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03 avril 2025

Parodie de Justice

La justice est une valeur cardinale de la démocratie.
Outre son rôle protecteur des citoyens consistant à sanctionner les crimes et délits, à réparer leurs fâcheuses conséquences, et à empêcher la récidive, elle est supposée agir comme un contre pouvoir politique.
Devenue divinité intouchable, elle dévore tout ce qui tombe entre ses mains et rien ni personne ne semble plus en mesure de contrecarrer son magistère, ses abus, ses erreurs, ses négligences. Aujourd’hui, avec la mesure d'exécution provisoire, elle est en capacité d’appliquer sans appel certains de ses jugements.
Jamais les juges ne sont jugés pour leurs fautes. Jamais ils n’ont à rendre de comptes. Jamais l’efficacité de leurs décisions n’est évaluée. Jamais leur impartialité ne peut être remise en cause, même lorsque l'esprit partisan relève de l'évidence. La situation est grave et rien ne paraît pouvoir enrayer une évolution qu'on pressent désastreuse.

Comme l'annonce le titre de ce billet, il y a parodie lorsque la justice se livre à des abus de pouvoir ou s’abandonne au contraire à une faiblesse coupable, lorsqu'elle démontre un esprit de parti ou qu'elle obéit sans broncher voire avec zèle à une législation inepte ou néfaste.
C'est ce à quoi on assiste en ces temps troublés et tout se conjugue, tant au plan des actions qu'à celui des responsabilités. Ces dernières incombent au Pouvoir et sont partagées entre l’Exécutif qui propose des lois, le Législatif qui les vote et le Judiciaire qui veille à leur bonne application. En démocratie, le peuple n'est pas innocent puisqu'il élit ceux qui font les lois. Mais est-on encore dans une démocratie de citoyens éclairés ? That is the question.

Le langage des juges, à l'instar des lois qui les inspirent, est souvent pontifiant, abstrus, voire hermétique au commun des mortels. Plutôt que de s'appuyer sur une jurisprudence simple et concrète, il se noie sous les artifices et les certitudes trompeuses engendrés par des lois devenues pléthoriques à force de vouloir décrire par le menu tous les cas de figures imaginables. Au pays de Boileau, de Montaigne et de Montesquieu, on a préféré le chaos jargonnant à la perspicuité, et l'idéologie au pragmatisme.
Dans l'enfer des bonnes intentions, on a cru bon d'édulcorer les concepts au risque de les rendre inintelligibles voire de les pervertir.
Entre autres exemples, on ne parle plus d’inculpation mais de "mise en examen" et même reconnus coupables en première instance, les accusés restent “présumés innocents”. Ce qui conduit de facto à une contradiction lorsqu’il s’agit de prononcer une sanction "d’exécution provisoire" en première instance.

Forts de leur impunité, les juges semblent prendre un malin plaisir à faire tomber de leur piédestal nombre de grandes figures, maintes fois adoubées par le jugement du peuple. Pour ce faire, ils n'hésitent pas à agir au motif de délits qu'ils ne se soucient même plus d'étayer sur des preuves tangibles. L'intime conviction a toute légitimité pour s'imposer. Les faits eux-mêmes ne sont plus nécessaires, l'intention seule suffit. Conséquence logique, les réquisitoires implacables et les condamnations pleuvent comme la mitraille à Gravelotte. Le bracelet électronique remplace le boulet des forçats et tient désormais lieu de pilori d'indignité.
C'est dans ce contexte que sont menées les poursuites dont sont victimes quelques personnes autrefois célébrées, devenues têtes de Turcs. Par exemple l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, et l'acteur on ne peut plus prestigieux Gérard Depardieu. L'acharnement est si évident qu'il faut être aveugle pour ne pas le voir ou diablement hypocrite pour feindre de le nier.

Force est de constater que nombre de délits ont été créés par des législateurs embarqués dans une surenchère morale insensée, se faisant un devoir de tout codifier, de tout surveiller et de tout sanctionner. Cette moulinette ubuesque transforme le moindre écart à la norme en crime passible de procès. On aligne la morale sur les crédos du nouveau puritanisme, on contingente les frais de campagne, on réglemente l'utilisation des deniers publics versés aux élus, on étiquette politiquement chaque intervention télévisée, on fait un décompte savant du temps de parole de chacun, on encadre la liberté d'expression.
Investi d’un pouvoir exorbitant, le censeur ou le juge sanctionne selon des critères de plus en plus arbitraires. Il garrotte la liberté d’expression, ferme des médias, décide de l’éligibilité des individus.

La récente décision de justice touchant le Rassemblement National est le dernier avatar de cette justice inquisitoriale inflexible.  Le trouble, l'émoi, le scandale provoqués par la sévérité du verdict fait envisager la mise en œuvre accélérée d’une procédure d’appel, dans l’éventualité d’atténuer les peines avant la prochaine élection présidentielle. Mais si la proposition semble bienvenue, ses répercussions pourraient s'avérer pires encore pour les intéressés.
On comprend le mécontentement de Marine le Pen et sa volonté de tout mettre en œuvre pour atténuer une sanction qu'elle estime disproportionnée aux faits qui lui sont reprochés. Mais le mal est fait, à tout point de vue. La perspective, en apparence bénéfique, d'un procès en appel à l'été 2026 fait peser une épée de Damoclès sur elle et sur son parti. Cela n'écarte nullement l'éventualité d’un verdict aussi voire plus sévère, et fait planer dans l'attente, une Incertitude rendant très difficile de mettre sur pied le fameux Plan B évoqué par les journalistes. Qu'on croie possible ou non l'élection de Marine Le Pen pour ce qui serait sa 4ᵉᵐᵉ tentative, c'est le fonctionnement de l'ensemble de son parti et la crédibilité des candidats putatifs, présumés innocents mais supposés coupables, qui va être affectée durant près d’un an et demi.

Qu’attendent les élus honnêtes et raisonnables qui se prétendent scandalisés ou “troublés” pour inverser le cours des événements en invalidant à l'Assemblée Nationale les lois devenues folles ? Qu'attendent les politiciens se réclamant d'une politique débarrassée des idéaux calamiteux du socialisme, pour faire l'union sacrée de la Droite et du Centre afin d’offrir enfin une vraie majorité et une chance réelle de changement fondé sur le pragmatisme et le bon sens, voulu par un nombre croissant d'électeurs lassés de l'attentisme décisionnel et du merdoiement politique.
A l’instant présent, le Président de la République a perdu l’essentiel de sa légitimité, après avoir été rejeté massivement par les électeurs à trois reprises. Le gouvernement sans programme et ne disposant d’aucune majorité est dans la quasi incapacité d’agir. Et la candidate déclarée pour la prochaine échéance présidentielle, représentant le premier parti de France, se trouve exclue du scrutin où elle occupe à ce jour la position de favorite.
On savait le débat politique très abîmé et la démocratie affaiblie en France depuis des décennies. Il y a peu de chances de les voir restaurés dans les mois et même les années à venir...

22 mars 2025

L'Esprit des Lumières

Ce petit ouvrage, particulièrement opportun en ces temps de pénombre intellectuelle, a le mérite de mettre à l'honneur les grands esprits qu’on appelle communément Lumières, nommés ainsi pour avoir illuminé l’horizon philosophique et scientifique du XVIIIe siècle.

A tout seigneur tout honneur, sans surprise, Rousseau, VoltaireDiderot, Montesquieu, Condorcet y occupent une place de choix. Mais d’autres sont également évoqués au fil des sujets et des citations : Locke, Hume, Newton, Lavoisier, Kant, Beccaria...

Tzvetan Todorov décline son propos sous plusieurs têtes de chapitres jugées par lui cardinales : autonomie, laïcité, vérité, humanité, universalité.
Il apparaît rapidement que ces thématiques sont en réalité étroitement liées et on suit volontiers l’auteur lorsqu’il part de la première qui consiste à se libérer des dogmes et des croyances. C’est l’essence même du mouvement, et il n’est pas le premier à comparer ce bouleversement à la révolution copernicienne.
La Terre a perdu sa position centrale, intangible, dans la nouvelle cosmogonie. Dieu perd la sienne dans la nouvelle perspective philosophique. C’est l’Homme qui devient l’objet focal vers lequel tout converge. Il ne peut ni ne doit rien attendre de qui que ce soit, hormis de lui-même. C’est un changement fondamental.
L’Homme étant par nature libre, rien ni personne n’a la légitimité de l’asservir et plus aucun dogme n’a d’autorité, plus aucune institution n’est sacrée. Les gouvernements et les lois sont nécessaires mais n’ont plus de caractère divin. A noter qu'il n’est toutefois pas nécessaire de récuser les religions, simplement d’adopter une attitude de tolérance et de liberté de conscience

Comme l’être humain est fait pour vivre en société, il est impératif de conserver des règles de vie communes, pour éviter le chaos et l’anarchie. La notion de contrat social devient rapidement incontournable, développée par John Locke puis par Rousseau. Le corpus réglementaire qu’il suppose repose sur le respect de la liberté individuelle, notamment, celle d’expression et de publication. Et le progrès vers lequel tend naturellement la société se fonde sur la connaissance et la recherche de vérité.

