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25 septembre 2018

La Santé en Plan

Ainsi donc un nouveau plan est annoncé pour réformer le système de santé français !
Il ne déroge pas à la règle: chaque nouveau gouvernement se doit d’apporter sa pierre à ce perpétuel chantier.
Présenté en grande pompe par le Président de la République en personne et baptisé “Ma Santé 2022”, il aurait vocation à tracer les perspectives en la matière pour les cinquante années à venir !

Alors qu'il était censé répondre au profond malaise des professions de santé, le chef de l’Etat a réaffirmé qu’il ne s’agissait pas d’un problème de sous-financement mais d’organisation. Tous les gens qui espéraient des moyens supplémentaires en seront pour leurs frais. Quant à l’organisation, on chamboule semble-t-il une fois encore la forme, mais il faut bien chercher ce qui change sur le fond.

Certaines mesures étaient déjà pressenties. Par exemple, la suppression de l’inénarrable numerus clausus qui rejette pour d’obscurs motifs planificateurs près de 90% des étudiants en fin de première année.
Ce système était devenu une véritable monstruosité organisationnelle, rassemblant dans les mêmes amphithéâtres bondés, non seulement les étudiants en médecine, mais également ceux en pharmacie, et qui plus est, les futurs dentistes, sages femmes et masseurs-kinésithérapeutes !
Un véritable chef d’œuvre de planisme comme la France est sans doute un des rares pays à savoir les porter à cet indicible degré d’absurdité. Tout le monde ou presque s’accordait sur l’inanité de cette sélection aride qui faisait perdre un an ou deux, à la majorité des étudiants inscrits dans cette Première Année Commune aux Etudes de Santé (PACES). Car force était de recruter un peu partout des médecins à diplômes étrangers pour faire face à la pénurie ressentie sur le terrain, et tout ça pour constater au bout du compte que la France ne manque pas de médecins par rapport aux autres pays de l’OCDE, mais qu’ils ne sont pas aux bons endroits et pas dans les bonnes spécialités….
On ne reprochera donc pas au gouvernement actuel de mettre fin à cette sinistre comédie, mais on peut s’interroger sur les solutions alternatives envisagées. Le Plan est en effet plus qu’évasif sur le sujet et peut laisser craindre pour le coup qu'on passe du manque à l'excès. Au surplus, il fait une nouvelle fois l’impasse sur les professions para-médicales auxquelles nombre de tâches dévolues aux médecins pourraient être confiées. Mise en pratique dans beaucoup d'autres pays, une telle délégation permettrait pourtant de générer de substantielles économies en diminuant le besoin en médecins, tout en revalorisant et en modernisant les profils de nombre de métiers de la santé.

Parallèlement, le gouvernement a pris acte du poids croissant des charges administratives pesant sur les médecins dits “de ville”. Mais curieusement, plutôt que de proposer enfin un vrai “choc de simplification”, il promet une armée de 4000 "assistants médicaux" destinée à alléger leur fardeau et leur permettre de soigner plus de patients. Hélas rien ne dit d’où il compte sortir ces gens ni de quelle formation il devront attester. Ni infirmiers, ni secrétaires, ni aides-soignants, on comprend mal leur positionnement mais on suppute qu’ils imposeront un coût supplémentaire non négligeable à l’Assurance Maladie. Au surplus, comme toute assistance étatique cette aide sera attribuée aux praticiens sous conditions, en l’occurrence de se rassembler pour former des “communautés professionnelles territoriales de santé”.
L’idée d’exercer en groupe pluridisciplinaire n’est ni mauvaise, ni très nouvelle, mais mise en œuvre sous contrainte, elle risque de se transformer en expédient et pourrait se traduire par le retour des dispensaires d’autrefois, guère efficaces ni innovants…

Supposées enrayer la désertification de nos campagnes, ces maisons de santé polyvalentes seraient susceptibles de se voir renforcées par l’arrivée de 400 praticiens dépêchés tout exprès pour la cause. Là encore, rien ne dit d’où viendront ces recrues providentielles ni ce qui pourrait les attirer dans les trous perdus que la République a purement et simplement abandonnés à leur triste sort, à force de prôner depuis des décennies l’hypermédicalisation centralisée dans les grandes métropoles, et la planification à outrance sur le modèle néo-soviétique. Pour lutter contre les déserts médicaux, M. Macron se refuse encore à envisager la suppression de la liberté d’installation des médecins, mais on subodore qu’il n’y a plus qu’un pas pour arriver à cette funeste extrémité.

Les Pouvoirs Publics n’en sont certes pas à une contradiction près. Aujourd’hui, ils veulent revitaliser les petits hôpitaux en les réorganisant et en les renommant, tout en laissant entrevoir la fermeture de leurs maternités, de leurs blocs opératoires au seul motif qu’ils ne pratiquent pas assez d’actes. Enfin, la tarification à l’activité (T2A) qui était un facteur d’émulation, et un système de répartition des ressources équitable, sous réserve qu’elle reste simple, raisonnable, et neutre, est en passe d’être en partie au moins abrogée après à peine quinze ans d'existence. Au moment précis où l’Etat cherche désespérément à la mettre en œuvre dans le champ des soins de suite et de réadaptation (SSR), il la rabote consciencieusement dans celui du court séjour, en proposant de la remplacer par l’usine à gaz du “financement aux parcours de soins” et “à la qualité”. Comprenne qui pourra...
Comment diable motiver les troupes avec une telle politique à la fois erratique et couarde, qui dit blanc un jour et noir le lendemain, et qui refuse obstinément de s’attaquer aux racines du mal ?

