23 octobre 2007

Aux fanatiques de la Vertu


En ces temps de déraison, où le désir morbide de repentance côtoie la mauvaise foi et le sectarisme, où certaines commémorations pathétiques éclipsent la mémoire de tant d’injustices, et où la récupération politique du passé devient le sport favori de gnomes ivres de surenchères verbales, mais incapables d’exister par eux-mêmes ; en ces temps médiocres et arides, qu’il soit permis d’évoquer le souvenir d’un doux poète, qui mourut innocent sous la hache féroce de ceux qui prétendaient fonder la plus belle et la plus vertueuse des républiques.
Celui qui n’avait d’autre passion que l’amour de la Beauté, et qui voulait donner aux idées neuves de Bonheur et de Liberté, l’écrin de la perfection antique, périt d’avoir osé dire leurs vérités aux zélateurs bornés et fanatiques de la Révolution.Du fond de l’infâme cachot où il fut jeté sans raison, et dont il ne sortit que pour monter sur l’échafaud, il eut la force de chanter dans des ïambes sublimes le drame indicible qui à travers lui, dévastait un pays pourtant si orgueilleux d’avoir avec emphase déclaré au Monde, les « Droits de l’Homme et du Citoyen».

André Chénier, que les tyrans sans-culotte décrivirent comme un « prosateur stérile » et que Victor Hugo considéra lui, comme un génie « romantique parmi les classiques » mourut sacrifié au nom de trop belles idées, trop bien appliquées.
Ses vers désespérés rappellent aujourd’hui la nécessité d’être humble, surtout quand on se targue de manier les grands principes. Si d’aucuns refusent de lire la lettre de Guy Môquet, pourquoi ne retourneraient-ils pas à la source de cette poésie si poignante, qu’il faudrait ne jamais oublier ?
Vienne, vienne la mort! Que la mort me délivre!
Ainsi donc à mon cœur abattu
Cède aux poids de ses maux? Non, non. Puisse-je vivre!
Ma vie importe à la vertu.
Car l'honnête homme enfin, victime de l'outrage,
Dans les cachots, près du cercueil,
Relève plus altier son front et son langage,
Brillants d'un généreux orgueil.
S'il est écrit aux cieux que jamais une épée
N'étincellera dans mes mains;
Dans l'encre et l'amertume une autre arme trempée
Peut encor servir les humains.
Justice. Vérité, si ma main, si ma bouche,
Si mes pensers les plus secrets
Ne froncèrent jamais votre sourcil farouche,
Et si les infâmes progrès,
Si la risée atroce, ou, plus atroce injure,
L'encens de hideux scélérats
Ont pénétré vos cœurs d'une longue blessure;
Sauvez-moi. Conservez un bras
Qui lance votre foudre, un amant qui vous venge.
Mourir sans vider mon carquois
Sans percer, sans fouler, sans pétrir dans leur fange
Ces bourreaux barbouilleurs de lois!
Ces vers cadavéreux de la France asservie,
Egorgée! O mon cher trésor,
O ma plume! Fiel, bile, horreur. Dieux de ma vie!
Par vous seul je respire encor…

22 octobre 2007

Contes de la folie ordinaire


En médecine, il est difficile de garantir les résultats des traitements qu’on entreprend. En psychiatrie c’est encore plus difficile.
Le principe de précaution - et le simple bon sens - obligent donc à rester modeste et à savoir remettre en cause à tout moment sa démarche diagnostique et thérapeutique.

Ce n’est pourtant pas ce qu’on a pu observer au cours de deux affaires récentes, très médiatisées.

Il y a quelque mois, un délinquant sexuel multi-récidiviste était libéré de prison, emportant avec lui une ordonnance de Viagra délivrée par un médecin du Centre Pénitentiaire. Coïncidence fâcheuse, quelques jours après sa sortie, l’individu commettait une nouvelle agression sur un enfant et retournait illico en prison.
De cette incroyable histoire, que tira-t-on comme conséquence ? Qu’il fallait procéder d’urgence à la création d’hôpitaux fermés !
Mais que pourraient apporter de telles structures quand on mesure en la circonstance, l’irresponsabilité dont fit preuve le corps médical ? Non seulement l’initiative fut immédiatement critiquée, mais elle s’accompagna d’un flot de mauvaise foi assez stupéfiante.
Le Dr Sylvie Ballanger praticien hospitalier à la Prison de la Santé, interrogée par le Figaro (10/08/07) s’exclama sans rire qu’une telle proposition reviendrait à « recréer le bagne de Cayenne » et que cela « n’empêcherait nullement les pédophiles d’agir ».
Dans le même temps elle refusa de reconnaître la moindre responsabilité au médecin prescripteur qui selon elle avait agi « sans avoir accès au contenu de la fiche pénale du patient et qui donc n’était pas au courant de la dangerosité du détenu ». Vraiment respectueux du secret le toubib…
Allant encore plus loin, elle affirma benoîtement que le Viagra ne créait « pas de pulsions, ni de désir sexuel », et simplement « qu’il favorisait l’acte sexuel », « sans en être à l’origine ».
Et elle termina son argumentation sur cette perle inouïe : « il n’y a d’ailleurs pas de contre-indication pour les pédophiles… »

Un tel niveau d’inconséquence, de légèreté et de négationnisme fait frémir… On pense à l’histoire de la dame qui pour sécher le poil de son chat, passa carrément l’animal au four à micro-ondes et qui au vu du résultat plutôt « cuisant », poursuivit le fabricant au motif qu’il n’avait pas averti du danger d’une telle utilisation de l’appareil !

Il y a quelques semaines, à Lormont, près de Bordeaux, une autre affaire défraya la chronique.
Un déséquilibré mental en permission tuait sa mère à l’arme blanche avant de la découper en morceaux qu’il entreprit de jeter du haut de l’immeuble où la malheureuse habitait.