Parvenu à ce stade, le lecteur a passé en revue les thématiques servant de canevas à l’ouvrage et s’il était ignorant du contexte historique et de l’esprit des Lumières, le voilà bien éclairé sur quelques notions essentielles.
Il peut rester sur sa faim car la réflexion se fait parfois un peu courte notamment lorsqu'il s'agit d'analyser l'évolution et les applications pratiques de ce courant de pensée.
Les rejets et les détournements font l’objet d’un chapitre, mais ils se bornent à des réflexions générales, parfois sujettes à controverse.
A juste titre, Todorov souligne la dérive colonialiste dont Condorcet se fit l’apôtre dans le dessein “d’apporter la lumière à tous”. Mais il peine à imputer aux Lumières les désastres révolutionnaires qui ont été commis au nom des grands principes, de la terreur de 1793 aux totalitarismes du XXème siècle. Pire, il semble confondre parfois le bon grain et l’ivraie, renvoyant par exemple dos à dos le marxisme-léninisme et le libéralisme.
A cette fin, il interprète de manière hasardeuse la pensée du pape Jean-Paul II, évoquant notamment un écrit dans lequel ce dernier affirme que “le drame des Lumières” est qu’elles ont rejeté le Christ, et que “par là s’est ouverte la voie vers les expériences dévastatrices du mal qui devait venir plus tard”.
Todorov se croit autorisé à en déduire que selon l’opinion papale, "le marxisme totalitaire et le libéralisme occidental sont des variantes à peine distinctes de la même idéologie". Cela semble très éloigné de la conception de Jean-Paul Il qui mit toute son énergie à lutter contre le fléau du communisme mais ne manifesta jamais un tel acharnement à propos du libéralisme, même s'il s'est élevé contre certains excès permis par la liberté, notamment le matérialisme, l'égoïsme et la cupidité. Il faudrait en la circonstance évoquer plutôt son successeur François, qui flétrit régulièrement le libéralisme avec plus qu'un brin de mauvaise foi si l'on peut dire…

Lorsque l’on poursuit le parcours intellectuel des Lumières jusqu’à notre monde contemporain, on se trouve tôt ou tard à la croisée des chemins entre le socialisme et le libéralisme qu’on peut considérer comme deux évolutions divergentes des mêmes idéaux. Même s’il faut éviter d’être trop manichéen, il faut bien choisir. Le flou idéologique duquel Todorov se montre incapable de s'extraire est la vraie faiblesse de l'ouvrage.
Rousseau, qu’il qualifie abusivement de “plus profond penseur français au temps des lumières”, peut être jugé proche des principes menant au marxisme, même si rien ne prouve qu'il les eut approuvés. En tout état de cause, ses frères de pensée ont bien plus de parenté avec les Pères Fondateurs de la Démocratie Américaine, laquelle représente l'application la plus aboutie de l'idéal de société porté par les Lumières.

L’Amérique n’est pas la seule à avoir cherché à mettre en œuvre les préconisations des Lumières, mais elle représente, qu’on le veuille ou non, le modèle le plus équilibré et durable de démocratie éclairée, et elle est celle qui a poussé le plus loin la logique de liberté individuelle. Au surplus, c’est elle qui a appliqué avec le plus de pragmatisme celle d’égalité.
Ces deux notions auraient gagné à faire l’objet de développements plus approfondis par Todorov.

Le libéralisme n’entend pas séparer la liberté en plusieurs composantes comme le fait le socialisme, qui en rejette certaines, notamment celle relevant du domaine économique. Dans ses pires acceptions, le socialisme, par essence collectiviste, va même jusqu'à piétiner les libertés individuelles au nom du Bien Commun. C’est un non sens, en contradiction flagrante avec la philosophie des Lumières.
A l'inverse, le socialisme fait un tout de l’égalité :égalité des chances, égalité des droits, égalité des conditions. C’est encore une aberration étrangère au libéralisme qui privilégie les deux premières au détriment de la troisième jugée néfaste à tout progrès et initiative. C’est beaucoup plus conforme à l’esprit des Lumières, tel qu’il apparaît chez David Hume. Dans son enquête sur les principes de la morale parue en 1751, le philosophe écossais mit solennellement en garde contre l’égalitarisme prôné à l’époque par les Levellers, ancêtres des Socialistes. Il les accusa même, de se comporter comme « une sorte de fanatiques politiques, dérivée de l’espèce religieuse »

On pourrait faire d’autres reproches à Todorov.
Celui d'avoir occulté l'importance de l'esprit critique, indispensable à toute démarche scientifique, et d'être passé trop rapidement sur les aspects moraux de la philosophie des Lumières si magnifiquement développés par Immanuel Kant. Ou bien de n’avoir pas évoqué le fédéralisme, qu’on peut considérer comme un principe cardinal, car il fut préconisé par le même Kant, comme moyen de tendre vers la paix perpétuelle et le progrès. Encore une fois, les États-Unis cochent la case…
En revanche, son argumentation faisant de l’abolition de la peine de mort un prérequis des Lumières, est des plus discutables, relevant quasi du hors sujet. Selon lui, “si l’assassinat privé est un crime, comment l’assassinat public ne le serait-il pas ?” On pourrait lui répondre par une autre interrogation : comment mettre sur un pied d'égalité un délit criminel et une décision de justice ? Le faire conduit à nier la légitimité de cette dernière, ce qui revient à contrevenir à un des principes fondamentaux des Lumières. Qu'on soit pour ou contre la peine de mort, cela relève du débat d'opinions et non d'un quelconque postulat philosophique.

Au total, ce texte est salutaire, mais hélas trop fragmentaire et inabouti pour servir à l’édification des foules et à la glorification de la belle aventure des Lumières !

09 juillet 2024

Le Principe du Tiers Exclu

En matière de politique, il faut rester très humble. Au terme de ces élections législatives impromptues, la redistribution des sièges à l’Assemblée Nationale se révèle sensiblement différente de ce que les sondages faisaient entrevoir.
Force est de constater que “le barrage anti RN” a fonctionné une fois encore, au-delà des espérances de ses promoteurs. La mécanique potentiellement destructrice du scrutin majoritaire à deux tours, est parvenue à biaiser l’esprit de la démocratie au nom de la logique pernicieuse et exclusive de “l’arc républicain”. Le camp macroniste a réussi à faire élire des révolutionnaires d’ultra gauche, des antisémites notoires et même un individu fiché S ! En contrepartie, la Gauche a permis au président de la république et ses amis, dont elle avait juré la perte et massivement rejetés par l’opinion publique, de continuer à exister.
Dans ce résultat en forme de trompe l'œil, la gauche semble renforcée, l’ex majorité présidentielle apparaît moins ratatinée qu’annoncé, et le Rassemblement National (RN), en dépit de l’augmentation importante du nombre de ses députés n’a ni majorité absolue, ni majorité relative. Son électorat se retrouve plus que jamais ostracisé, puisque la coalition des contraires réaffirme en chœur, au mépris de tout principe républicain, son refus de travailler avec ses représentants.

Pour autant, la perspective ouverte par le renouvellement de l’Assemblée législative est-elle vraiment bouleversée ? Non car le chaos politique qui régnait avant la dissolution est toujours là. Il est simplement plus désastreux qu’auparavant et le Président de la République porte une lourde responsabilité dans cette évolution.
Puisqu’il paraît hélas peu probable qu’il démissionne après un tel résultat, signant l’échec de son ambition de clarifier la situation, il faut bien tenter d’imaginer avec quel conglomérat il pourrait envisager de continuer à feindre de diriger le pays, et pour quel dessein.
Il manquait au parti présidentiel et ses alliés, une quarantaine de députés pour obtenir une majorité, il lui en faudrait désormais environ 130 ! De part et d’autre de ce ventre mou, embarrassé par la vaine stratégie du “en même temps” se trouvent des gens aux projets irréconciliables.
Il est exclu par principe de se tourner vers le RN.
Les Républicains (LR), dont le nombre est stable, ont perdu leur position d’arbitre, et pour coopérer avec le pouvoir, devraient accepter une collusion contre nature avec une partie de la gauche.
Cette dernière, si tant est qu'elle soit unifiée, ne pèse en effet que 180 sièges, desquels il faut logiquement retirer les quelque 70 attribués à La France Insoumise (LFI). Mais ce faisant, l’alliance du Nouveau Front Populaire se fracasse et son programme de gouvernement tombe à l’eau.

En définitive, si ces élections ont donné lieu à beaucoup de magouilles politiciennes abjectes, il faut bien convenir que les Français leur ont donné corps en suivant docilement les consignes les plus insanes. Résultat des courses, la France se retrouve dans la pire des situations imaginables, celle d’un pays ingouvernable.
On se souvient du mot fameux de Tancrède adressé à son vieil oncle Salina dit Le Guépard : “Il faut que tout change pour que rien ne change…” Une chose est plus que jamais certaine : on a les gouvernants qu’on mérite !