Devant ce plan étique, on ne peut s’empêcher, lorsqu’on a la fibre un peu libérale, de penser qu’on est en train une fois encore de passer à côté de la mère des réformes. Dans sa déclaration d’intention, M. Macron affirme haut et fort qu’il entend rester dans le prêt à penser idéologique suranné dont le pays crève à petit feu: “je veux que ce qu'on appelle le système de santé soit l'un des piliers de l'Etat providence du XXIe siècle qui prévient et protège et puisse accompagner les parcours de vie.” Belles paroles, mais guère pragmatiques...
Au point où nous sommes rendus, on aurait pu rêver à la suppression de toutes les instances administratives inefficaces, au premier rang desquelles figurent naturellement les Agences Régionales de Santé (ARS). Le Canada qui en était également doté l’a fait, pourquoi pas la France ?
On aurait pu de cette façon, imaginer redonner aux hôpitaux l’autonomie de fonctionnement qu’ils ont perdu au fil des décennies. Dans un tel contexte la délégation d’une partie de la gestion au corps médical aurait sans doute été en mesure d’apporter plus de responsabilité et permis à certains de comprendre que la pérennité d’un établissement ne dépend que de deux conditions: être en équilibre financier et réaliser des prestations conformes à l’état de l’art.
On aurait également pu rêver à l’ouverture à la concurrence du monopole usé de l’Assurance Maladie.
On aurait pu enfin songer à décloisonner les soins en favorisant les délégations de tâches au personnel non médical, et comme les instances européennes nous y invitent, à déréglementer nombre de professions de santé.
Mais force est de conclure que tout cela est hélas inimaginable dans notre pays...
Illustration: Le Petit Prince. Saint-Exupéry.

30 août 2018

Mauvaise Passe

Il y a manifestement quelque chose de grippé dans la belle mécanique macronienne.
Pas plus que l’épisode Benalla, la démission de Nicolas Hulot, n’est pour grand chose dans ce déraillement, sauf aux yeux des médias dont ce dernier était le chouchou. 
Comme pour beaucoup de personnalités prétendues “préférées des Français”, ce genre de popularité est des plus volatiles. En réalité la défection de l’ex-présentateur d'Ushuaia était attendue depuis sa nomination tant le personnage paraît incongru dans un gouvernement.
La preuve, à part l’inscription de beaux principes dans la Constitution, et une pâle contribution au calamiteux dossier Notre Dame des Landes, il n’a quasi rien à son actif. Quand on connaît le sectarisme du gars, on ne peut que s'en réjouir...
A sa décharge, aucun ministre de l’écologie n’a jamais fait mieux. On se souvient de Dominique Voynet, championne toute catégorie, dont la mauvaise foi alla jusqu’à nier les dégâts de la marée noire de l’Erika qui étalait son voile gluant sous ses yeux… Quant à Ségolène Royal qui tente opportunément de ramener sa fraise, on n'a pas oublié qu'elle s’illustra, entre autres rodomontades, par la funeste et stupide écotaxe...

N’empêche, le mandat d’Emmanuel Macron ressemble de plus en plus à une impasse.
C’est peu dire qu’il a perdu le mojo. Rien ne se passe comme prévu, ni comme on aurait pu l’espérer en écoutant ses discours enflammés.
Étiqueté “ultra-libéral” et “président des riches”, il endosse, à l’instar de Nicolas Sarkozy, aussi fougueux mais inconstant que lui, l’impopularité de réformes annoncées mais non ou à moitié réalisées. Aujourd’hui encore, il prend le risque de mécontenter l’intelligentsia en évoquant “les Gaulois qui ne veulent rien changer” alors qu’il recule lui-même sur tous les sujets qui fâchent. Comme un cheval pusillanime, sa détermination fléchit devant l’obstacle. Même sur le prélèvement de l’impôt à la source, qui semblait enfin acté, il semble hésiter.

Résultat, après l'illusion d'une esquisse d'embellie, l’état du pays continue de se dégrader irrémédiablement, surtout si on le compare à ses voisins.
Un récent éditorial de Jean Nouailhac paru dans le magazine Le Point fait un état des lieux assez consternant. La France traîne comme un boulet le chômage. Face à nos 9,2% , le Royaume Uni, qu’on dit emberlificoté dans le Brexit, affiche royalement 4%. En Allemagne, avec à peine 3,4%, c’est le plein emploi ! Même l'Irlande et le Portugal, pourtant étrillés par la crise de 2008 font bien mieux que nous (respectivement 5,3 et 7,3%)... Quant à l'Amérique, elle n'a pas connu situation plus floride depuis 50 ans !

Parallèlement, la France n’en finit pas d’alourdir sa dette. Lorsque nous nous félicitons de passer sous la barre des 3% du PIB en termes de déficit budgétaire, nos voisins germaniques peuvent se targuer d’un solde positif de 3%. Résultat, le PIB de l’Allemagne est supérieur au nôtre de près de 1000 milliards d’euros soit plus de 42% (3260 milliards € vs 2290). La France dégringole lentement mais sûrement dans le palmarès international. Après l’Angleterre, c’est l’Inde qui vient de nous passer devant...
Faute de parvenir à diminuer les dépenses publiques, faute de pouvoir simplifier l’incroyable arsenal bureaucratique hexagonal, et faute d’alléger les prélèvements obligatoires, la France continue de s’asphyxier doucement. Contrairement à tous les pays un peu plus dynamiques et audacieux, la croissance reste atone et la morosité sévit à tous les étages. Même l'inflation qu'on croyait jugulée, pointe à nouveau son nez, c'est dire...

Le moins qu'on puisse dire hélas en cette rentrée, est que les perspectives ne sont pas réjouissantes.
Pendant que le gouvernement promulgue à tour de bras des réformes ineptes, illisibles ou inapplicables, l’imagination inépuisable des technocrates continue de produire toujours plus de réglementations, de contraintes et de taxes. Après celles supposées rendre vertueux les citoyens sur les produits pétroliers, le tabac, l’alcool, les sodas et les produits trop sucrés, on évoque un alourdissement de la fiscalité sur les aliments excessivement salés. Serait-ce le retour de la gabelle ?