Encore une fois, aucun regret, aucun questionnement de la part des gens qui avaient remis en liberté la veille un tel individu. Les médecins se bornèrent à dire que son état était pour eux « stabilisé », qu'il ne manifestait aucune agressivité, et se dédouanèrent en rappelant que la psychiatrie « n’était pas une science exacte »... Merci pour l’information, on est en effet bien avancé !
Il faut mentionner que le forcené avait trucidé quelques années plus tôt un co-détenu dans la prison où il séjournait après avoir agressé des policiers et qu'il avait à l’époque bénéficié d’un non lieu « psychiatrique ».

Il faudrait tout de même savoir. Si l’on affirme de quelqu’un qu’il est dans un état stabilisé, c’est donc qu’il est au moins un peu responsable de ses actes, sinon, ce sont les médecins qui portent eux le poids d'erreurs fatales, et qui devraient pour le moins se poser des questions.
On peut tout de même difficilement se satisfaire en guise de consolation, du propos lénifiant d’un des médecins : "seulement 5% des homicides sont causés par des malades mentaux"…

Est-on d'ailleurs si sûr que les 95% restants sont des gens parfaitement normaux ? Et qu'est-ce donc en fin de compte que la "normalité" dans de tels cas de figures ?

12 octobre 2007

Ce grand cadavre à la renverse


Bernard-Henri Lévy sait comme personne se mettre en scène, il possède un art consommé de faire mousser dans les médias le moindre de ses aphorismes et la plus insignifiante de ses paroles.
Et comment l'attaquer ? Ce général chamarré de la « nouvelle » philosophie pompière a trouvé une position inexpugnable. Il se situe si loin de toute logique, par delà même le ridicule, dans une bulle exquise de morale séraphique... De ces hauteurs éthérées, avec son éléphantesque quincaillerie dialectique, Il peut dès lors enfoncer hardiment les portes grandes ouvertes du conformisme, et s'attaquer aux plus plates problématiques intellectuelles tout en donnant l'impression d'être Hannibal gravissant les Alpes !
Les salons dorés et les plateaux-télé rutilants, au sein desquels il donne à voir son altier profil, sont autant de champs de batailles, qu'il sillonne en tous sens avec une admirable opiniâtreté. Il y mène héroïquement son combat « progressiste », non sans risque – mais assumé – de prendre ici ou là une énorme tarte à la crème en travers de la gueule... Qu'importe, armé de son inépuisable moulin à paroles, il déclame, il exhorte, il fustige, il persifle. Bref, il n'a pas son pareil pour faire reluire tout ce qui est creux, et pour allumer dans les cieux bas de la pensée franchouillarde, de brillantes mais fugaces étincelles...
Aujourd'hui il signe avec pompe et circonstance, le constat de décès de la Gauche. Franchement, ce n'est pas vraiment un scoop (il recourt à une citation de Sartre datant des années 60...). Depuis le temps qu'elle se ratatinait, on pouvait surtout se demander pourquoi elle n'était pas encore enterrée !
Qu'on ne s'y trompe pas pourtant, selon lui ce « grand cadavre » bouge encore. Et, Pater familias aidant, il y reste envers et contre tout accroché par toutes ses fibres. Ne serait-ce que par fidélité à son père, le digne fils a décidé qu'il serait toujours sur ce bord de la rive. Elle est putride, elle est déviante, elle ne mène à rien de concret ou bien à des horreurs, mais tant pis il continuera de suivre cette voie.
Se lavant les mains des innombrables dérives totalitaires, chauvines, anti-sémites, anti-américaines, anti-libérales, ou bourgeoises, il se raccroche à quelques vieilles lunes qui seraient paraît-il consubstantielles à la gauche : anti-colonialisme, anti-fascisme, dreyfusardisme, cosmopolitisme... Et pour finir, Mai 68 au travers duquel il continue de voir avec émerveillement « libertés nouvelles, modernité, allégresse; poésie ... »
Tout ça relève du badinage de collégien premier de la classe. C'est appliqué, bien intentionné, mais un tantinet niaiseux.
Même si l'homme est parfois touchant et même si tout n'est pas faux loin de là dans son bagout hétéroclite, il passe une fois encore à côté du vrai sujet et ici, des vrais et terrifiants cadavres. Ceux avant tout des malheureux que la Gauche a assassinés par millions au seul motif qu'ils n'étaient pas du bon côté. Mais aussi les momies infâmes de leurs bourreaux implacables, si longtemps encensés. Et celles enfin des idéologues aux mains sales par qui tout le mal est venu.
En la matière il n'est pas nécessaire de savoir si l'on est de droite ou de gauche, pour préférer toujours et de très loin Voltaire à Rousseau, Locke à Saint-Just, Hume à Hegel, Tocqueville à Marx, et Aron et Camus à Sartre.
Et pour avoir ces derniers temps, la nausée devant les rites compassionnels autour de la dépouille pseudo-christique de Che Guevara, laborieusement exhumée de la fange dans laquelle ce faux héros était tombé par sa propre faute...