04 juillet 2024

Toute honte bue

C’est fait. Le séisme annoncé s’est produit. Le Rassemblement National (RN) est aux portes du pouvoir. Il balaie tout sur son passage et pourrait à lui tout seul acquérir une majorité absolue à l’Assemblée Nationale.
Ce résultat consacre l’échec de la stratégie mise en œuvre depuis quelques décennies par le reste de la classe politique, consistant à faire barrage à son ascension. Il consacre également la déroute totale de toutes ces formations prétendant appartenir à “l’arc républicain”, liguées contre le supposé péril RN.
Le parti présidentiel, dont on ne sait même plus trop comment il se nomme, après avoir été sévèrement averti en 2022 et sanctionné lors des élections européennes, prend une claque monumentale. Il réunira peut-être moins de 100 députés dans la future Chambre ! Les Républicains (LR), profondément divisés, apparaissent définitivement écrabouillés, réduits à un micro-parti sans avenir. La gauche a fait un des plus médiocres scores de son histoire. En ratissant tout le ban et l'arrière-ban, jusqu’aux extrêmes les plus nauséabonds, elle totalise à peine 28% des voix !
Tout ce joli monde désemparé semble pourtant désirer que les choses aillent plus mal encore.

Peu importe l’avenir du pays, peu importe le message évident des électeurs, le monde politique détenant encore les clés d’un pouvoir à l’agonie, se complaît plus que jamais dans le déni et la combine de bas étage.
La stratégie clamée par M. Macron, suivie à la lettre par M. Attal, tient en un petit slogan: “pas une voix pour le RN !” qu’ils ont repris mot pour mot du discours de Jean-Luc Mélenchon.
Pire, ils l’accompagnent d’actes. Depuis mardi soir, on sait que plus de 220 candidats ont été invités à se désister au bénéfice du seul projet qui leur reste : faire un rempart contre le RN.

Dans le sauve-qui-peut général, les scrupules et la morale s’envolent.
M. Macron, qui flétrissait hier encore l'agglomérat de gauche, décrit par lui comme “bricolage et tripatouillage avec lesquels on ne peut construire une majorité”, encourage désormais ses sympathisants à se rallier à ce magma insane…
M. Attal, premier ministre, n’hésite plus à prôner le vote pour des candidats de la gauche la plus abjecte ! Il qualifiait hier le nouveau front populaire "d’alliance de la honte". Aujourd’hui il appelle les électeurs à voter en sa faveur.
Edouard Philippe, ancien premier ministre et héritier du bastion havrais, arraché de haute lutte aux communistes par son prédécesseur Antoine Rufenacht, affirme qu’il préfère voter pour le PCF que pour le RN !
A gauche évidemment ce n’est pas mieux.
Marine Tondelier, au nom des écologistes, verse des larmes de crocodiles parce que Bruno Lemaire, dans un petit sursaut de réalisme, a indiqué qu’il ne voterait pas pour un candidat LFI, même pour faire barrage au RN.
Sandrine Rousseau, après avoir fait la leçon à M. Ciotti, affirme tranquillement qu’elle est “prête à tout du moment qu’on gagne”. Au moins, c’est clair.
S’ils sont élus dimanche prochain, M. Darmanin, madame Borne, le seront avec les voix de LFI, et M. Hollande sera laborieusement remis en selle grâce à LR, vestige du parti de M. Sarkozy !
Enfin, le pauvre Raphaël Glucksmann, qui a bien du mal à exister et qui ne sait plus trop où il habite, appelle de ses vœux pieux une assemblée nationale sans majorité, sans perspective, sans direction.
Tout cela relève de l’ignominie.

L’objectif de tous ces gens est désormais qu’il n’y ait pas de majorité claire et leur but, on ne peut plus simpliste, est de faire en sorte que pour la première fois de la Vème République, le parti arrivé en tête au premier tour avec plus de 30% des voix ne puisse constituer un gouvernement.
Qui peut croire M. Attal lorsqu’il invoque en désespoir de cause “une majorité plurielle” faisant l’impasse sur le plus grand parti de France ?
En réalité, lui et plus encore le Chef de l’Etat, préfèrent le chaos d'une nation ingouvernable et le spectre d'une piteuse démission, à une cohabitation peu glorieuse mais plus démocratique, avec ce qu'on appelle encore l'extrême-droite.
Ces perspectives navrantes sont de toute manière illusoires car pour le RN et ses alliés, si ce n’est pas pour ce coup-ci, ce sera pour le prochain. Finalement, même si pour le pays l’absence de majorité à l’Assemblée serait la pire des catastrophes, il vaudrait peut-être mieux pour Jordan Bardella qu’il n’y parvienne pas. Au moins on ne pourra pas lui imputer le bordel qui vient.

En vérité, la Démocratie, la République et les Valeurs, tout le monde s’en moque maintenant que le danger de perdre prébendes et rentes de situations est maximal. Il n’y a toujours aucune interrogation sur les raisons profondes de la montée régulière du RN. Aucune réflexion sur la cause du rejet massif par le peuple des politiciens traditionnels de tous bords.
Au contraire. Moins le fameux barrage convainc de monde, plus ses promoteurs, à court d’idées, s’accrochent à lui, usant de tous les derniers stratagèmes politiciens pour le faire perdurer. Plus ils perdent d'influence, plus ils deviennent radicaux et virulents. Il n’a jamais été aussi évident que le déferlement de haine et d’intolérance auquel on assiste, vient de la gauche, ralliant une bonne partie des artistes, réels ou prétendus, du petit monde de l’éducation, des syndicats, de la haute fonction publique, et même de la justice.

Comment les Français vont-ils réagir ? Seront-ils assez niais pour suivre les combines, les grosses ficelles, les pactes mort-nés, les faux-derches qui ne cessent de trahir leurs engagements, les chevaux de retour usés jusqu’à la moëlle, qui les ont trompés tant de fois ?
Une chose est certaine, la France va vivre des moments d’incertitude et de basse politique si ce n’est de pagaille et d'émeutes qui risquent de l’affaiblir un peu plus. Et de cela, tout républicain, démocrate, aimant son pays, ne peut que s’attrister si ce n’est ressentir un immense dégoût…

30 juin 2024

Du Mensonge en Politique

Aujourd’hui, c’est le grand saut dans le vide. L’abcès qui empoisonne l'espace politique jusqu’à le gangréner en profondeur depuis des décennies, est sur le point de se rompre.
Nul ne sait encore ce qui en sortira. Une suppuration chaotique immonde menant à la guerre civile comme certains le prédisent, le craignent ou même semblent le désirer ? Ou bien un nouvel ordre républicain, chargé d’incertitude et d'une lueur d'espoir ?

Outre-Atlantique, chez nos amis américains la situation n’est guère plus enviable. Il y a deux jours à peine les deux candidats à l’élection suprême s’affrontaient en un pathétique débat.
Les nombreux et virulents détracteurs de Donald Trump qui étaient à l'affût du moindre incident ou dérapage le concernant ont pris conscience tout à coup de l’obsolescence critique de son adversaire, Joe Biden. Le spectacle leur a troué le c.. comme on dit. Ils en sont restés comme deux ronds de flan.
Ces gens bien pensant dont la partialité confine parfois à l’absurdité n’avaient encore rien vu de la sénilité de l’actuel président !
Elle était pourtant évidente à chacune de ses apparitions depuis sa prise de fonction. Comme chacun sait, il n’y a pas de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir…

Face à ce désastre qui leur éclate en pleine figure, ils n’ont plus grand chose à dire contre Trump. Le seul argument encore audible est selon eux qu’il ment. La belle affaire ! A supposer que cela soit vrai, serait-il le seul politicien qui mente ici bas ?
Après le débat, l'épouse du malheureux Joe y est allée elle-même de son petit couplet : “lie, lie, lie !”
Juste avant, elle venait de féliciter son mari qui selon elle “avait bien répondu à toutes les questions” ! Plus menteuse tu meurs !
Personne n’ose avancer une telle énormité. Pour tout dire, de l’aveu unanime, le président a raté sa prestation à tel point que le New York Times, peu enclin à la critique du parti à l’âne, demande qu’il soit remplacé de toute urgence par un autre candidat. Le problème est qu’il n’y a pas foule pour accepter de prendre cette place glissante, et peu de personnalités crédibles dans un parti divisé, en proie au doute et aux contradictions. Encore faudrait-il d’ailleurs que le tenant du titre se résigne à s’effacer, ce qui est loin d’être le cas… Voilà où l’anti-trumpisme bas de plafond a mené l’Amérique. A la probable réélection de Trump ou bien au cataclysme !

En France, c’est le "tout-sauf-l’extrême-droite" qui nous a conduit à l’abîme devant lequel nous sommes.
Il faut dire qu’en matière de mensonges politiciens, notre piètre république est servie. Le mal est dans le fruit de longue date, mais ces élections législatives précipitées ont donné lieu à une surenchère affolante de contre-vérités, de dénis, de tromperies et de mystifications. Rien ou presque ne tient debout dans le déluge de promesses, de programmes à la dubout, et de lendemains supposés chanter.
Le Président, qui selon son habitude, dit tout et son contraire, ment au moins une fois sur deux.
S'agissant de la gauche, le conglomérat abject qu’elle propose au peuple repose exclusivement sur les falsifications, les compromissions et les délires idéologiques. A ce niveau, cela relève de l’imposture.