08 août 2018

Benalla par-ci Benalla par-là

Le retentissement donné à l’affaire Benalla peut paraître extravagant.
Quoi, la France qui a une si longue tradition de polices parallèles et de barbouzes s’offusquerait tout à coup qu’un supplétif affecté à la protection du chef de l’Etat prête main forte au très officiel Groupe de Sécurité de la Présidence de la République (GSPR) voire aux CRS ?

Tempête dans un verre d’eau, l’affaire a pourtant occupé le champ médiatique durant tout le début de l’été. Benalla par-ci Benalla par-là, il fut impossible d’échapper à ce nouveau micro scandale monté en épingle. Rien de mieux en tout cas pour souder les oppositions au pouvoir en place, en mal d’inspiration (en l’occurrence le pouvoir comme l’opposition d’ailleurs….). On vit ainsi toute la classe politique se lever comme un seul homme pour déposer solennellement une grotesque et vaine motion de censure à l'Assemblée. Echec garanti...

Pendant ce temps, c'est à peine si on parla des incendies meurtriers en Grèce, d'origine humaine comme toujours, faisant plusieurs dizaines de victimes. On parla encore moins des plus de 130 disparus, emportés par les eaux d'un barrage rompu au Laos.
On évoqua comme un fait divers anodin l'attentat revendiqué par les Islamistes faisant 2 morts dont une enfant de 10 ans et 13 blessés à Toronto. Il est vrai qu'il ne s'agissait parait-il que d'un acte commis par un déséquilibré...
Une fois encore, les ravages du terrorisme obéissent au trop classique "2 poids, 2 mesures”, notamment s'ils ont lieu loin de chez nous. Qui fit vraiment attention aux quelques 250 morts en Syrie causés fin juillet par les enragés du Prophète ? Qui remarqua la série d'attentats survenus en Afghanistan et au Pakistan dont le plus sanglant tua pas moins de 149 personnes le 14 juillet à Mastung au Balouchistan ?
Tout ça est bien peu de chose face à la petite vidéo de quelques dizaines de secondes passée en boucle des jours durant, où l’on voit le fameux Alexandre Benalla, conseiller spécial affecté à la sécurité du président, rudoyer deux manifestants, alors que ces derniers exprimaient paisiblement leur “haine du système” en jetant des bouteilles sur les gendarmes.
Derrière les mines surprises, contrites ou plus ou moins embarrassées des membres du gouvernement, il est possible également qu’on se frotte les mains. Pendant qu’on glose sur cette dérisoire histoire, on occulte les vrais problèmes et les mauvais indicateurs qui continuent de tomber comme vache qui pisse : croissance en berne, chômage en hausse, prisons passoires, déroute chronique des chemins de fer …
Cela dit, Benalla n’aura qu’un temps. Sitôt loin des caméras sitôt oublié...
Heureusement est venue la canicule estivale, annonciatrice à n’en pas douter, d'après les journalistes, de l'emballement climatique qui va peut-être nous tuer presque tous d’ici 2100…

09 mai 2018

Macron par Macron

On n’est jamais mieux servi que par soi-même. C’est sans doute ce qu’a pensé Emmanuel Macron en participant activement à l’édification de cette chronique d’une année passée au pouvoir, diffusée hier soir sur France 3.

Il est en effet difficile de nier le caractère quasi hagiographique de ce reportage, réalisé par un proche du président, et diffusé comme au bon vieux temps du gaullisme sur les ondes de la télévision d’État.

Mais plus que les images déjà vues et revues de la geste macronienne, les propos du chef de l’État, ponctuant ces séquences, révèlent davantage sur ses convictions et donnent la mesure de son tempérament. Et le moins qu’on puisse dire est que le style détonne face à l’ineffable médiocrité de son prédécesseur. On pourrait même considérer qu’il y a bien longtemps qu’on n’a pas entendu parler avec autant de liberté et de sincérité en France. Point de langue de bois ici mais un ton débridé pour aborder sur un ton à la fois grave et léger tous les problèmes de notre temps.

S’il ne fallait retenir que deux ou trois choses de ce film ce serait qu’Emmanuel Macron a une vraie ambition européenne, et un esprit pragmatique, ce qui n’exclut pas un sens aigu du tragique et de la solennité.
Sur l’Europe, son discours à la Sorbonne, comme l'a fait remarquer Alain Duhamel, fut à marquer d’une pierre blanche. Il faut en effet un certain courage pour défendre de nos jours l’idée d’une nation européenne, plus démocratique, plus souveraine et plus ambitieuse. Certes il y a des concessions un peu niaises à l’air du temps (la fumeuse taxe carbone et le renforcement de la fiscalité des GAFA). Certes, il manque l’affirmation du fédéralisme qui serait pourtant le ciment d’une vraie union. N’empêche, la vision du chef de l’État est bien éloignée de celle étriquée de "l’Europe des Nations", qu’on nous serine depuis des décennies. 

Se démarquant d'ailleurs de ses prédécesseurs, M. Macron affirme que lui « ne joue pas avec les cartes cachées ». Il fustige au passage l’idée qu’il suffise « de prendre un air intelligent » pour faire avancer les choses. de son point de vue, si le concept européen manque tant de crédibilité, c'est peut-être avant tout parce que les gens qui en parlaient jusqu’alors donnaient l’illusion "d’avoir un plan, qui en réalité ne venait jamais..." Non sans raison le Chef de l’État affirme « qu’on ne peut pas faire prendre aux gens un risque si on ne dit pas où on les emmène... »
Reste à savoir si ses discours vigoureux suffiront à chasser les vieux démons nationalistes et à redonner vigueur aux rêves inassouvis… 