09 octobre 2007

Les nouveaux calotins

La médiocrité du débat politique en France donne parfois des hauts-le-coeur. Surtout quand l'argumentation s'appuie sur les artifices usés d'une morale sulpicienne à deux balles, rancie dans le marigot gluant des truismes républicains les plus surannés. Ça pue la tartuferie, c'est écoeurant.
Le pataquès fait au sujet des tests ADN pour prouver les liens familiaux d'étrangers candidats au regroupement familial est révélateur de cet état d'esprit boursouflé et insane. On pourrait multiplier les citations grandiloquentes, mais les propos de Mouloud Aounit, président du MRAP donnent à eux seuls la démesure de cette tempête dans un verre d'eau bénite. Il s'agit selon cette belle âme d'une régression, d'une « une tache qui souille la page de l'histoire des droits et des libertés fondamentales" !
Ben voyons ! Rien que ça. Nous sommes dans un monde si parfait, si vertueux, si généreux, qu'on se demande en effet comment un gouvernement peut être assez tordu pour inventer de tels stratagèmes xénophobes.
Trop contente de trouver une occasion de faire prendre l'air à ses étendards moisis, la vieille garde sonne la charge. Tout le ban et l'arrière ban des vicaires et autres zélateurs de l'orthodoxie intellectuelle alter-trotsko-bobo accourt comme une nuée de mouches attirées par un morceau de viande. Regardez la "pétition d'ouverture" lancée selon le rite établi, mercredi dernier par Charlie Hebdo et SOS-Racisme : ils sont tous là, en rangs d'oignons, confits dans leur jus bien pensant. "Touche pas à mon ADN !" bêlent-ils à l'unisson. Pour eux assurément, nul besoin de test génétique pour se regrouper. L'instinct pétitionnaire les réunit à coup sûr. A leur tête, le grand satrape Robert Badinter ne mâche pas ses mots : "Ce que nous faisons là est une erreur (...). Le retentissement que ce texte aura en Afrique et dans d'autres pays sera totalement négatif".
Et ce tribunal de la pensée unique, à l'instar de ses sinistres précurseurs de l'Inquisition ne plaisante pas. Chaque mot est pesé, analysé, interprété pour débusquer les vils relaps inspirés par Satan. Celui à qui échappe ne serait-ce qu'un « détail » signe son arrêt de mort. On se moque des raisons pratiques qu'il invoque pour justifier son action. Peu importe de savoir si l'immigration clandestine existe, nul besoin d'en mesurer les conséquences néfastes sur l'équilibre déjà fragile d'une société cacochyme, et pas davantage naturellement de nécessité d'évaluer rationnellement les moyens d'une éventuelle maîtrise de ce fléau des temps modernes. Le but est simple, quasi pavlovien dans sa nature réflexe : décréter ex cathedra que les gouvernants sont des hérétiques, que leur l'intention est nécessairement mauvaise, perverse, et rejeter en bloc leurs propositions, leur action et pour tout dire leur légitimité...

06 octobre 2007

Se souvenir de si belles nuits...


Ce coffret magnifique c'est en quelque sorte l'apothéose de David Gilmour. Comme un merveilleux et poignant chant du cygne après l'album un peu léthargique de l'année dernière. Avec un titre qui, s'il ne sonne pas tout à fait comme un adieu, exprime une indicible nostalgie : Remember That Night.

Mais si le souffle créatif paraît affaibli, l'artiste heureusement s'avère toujours capable de rassembler des forces incroyables pour livrer la quintessence de son génie musical. On trouve ici parmi nombre de trésors, quelques magistrales interprétations des grandes compositions du Floyd. Notamment une des plus sublimes versions qui soient de Shine On You Crazy Diamond. Avec David Crosby et Graham Nash en forme de choeur s'il vous plaît. Ou encore Comfortably Numb, introduit de manière superbe et déchirante par David Bowie.

Dans cette fameuse ambiance d'extase flottante, bleue, rouge et multicolore, traversée de lasers tranchants comme des rayons issus de diamants utopiques, l'esprit s'égare et s'imagine en bateau ivre, échappé au temps, mais sillonnant sereinement une ineffable mer de raison. Et après les réminiscences de Rimbaud, on songe aux mots de Baudelaire : « là tout n'est qu'ordre et beauté, luxe calme et volupté ».

Alors oubliées les réserves, au diable les réticences, profitons de ce fabuleux feu d'artifice en espérant qu'il soit suivi d'autres. Et prolongeons le plaisir avec le second DVD rempli de pépites inattendues (Astronomy Domine en studio par exemple...).

Un seul regret toutefois faute de disposer d'un standard haute définition : que le son ne soit pas en DTS qui serait nettement meilleur que le Dolby Digital...

25 septembre 2007

La Cour fait ses comptes


J'avoue éprouver un certain amusement lorsque je prends connaissance des rapports publiés par la Cour des Comptes.
Je m'interroge sur l'utilité des constats pertinents et souvent accusateurs, pondus avec une régularité métronomique par cette docte assemblée de magistrats chargés de contrôler la gestion de l'Etat.
Ils s'échinent à « épingler » méticuleusement les défaillances et les lacunes des institutions et ministères, mais tout cela s'apparente à un jeu puisque le système continue en réalité de tourner en rond, à l'abri de ce délicieux théâtre de l'illusion.
Cette année, dans son rapport sur la Sécurité Sociale, la vénérable assemblée a renoncé semble-t-il à s'attaquer aux causes du monstrueux déficit (près de 12 milliards d'euros pour 2007). Elle se borne à proposer d'augmenter les ressources en « élargissant l'assiette des prélèvements ». Jamais à cours d'idées en la matière, elle suggère de jeter cette fois dans la grande marmite sans fond, le produit de nouvelles taxations sur les stock-options, les indemnités de départ en pré-retraite ou de licenciements ! Ça ne mange pas de pain comme on dit, et c'est tellement politiquement correct. Plutôt que de revoir des pratiques douteuses ou de prôner davantage de responsabilité, pourquoi ne pas continuer de se servir sur la bête tant qu'elle a encore un peu de lard !
Elle trouve également que les médecins sont trop payés et ironise même sur des dépassements d'honoraires « assez loin du tact et de la mesure prescrits par le code de déontologie ». Faut-il y voir l'incapacité des Pouvoirs Publics et de l'Assurance Maladie à contrôler efficacement le bien fondé des pratiques, en dépit des kyrielles de fonctionnaires chargés de cette tâche ? Est-ce le constat de l'inanité de la monstrueuse nomenclature baptisée CCAM, mise en oeuvre à grands frais en 2005 et réputée neutre et irréprochable ? Ou bien de la faillite du très emphatique « Parcours de soins coordonné» inauguré bruyamment par le gouvernement en 2004, et qualifié aujourd'hui de « maquis tarifaire illisible par l'assuré » ?
Pareillement, les censeurs s'insurgent au sujet « de la mauvaise répartition des médecins entre spécialités et entre territoires ». Étrange constat dans un pays qui a installé le plus fabuleux dispositif de planification qu'on puisse imaginer ! La Cour des Comptes pointe non sans raison, l'imbécillité d'une telle bureaucratie et propose – hélas un peu tard – de « réduire le nombre d'instances chargées des questions de démographie médicale ». Mais paradoxalement elle en rajoute une couche en suggérant dans le même temps de contrôler de manière autoritaire les installations des jeunes praticiens et en allant jusqu'à recommander la mise en place de « mécanismes de pénalisation financière » afin de « mieux répartir l'offre sur le territoire et de préserver l'égal accès aux soins »...
Face enfin aux gâchis de la scandaleuse usine à gaz du Dossier Médical Personnel (DMP), elle reste étonnamment muette. Plus fort, elle propose même sur ce projet « un pilotage renforcé par la tutelle ».
Bref le manège administratif n'a pas fini de tourner, et les comptes de dériver..