Mais les dés sont jetés. Aux Urnes citoyens ! Advienne que pourra…

20 juin 2024

Dindons et Chapeaux à Plumes

La campagne électorale express suivant le coup de tonnerre de la dissolution de l’Assemblée Nationale, donne lieu à un édifiant spectacle. La panique qui saisit la classe politique dans son ensemble s’exprime par des contorsions, des revirements, des trahisons et des compromissions évoquant les pires moments de notre piètre république.
Dans le festival de faux semblants, de grandiloquentes déclarations et de fausses promesses, deux grands types de volatiles sont au devant de la scène : les Dindons de la farce et les Chapeaux à Plumes.

Dans la première catégorie, trône Raphaël Glucksmann.
Rarement on aura vu volte face plus soudaine.
Deux heures à peine après le verdict des urnes et l’annonce de la Dissolution, et après avoir affirmé la main sur le cœur qu’il ne transigerait pas avec Mélenchon et ses nervis, et qu’il ne trahirait pas ses électeurs, voilà qu’en son nom, ses amis signent un accord pour un nouveau Front, autoproclamé populaire, racolant sans vergogne tout ce que la gauche a de plus nauséabond. Le lendemain il avalise en personne l’alliance de la honte et se fait ainsi voler avec le sourire son beau panache zéropéen, blanc immaculé, par les gnomes socialistes qui couraient à ses basques, rejoints par leurs copains ultras. Il est devenu le porte-coton du petit roi Mélenchon qui exerce son magistère insane en propageant la haine, l'intolérance et la violence ! Quelle descente pour ce dadais si moral, fils-de, transformé en l’espace d’un jour, en idiot utile.
Le plus grave est qu’il y ait encore des bonnes âmes, sans doute les vrais dindons, pour croire en la vertu de ces gens. Elle est tombée si bas qu'il faut désormais aller la chercher dans les égouts…

Il y a d’autres dindons, mais ils feraient presque pâle figure à côté. Eric Zemmour par exemple, qui se retrouve gros-jean comme devant après le rapprochement de Marion Maréchal et ses lieutenants, du Rassemblement National, plaidant en la circonstance l’union des droites. Il n’y a que lui pour être vraiment surpris. A contrario de Glucksmann, Zemmour n’est pas la victime consentante d’une machination mais de son propre acharnement et de ses maladresses. Par son intransigeance, il a cassé tout seul le parti qu’il était parvenu à mettre sur pied, le tout en un temps record !
On aura également une pensée émue pour Gabriel Attal, Premier Ministre depuis moins de 6 mois, totalement pris au dépourvu par le coup de tête du chef de l’Etat, et qui se trouve brutalement claquemuré dans une impasse. Avec son sourire d’archange, il erre entre deux eaux, dans l’incapacité de désavouer son chef et tout aussi incapable de proposer une alternative crédible. Hormis son rôle très bien tenu de porte-parole du gouvernement, sa carrière ministérielle tient du météore…

De l’autre côté, il y a les Chapeaux à Plumes, c’est-à-dire les caciques des vieux partis politiques, ou plutôt les survivants accrochés aux vestiges de ces formations dont ils sont d’ailleurs les principaux fossoyeurs. Plus ils s’enfoncent dans l’impopularité, l’échec et le rejet, plus ils se dressent sur leurs ergots pour tenter de dire qu’ils existent encore. Cramponnés à de vieilles lunes idéologiques, ils n'ont vraiment plus grand chose à dire ni à proposer pour rester dans le jeu.
Ce sont avant tout les barons miteux du parti Les Républicains, ersatz racorni des UDR, RPR, UDF et autres MPR. Forts de leurs dérisoires 7% aux Européennes, ils trouvent le moyen de se recroqueviller en un dernier carré, drapés dans les lambeaux du vieux manteau gaullien. Vu leurs médiocres faits d’armes passés, ils auraient tout intérêt à faire preuve enfin d'un peu de pragmatisme, mais ils préfèrent s'arc-bouter sur leurs idées fixes et mourir d’inanition dans le piège à c… de Mitterrand dans lequel ils ont sauté à pieds joints il y a déjà quelque décennies.

Passons enfin sur les rabroués, les relégués et les losers d’autrefois, qui cherchent à exploiter la divine surprise pour ramener leur fraise inopportune, certains pour le seul plaisir de retrouver les feux de la rampe, d’autres caressant encore et toujours l’espoir fou d’un retour en grâce. Tel est le rêve d'un de ceux-ci, qui fut, paraît-il, président de la république...

Devant cette sinistre parade, on ne peut s’empêcher de penser que le pire est peut-être à venir. On a beau retourner le problème en tous sens, aucun scénario post-électoral n'ouvre en effet de perspective rassurante pour notre pays, qui semble avoir perdu la raison. Il y a donc de quoi être un peu inquiet !

Illustrations : dindons et carnaval de Binche en Belgique

16 février 2023

Sondages et micros-trottoirs

Le chaos régnant à l'Assemblée Nationale donne une piètre image de notre pseudo république. Le débat s'est transformé en parodie dans laquelle la bouffonnerie a laissé la place à l'intolérance, à l'anathème, aux insultes et aux pitreries grinçantes nourries d’odieuses réminiscences révolutionnaires.
A côté de ce vacarme puéril et vain, les ersatz démocratiques fleurissent, chassant les derniers restes de l'esprit critique sur lequel la concertation se fonde. Le pouvoir n’est plus dans les institutions élues. Il est éparpillé façon puzzle, un peu partout et nulle part.

Passons sur les stupidités sans nom qui ont envahi ce qu'il est convenu d'appeler réseaux sociaux. C’est un magma insignifiant puisqu'il fonctionne sur les pulsions et qu'on n'ose le plus souvent même pas y dire son nom.
Il y a les sondages, qui depuis quelques décennies déjà ont investi le paysage médiatique.
Pourtant, quand ils ne se trompent pas, ils passent très souvent à côté de leurs objectifs, faute sans doute de poser les bonnes questions, ou pire, de mal cibler le public interrogé. Sans compter la versatilité des opinions, qui fluctuent en fonction des circonstances ou bien même desdits sondages..
Ainsi, sur le sujet brûlant des retraites, selon des enquêtes datant de 2012, 76 % des personnes interrogées se disaient préoccupées par le montant de leur pension à venir.
Il s’agit comme l’on dit d’un “vrai sujet” et il y a peu de temps encore, 61 % des personnes interrogées jugeaient qu'une réforme des retraites était « nécessaire » (OpinionWay 16/01/23)… Aucune alternative concrète n'était bien sûr proposée, mais les perspectives d’évolution pouvaient paraître ouvertes. Selon Bruno Jeanbart, vice-président de l'institut sondagier, « Les Français n’ont pas envie de cette réforme, mais ils comprennent que le système n’est pas viable, donc le gouvernement a un espace pour faire accepter ses mesures ».
Peu de temps avant les premières manifestations, la même source révélait même que 73% des Français n’avaient pas l’intention de se mobiliser contre la réforme (OpinionWay 14/01/23).
Les choses ont bien changé depuis cette date. Une forte majorité se déclare désormais franchement hostile aux propositions gouvernementales (68% d'après Elabe le 18/01/23). Alimenté par l'agitation médiatique et sans doute par la rumeur sondagière, le mécontentement ne cesse depuis de grandir. Aujourd'hui,à ce qu'il paraît, une majorité de Français serait carrément favorable au blocage du pays (Elabe février 2023)
On pourrait juger paradoxal ce revirement de l’opinion puisqu’un des rares éléments concrets du programme de Macron portait justement sur la réforme des retraites et le recul de l’âge de départ…

Ceci dit, pour colporter les paradoxes, les contradictions et les idées folles, il y a pire que les sondages. Le nouveau pont-aux-ânes des journaux télévisés, ponctuant le traitement de tout sujet d’actualité est devenu le micro-trottoir.
D’un témoignage personnel on fait une généralité. Évidemment sans aucune méthode ni la moindre garantie d’objectivité, le pire étant d’interroger les gens au sortir d’une manifestation… Rien de plus facile que de faire dire aux gens tout et son contraire, et surtout n’importe quoi.
Ainsi on voit des employés de la RATP affirmer que leur travail est harassant et qu’il leur est impossible de prolonger leur activité professionnelle de 2 ans, c’est-à-dire de partir en retraite à 54 ans au lieu de 52… On voit des gens qui se prétendent usés, cassés, bien avant leurs 60 ans, et qui revendiquent le droit de “profiter de la vie” plutôt que de continuer à  s'épuiser à la gagner. Quel contraste avec l'image souvent véhiculée par les médias, de retraités septuagénaires et plus, dynamiques, sportifs, voyageurs, hyperactifs ! Le travail est donc bel et bien une aliénation…
On voit aussi des malheureux qui s’échinent en foule compacte, à tenter d’attraper un train, un bus ou un métro les jours de grève, ceux qui patientent dans des files d’attente interminables avant de pouvoir mettre du carburant dans leur auto, lorsque les raffineries sont bloquées par une poignée de nervis à la solde de syndicats subventionnés par l'Etat. Ils seraient, à croire les micros qu’on leur tend, le plus souvent compréhensifs, ou bien fatalistes vis-à-vis de l’infortune qui leur échoit.
Que dire enfin des personnes gorgées d’empathie, mais non sans une pointe de condescendance, qui disent comprendre la hâte à se reposer des travailleurs “aux métiers durs”, alors qu’eux se font une joie d’exercer une profession peu fatigante, passionnante et rémunératrice…

