Si cette reconquête étonnante mais illusoire n’était pas sans rappeler les fameux cent-jours de Napoléon, le résultat du scrutin de cette “Primaire de la Droite et du Centre”, c’est en quelque sorte Waterloo et l’exil à Saint-Hélène...

L
es électeurs ont écarté leur champion d’un nouveau challenge présidentiel, et ce, sans ambiguïté ni ménagement.

Il faut croire que l’Histoire repasse rarement les plats. La chance qui a souri à Nicolas Sarkozy ce soir de mai 2007, où vainqueur de l’élection présidentielle il exultait sa joie, s’exclamant “Je ne vous trahirai pas”, “Je ne vous décevrai pas”, cette chance s’est obstinément refusée à lui pour une nouvelle aventure.


Derrière la meute des ennemis jurés, ni plus ni moins nombreux depuis 10 ans, l’ancien chef de l’Etat n’a pas vu celles et ceux qui se sont sentis trompés et trahis durant ce quinquennat trépidant mais désordonné, plein de fougue mais sans vraie ligne directrice, marqué par tant de renoncements, de contradictions et tant d’erreurs grossières de communication ! Il n’a pas vu que s’est imposée peu à peu dans beaucoup d’esprits, l’idée que chez lui, l’énergie et la volonté masquaient un manque quasi total de convictions.


Certes il y eut cette haine irrépressible, inextinguible, épidermique, inexplicable tant elle est irrationnelle, qui l’a poursuivi sans répit durant tout son quinquennat, et ce quoiqu’il fasse ou qu’il dise. Cette haine qui s’est accrochée à ses basques dès le début du marathon un peu fou qu'il avait entrepris pour tenter de revenir au premier plan.

Tout y passa, des insultes les plus viles aux accusations les plus extravagantes pour tenter de le discréditer. Le “Hollande bashing” contre lequel quelques chochottes enfarinées de la Gauche bobo font mine de s’émouvoir et qui fait gémir les Saintes-Nitouches “people” de la Socialie, n’est rien en comparaison de celui qui s’abattit sans discontinuer depuis de nombreuses années sur Sarko.
Il perdura jusqu’à ces derniers temps, où nombre de revanchards hystériques se déclaraient prêts à tout ou presque pour barrer la route au candidat républicain, y compris piétiner leur prétendu engagement idéologique, en allant voter pour le quelque peu rassis Juppé. Six-cent mille personnes ont cru bon d’accomplir cet obscur dessein, à ce qu’il paraît.


Le parti des Republicains peut dire merci à ces idiots utiles qui ont un peu renfloué ses caisses en même temps qu’ils ont précipité ce qui était devenu inéluctable !

Même si Sarkozy était encore capable de déployer une énergie admirable, même s’il émanait toujours de sa personne un charisme puissant, les ressorts étaient usés. La ligne stratégique était devenue franchement erratique, tellement difficile à comprendre que plus grand monde ne parvenait à la suivre.


Pourtant, les événements ne se sont pas vraiment déroulés comme prévu. La Gauche vindicative et le Centre équivoque ont eu la peau de Sarko mais, faisant involontairement d’une pierre deux coups, ils ont blackboulé par la même occasion celui qu’ils avaient désigné comme l’exécuteur de leurs basses oeuvres !

Mu par une intuition contagieuse et déjouant tous les pronostics, le “peuple de droite” a en effet anticipé la chute annoncée de son héros et s’est reporté massivement sur François Fillon, prenant à contrepied la stratégie machiavélique, un peu cousue de fil blanc. Résultat : Sarkozy entraîne dans sa chute Alain Juppé qui se croyait déjà en haut de l'affiche, et toute sa suite de courtisans, parfois de la dernière heure, alléchés par les juteuses prébendes qui se profilaient à l’horizon.


Mauvais perdant, mal conseillé, et obstiné jusqu’à l’absurde, Juppé “a décidé de continuer le combat” au nom du “rassemblement”. Largement distancé, il avait une belle occasion de faire cesser au contraire les hostilités inutiles, et de s’associer à cette nouvelle dynamique porteuse d’espoir pour son parti. Il préfère courir le risque d’ouvrir de nouvelles divisions dans lesquelles pourront s’engouffrer les adversaires de tout poil. Il prend également celui d’une défaite cuisante en deux temps, qui ne serait en définitive que justice face à tant de mesquinerie.


Quant à Nicolas, il s’est esquivé sur la pointe des pieds, rendant les armes avec panache et humilité, au terme d’une brève et touchante allocution. Ce dernier combat fut sans doute celui de trop, mais il lui donne l’occasion de prouver que derrière des manières parfois histrioniques, il y a un coeur sensible et une âme noble. Respect lui soit rendu...