18 septembre 2007

Poncifs et idées reçues


L'Académie de Médecine vient de rendre public un rapport sur les causes du cancer en France. Il démolit nombre d'idées reçues, qu'on entend bien souvent colportées depuis quelques années, sans vrai fondement scientifique.

D'abord, il affirme que la mortalité par cancer est en diminution (-13% entre 1968 et 2002). Il s'agit d'une bonne nouvelle en soi, qui contredit de manière cinglante les sombres prédictions des experts en sinistrose.

Ensuite il remet de l'ordre au sujet des facteurs favorisant la survenue de ces affections. Si près de la moitié des tumeurs restent d'étiologie incertaine, l'écrasante majorité des autres relèvent de causes plutôt triviales, impliquant tout simplement la responsabilité individuelle : tabagisme et alcoolisme avant tout, obésité, sédentarité, exposition excessive au soleil. Il évoque également le rôle de certains agents infectieux notamment viraux et celui de toxiques professionnels. Mais, au grand dam des sermonneurs, la pollution n'intervient que pour 0,5% des patients !

Cela rappelle la polémique survenue il y a quelques années au sujet de la mort des abeilles, que des ratiocineurs bornés mettaient arbitrairement sur le dos des fabricants de pesticides. Aujourd'hui on sait que ce phénomène est beaucoup plus complexe, et on s'oriente avant tout vers une cause virale !
Cela rappelle également les vitupérations du Professeur Belpomme, oncologue très médiatique, en 2004, à propos des méfaits de la pollution. Je reprends l'analyse que j'en avais faite pour la revue DH Magazine :

C’est désormais une mode que d’accuser la société moderne de tous les maux dont souffre l’Humanité. Du terrorisme à la canicule en passant par la mort anormale des abeilles, à l’évidence, il n’y a qu’un seul coupable, le Progrès !

La croisade virulente lancée par Philippe de Villiers en faveur des hyménoptères, n’est probablement pas exempte de calcul politique. Les jérémiades bruyantes mais confuses des altermondialistes non plus. Pour autant, il ne sont pas les seuls à excéder les limites de la bienséance. Le pamphlet tonitruant au sujet des « maladies créées par l’homme » du Professeur Belpomme s’inscrit dans l’outrance, tant il contient d’approximations, de contrevérités et d’incitations à la panique, indignes d’un homme de science.
Ce médecin oncologue ordonnateur nous dit-on du « Plan Cancer » promu par le président Chirac, place son propos dans le champ du catastrophisme le plus noir. Il n’annonce en effet rien moins que la fin de l’humanité à l’horizon 2100 et fait notamment de la pollution la cause première des maladies tumorales !
Curieusement, ces propos alarmistes sont en contradiction flagrante avec ceux d’un autre grand spécialiste le Pr Khayat, présenté lui, comme « Conseiller permanent de la Mission interministérielle pour la lutte contre le cancer ». Dans un récent ouvrage, ce dernier déclare en effet avec enthousiasme que : « Les progrès accomplis dans la recherche contre le cancer, les avancées thérapeutiques sont devenus tels qu'ils ouvrent devant nous, sans aucun doute permis, de merveilleux chemins vers l'espoir. »
Alors qui croire ? Doit-on faire confiance à des experts aussi antithétiques ?
Le tableau brossé par le Pr Khayat est peut-être un peu trop idyllique, mais à bien y regarder, les arguments dont use et abuse le Pr Belpomme apparaissent hautement discutables, voire partisans et idéologiquement très marqués.
Son constat est caricatural. Il affirme gravement que les maladies cancéreuses sont « en augmentation dans tous les pays industrialisés ». Sur 150.000 décès annuels par cancer en France, il en impute 30.000 au tabac, et « une très grande partie » des 120.000 restants à « à la dégradation de l’environnement » !
On chercherait vainement des preuves tangibles à ces énormes affirmations. L’augmentation du nombre de cancers depuis quelques décennies a quelques raisons simples : accroissement de la population, vieillissement progressif et mise en œuvre de moyens de dépistage précoce.
Mais derrière cette recrudescence apparente, se cache en réalité le déclin de certaines tumeurs, particulièrement celles dans la genèse desquelles l’alimentation est susceptible de jouer un rôle important : l’estomac et l’œsophage.
Au surplus, contrairement à ce qu’insinue le Professeur Belpomme, la mortalité a commencé de décroître dans beaucoup de pays, au premier rang desquels figurent les USA qui furent les premiers à mettre en œuvre de vraies mesures préventives. La baisse y est particulièrement sensible pour les cancers les plus fréquents : poumon, prostate, côlon, sein.