Bref, on en revient aux vieux ressorts de la comédie humaine, dans laquelle les passions et l’égoïsme, supplantent la raison. Vu qu’il n’y a plus d’idéal ni même d’espérance, on ne croit plus à rien d’autre qu’au néant pourvu qu’il soit éco-responsable, et surtout bien nourri, chauffé, propice au farniente. Le débat se meurt. Certains nostalgiques du grand Soir et de la Terreur, cultivent l’ivresse trompeuse des lendemains qui chantent, et voudraient faire croire que le pouvoir du peuple est dans la rue. Mais il n’a fait que passer du niveau du café du commerce à celui du caniveau…

05 novembre 2022

Les rois de la récup

On a pu reprocher à certains politiciens de droite de se saisir de l'atroce histoire de la petite Lola en instrumentalisant ce crime odieux au profit de leurs thèses. On peut même qualifier de maladroits voire d'inconvenants les mots employés par Eric Zemmour en la circonstance, qui font craindre qu'il n'ait tiré aucune leçon de son cuisant échec lors des récentes élections. L’appellation de francocide n’est pas moins galvaudée que celle de féminicide ou d’écocide…

On a sans doute trop cité Camus lorsqu'il affirmait en substance que mal nommer les choses ajoutait au malheur du monde. On n'a pas assez rappelé en revanche les propos de Jaurès lorsqu’il déplorait que faute de pouvoir solutionner les problèmes, on se bornait trop souvent à changer leur nom.
On ne peut toutefois reprocher que soient faits et soulignés avec force des constats objectifs. Passé l'effroi, et quelque peu atténuée l'émotion qui suscite la compassion, il faut donc affronter l'horrible réalité avec lucidité et courage.
Surtout on ne peut laisser sans réagir les ligues de vertu conspuer ceux qui s'appuient sur ce drame pour critiquer l'impuissance étatique et réclamer des mesures concrètes. M. Dupont-Moretti s’est ainsi livré à un numéro ignoble d'imprécateur faussement indigné pour tenter d’occulter son incapacité flagrante à assumer la fonction qu’il occupe. Il fait partie de ces bien pensants niais ou bien veules, qui emboitent le pas des crypto-marxistes de tout poil, engagés sur le chemin trompeur et mortifère menant à d’insondables abîmes nihilistes. Leur rhétorique révolutionnaire use toujours des vieilles recettes. Quoique minoritaire, elle s’avère hélas contagieuse.

Les as de la récup ce sont bien ces gens. Les rois de l'amalgame c'est encore eux. Aujourd’hui même ils se saisissent d’un mot malheureux lancé par un député du Rassemblement National pour intenter un procès en sorcellerie, brandissant les accusations spécieuses de racisme et de xénophobie. Tout le monde s’y met pour participer à la curée du gibier débusqué, du péquin moyen jusqu’au président de la république.
Navrant paradoxe caractéristique de l’époque, dans le même temps qu’on condamne pour des mots, on permet en toute impunité à des élus de prêcher l’insurrection, la grève générale. Rien n’arrête ces enragés de la destruction. N’ayant cure du débat démocratique, ils s’associent à une poignée de manifestants pour barrer les rues jouxtant le Palais Bourbon au prétexte farfelu de la rénovation thermique de l’habitat ! Pire, ils vont, au mépris des arrêtés d’interdiction préfectoraux, main dans la main avec les “éco-terroristes” de Sainte-Soline casser du flic et brailler leur haine des méga-bassines !

Ceux qui passent leur temps à vomir leurs insultes sur les forces de l’ordre, sur les patrons, sur les labos pharmaceutiques, sur le capitalisme et la libre entreprise en fondant leurs slogans sinistres sur des mensonges éhontés. Ceux-là feraient mieux de balayer devant leurs portes. Ils ont tant fois ignoré voire méprisé les victimes et excusé les assassins qu'ils ont perdu toute crédibilité. Honte à ces pharisiens cyniques faiseurs de facto de désordre et de chaos, ces abuseurs de peuples, ces idiots utiles du crime et de la délinquance. Foulant de leurs pieds souillés la liberté qui leur permet d'exprimer leurs insanités, ils font le lit des dictateurs et le berceau de tous les totalitarismes...

20 juin 2022

A bout de souffle

Jamais sans doute au cours de la cinquième république, on n’avait connu pareille situation: un Président de la République largement élu, qui se trouve dans l’incapacité de mobiliser dans la foulée une majorité à l’Assemblée Nationale.
C’est peu dire qu’il s’agit d’un échec cuisant pour Emmanuel Macron dont le second quinquennat s’ouvre sous les pires augures. Sa coalition gouvernementale perd près de cent sièges et se trouve désormais dans l’impossibilité de faire voter les lois sans recourir à des compromis, si ce n’est des compromissions, avec les différents courants d’opposition. De surcroît, elle sera exposée au risque permanent de voir s’abattre le couperet de la motion de censure.

Cette évolution apparemment inattendue était pourtant prévisible depuis de nombreuses années. A force de vouloir ostraciser toute opposition qualifiée “d’extrême-droite” ou de “non républicaine”, à force d’exclure un flot croissant de citoyens du débat politique, les digues ont fini par se rompre.
Foin de proportionnelle, foin de barrage aux extrêmes, le paysage démocratique (si tant est qu’on puisse encore lui donner ce nom) se trouve submergé de toute part. A l'exception du Rassemblement National qui fait une entrée triomphale, les partis se retrouvent morcelés, lorsqu’ils n’ont pas été regroupés sous forme de magmas nauséabonds, formés à la va-vite à seule fin d’engranger le maximum de postes.
A ceci s’ajoute l’absence durable de ligne directrice, de programme clair, de pragmatisme et de détermination manifestée par les Pouvoirs Publics, ce qui a progressivement conduit à faire monter une abstention devenue massive (moins d’un citoyen sur deux s’est déplacé pour voter). C’est aujourd’hui la question de la légitimité même de l’Assemblée Nationale qui se pose.

Comment gouverner le pays dans un tel contexte, c’est une autre question à laquelle devra s’atteler sans délai le chef de l’État. La dissolution et le référendum sont des armes redoutables qui se retournent souvent contre celui qui les emploie. Sera-t-il tenté une fois encore par la stratégie du “en même temps” qui consisterait à chercher ici ou là un soutien occasionnel en fonction des circonstances ? Il y a de grandes chances que cela s'avère infructueux voire carrément incohérent, au regard de la radicalisation croissante des esprits, et le risque est d’aboutir très vite à un vrai fiasco si l’on songe à la première des réformes promises, des plus délicates, à savoir celle des retraites…

14 octobre 2021

La Mort du Débat

Cette fois la terre tremble pour de bon sur la planète politique de France.
Ce séisme était prévisible et avait été précédé d’alertes itératives mais elles avaient été minimisées voire négligées.
Notre médiocre république, qui n’a de démocratique que l'illusion, est depuis des décennies parcourue par de sinistres convulsions. Aujourd’hui, c’est à ce qu’il paraît, l’acmé de cette crise.

Pour en arriver là, il a fallu bien des lâchetés, bien des faiblesses, bien des paroles ronflantes mais creuses, et tant de promesses jamais tenues, de la part de la quasi totalité du monde politique. Le désastre actuel leur incombe donc totalement. La plupart des politiciens ont tout fait pour galvauder les mots de république, de constitution, de démocratie. Ils ont laissé pourrir par leur incurie le fameux trépied Liberté Egalité Fraternité qui aujourd’hui ne veut plus rien dire. Enfin, ils ont mis un zèle incroyable à détruire leur propre image, leur fonction, leur idéologie, leur parti…

Sans remonter à Mathusalem, on se souvient comment François Hollande, par ses magouilles à deux balles, son indétermination incurable et son absence de leadership avait fini par réduire en bouillie le Parti Socialiste en même temps que ses ambitions personnelles. Certes avant lui Mitterrand avait dénaturé le socialisme en faisant alliance avec les communistes, et Jospin "l’austère qui se marre", l’avait ringardisé. Mais l’essentiel du mérite revient sans sourciller au plus calamiteux des présidents de la cinquième république !