L’esprit pragmatique, Emmanuel Macron le manifeste en s’attaquant sans vergogne aux symboles de l’immobilisme idéologique qui asphyxie le pays. Les lois que son gouvernement propose peuvent être jugées un peu pusillanimes, mais elles s’attaquent tout de même à des mythes qu’on croyait indéboulonnables. La SNCF, le code du travail, l’Education Nationale, la Sécurité Sociale, autant de vaches sacrées, de plus en plus efflanquées par l’incurie de leur gestion.
Le Président le dit, « la France n’est pas réformable ». Son histoire l’a pétrie de contradictions, « c’est un pays d’aristocrates égalitaires », où l’on veut des actions mais où l’on exige qu’elles préservent les principes et qu’elles ne remettent pas en cause les rentes de situation.
La meilleure démonstration de cette inconséquence et de cette mesquinerie, on la trouva dans les réactions offusquées de nombre de commentateurs, de politiciens et de syndicalistes, à son allusion au coup de rabot donné aux aides au logement.
Il fut pourtant savoureux et si juste ce moment où il s’éleva contre "les gens qui pensent que la France, c'est une espèce de syndic de copropriété où il faudrait défendre un modèle social qui ne sale plus, une république qui n’a plus d’odeur.../... et où l'on invoque la tragédie dès qu'il faut réformer ceci ou cela, et qui pensent que le summum de la lutte, c'est les 50 euros d’APL. Ces gens-là ne savent pas ce que c'est que l'histoire de notre pays..."

A ces batailles lilliputiennes, M. Macron oppose le sacrifice sublime du colonel Beltrame, symbole selon lui de l’esprit de résistance et d’un amour absolu de la liberté, de la fraternité, et de l’égalité réelle. On peut en l’occurrence trouver qu’il fait preuve d’un opportunisme un peu déplacé voire entaché d’angélisme, car les gendarmes ne sont pas supposés servir de martyrs. Mais on ne peut qu’adhérer à son propos lorsque visant les actes terroristes et la radicalisation de certains rebelles au système, il ajoute qu’on aurait tort de "laisser le tragique et l'absolu à des idéologies non démocratiques."
M. Macron voudrait redonner une dimension tragique à la démocratie. Selon lui, à l'instar de Roméo et Juliette, sans obstacle, sans drame, il n’y aurait pas d’amour (il en sait sans doute quelque chose...). Il fait même sienne la tirade d’Orson Welles dans le Troisième Homme,  comparant le fabuleux épanouissement artistique de l’Italie pendant le règne sanguinaire des Borgia, au chemin tranquille suivi par la Suisse qui n’aurait abouti qu’au Cuckoo Clock…
S’il paraît essentiel pour nos démocraties qu’elles prennent un peu de hauteur spirituelle et qu’elles affermissent leurs ambitions et leur détermination face aux extrêmes, le drame ne leur est toutefois pas consubstantiel, et la Suisse, pays paisible s’il en est, n’en est pas moins prospère, responsable et heureux. Que demander de mieux ?


Pour l’heure, ce film montre que M. Macron a redonné à la fonction présidentielle, du panache et de la respectabilité. Son discours est simple et il semble sincère. Le personnage n’est pas débarrassé de toute contradiction mais il a acquis une vraie stature internationale et entamé des réformes pour moderniser la France, ce qui n’est pas si mal en un an. 
Il n’a peut-être pas dit son dernier mot. Tant mieux, car comme le fait remarquer le journaliste helvétique Richard Werly, s’il s’agit d’une année de réussites, aucune des colères n'est apaisée, et la France a besoin de calmant...

18 avril 2018

En marche, un an après

Face au duo grimaçant de pitres idiots-visuels, Plenel et Bourdin, auto-investis de mandats de commissaires du peuple bien plus que de journalistes, le Président de la République Emmanuel Macron a déployé tout le panache et tout l’art de la dialectique dont il est capable. Rien que pour cela, le spectacle qui nous fut offert par la chaine BFM TV ce dimanche 15 avril, valait son pesant de cacahuètes.
Face aux questions en forme de “plaidoyers” voire de réquisitoires, qu’ils lui adressèrent, assorties de rictus grotesques, les réponses du chef de l’Etat sifflèrent comme des balles aux trajectoires millimétrées, renvoyant tour à tour les deux procureurs morveux au fond du court.

Au bout d’une heure de ce petit jeu, les attaquants paraissaient bien plus fatigués et dépités que leur victime, si bien que leurs coups, s’ils fusaient certes encore, étaient tellement amortis, tellement à côté de la plaque, que pour tout un chacun la cause était entendue.


Mais derrière le show étincelant d’Emmanuel Macron, sous la verve mordante de son discours, on cherchait pourtant vainement les éléments révélateurs d’une politique claire et d’actions concrètes à venir.

Comme souvent dans ce genre d’exercice de style, la communication fut parfaitement maîtrisée, mais les propositions restèrent imprécises. La faute sans doute en grande partie aux interviewers, rechignant à s’élever au dessus de viles et démagogiques considérations partisanes, puisées souvent dans le registre ringard de l'extrême-gauche, et incapables de voir l’actualité autrement que par le petit bout de la lorgnette.
Ainsi, on perdit beaucoup de temps à discourir sur le bien fondé ou non des récentes frappes punitives sur la Syrie, on eut droit aux sempiternels couplets pleurnichards sur les inégalités croissantes entre les riches et les pauvres, sur les profits éhontés d’entreprises coupables de "plans sociaux", sur le mythe de la perte financière due à l’évasion fiscale, et on tourna en rond de manière lénifiante autour de l’islamisme, de l’immigration, et de la sinistre pantalonnade de Notre Dame des Landes...