Si l’on s’attache enfin à analyser les causes des maladies tumorales malignes, on ne saurait mélanger les certitudes et les hypothèses. Chacun sait que les deux principaux toxiques pourvoyeurs en cause restent le tabac et l’alcool, dont la consommation n’a cessé de croître jusqu’à ces derniers mois. On peut également s’interroger avec inquiétude sur le nombre croissant de cas de mélanomes, provoqués par le bon vieux soleil dont les vacanciers sont si friands.
On invoque souvent les facteurs environnementaux dans le développement inquiétant de certaines tumeurs dont les lymphomes. Bien qu’il ne soit pas possible d’éluder la responsabilité potentielle des pesticides, cette hypothèse est loin d’être vérifiée à ce jour. En revanche les arguments sont nombreux pour accuser les facteurs génétiques et les agents infectieux. La liste est longue des microbes impliqués avec certitude dans les prolifération tumorales : papillomavirus, HTLV1, VIH, herpès, Epstein-Barr, hépatites B et C, helicobacter, campylobacter…
Enfin, la médecine elle-même n’est pas innocente. On estime entre 700 et 1000 par an, les cancers causés par les examens radiologiques ! Et nombre de médicaments se sont avérés cancérogènes, parmi les traitements hormonaux ou immunosuppresseurs. Or ces derniers sont de plus en plus souvent utilisés pour soigner les maladies tumorales elles-mêmes, les affections auto-immunes ou encore comme thérapeutiques « anti-rejet » des greffes d’organes.
La prudence doit être naturellement la règle avant de commercialiser de nouveaux produits chimiques. Il est excessif pourtant de prétendre que rien ne soit fait, même si notre pays a du retard par rapport à d’autres. En tout état de cause, accuser comme on le fait souvent avec beaucoup d’a priori, le système « ultra-libéral », ou la collusion de l’Etat et des grands trusts agrochimiques relève du délire obsessionnel et n’est assurément pas très constructif. Les pays ayant fait le choix d’économies planifiées par l’Etat furent par le passé montrés du doigt en raison de leur mépris total de l’environnement. En France, les principaux scandales récents touchant à la santé publique (sang contaminé, hormone de croissance, vache folle) n’ont pas permis de disculper les instances officielles soi-disant indépendantes…

En matière de solution, sauf à refaire la révolution anti-capitaliste, les propositions sont maigres. Le professeur Belpomme, affirme que : « l’agriculture bio doit être soutenue économiquement ». En dehors du charme passéiste des traditions, il n’existe pourtant guère d’arguments plaidant pour la supériorité du « bio », si tant est qu’on puisse lui donner une définition claire. Au contraire, on connaît depuis longtemps le rôle cancérogène de nombreux produits naturels. Parmi les plus connus figurent l’aflatoxine et la patuline, sécrétées par des moisissures telles que les pénicillium et aspergillus contaminant régulièrement les pommes et autres fruits et légumes.
Il y aurait bien une solution pour éviter autant que faire se peut d’employer des pesticides et insecticides, ce serait de recourir aux OGM, mais je crains que pour beaucoup de gens dans notre pays, le remède n’apparaisse pire que le mal ! Pourtant si le choix leur était laissé, il y a fort à parier que les abeilles ne se tromperaient pas…

14 septembre 2007

De la sottise, érigée en art médiatique


L'actualité, par médias interposés, sert régulièrement son lot d'imbéciles magnifiques à l'admiration versatile des foules. Ces derniers temps trois sont sortis brillamment des rangs :
Honneur aux dames, une place de choix revient à Fanny Ardant. Comparer l'actrice à un grand cheval n'est pas très original mais sied bien à son tempérament. Sans aller jusqu'à insinuer qu'elle en a quelque peu le physique, c'est peu de dire qu'elle rue dans les brancards et qu'elle a une certaine propension à hennir à tous crins. Elle vient de se faire remarquer en qualifiant de « héros » le terroriste Renato Curcio, fondateur en Italie des affreuses Brigades Rouges. Peu avare de louanges en la circonstance, elle a même jugé cet épisode sanglant, « captivant et passionnant » ! On atteint là sans nul doute un sommet exquis dans le crétinisme bourgeois. On retrouve en effet, portée au paroxysme, la tendance perverse à encenser les fausses valeurs, et à débiter à la tonne en toute inconséquence, les lieux communs les plus ronflants, qu'on ne peut que regretter sitôt dits.
José Bové continue lui tranquillement en toute impunité, son petit bonhomme de chemin dévastateur, le long des champs d'OGM. Comme les anciens barbares il détruit tout ce qu'il ne connaît pas. Derrière lui l'herbe ne doit pas repousser. Simple principe de précaution... Curieusement les Pouvoirs Publics paraissent bien indulgents vis à vis de ses provocations infantiles. Faiblesse, lâcheté, ou bien conviction qu'il finira par lasser l'opinion publique ?
Last but not least, Dominique de Villepin qui après son Waterloo politique, trouve opportun de sortir un n-ième ouvrage à la gloire de Napoléon.
On pouvait l'entendre il y a quelques jours sur France-Inter, dans son style inimitable fait de clinquantes ampoules et d'onctueuses circonlocutions, comparer à mots couverts Nicolas Sarkozy au Bourgeois Gentilhomme. Il a du culot le bougre. Lui à qui le rôle irait si bien avec ses manières empanachées d'aristocrate d'opérette, attaché à la forme bien plus qu'au fond des choses !
Lui qui du temps qu'il se croyait un vrai destin national, bombait élégamment le torse sous l'oeil complice des photographes, sur la plage de la Baule. Lui qui n'aime rien tant que parler devant les caméras, il prétend aujourd'hui que la communication, « ça isole », et « qu'on s'appartient mieux quand on se promène seul » comme Jean-Jacques, « qu'on lit ou qu'on travaille »... Il oublie le contentement de soi évident qui s'exprimait sur son visage de muscadin lorsqu'il déclamait ses discours racoleurs à l'ONU.
Mais les revers de fortune obligent parfois à des révisions douloureuses et il se console en occultant les rêves du passé. A croire l'ancien premier ministre, en acceptant cette fonction il n'avait qu'un souci en tête : "servir le pays et non ses intérêts". Il n'y avait "aucune rivalité entre lui et Nicolas Sarkozy", et "pas de place pour une ambition présidentielle". Sans blague...
*****
Pour finir sur une réflexion plus collective, au sujet de la réapparition de Ben Laden, il y aurait beaucoup à dire pour qualifier les réactions de la Presse. Tout d'abord sur l'importance démesurée donnée à ce non événement. Le clip horrible mettant en scène cette sinistre arsouille a fait la une des journaux et de leur sites internet comme s'il s'agissait d'une déclaration majeure d'un chef d'Etat. Il est resté plusieurs jours par exemple en page d'accueil du Figaro, bien qu'il n'y ait rien de neuf dans cette litanie insoutenable d'abjections et de vilenies. Rien qu'on ne sache déjà hormis la couleur de la barbe...
Plus grave encore, on entend de ci de là les commentateurs proclamer qu'il s'agit de la preuve de la vitalité d'Al Qaeda, et de l'échec retentissant de la stratégie de George Bush. Air connu mais plutôt lassant. A croire que ces gens souhaitent la pérennité du terrorisme...
Tout de même. Personne ne peut ignorer qu'aucun attentat de s'est reproduit en Amérique depuis 2001 en dépit des menaces incessantes. Chacun a pu constater en Europe même, les progrès enregistrés dans cette lutte depuis quelques années. Grâce à une bonne collaboration internationale et une vigilance de tous les instants, plusieurs tentatives ont été déjouées, dont une très récemment en Allemagne. La menace certes est toujours présente, mais elle semble mieux contenue.
S'agissant enfin de l'Irak, pour la première fois on parle d'amélioration de la situation. La bataille est loin d'être gagnée mais elle n'est sûrement pas perdue et il appartient plus que jamais aux nations libres d'aider ce pays à conquérir durablement la paix et à s'inscrire dans une vraie logique de progrès. On a trop tendance à occulter le fait que plusieurs milliers de jeunes gens ont donné leur vie dans ce but.