A droite, la stratégie ne fut guère plus brillante. Jacques Chirac avait mené son camp dans une impasse à force de trahir sans arrêt ses engagements et surtout de rejeter de manière primaire tout ce qui était plus à droite que son RPR, notamment le Front National, vouant une haine féroce et stupide à ses dirigeants, et un mépris définitif pour toutes les thématiques qu’ils agitaient, non sans raison parfois. Pris dans le piège diabolique ourdi par le faquin de Jarnac, il avait fini par zigouiller son propre camp.
Héritier controversé et instable, Nicolas Sarkozy tenta de le remettre debout mais par son inconstance et ses frasques, il ne fit qu'en clouer le cercueil. Son quinquennat entamé en fanfare a fini en eau de boudin et depuis l’échec retentissant de 2012, suivi de la pantalonnade Fillon, on assiste au ballet navrant des petits chefs de cette armée mexicaine en déroute, venant fleurir avec componction la tombe où gît la Droite, chacun réclamant le retour à l'union derrière son petit fanion dérisoire.

Force est de constater que de son côté, Marine Le Pen a raté la transition post Jean-Marie. Sa stratégie racoleuse à gauche, erratique au plan économique et de plus en plus floue sur les thèmes de la sécurité et de l’immigration a fait un flop. Son incapacité à assumer un dessein national et à incarner la fonction présidentielle ont provoqué le déclassement progressif du mouvement dont elle s’est crue obligée de changer le nom, en vain.
Il est inutile de trop s’étendre sur les problèmes des autres formations, surnageant de part et d’autre. Aucune n’émerge vraiment et les rodomontades et dissensions grotesques qui divisent durablement ceux qui font de l’écologie leur étendard, fort minable au demeurant, est à l’image de l’effondrement du débat politique et de la crédibilité de ses acteurs dans notre pays.
Il reste Emmanuel Macron, arrivé par effraction au sommet de l’Etat, mais qui n’a pas réussi à fonder de parti, ni à s'entourer de gens d’envergure significative. Il survit toutefois dans les sondages, sur son îlot à 25%, bien qu’il ne soit parvenu à rien de concret durant son mandat, hormis entretenir une grogne sociale permanente.

Il n'est en somme pas besoin de faire l'éloge d’Eric Zemmour qui est en train de devenir un acteur politique de premier plan et d'enclencher une dynamique populaire inédite. Il est probable qu'il ne souhaitait pas ce rôle mais il lui échoit car il n'y a personne d'autre pour l’assumer. Ce sera donc lui.
Il n'est pas nécessaire d'être d'accord avec toutes ses idées pour éprouver une certaine satisfaction d'entendre enfin quelqu'un parler sans détour ni circonlocution et faire preuve de vraies convictions (cf le problème Zemmour 1 et 2).
Son succès s'explique donc aisément. Jusqu'où ira son ascension, sera-t-il même candidat, ce sont pour l’heure les seules questions qui vaillent.

Le fait est qu’il désarme toute opposition et renvoie sans difficulté dans les cordes celles et ceux qui cherchent à enrayer son ascension, tant leurs arguments paraissent inappropriés, inopérants, voire franchement stupides à force de vouloir systématiquement se démarquer de lui.
Foin des blagues nauséabondes des humoristes du service public, qui tombent à plat, foin des rodomontades de Ruquier qui joue au caïd borné, à la manière d'un petit Beria, en souhaitant qu’on éradique “le virus Zemmour”. Foin enfin des ministres, totalement à court d'inspiration et sentant le sol se dérober sous eux, qui y vont de leurs invectives dont la répétition niaise épuise les esprits : négationnisme, révisionnisme, pétainisme, fascisme, peste brune…
En somme, sans vouloir minimiser son talent de bretteur, Zemmour grandit parce que tout s’effondre autour de lui.
Il ne reste plus grand chose du débat politique. Ni stature, ni idée, ni dessein. C’est vrai de Marine Le Pen qui s’enlise inéluctablement et de plus en plus rapidement dans le déni. C’est vrai des candidats putatifs de droite tels Valérie Pécresse qui s’époumone dans le désert à faire croire qu’elle a pris en considération le problème de l’immigration, ou de Xavier Bertrand, de Michel Barnier qui ont passé tellement de temps à polir leur image de rassembleurs consensuels qu’ils se retrouvent de plus en plus isolés et transparents. C’est vrai enfin de tous les groupuscules plus ou moins insoumis qui patinent dans la semoule faisandée de la révolution.
M. Macron quant à lui conserve un certain potentiel de sympathie en dépit d’une politique toujours plus incohérente, contradictoire et inefficace. Pour combien de temps ? Il est à ce jour la cible des attaques d’Eric Zemmour, qui semble avoir déjà évincé tous les autres adversaires...

14 août 2021

Adieu Kaboul, adieu Liberté

La capitale afghane n’est pas encore tombée aux mains des Talibans, mais le sort de cette ville et de tout le pays paraît d’ores et déjà scellé. La progression fulgurante des fous de Dieu ne laisse guère de doute quant à leur retour, favorisé par le désengagement américain et l’abandon de tout un peuple par la Communauté Internationale, beaucoup plus préoccupée par le COVID ou le réchauffement climatique...
La faute incombe évidemment également aux Afghans eux-mêmes et à leurs dirigeants, qui se sont montrés incapables de mettre à profit l’aide internationale colossale qui leur a été apportée durant deux décennies pour organiser une société libre, pacifique et démocratique. Tragique constat, hélas prévisible depuis déjà quelques années, et responsabilités multiples...
Ironie du sort, 2021 marque le vingtième anniversaire de l’intervention internationale entreprise à la suite des horribles attentats du World Trade Center.

Malheureusement, vingt années n’ont pas suffi pour éradiquer la vermine obscurantiste qui, telle une armée de termites opiniâtres, revient plus forte et déterminée que jamais. Tous les efforts, toute l'énergie, toutes les vies humaines consacrés à la reconstruction d’un pays en proie à la barbarie ont donc été vains. Les mêmes causes entraînant les mêmes effets, il y a fort à craindre que l’Afghanistan retourne à la triste situation qu’il a connue lorsque la charia faisait régner une terreur moyenâgeuse. Il est également probable que ce chaos fasse le lit de nouveaux groupes terroristes.
Dans cette triste histoire, le cortège des nations montre une fois de plus son impuissance désespérante, si ce n'est une vaste indifférence. Pas un mot, pas une résolution, pas un casque bleu en provenance de l'ONU...
Chacun se bat la coulpe au souvenir des horreurs du passé en clamant “qu’on ne verra plus jamais ça”, mais l’histoire a une fâcheuse tendance à se répéter et il s’avère plus que jamais difficile de passer des paroles aux actes. Les plus audacieux se bornent à informer les rebelles qu’ils ne reconnaîtront pas un régime imposé de manière non démocratique ! Le chef de la diplomatie de l’Union Européenne, Josep Borrel prévient les Talibans : “S’ils prennent le pouvoir par la force et rétablissent un émirat islamique.../… ils subiront l’isolement, un manque de soutien international et la perspective d’un conflit continu et d’une instabilité prolongée en Afghanistan.”
Autant pisser dans un violon, face à cette horde conquérante qui n’a que faire de ces veules leçons de morale !

En attendant, on rapatrie avant la catastrophe annoncée, les ressortissants et le personnel diplomatique, à l’instar de ce qui s’était passé dans les années soixante-dix avant la chute de Saïgon, puis de Phnom Penh, puis de Téhéran, etc...
Et l’on plaint par avance avec des larmes de crocodile les populations sacrifiées sur l’autel de la couardise et de l'hypocrisie réunies. On s’attend déjà à voir errer les myriades de réfugiés, les malheureux qui n’auront d’autre espoir que de fuir et d’émigrer. Quant à ceux qui avaient déjà fait le pas et qui se trouvaient en situation irrégulière, la France généreuse annonce “avoir suspendu les expulsions de migrants vers l’Afghanistan”. Belle perspective, et beau résultat…
Comme le déplore avec amertume l’historien Jean-Charles Jauffret "Nous assistons au naufrage d'un pays en nous croisant les bras..."

29 mars 2021

Romance au Botswana

Qui connaît Seretse Khama ? Qui connaît la capitale du Botswana ? Et qui connaît mieux qu’à peine ce pays, presque aussi grand que la France mais dont on ne parle quasi jamais ?
Il est situé entre la Namibie et le Zimbabwe (ex-Rhodésie), au nord de l’Afrique du Sud. Sa capitale est Gaborone, ville quasi frontalière avec cette dernière, et que 300 kilomètres à peine séparent de Pretoria.
Parfois qualifié de Suisse de l’Afrique, le Botswana fut le siège d’une aventure assez extraordinaire, alors que le monde se remettait tout juste des horreurs de la seconde guerre mondiale.