C’est à peine si quelques problèmes pratiques furent esquissés. Celui récurrent des retraites par exemple, au sujet duquel M. Macron réaffirma son attachement exclusif au système par répartition. Comme ses prédécesseurs, il continue donc de tout miser sur cette véritable pyramide de Ponzi qui fait peser un poids croissant sur les jeunes générations, tout en réduisant comme peau de chagrin pour eux l’espoir de profiter un jour des fruits de cette pseudo-solidarité générationnelle.
Le grand âge, la dépendance et la situation tendue dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ne furent qu’effleurés. Il évoqua rituellement la création d’une branche supplémentaire de l’Assurance Maladie en avançant pour seul financement la création d’un nouveau jour de travail non payé... Doux pays où l’on octroie généreusement des jours de repos supplémentaire au titre de la réduction du temps de travail (RTT), tout en rognant peu à peu sur les congés…
Sur le malaise profond qui mine le secteur hospitalier, le Président de la République se borna à envisager la solution illusoire consistant à sortir de la tarification à l’activité, tout en proposant d’un ton évasif “moins de bureaucratie...”
Rien de très clair s’agissant de la SNCF, hormis la promesse que l’Etat, c’est à dire les contribuables, reprendrait tout ou partie de la dette faramineuse de l’entreprise, à condition que les négociations avec les cheminots avancent. On ne voit pas bien le rapport et on ne voit pas bien comment l’Etat pourrait s’exonérer de la mission de résorber les déficits que sa gestion calamiteuse à creusés, sachant comme l’a réaffirmé M. Macron, qu’il n’a jamais été question de “privatiser” les chemins de fer.

Bref, si les mots du président sonnèrent souvent juste face à l’inconséquence de journalistes se faisant un devoir d’être agressifs par principe, on n’apprit pas grand chose de nouveau, comme le relevèrent nombre de commentateurs. Et l’Europe, pour laquelle le chef de l’Etat nourrit tant de projets ambitieux ne fut tout simplement pas abordée. Peut-être sera-ce pour un autre jour...

29 décembre 2017

Entre Trump phobie et Macron mania

L'année 2017 aura vu l'arrivée du pouvoir de deux personnages hors normes, Donald Trump aux Etats-Unis puis Emmanuel Macron en France.
Election improbable pour ces deux là. Et pourtant…

Tous deux sont parvenus aux sommets de leurs pays respectifs au terme d’une campagne éclair, favorisée par l’effondrement des partis traditionnels et par l’usure de figures trop ancrées dans un morne et inerte paysage politicien.
Bien qu’ils aient chacun revendiqué un positionnement à l’écart de l’Establishment, ils en sont pourtant originaires sans nul doute tous les deux. S’ils sont neufs en politique, ils sont tous deux issus de la haute société et il n’est pas abusif de dire qu’après être nés avec une cuiller en argent dans la bouche, ils bénéficièrent largement du système qu’ils entendent désormais combattre.
Mais de quel système s’agit-il, c’est bien là tout le problème.

La haine anti-Trump qui déferle jour après jour sur ce président pourtant démocratiquement élu, démontre bel et bien qu’il incarne une rupture, au moins face à cette partie de l'opinion qui le rejette violemment. Bien qu’elle fut spectaculairement mise en échec par les urnes, c’est manifestement la plus bruyante. C'est celle qui détient l’essentiel du pouvoir médiatique, qui peut par exemple donner un écho international au moindre rassemblement d’imbéciles vociférant, même s’il ne compte que quelques individus. Ou qui se jette avec une avidité consternante sur le moindre des tweets que le président adore leur jeter en pâture.
Le mainstream aujourd’hui, c’est celui qui s’exprime à longueur de journées urbi et orbi, assénant au marteau pilon, un seul message partisan. Lors de l’élection de Trump, les sondeurs qui ne l’avaient pas vu venir avaient soi-disant tiré la leçon de leur erreur. En réalité, des mois durant, l’écrasante majorité des médias avaient pris position pour Hillary Clinton. On pourrait même affirmer qu’ils avaient massivement tenté de discréditer le candidat républicain, au point d’avoir pris leurs désirs pour des réalités et entériné par avance son échec. On avait déjà vu pareille campagne de presse à l’encontre de George W. Bush en 2004. Avec le même piteux résultat.
S’il est un constat réconfortant à porter au crédit de la démocratie, c’est bien la capacité du peuple à déjouer les menées partisanes de ce Pouvoir médiatique et à voter en toute indépendance.

Depuis l’élection de Trump le déferlement d’insultes et de diatribes est loin d’avoir cessé.
Chaque mot, chaque geste est scruté, disséqué et aussitôt dénigré ou bien ridiculisé. La Presse française n’est hélas pas en reste dans cette entreprise d’accusation systématique. Politique migratoire, intérieure, internationale, tout est sujet à raillerie. Lorsqu’on ne compare pas le président américain à Hitler ou au tyranneau nord-coréen Kim Jung Un, c’est pour en faire un odieux personnage, vulgaire, raciste, misogyne, voire un déséquilibré mental que certains vont jusqu’à souhaiter publiquement voir assassiné...
On attaque par tous les côtés, au moyen d’accusations fantaisistes ou carrément inventées. On a essayé de le déstabiliser en mettant en doute sa probité de chef d’entreprises bien sûr. On l’a accusé d’harcèlement sexuel, crime des plus abjects par les temps qui courent. On a monté une soi-disant affaire russe qui est en train de se dégonfler et de se retourner contre les brillants stratèges qui l’ont conçue. En définitive, rien n’a permis d’étayer sérieusement les insinuations et accusations qui fusent sans discontinuer.
Le gars tient bon et mène sa barque envers et contre tout.
Faute de pouvoir le faire chuter on a essayé de freiner son action. Pour une fois qu'un élu s'attache à mettre en œuvre son programme, on s'ingénie à l'empêcher de le faire. Tous ses décrets visant à lutter contre le terrorisme et l'immigration clandestine, ont été contestés ou bloqués. Sa contre réforme du système de santé a été amendée parfois par des gens de son propre camp.
Aujourd’hui les ligues de vertu s’étranglent de stupeur à la suite de sa décision de conférer une fois pour toute à Jérusalem le statut de capitale de l’Etat Israélien. Le chœur des représentants irresponsables de l’ONU s’en émeut mais il n’en a cure. Ces gens là sont incapables de la moindre décision et font preuve d’une telle lâcheté, qu’il passe outre sans vergogne. Après tout, il n’a pas à rougir de cette décision validée par la même ONU en 1949, jamais appliquée depuis cette date.
Comme il n’a pas rougir de son action au Moyen-Orient qui a contribué à combattre le fanatisme islamique en Syrie et en Irak. Il n’a pas à avoir honte d’être le seul à s’opposer ouvertement à la Corée du Nord. Hélas, c’est sans doute un peu tard, mais à qui la faute si ce n’est celle des pleutres qui depuis un demi siècle ont laissé s’asseoir et perdurer cette immonde dictature. Les mêmes ont abandonné à leur triste sort le Vietnam, le Cambodge, le Rwanda, la Somalie, l’Erythrée, Cuba, le Venezuela, l’Iran et tant d’autres malheureux pays...
Envers et contre tous les donneurs de leçons, Trump agit conformément au programme sur lequel il a été élu. S’il n’a pour l’heure réussi à enrayer qu‘en partie la machine infernale de l’Obamacare, il enregistre des progrès significatifs dans la lutte contre l’immigration clandestine. Et en France on pourrait envier l’audacieuse réforme fiscale qu’il est en train de mettre en place...