05 septembre 2007

Fine and Mellow

Septembre est là avec ses parfums nostalgiques. Soleil incliné, douceur des jours mais moroses perspectives... Le temps idéal pour le Blues.

Avec un DVD consacré à Billie Holiday je me laisse aller à ce tendre et doux désespoir. (Yet now despair is mild disait Shelley...) Sorti à tout petit prix chez Salt Peanuts, il permet de retrouver Lady Day au travers de quelques sessions envoûtantes. De 1950 à 1959, l'année même de sa disparition, le charme opère pleinement derrière ces images en noir et blanc, incertaines mais si évocatrices. Comment résister à cette voix fragile mais indicible qui dit de manière bouleversante la grandeur tragique de l'existence ? Cette manière poignante de transcender humblement le drame du quotidien : If you treat me right, baby I'll stay home everyday If you treat me right baby I'll stay home night and day...

Comment rester insensible à ces mélodies simples qui glissent comme des larmes chaudes, en apaisant pour le coeur et l'esprit, les peines et l'anxiété ? Et comment ne pas fondre devant ces regards empreints d'une grâce aérienne, qui vous interrogent au delà du temps qui s'écoule.

Pas un commentaire superflu, pas une coupure ne viennent interrompre ces instants ensorcelants. L'émotion est là, à l'état pur.

On retrouve notamment cette session magique, rassemblant autour de la chanteuse une pléiade d'artistes et d'amis particulièrement inspirés et attentionnés. Roy Eldridge, Vic Dickenson, Ben Webster, Gerry Mulligan, Coleman Hawkins et naturellement Lester Young. D'elle et de lui, tous deux si torturés par la vie, tous deux si proches et si loin en même temps, Alain Gerber a dit des mots que je ne peux m'empêcher de répéter ici tant ils sont magnifiques et justes : « trop émerveillés d’être ensemble pour ne pas rester des amants chastes, qui n’enlacent que leurs musiques. Qui se moquent des fêlures dans les ciels de faïence . Et qui font des miracles comme on fait des chansons. »

Pour ceux qui voudraient retrouver un peu de la substance de ce jazz intense et languide, je conseille l'écoute d'un disque de Madeleine Peyroux (Careless Love). Cette jeune Américaine a des inflexions qui ne sont pas sans rappeler celles de la Reine dont elle s'inspire manifestement. Très bien accompagnée, elle parvient à faire beaucoup mieux qu'une imitation. C'est donc vrai, le Blues ne meurt jamais.

30 août 2007

Riches heures en Saintonge


On laisse toujours un peu de son âme dans les lieux qu'on visite, en voyage. Lorsque ce dernier s'achève, c'est une sorte d'amertume qui nous étreint. Le sentiment de devoir, pour revenir à la réalité, arracher aux endroits fraîchement quittés, cette partie de soi qui semble vouloir y rester cramponnée.
Il y a quelques jours à peine je me promenais au coeur de la Saintonge. Cette région me séduit à chacun de mes passages et c'est à grand peine que je dois m'en extraire. J'aime son calme et sa tranquillité. Grossièrement traversée par un axe qui va de Saint-Jean d'Angély à Talmont sur la Gironde, elle a son coeur à Saintes. Cette dernière, lovée dans les méandres de la Charente, semble vivre au rythme tranquille des eaux du fleuve, sous le regard impassible de Bernard Palissy, l'enfant du pays qui ne ménagea pas sa peine pour trouver le secret de la faïence émaillée.