Connu à l'époque sous le nom de Bechuanaland, le Botswana était un protectorat britannique et Seretse Khama (1921-1980) était l’héritier putatif de la couronne royale de la dynastie tribale des Khama dont son père était le dernier représentant en fonction. A la mort de ce dernier en 1925, le fils était bien trop jeune pour assumer la charge, confiée à la régence de son oncle Tshekedi Khama.
Parti pour l’Angleterre en vue d’y faire ses études et parfaire sa connaissance du monde et notamment des liens qui unissaient l'empire anglo-saxon à sa nation, réduite à l'état de vassale, un évènement imprévu bouleversa le cours du destin. Il arriva que le jeune prince s’éprit d’une compatriote de Shakespeare, nommée Ruth Williams, avec laquelle il se trouva beaucoup d’affinités dont un amour immodéré pour le jazz... 
Mais ce qui allait devenir une grande histoire d’amour se heurta très vite à de nombreux obstacles. Ce fut tout d'abord la famille de Ruth, qui exprima sa réprobation, surtout lorsque Seretse manifesta l’intention d’épouser celle pour laquelle il avait une si forte inclination.
En dépit des réticences, le mariage fut toutefois célébré en 1948, mais de retour au Botswana, le prétendant au trône et son épouse furent accueillis plutôt fraîchement, notamment par l'oncle tuteur, pour lequel il paraissait impensable que la future reine fut blanche et d’origine étrangère.
Le Conseil des Anciens fut plus compréhensif et donna raison au jeune prince plutôt qu’à son oncle, lequel préféra l’abdication à ce qu’il pensait être le déshonneur. La partie était loin d'être gagnée toutefois.
Alors que Seretse était reparti en Angleterre pour y plaider sa cause, il rencontra des réticences très vives de la part des autorités. Celles-ci voyaient également cette union d’un très mauvais œil, craignant en effet qu'elle entraine la détérioration des relations avec l’Afrique du Sud dont l’or et l’uranium étaient plus que jamais nécessaires au sortir de la guerre.
Résultat, le gouvernement travailliste de l’époque s’opposa au retour de Seretse dans son pays natal et Churchill, parvenu peu après au pouvoir, fit de cet exil un bannissement définitif, en dépit semble-t-il d’engagements pré-électoraux…

Ce n’est qu’en 1956, alors qu’il avait déjà donné naissance à deux enfants, que le couple fut enfin autorisé à repartir pour le Botswana, mais en tant que simples citoyens...
Bien que contraint de renoncer au trône, Seretse Khama ne se découragea pas. Il entreprit une carrière politique et fonda le Parti Démocratique du Bechuanaland. Grâce à sa popularité et peut-être aussi à la sincérité et au courage dont il sut faire preuve, son ascension fut rapide et après avoir gagné les élections, il devint premier ministre puis président de la république en 1966 lorsque son peuple obtint l’indépendance.
Le Botswana qui était alors un des trois pays les plus pauvres d’Afrique vit peu à peu sous son autorité sa situation s’améliorer et son organisation politique prendre la forme d’une démocratie moderne. Resté tel jusqu’à nos jours, il fut nettoyé de la corruption, mal endémique en Afrique, doté d’une fiscalité incitative et d’une gestion intelligente des ressources minières. Hélas ce brillant parcours fut interrompu par la mort prématurée de Seretse, atteint d'un cancer du pancréas à l'âge de 59 ans. Son fils, Ian, fera à son tour de la politique et accédera lui aussi à la présidence de la république 28 ans après la mort de son père.

Jusqu’à la disparition de Seretse, jamais l’union des amants hors normes ne fut prise en défaut. Cette aventure méconnue et à peine croyable, a été portée au cinéma par la réalisatrice Amma Asante. C’est le mérite de cette dernière que d’avoir fait sur ce sujet délicat mais très actuel, une œuvre mariant avec efficacité et pudeur la romance avec l’Histoire, sans sombrer dans le mélo, le sermon ou la grandiloquence. Le film, United Kingdom, interprété par David Oyelowo et Rosamund Pike, reçut un accueil mitigé de la critique. Il est certes classique dans la forme et sa narration s’inscrit dans un schéma très linéaire. Inspiré de faits réels qui sont racontés sans discours inutilement moralisateur ni victimaire ou revanchard, et sans fioriture par trop mélodramatique, il n’en est pas moins édifiant et pourrait être érigé en modèle par nombre de champions de l’anti-racisme, beaucoup plus à l’aise dans les accusations et la révolte que dans la glorification de visions apaisées ou l’éloge de personnes constructives...


20 janvier 2021

La Chèvre

Surréaliste passation de pouvoir aux Etats-Unis ce 20 janvier. A quelques heures, de l'évènement, on peut imaginer qu'on assistera à un étrange ballet mettant en scène un Capitole transformé en camp retranché, sous protection militaire, confronté à la double menace du coronavirus et de partisans frénétiques du président sortant. Ce dernier brillera par son absence, parti tranquillement vers sa résidence privée de Floride, et l’on verra l’impétrant, bien seul, masqué, chancelant, prêter serment dans ce décor crépusculaire. Au lieu d’une fête, ce sera un huis clos sinistre. Il n'y aura guère que les drapeaux pour faire foule...
On se souvient que l’intronisation de Donald Trump, il y a quatre ans, s’était également déroulée dans un contexte inhabituel, et avait été l’objet d’assez désagréables manifestations. Le camp démocrate ne digérait pas sa défaite et les caméras médiatiques s’attardèrent longuement sur les banderoles exhibées jour et nuit pendant plusieurs semaines par des enragés campant devant la Maison Blanche. Personne ou presque à l’époque ne trouva choquant le beau slogan anti-démocratique “Not My President” !

L’Amérique est divisée et cela ne date pas d’hier.
Joe Biden aura-t-il la force, la volonté et le temps d’apaiser ces tensions comme tant de belles âmes en font le vœu pieu et touchant ? Ce vieillard est un roué politicard, qui fut, il y a presque 50 ans, le plus jeune sénateur. Il est désormais le plus vieux président à entrer dans le Bureau Ovale.
Il fut un terne et gaffeur vice-président durant 8 ans. Il parvient enfin au pouvoir au terme d'un processus électoral contestable, sans avoir fait campagne, et sans avoir de programme, hormis le souci maladif d’effacer l’ère Trump au plus vite. Il se trouve de facto prisonnier des anti-Trump primaires, assoiffés de revanche. Cette folie auquelle l’intéressé a lui-même participé par jeu et par provocation, avait atteint de tels sommets qu’elle aurait sans doute permis à une chèvre d’être élue, pour reprendre le mot d’un commentateur facétieux lors de l’élection de François Hollande contre Nicolas Sarkozy en 2012.

Anticipant les exégèses partisanes, Donald Trump a fait lui-même le bilan de son action. Avec sans doute un peu de lyrisme et d’emphase, mais non sans quelques vérités objectives que l’Histoire retiendra peut-être, une fois les passions assagies…
S’il a raté indéniablement sa sortie, il n’a pas à rougir de sa prestation dans un contexte international tendu et intérieur très hostile. Il a plus fait pour le pouvoir d’achat et la prospérité des Américains et notamment des Noirs et des Latinos qu’Obama. Il a œuvré avec un certain succès pour la paix au Proche-Orient. Il a contenu autant que possible l’expansionnisme chinois et la menace iranienne. Il a garanti une prospérité économique à son pays, et maintenu le chômage à un de ses plus bas niveaux historiques. On a dit qu’il n’avait pas su juguler la pandémie COVID-19, mais l’honnêteté oblige à reconnaître qu’il fut, en élaguant la jungle administrative et en sponsorisant les laboratoires, le principal artisan du développement rapide des vaccins sur lesquels tant d’espoir reposent désormais.

En définitive, il y a peu de mauvais présidents aux Etats-Unis, sans doute grâce au système démocratique performant mis en place en 1789 et à un équilibre savamment dosé des pouvoirs. Pourvu que cela dure, et à l’instar du président sortant, prions pour la réussite de l'administration Biden...

07 janvier 2021

L'Amérique Fracturée

Le consternant spectacle que les Etats-Unis ont donné au monde ce mercredi 6 janvier est un nouveau révélateur explosif de la grave crise que traversent depuis quelques années nombre de démocraties.
L’Amérique, première d'entre elles et la plus ancienne, la plus stable, branle dangereusement sur ses fondations.
Le nom du nouveau Président de la République n’a pas pu être proclamé et certifié par le Congrès. Ce dernier, a été contraint de reporter sa séance suite à l’irruption violente dans l'enceinte du Capitole, de manifestants pro-Trump, n’acceptant pas l’annonce plus que probable de la défaite de leur champion.
Evidemment, celui-ci n’est pas pour rien dans ce brutal déchaînement populaire. Il porte même une lourde responsabilité dans la survenue des troubles en raison notamment du discours vindicatif tenu ce jour même, refusant obstinément de reconnaître le verdict des urnes, et exhortant le peuple à manifester à Washington.
Triste fin de mandat pour un élu décidément pas comme les autres et attitude évoquant fort la politique de la terre brûlée. Il est évident que ce jusqu’au-boutisme ne peut mener à rien de bon et sûrement pas à son maintien au pouvoir. Pire même, il a sans doute contribué à ruiner les derniers espoirs du
 Grand Old Party de conserver la majorité au Sénat, puisque les deux postes encore en lice en Georgie sont en passe d'être perdus alors qu’ils étaient à portée de main, l’un des deux candidats républicains étant même passé à un cheveu de l’élection au premier tour.