Alors que l‘impopularité de Donald Trump atteint en France des sommets vertigineux, c’est un des mérites d’Emmanuel Macron que d’accorder au président américain la considération qu’il mérite. S’en inspire-t-il c’est une autre histoire…
Le contexte français est si différent de celui qui règne outre atlantique.
A l‘inverse de Trump qui est entré de force dans le jeu politique, Macron l’a fait en douceur. Il a su exploiter habilement l’affaiblissement de partis sclérosés, incapables de se réformer. S’il a joué comme Trump de la rupture avec le système, Macron l'a fait en nuances, et sans doute davantage dans les mots que dans l’action.
Il n’eut pas contre lui la majorité des médias, bien au contraire. En dépit de quelques gaffes, il surfa sur la vague populaire qu’engendra sa jeunesse, sa modernité et son apparence décomplexée. Il tira profit de l'ambiguïté, se situant “en même temps” à droite et à gauche. Position délicate qu’il continue d’adopter eu égard à la nature contrastée mais fragile de la nouvelle majorité sur laquelle il assied sa légitimité et son pouvoir.
Il n’est pas certain que cela puisse être tenu très longtemps, car le temps de l’action ne saurait trop être différé. Dans un contexte international très favorable, la France est en fâcheuse situation. Si elle ne profite pas de cette conjoncture pour se réformer en profondeur, sans doute ne pourra-t-elle plus le faire avant longtemps.

En dépit d’un vent d’optimisme qui souffle dans les voiles, le navire paraît bien trop lesté pour avancer vraiment.
Si le président français manie avec dextérité le langage, et s’il ose parfois sortir de l‘ornière de la correction politique, s‘il ose décocher de ci de là quelques vérités bien senties, marquées au coin du bon sens et du pragmatisme, les premières actions concrètes s’apparentent davantage à des demi-mesures. Par exemple, la refonte du code du travail dans lequel on peine à distinguer de vrais changements. Ou bien la fiscalité qui ne cesse de s’alourdir tandis que les annonces restent nébuleuses : la transformation de l’ISF en IFI, l’abolition partielle de la taxe d’habitation sont les deux principales, qui restent bien insuffisantes pour convaincre d’un vrai changement.
En politique étrangère, notamment européenne, le président a un style et une approche qui font de l’effet, mais pour combien de temps si rien ne vient donner corps aux belles paroles ?

2018 sera peut-être l‘année de vérité pour ces deux hommes dont on parle beaucoup, mais qui n‘ont à ce jour pas livré tout ce dont on les espère capables…

30 septembre 2017

L'Europe à la Sorbonne

Pour avoir plusieurs fois émis des réserves sur le programme et sur l’action du nouveau Président de la République, Emmanuel Macron, je me dois également de saluer les initiatives qui me semblent heureuses ou au moins prometteuses.
Il en est ainsi de son Discours tenu à la Sorbonne le 26 septembre dernier, sur le devenir de l’Europe.
Il s’en est fait le fervent défenseur, c’est un fait. Et en cela, il confirme l’engagement et les déclarations d’intentions qu’il avait martelés durant la campagne électorale.

Nombre de commentateurs ont relevé avec raison, qu’il fallait un certain courage et une vraie détermination pour brandir ainsi l’idéal européen, à l’heure où l’on entend surtout les contempteurs du système.
Lorsqu’il ne s’agit pas des souverainistes plus ou moins entichés du concept tiède d’Etat-Nation, ce sont les Nationalistes purs et durs, nostalgiques de la grandeur passée, ou bien les soi-disant Insoumis, et autres écolo alter-mondialistes, qui se targuent d’imposer au monde leur modèle, plus ou moins inspiré des dogmes insanes hérités de la révolution…

Emmanuel Macron revendique une Union forte et n’hésite pas pour tendre vers cet objectif à souhaiter une “Europe à plusieurs vitesses”. Il voudrait une assemblée élue sur un scrutin supra-national et il préconise une commission réduite à 15 membres, ce qui suppose, sauf à créer une nouvelle instance, d’éliminer pas mal de canards boiteux de celle en place...
Il accroche résolument notre pays à la locomotive allemande, quitte à flagorner madame Merckel qui selon lui, et malgré ses récents déboires électoraux, « ne sera ni le repli ni la timidité, mais l’audace et le sens de l’histoire... »
Il propose enfin de mutualiser nombre de fonctions. On trouve ainsi pêle-mêle, la création d’une force commune d’intervention, d’un parquet anti-terroriste, d’un budget de défense commun, d’une académie du renseignement, d’un office européen de l’asile, d’une police des frontières, d’un ministre des finances de la zone euro, d’une agence de l’innovation, et bien sûr en guise de cerise sur le gâteau, il demande la généralisation de la fameuse taxe sur les transactions financières, que la France est à ce jour, seule à avoir mise en place.

Que l’engagement européen de M. Macron soit réel et sincère, il n’y a pas en douter. Qu’il soit dicté par une ambition débordante, c’est probable. Qu’il soit pragmatique, c’est une autre histoire...
Car les propositions ressemblent pour l’heure assez furieusement à un catalogue de vœux pieux. Au surplus, la plupart d’entre elles n’apparaissent pas de première fraîcheur. On pourrait même dire qu’elles furent maintes fois entendues.