En longeant la rive, le soleil estival donne aux amples perspectives un éclat doré délicat, qui rejaillit de la belle pierre blanche des bâtiments. Dans les rues, les maisons cossues et bien proportionnées abritent de jolis magasins et les principaux services publics sont également richement logés. Sur les rives du fleuve de vastes jardins fleuris invitent au repos et à la réflexion. On trouve dans cette cité la trace de son histoire antique : l'Arc dédié à Tibère et Germanicus, ou bien encore les restes du grand amphithéâtre romain. De ce dernier on aperçoit la flèche de l'église Sainte-Eutrope. Elle rappelle la ferveur religieuse de la ville, qui offrit longtemps l'hospitalité aux pèlerins de St-Jacques de Compostelle. Aujourd'hui, les édifices d'inspiration plutôt romane, sont les centres de gravité des principaux quartiers : outre Saint-Eutrope, il y a la cathédrale Saint-Pierre inachevée quoique très retouchée depuis le Moyen-Age, et surtout sur la rive droite, la magnifique Abbaye aux Dames dont la longue façade s'allonge en majesté jusqu'au noble et austère clocher de pierre, bordée par une claire esplanade juste ombragée par quelques grands arbres.
Dans la ville en fin d'après-midi règne une douce chaleur. On dîne dehors sous les mûriers, d'une salade agrémentée de fois gras et de gésiers. On savoure alors in petto les agréments de cette région privilégiée. A l'est les vignobles de Cognac. A l'ouest l'air de la mer, le réseau inextricable des parcs à huîtres, et les vestiges alanguis des lignes de défense contre les Anglais. Brouage notamment, village insolite aux rues pavées, ivres de soleil. Un axe principal traverse la cité comme une arête et se distribue en impasses bornées par les remparts « à la Vauban ». Mais ils ne veillent plus que sur des salines herbeuses à perte de vue.
Au sud c'est l'estuaire de la Gironde. J'aime me rendre à Talmont, ce petit village juché sur la falaise crayeuse, tout entier symbolisé par son adorable église, Sainte-Radegonde.
Au dessus du flux boueux des eaux, au bout de fragiles échafaudages en bois, les carrelets nostalgiques étendent leurs grandes nasses arachnéennes. Talmont est devenue hélas un haut lieu touristique. Les petites ruelles bordées de roses trémières ont vu leurs maisons peu à peu rénovées. Elles sont rutilantes mais de plus en plus livrées au commerce des babioles et des souvenirs. Je crains que ce genre de réhabilitation, pourtant bien intentionnée, ne fasse tôt ou tard, fuir l'esprit des lieux. Mais comment préserver l'existence de tels sites sans en stériliser l'âme ?

24 août 2007

Expectative


Ambiance un peu vide en France. Le premier ministre et le président se partagent les cérémonies désormais incontournables du rite compassionnel d'Etat. L'un fait des ronds en hélicoptère autour des bananeraies dévastées de la Martinique, après le passage du cyclone Dean. Il se déleste au passage de quelques vagues promesses d'indemnisation. L'autre assiste solennellement aux funérailles d'un malheureux marin-pêcheur en insistant sur sa détermination à punir les responsables de ce tragique accident. Il ne laisse toutefois guère d'espoir de réussite...
Pendant ce temps quels sont les évènements qui font l'actualité ?
Grosse émotion à propos d'une photo parue dans Paris-Match montrant le même Président de la République en vacances, à qui des journalistes bien intentionnés auraient « gommé » quelques replis de chair superflue sur les flancs. Preuve sans doute irréfutable de l'influence du chef de l'état sur la Presse !
Remue-ménage autour d'une invraisemblable prescription de Viagra faite à un délinquant sexuel pédophile récidiviste juste avant sa sortie de prison, comme s'il s'était agi de faciliter le nouveau passage à l'acte dont il n'a pas manqué de se rendre coupable... Ce fait divers relance la polémique du suivi médical des prisonniers et suscite dans l'urgence, entre autres propositions saugrenues, celle d'un « hôpital fermé » dont on ne voit pas bien les tenants et les aboutissants en la circonstance.
Controverse enfin au sujet d'une promesse électorale faite par Nicolas Sarkozy, consistant à déduire fiscalement une partie des intérêts des prêts réalisés pour acquérir une résidence principale (rien de bien original en soi, puisque tout cela existait jusqu'en 1995, date à laquelle le duo Chirac-Juppé crut bon de l'abolir). Le Conseil Constitutionnel sollicité par le Parti Socialiste – qui n'a décidément pas grand chose à proposer – a rejeté une partie du dispositif, applicable aux emprunts souscrits avant le 6 mai. Du coup le ministre planche sur une solution de contournement qui s'apparentera probablement à une nouvelle usine à gaz...
Sur le fond, pas grand changement. Avec la rentrée en fanfare du gouvernement, se profilent à nouveau le projet de « TVA sociale » et de plus en plus précisément les franchises médicales. La météo, quant à elle reste désespérément maussade. La France a connu paraît-il son été le plus froid depuis 50 ans ! A quelque chose malheur est bon : on oublie pour un temps le réchauffement climatique et le « plan canicule »....

14 août 2007

Nuages


Les nuages forment des îles
Posées sur des océans bleus,
Qui dansent au fond de mes yeux,
Au gré de cadences graciles.

Ils déchirent gaiement l’azur
De leurs contours fantomatiques,
Et sillonnent énigmatiques,
L’infini profond d’un pas sûr.

**
Trouée par des rais de lumière
Leur substance en se déchirant
Laisse se déployer en grand
De longs bras de jeune matière.