Inutile de revenir sur le déroulement calamiteux des élections générales du 3 novembre dernier. Elles resteront entachées d’un fort doute quant à la régularité des procédures, la faute en premier lieu au COVID-19 qui contraignit à recourir massivement au vote par correspondance, sujet de tant de controverses. Mais tous les recours intentés ayant fait long feu, les résultats paraissent irréversibles.
Ce foutu virus avait auparavant enrayé la campagne électorale et quelque peu perturbé la dernière année du mandat présidentiel de Donald Trump. Ses adversaires s'étaient donné à cœur joie évidemment, de stigmatiser sa gestion déplorable de l'épidémie.
Alors que sa réélection paraissait jusqu'alors probable, son crédit fut sérieusement entamé par la crise durant laquelle il se montra très maladroit, affichant une arrogance imbécile et abusant jusqu'à l'outrance de ses habituelles provocations. S'il fut en quelque sorte l'artisan de son infortune, il faut dire qu'il eut maille à partir avec une opposition aussi stupide que délirante, cherchant toutes les occasions pour tenter de le faire chuter. Sa légitimité ne fut jamais acceptée par près de la moitié du pays et dès son arrivée au pouvoir en 2016 on avait assisté à une véritable bronca médiatique. Un formidable torrent de haine se déversa à jet continu durant 4 ans sur sa personne, ses paroles et ses actions, lesquelles ne furent pourtant pas toutes mauvaises, loin de là.
Trump ne fit rien certes, pour apaiser les passions mais à sa décharge, il y a de quoi perdre son calme et sa sérénité quand jour après jour on est l'objet de toutes les insultes imaginables et qu'on doit faire face à une épuisante remise en cause, par principe, de tous ses actes.
 
Force est de faire le constat que l’Amérique, et une bonne partie du monde avec elle, semblent sombrer dans l’irrationalité, conduisant à l’exacerbation des opinions et à la radicalisation croissante des esprits. Cause ou conséquence, les processus électoraux sont de plus en plus souvent remis en cause un peu partout, semblant donner raison au vieux slogan soixante-huitard "élections piège à c..." Un nombre grandissant de gens s'estiment régulièrement floués par les résultats des scrutins, et leur insatisfaction grandit, se traduisant tantôt par l'indifférence, tantôt par le mépris pour les élus et les institutions, et tantôt par la révolte.

Les États-Unis apparaissent aujourd’hui sévèrement traumatisés, divisés, victimes de fractures multiples et en perte de direction.
Il est peu probable que le malheureux Joe Biden, insipide et incertain, mal élu de surcroît, parvienne à inverser le cours des choses. Il est porté par des gens qui ne sont pas moins intolérants que les supporters de Trump, et le Parti Démocrate fait l’objet de tiraillements idéologiques qui fragilisent par avance toute politique, si tant est qu’il y en ait une...
Quant au Parti Républicain, il risque fort de se voir affecté par les dérapages de Donald Trump, désormais sans limites, et source probable de futures dissensions internes.

L’avenir est donc sombre. Et quand l’avenir de l’Amérique s’obscurcit, celui du monde tend à devenir chaotique. L’Europe ne va guère mieux par les temps qui courent, et à l’Est, le soleil qui se lève, suscite beaucoup d’inquiétudes. En Chine on réduit au silence les entrepreneurs manquant d'égards pour le Parti, tel le fameux Jack Ma, fondateur d'Ali Baba, et aujourd’hui même on apprenait la rafle massive à Hong-Kong organisée par le Pouvoir Central à l'encontre des opposants pro-démocratie.
La planète se serait-elle mise à tourner à l’envers ?

05 novembre 2020

Encore trumpé...

Ça y est, “ils” ont probablement réussi cette fois à venir à bout de "la bête". Encore quelques heures ou jours de suspense mais les jeux semblent faits. Donald Trump devra selon toute probabilité bientôt quitter la Maison Blanche, bon gré, mal gré.


“Ils”, c’est toute cette foire aux lobbies bien-pensants, politiquement corrects,
démocrates à l'américaine, libéraux à l’anglo-saxonne, black lives matter, occupy wall street, anti-spécistes, LGBT, féministes, femen, me-too, écolo-bobos, alter-mondialistes, réchauffistes, médias partisans, showbiz engagé,  gauchistes et intellos de tout poil, qui sont vent debout contre le président élu en 2016.
Durant quatre années qui leur parurent une éternité ils n’ont eu de cesse avec un a priori sous-cortical à la Pavlov de le faire chuter, faisant obstacle à toutes les mesures qu’il tentait de mettre en œuvre, ridiculisant systématiquement toutes ses interventions, essayant même d’obtenir sa destitution pour des motifs grotesques.

Peu importait les résultats qu’il obtenait en matière économique ou sur le front du chômage. Peu importait ses efforts pour préserver les intérêts de son pays face à l’ogre chinois ou à la menace iranienne. Peu importait en somme qu’il tint ses promesses. Ces gens n’avaient qu’une haine revancharde primale à la bouche et à l'esprit, qu'ils purent déverser à jet continu, en toute impunité. Il est clair qu'ils n’ont que faire de la réalité et de l’esprit pratique, seuls les principes idéologiques comptent. A l'instar des procès en sorcellerie, c’est au nom de ces derniers qu’ils avaient condamné sans appel et quoiqu'il fasse le vilain Donald.

Fort d’une base électorale solide et fidèle, il leur tint tête, n’hésitant pas à fanfaronner, et à les provoquer, se croyant à tort invincible. Il semblait presque y être parvenu en dépit de la force de frappe médiatique colossale qui le pilonnait sans cesse.
Comme en 2016, Trump s'est battu comme un lion et a fait une fois encore mentir les instituts de sondages, dont on peut douter de l’impartialité si ce n'est de la compétence. Mais il va être terrassé par le mainstream bien-pensant qui vitrifie tout sur son passage, quitte à préférer porter à la Maison Blanche un vieillard cacochyme, à la sénilité avancée et à la probité douteuse. Sans doute sera-t-il plus malléable. On a vu ça en France avec le président “normal” Hollande. Triste souvenir... Ça ne présage rien de bon, et l’Amérique apparaît plus divisée que jamais en deux moitiés de plus en plus irréconciliables.

Le COVID-19 fout le bordel même dans les élections, on l'a vu avec nos municipales complètement ratées. Contrairement à ce qu’on dit, Trump ne pouvait pas grand chose pour casser la progression du virus. Il a tout misé sur les vaccins et allégé avec efficacité les réglementations pour accélerer la recherche et les essais cliniques. L'avenir lui donnera peut-être raison... mais trop tard ! Aux USA, la responsabilité incombe autant aux autorités locales que fédérales. Toujours est-il qu'à l'occasion de l'épidémie, le système des votes par correspondance, a pris des proportions assez surréalistes. Comment ne pas avoir un doute sur la régularité d’un scrutin dans lequel plus d’un tiers des bulletins échappe à tout contrôle sérieux ?

Tout cela est révélateur hélas de la déconfiture et de l’auto-destruction du monde occidental. Il vacille sur ses fondations et des fissures annonciatrices de catastrophes se font jour un peu partout. Le coronavirus est un révélateur parmi d'autres, de ce délabrement général.
De l'autre côté l'Asie s'éveille. Elle a pris très tôt la mesure de l’épidémie, elle croit plus que jamais à son modèle et ne passe pas son temps à remettre en cause son passé, sa religion ou sa culture. Elle a l’avenir devant elle.
Nous sommes de facto entrés dans une période de grands troubles et de grandes turbulences. L’Amérique risque d’aller de plus en plus mal, ce qui est sans doute beaucoup plus dangereux pour la planète que le réchauffement climatique. L’Europe quant à elle, particulièrement dévastée par la pandémie, existe de moins en moins en tant qu’entité. Les quelques liens qui unissaient les nations se disloquent peu à peu. Il n’y a plus, si tant est qu'il y en eut, de dessein commun en dehors d’une bureaucratie qui pèse de plus en plus, et de dettes qui s’accroissent de manière vertigineuse. L’immigration non contrôlée, le terrorisme, les révoltes sociales incessantes contribuent à désagréger un édifice déjà fragile.


Aux States, si le Président et la Chambre des Représentants seront aux couleurs du Parti Démocrate, les Républicains devraient toutefois garder le Sénat et une Cour Suprême plutôt de leur côté, même si elle se doit d’être au dessus des partis. Un semblant de pluralité sera préservé dans cette démocratie fracturée. Joe Biden quant à lui n’a pas beaucoup de temps pour convaincre, dans un contexte très tendu et avec un programme erratique, débordant de bonnes intentions et de promesses angéliques mais sans ambition. Dans 2 ans, il y aura de nouvelles élections pour renouveler la Chambre des Représentants et tout peut à nouveau basculer...
En attendant, le temps va paraître long à certains car au moins avec Trump on ne s’ennuyait pas...