Les paroles sont exaltées : “nous sommes bousculés, l’audace est notre seule réponse...”, “il faut sortir l’Europe de la glaciation, la rendre au peuple...”, mais il y a loin de la coupe aux lèvres.
Car il faut tout d’abord convaincre les partenaires du projet, et ce n’est pas gagné, lorsqu’on pense aux réactions pour le moins mitigées de certains pays, dont la Pologne, aux propos quelque peu méprisants du président français à leur endroit.
Il y a également les doutes plus ou moins exprimés par l’Allemagne et d’autres nations quant à la capacité de notre pays à aller au delà des envolées lyriques, et à tenir ses engagements.
Nous sommes devenus le plus mauvais élève de la classe Europe, et le moins qu’on puisse dire est que nous ne sommes plus en position de faire la leçon à qui que ce soit
Enfin, pour les partisans résolus d’une Europe fédérale, dont je suis, M. Macron ne va pas assez loin. Il en fait d’ailleurs lui-même le constat : "Ce que je vous propose, ce n'est pas le fédéralisme..."
Est-ce la crainte de heurter l’Opinion Publique, est-ce le manque de conviction, toujours est-il qu’il y a donc une forte probabilité que le modèle reste encore longtemps bancale. Les fondations solides n’ont pas été posées à l’origine, il paraît très compliqué de changer les choses sans déconstruire tout ce qui est sujet à malfaçon.
Dans la situation où nous nous trouvons, avancer, c’est risquer une instabilité croissante, et revenir en arrière, c’est provoquer l’incompréhension des peuples.

Si on compare le modèle européen à d’autres plus anciens et éprouvés, force est de constater des différences fondamentales. Le modèle américain par exemple, s’est construit progressivement, de bas en haut, avec à chaque instant le souci de rester unis selon la belle devise E Pluribus Unum. Le nôtre a fait le chemin inverse et n’a jamais vraiment sacrifié les souverainetés nationales à l’Union.
Une chose est certaine, pour être convaincante, la France devrait en rabattre un peu de sa morgue et de sa prétention. Notre propre modèle national est hyper-centralisé, anti-libéral, et très bureaucratique; il n’inspire pas beaucoup de sympathie aux autres.

On peut donner quitus à M. Macron de ses belles idées et du courage qu’il a de tenter de remettre à l’honneur l’idée européenne, mais malgré son vibrant discours à la Sorbonne devant un parterre trié sur le volet, la Nation Européenne appelée par des visionnaires comme Immanuel Kant, Julien Benda ou Aristide Briand n’est malheureusement pas pour demain...

25 juin 2017

Macron, Acte III

Et bien c’est fait. Les légions “En Marche”, aux pieds légers et aux mains immaculées ont investi l’Assemblée Nationale !
On pourrait à l’occasion de cette razzia à l’allure de révolution molle, évoquer l’adage qui veut qu’à vaincre sans péril on triomphe sans gloire. Tout semble aller tellement de soi qu'on devient fataliste, voire indifférent. Dans la chaleur de ce mois de juin, on croirait voir une marée languide monter en douceur et sans effort sur une plage offerte. Aucun obstacle, aucune digue à ce flux prévisible, mais  sans nom, ni étendard. Il n’y eut pas de combat, et à peine plus de controverse.

C’est un constat battu et rebattu, les partis traditionnels sont en pleine débandade. Plus aucun n’est en mesure à ce jour de mobiliser les électeurs. A l'occasion de ces élections législatives, ces derniers sont d’ailleurs restés chez eux pour le plus grand nombre, où bien ils ont renoncé à exprimer leur vote.
Avec le passage à l’Elysée du lénifiant et inconsistant Hollande, et la direction peu inspirée du hiérarque empesé Cambadelis, les Socialistes, qui l’ont bien cherché, sont ratiboisés. Exit Benoit Hamon, le frondeur, piteux candidat à la présidentielle, qui ne parvient même pas à passer le premier tour de l’élection législative ! Exit cette nomenklatura de l’ancien régime, balayée sans ménagement.
Les Républicains, dont l’emprise a rétréci comme peau de chagrin, auraient pu avec leurs alliés de l’UDI incarner un semblant d’opposition aux troupes en carton de Macron. Mais quoique défaits, ils ne pensent qu’à se diviser, histoire d'émietter un peu plus leur force de frappe. C’est devenu une armée mexicaine pleine de généraux, mais qui erre sans direction, sans programme et sans conviction. Les uns jouent les rebelles, par principe; les autres se veulent "constructifs" par opportunisme...
Résultat, le pouvoir est livré sans partage pour cinq ans à des candides dont la feuille de route est quasi vierge. Ils débarquent au Palais Bourbon comme une masse d’élèves déboussolés lors d’une rentrée scolaire. A l’autre bout, on voit s’agiter l’histrion Mélenchon, entouré de cancres hilares, auto-proclamés Insoumis. Ils font leur entrée théâtrale, le poing levé et l’esprit de revanche dégouline de leurs bouches tordues par les rictus de haine.

Dans ce brouhaha informe, le Président de la République, en dépit de son aura, rate complètement ses débuts. La nouvelle génération morale avec laquelle il entendait construire son action, s’effondre d’entrée de jeu comme un château de cartes. Un mois après avoir été nommés, quatre ministres, et pas des moindres, se retrouvent au tapis, pour de sordides affaires d’enrichissement douteux, de détournement de financement public ou d’emplois fictifs. Et ce n'est peut-être pas fini !