Et de ces doux enroulements,
Surgit la carte d’Italie,
Ou bien quand le sort les relie,
De bizarres animaux blancs

**
Je songe à des apothéoses
Au bout de ces trajets vainqueurs
Mais les perspectives grandioses
Ne sont rien pour ces voyageurs

Insoucieux du vent qui les mène
Ils glissent dans l’air, simplement
Comme une longue et douce haleine,
Défilant indéfiniment...

12 août 2007

L'été en pente douce


Avec l'été revient l'envie de s'évader. De se libérer des turpitudes d'un quotidien trop routinier. De se mettre en quelque sorte entre parenthèses, comme protégé des tracas de la vie. Même s'ils ne s'effacent pas totalement, même si la tragique certitude du destin reste la toile de fond plus ou moins lointaine de cet intervalle de temps suspendu, le sentiment de liberté prend le dessus et l'on se grise de la touffeur des jours et des brûlantes caresses du soleil. La nature entière s'abandonne avec délice à cette exquise langueur. Les fleurs sont comme ses pores aromatiques, par lesquelles elle semble prendre une douce et profonde respiration. Le feuillage des arbres en se balançant donne un rythme à cette tranquille pulsation.
En descendant vers le Sud, à la recherche de la chaleur et de la lumière, j'ai découvert Lodève, au pied des Grands Causses. Cette petite ville d'à peine 7000 habitants, située à une cinquantaine de kilomètres de Montpellier est arrosée par deux rivières paisibles : Lergue et Soulondre qui se rejoignent pour grossir un peu plus bas les eaux de l'Hérault. Les berges caillouteuses hébergent une humble floraison. Je ne reconnais pas tout mais je distingue des mauves sylvestres, des épilobes aux longues tiges velues, des salicaires, du fenouil et des carottes sauvages (avec une petite fleur noire au centre de l'ombellifère blanche).
Ce village est comme on dit « dans son jus ». Les ruelles étroites sont humbles, les maisons un peu décaties. Mais il est aussi de beaux corps de bâtiments aux façades cossues témoignant d'un passé plus prospère. L'ancien palais épiscopal, parfaitement rénové sert d'Hôtel de Ville. Il jouxte l'ancienne et noble cathédrale Saint-Fulcran.
Lodève est riche enfin d'un intéressant musée des Beaux-Arts. Il offre durant tout l'été une exposition de peintres impressionnistes et apparentés : la collection Oscar Ghez. Nul doute que cette région, encore préservée du tourisme, se développe prochainement.
Un peu au nord, le viaduc de Millau sera probablement une voie d'accès facile pour de futures invasions...
Nous avons dormi à l'Hôtel de la Paix. Ancien relais de poste en cours de rénovation, il donne sur la rivière. Nous avons apprécié tout particulièrement son adorable patio qui permet aux convives de dîner autour de la piscine, dans une ambiance quasi mauresque : fraîcheur de l'élément aquatique, tomettes et tons colorés, mélange d'ocre et de fuchsia. Découverte d'un vin de pays très dense et parfumé à base de Marselan, un cépage original réalisé à partir de Grenache et de Cabernet.
Le soir, l'esprit rassasié de sensations heureuses, j'en ai profité pour me replonger avec délectation dans l'oeuvre maîtresse de Lawrence Durrell, le Quatuor d'Alexandrie. Elle m'accompagnera durant plusieurs semaines. La grâce aérienne de son style, son univers très méditerranéen, syncrétisme lumineux de l'Orient et de l'Occident, en font un écrivain idéal pour une lecture estivale... Lawrence Durrell a passé les dernières années de sa vie non loin d'ici dans le Gard. Sauf erreur de ma part, il repose à Sommières...

08 août 2007

Raisons d'Etat


Un obscur agent des services secrets américains, est partagé entre les exigences de son pays et celles de sa famille. Ambiance de complot permanent, scènes en clair-obscur, dialogues à mots couverts, sentiments en demi-teintes et secrets d'alcôve. Robert de Niro crée une atmosphère. Mais hélas celle-ci s'étire interminablement, épuisant le spectateur en incessants flashbacks, et en intrigues confuses. Matt Damon est plus inexpressif que jamais et autour de lui, pas un personnage ne se détache de la triste grisaille dans laquelle se noue un drame un peu dérisoire. La reconstitution des années de plomb de la guerre froide est très soignée, mais il y a au moins une heure de trop dans cette satire pesante des méthodes de la CIA. D'autant qu'elle n'apprend pas grand chose sur le fonctionnement de ce type d'administration et compte beaucoup de clichés et d'invraisemblances.

03 août 2007

Profession cinéaste


Avec la disparition de Michelangelo Antonioni (1912-2007), c'est à mon sens un des trois piliers du cinéma italien de l'après-guerre qui s'écroule. Les deux autres, hélas déjà tombés, étaient Fellini (1920-1993) et Visconti (1906-1976). Tous trois, quasi contemporains, ont exploré des voies très différentes, mais complémentaires.
Visconti, a mis en scène la sublime et douloureuse décomposition de la beauté et le naufrage grandiose des hautes aspirations. Comme on tire le Sauternes capiteux et magnifique de la pourriture noble du raisin, il magnifia en esthète la déchéance tragique de la vie.
Fellini obsédé par la laideur et les excès du monde transcenda ces masques grimaçants pour en extraire la quintessence de l'être humain. Ses spectacles sardoniques et truculents n'étaient en quelque sorte que la transmutation comique du désespoir.
Quant à Antonioni, ce furent l'absurdité de l'existence, l'infini de la solitude, et le mystère de la disparition qu'il entreprit de décortiquer au moyen de sa caméra inquiète. On cite souvent la scène finale de Profession Reporter. Elle constitue une tentative originale pour exprimer l'inexprimable. Un sentiment d'étrangeté tranquille. La vie est là tout autour qui bruisse dans l'encadrement de la fenêtre. Mais elle s'inscrit dans une indicible absence. Celle que nous portons tous au fond de nous et à laquelle nous préférons le plus souvent ne pas penser...