Au Parti Socialiste, Martine Aubry est une doctrinaire parmi les doctrinaires. S'inspirant de son goût pour les superlatifs, on pourrait même dire qu'elle est une ultra-doctrinaire...
On connaît le ton péremptoire et la constance avec lesquels elle répète depuis des décennies tous les slogans socialistes, y compris les plus rétrogrades.
On se souvient, lorsqu'elle était au gouvernement, de la brutalité avec laquelle elle mit en oeuvre les fameuses 35 heures, décrétant ex cathedra que le travail était un gâteau dont il fallait réduire les parts de chacun pour en donner à tout le monde.
On se souvient plus récemment, comment, lors du débat sur les retraites, elle se crispa sur le système monolithique dit "par répartition", et sur le seuil intangible des 60 ans, qu'elle soutint mordicus contre le gouvernement, jusqu'à faire cause commune avec les revendications les plus obtuses des syndicats.
Quelle ne fut pas ma surprise en l'entendant récemment (10/11/2010 Matins de France Culture), de percevoir au détour de quelques phrases, comme une fissuration dans le bloc de certitudes qui la définit si bien.
Premier aveu extraordinaire dans sa bouche : "L'Etat ne peut pas tout faire."
Je me pince, mais non c'est bien ça car elle explique ensuite que le rôle de ce dernier est seulement de "fixer un cap", et que "la société civile, les chercheurs, le système éducatif, les entreprises doivent s'emparer du reste..."
Après ce premier boulet fumant lancé dans la forteresse de l'Etat-Providence, elle élargit la brèche, autour de la notion à la mode de "care", en définissant le nouveau concept "d'égalité réelle".
Là aussi, il s'agit d'une petite "révolution de pensée", selon ses propres mots : "l'Etat doit mettre des protections, mais il doit laisser la place à la liberté individuelle".
Je me repince, mais au cas où les auditeurs comme moi n'auraient pas bien compris, elle met les points sur les i, en annonçant la rupture avec les idées anciennes, qui voulaient "que quand on fait tout pareil pour tout le monde, on accroisse l'égalité"; qui considéraient en matière d'éducation "que mettre des enseignants tous les mêmes, et des programmes tous les mêmes, au même moment, c'est l'égalité".
Un peu plus tard, elle renchérit encore : "Le PS ne dit pas : on veut augmenter le budget de l'éducation". Non, il cherche plutôt "à faire en sorte que chacun des enfants puisse réussir, [en jouant] sur la formation des maitres, les rythmes scolaires..."
Elle termine, avec la cerise sur le gâteau, au sujet des retraites : "nous voulons un système qui met des protections mais qui laisse le choix aux gens..."
Curieusement dans la salle personne ne semble moufeter en entendant ces révélations édifiantes. Ni le maitre de séance Marc Voinchet, ni Alain-Gérard Slama, ni Alexandre Adler. C'est dire l'amortissement de la capacité à débattre qui caractérise aujourd'hui notre pays (pour être juste M. Colombani lui demanda si elle avait conscience qu'il lui faudrait tôt ou tard s'attaquer à la montagne de principes de l'Education Nationale)...
Evidemment, on ne saurait être dupe de mots. Surtout quand d'autres les contredisent quasi simultanément, ou bien que le comportement de celui qui les prononce les infirme quotidiennement. On se demande bien par exemple, pourquoi madame Aubry continue de stigmatiser avec autant de hargne toutes les actions du président de la république, si elle pense ce qu'elle dit.
Et pourquoi elle fustige aussi opiniâtrement le Libéralisme vers lequel on sent confusément que le Socialisme ne fait que tendre peu à peu, bon gré, mal gré.
Depuis le credo communiste des débuts, force est de constater en effet que c'est un long chemin d'abandons et de reculades. La Social Démocratie est une étape mitigée sur le parcours, mais en définitive il faudra bien un jour s'y résoudre : rien n'incarne mieux l'amour de la liberté et de l'égalité réelle, à savoir celle des chances et des droits, que le Libéralisme...
Depuis le credo communiste des débuts, force est de constater en effet que c'est un long chemin d'abandons et de reculades. La Social Démocratie est une étape mitigée sur le parcours, mais en définitive il faudra bien un jour s'y résoudre : rien n'incarne mieux l'amour de la liberté et de l'égalité réelle, à savoir celle des chances et des droits, que le Libéralisme...
Au sein de l'Internationale Socialiste, pour l'instant seul Tony Blair l'a compris et a eu le courage de l'affirmer sans complexe.
Hélas dans notre bon vieux PS hexagonal, il y a peu de chances qu'un changement véritable de mentalité se fasse jour avant longtemps. De l'aveu de Martine Aubry : "s'il y avait quelqu'un qui s'impose dans notre génération nous le saurions. Ce n'est pas le cas".
Le sombre réalisme de cette dernière révélation n'a d'égal que le désespoir de voir les plus jeunes renouer plus que jamais avec les archaïsmes...
salut Pierre
RépondreSupprimeroh là là ! qu'est ce que leur a mis !!!!!!!!! RAMONE
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