La “loi de moralisation de la vie publique” que nous promettait l’ineffable François Bayrou est rebaptisée à la hâte. Elle est devenue “loi pour la confiance dans notre vie démocratique”, mais ce n’est pas lui de toute manière qui la portera. On peut évidemment se réjouir de voir partir si vite en capilotade cette comédie montée par le président du Modem. C’était si mal joué qu’on ne pouvait y croire un instant
 
Mais on peut aussi s’interroger sur l’avenir : cet échec prélude-t-il à d’autres désillusions ? Une politique de reconstruction peut-elle être bâtie comme Venise sur des fondements sans consistance ?
Il va bien falloir un jour que le Président de la République précise la nature de la politique qu'il entend mener. Est-elle d'inspiration libérale ? Ou plutôt sociale ? De gauche ? de droite ? ou du centre ? De tout un peu et de rien beaucoup ? Le pied sur le frein ou l'accélérateur ou les deux à la fois ?
On ne sort paraît-il de l’ambiguïté qu'à son détriment, mais les atermoiements tuent à petit feu... Le nouveau gouvernement est au pied du mur. Il va falloir qu’il entreprenne quelque chose, mais quoi ? Que peut-on faire avec un programme bourré d’oxymores, de flatulences bien intentionnées, et de vides pusillanimes ?
Derrière les hausses d’impôts qui se profilent déjà et les trains de demi-mesures qu’on entrevoit au détour des belles paroles, y a-t-il encore de la place pour l’ambition, le courage et la volonté ? ça reste à voir...

07 mai 2017

Souffler n'est pas jouer

Et bien c’est donc fait ! le pari est remporté sans suspense ni surprise.


Si le talent de séducteur d’Emmanuel Macron n’est évidemment pas étranger au triomphe romain que le peuple vient de lui accorder, ce succès  en trompe-l'oeil révèle également la maladie profonde dont souffre la démocratie française.

Passons sur le caractère météorique de la carrière du très jeune nouveau Président de la République. Passons sur le caractère nébuleux de son programme, rempli de vides prometteurs et plein de contradictions dans l’inspiration (ni de droite, ni de gauche ou plutôt de droite et de gauche comme il se plaît à le dire…). Passons enfin sur l’aspect très hétéroclite des troupes qui le soutiennent, aux premiers rangs desquelles on voit nombre de politicards rassis, quelques convaincus de la première heure sans doute, mais aussi beaucoup d’opportunistes et de ralliés par pur pragmatisme.

Le plus important pour l’heure est de constater l’effondrement des deux grands partis qui contrôlaient de manière bi-polaire l’essentiel du débat depuis des décennies.

La Gauche socialiste est à l'agonie. Minée par les divisions, décrédibilisée par l'échec du quinquennat Hollande, elle n'a pas su évoluer ni se rénover.
La Droite traditionnelle ne vaut guère mieux. Littéralement éparpillée par cette campagne calamiteuse, elle n’a plus que ses yeux pour pleurer. Sans vrai leader et sans ligne directrice, elle paraît au bout du rouleau. Elle peut faire mine d’imaginer s’imposer lors des prochaines Législatives, mais l’espoir est ténu car le désastre de la Présidentielle risque d'être suivi par une onde de choc qui n’a pas fini de secouer le Landerneau.

En réalité, elle doit sa défaite à l'indigence de son inspiration et à ses erreurs stratégiques, et celles-ci ne datent pas d’hier. Les affaires qui ont terni l’image de François Fillon et la désunion qui s'ensuivit ne sont qu’une petite partie du problème. Les causes de la déroute peuvent être recherchées beaucoup plus loin. Aussi loin sans doute qu’existe le Front National.


Ce parti créé en 1972 n’émergea réellement sur l’échiquier politique qu’au cours des années Mitterrand. On se souvient des efforts que ce dernier déploya pour en doper l’influence tout en veillant de manière machiavélique à le diaboliser.
La stratégie du vieux politicien retors qui avait ourdi ou participé à tant de combines était simple, consistant à plomber la Droite modérée avec un boulet équivalent pour elle à ce qu’avait représenté durant des décennies pour le Parti Socialiste, l’épouvantail du Parti Communiste.


Mitterrand était parvenu à neutraliser ce dernier en l’asphyxiant au sein du Programme Commun de gouvernement.

Mais alors qu’il avait sans scrupule fait alliance avec l’extrême gauche, la Droite elle, se laissa emprisonner dans l’impasse idéologique représentée par le Front National. Elle fit même du zèle pour tenter de démontrer qu’elle n'avait rien à voir avec lui, jusqu’à nier toutes les idées ou propositions qui en émanaient, même si certaines étaient défendables. 

A contrario, dans le but de séduire certains électeurs, les dirigeants de la Droite classique se mirent à d'autres moments à renchérir sur le langage du FN (on se souvient du “bruit et des odeurs” de Chirac, du “kärcher” de Sarkozy.
Mais comme dans le même temps ils maintenaient leur ostracisme, ils ne firent que déboussoler un peu plus les gens. Et incapables de traduire en actions leurs propos provocateurs, ils ne firent que se décrédibiliser un peu plus, comme Sarkozy avec sa “ligne Buisson” et son piteux débat sur l’identité nationale.


Aujourd'hui, nous nous trouvons à la fin d’un cycle. Il est trop tard pour la Droite d'espérer phagocyter le FN, devenu plus gros qu'elle. De l'autre côté, les deux Gauches sont qualifiées "d'irréconciliables". Près de 50% des électeurs votent pour les extrêmes, et en face, nous avons une sorte de magma idéologique raccroché au radeau de la méduse de la social-démocratie. Que peut-il sortir de tout ça ?


Partout, le libéralisme a marqué des points décisifs, même dans les pays scandinaves qui se sont débarrassés peu à peu de la gangue socialiste.
Emmanuel Macron sera-t-il l’héritier de Hollande, laissant dériver un peu plus le paquebot France vers je ne sais quels abîmes ?
Ou bien saura-t-il construire quelque chose de solide, pour faire suite au joli soufflé de son élection, et incarner un vrai renouveau fondé enfin sur l’esprit de liberté et l’ouverture au monde, that is the question...
Il y a un tout petit espoir pour ceux qui sont résignés à l’idée que ce renouveau ne peut venir dans notre pays que de la Gauche...