
Partant du principe que le corps humain n'est qu'une machine, même si elle est très complexe, il se dit convaincu qu'il sera possible sous peu d'en connaître suffisamment le fonctionnement pour pouvoir l'entretenir et le rénover quasi indéfiniment. Pour stimuler les recherches dans cette direction, et en hommage à Mathusalem, il a même créé une fondation qui récompense chaque année par le Methuselah Mouse Prize, les meilleurs travaux... sur les souris !
Ces prévisions sont sans doute un tantinet excessives ou provocatrices, mais elles sont le révélateur d'un courant de pensée résolument optimiste, qui voit l'avenir en rose.
D'un autre côté, les avancées dans la connaissance du développement cellulaire notamment des lignées souches, laisse envisager dans un futur pas trop éloigné, par des techniques de différenciation dirigée et de culture, la possibilité de régénérer en partie ou même entièrement des organes: muscles, téguments, os, coeur, vaisseaux...
En 1991, il avait prédit l'année exacte où un ordinateur battrait un champion d'échec à son propre jeu (l'ordinateur Deep Blue capable d'effectuer 3. 108 d'opérations à la seconde, eut raison de Gary Kasparov en 1997). Aujourd'hui, il prévoit qu'en 2040 la partie « non biologique » de l'intelligence humaine sera un milliard de fois plus puissante que celle émanant de nos cerveaux. Les ordinateurs pourront faire alors selon lui 1035 opérations par seconde, tandis qu'il évalue les capacités de l'ensemble des cerveaux humains de la planète autour de 1026 opérations par seconde.
Il imagine que doté d'aussi fantastiques performances, l'homme sera capable non seulement d'abolir le vieillissement, mais de faire communiquer directement les cerveaux entre eux. Il aura également conçu des machines douées de conscience avec lesquelles il travaillera en symbiose parfaite.
Fasciné par le développement de l'Intelligence Artificielle, j'ai moi-même bien modestement travaillé sur les systèmes experts en médecine et certains langages ayant pour but la modélisation de raisonnements logiques (LISP). J'ai pu constater que ces systèmes réalisaient parfois des prouesses étonnantes, supérieures à celles d'étudiants voire de praticiens chevronnés sur des problèmes très ponctuels. En aucun cas je n'ai vu toutefois qu'ils soient en mesure d'apporter autre chose qu'une aide limitée, guère supérieure à celle que fournit une calculette à un comptable. D'ailleurs l'enthousiasme des chercheurs est vite retombé et plus de vingt ans après les premières réalisations, le champ d'application de ces logiciels reste très limité en pratique.

Il y aurait mille exemples d'améliorations spectaculaires dans le domaine médical. Pour autant, même si l'espérance de vie des populations s'allonge, on n'a encore pas vu beaucoup de gens dépasser en durée de vie, le siècle. Pour l'heure, Jeanne Calment et ses 122 printemps constituent un horizon exceptionnel et indépassable. Et paradoxalement, la médecine semble actuellement plus préoccupée de savoir comment abréger la vie que de la maintenir indéfiniment. Les revendications portant sur l'euthanasie et les soins palliatifs sont omniprésentes dans les médias. Même dans les services de Réanimation on s'interroge de plus en plus souvent sur la nécessité de réanimer...
Quand bien même maitriserions nous totalement l'univers et notre destinée que nous nous retrouverions face au même dilemme, quant à la signification de notre existence.
La science a fait des progrès gigantesques et en fera sans doute encore, mais comme le rappelait Jean Rostand en 1958, l'Homme lui-même n'a pas changé depuis 100.000 ans et ne changera sans doute plus. Il lui importe d'inscrire sa science dans un minimum de sérénité. L'essentiel reste invisible pour les yeux, aussi performants et clairvoyants soient-ils...
