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09 février 2021

Cancel Culture

Après la contre-culture des années soixante, voici l’avènement d’une nouvelle contestation, bien plus radicale: la Cancel Culture.
La première s'était targuée de casser les codes classiques et bourgeois, et de faire naître un Nouveau Monde fondé sur le partage, la solidarité, et la paix. Les racines de ce mouvement plongeaient dans le vaste terreau des révolutions, presque aussi vieux que la condition humaine. Il s’agissait d’opérer un retour aux sources, supposé s’opposer à la technique, à la mécanisation et à l’industrialisation, qui manquaient certes de poésie et de romantisme, bien qu'ils aient apporté la prospérité et le confort matériel.
La révolution n’étant en somme rien d’autre que l’art de tourner en rond, cette belle et louable ambition tourna largement au fiasco, charriant au passage des montagnes de naïveté idéologique, et faisant le lit de monstrueux totalitarismes fondés sur l’illusion socialiste.
Les stupides crédos marxistes-léninistes, néo-constructivistes, voire nihilistes de l’époque, ne doivent pas conduire à occulter la nature libertaire du mouvement ni l’impressionnante floraison de courants artistiques, notamment musicaux qu’il engendra. Dans ce magma fumant, on pouvait trouver des perles et surtout un vrai amour de la liberté.

C’est tout autre chose avec la nouvelle rébellion, qui non contente de mépriser le passé, voudrait purement et simplement l’effacer des mémoires. L’objectif est désormais d’éradiquer au nom du progressisme, toute culture ne répondant pas strictement aux oukases de plus en plus extravagants des gourous de la pensée correcte. Il ne s’agit même plus de lutter contre les idées jugées malfaisantes, il faut les annuler ! Au nom de l'égalitarisme, on en vient à nier les différences sensibles (sexes, genres, races, espèces, religions, talents, handicaps...) et en vertu du principe de précaution à rendre suspect tout progrès technique susceptible d'agir sur les écosystèmes, le climat ou la nature en général.
Il n’y a plus rien de festif hélas dans cette démarche, et la liberté fait le plus souvent figure d'obstacle à la folle quête d’absolu qu’elle incarne.
On voit à l'œuvre hélas depuis déjà quelques années ces nouveaux puritains, dont le fanatisme destructeur ne fait que s’exacerber à mesure que grandit l’intérêt qu’on porte à leurs théories.
C'est ainsi qu'après bien des excès en tous genres, on apprend ces derniers jours, que pas moins d'un tiers des écoles publiques de San Francisco sont en passe d’être débaptisées pour cause d'inconvenance par rapport aux nouveaux dogmes éthiques. Une commission créée spécialement par le School Board de la cité californienne s’est fait un devoir d’éplucher la biographie des personnages illustres dont le patronyme orne le frontispice de ces établissements. Le moindre écart est impitoyablement repéré et sanctionné. Et c’est une effroyable épuration à laquelle on assiste, qui n’épargne pas même les Pères Fondateurs de la République Américaine.
Finis les collèges Washington, Jefferson ou Madison, car ces gens sont jugés coupables d’avoir exploité des esclaves. Lincoln lui-même fait partie des proscrits. Il avait certes aboli l’esclavage mais il a commis le crime irréparable de ne pas s’opposer à l’exécution d’une trentaine de chefs indiens ! Dans cette liste noire, on trouve également Edison qui lors de ses nombreuses expériences s’est laissé aller à faire électrocuter des animaux...
Alors que la pandémie au COVID-19 fait rage, notamment en Californie, et que les écoles sont pour la plupart fermées depuis un an, les nouveaux censeurs ne trouvent donc rien de mieux à proposer que de dépenser au bas mot 8 à 10.000 dollars par école, pour les purifier de ce qu’ils considèrent comme une intolérable souillure. 
Mais comment pourront-ils renommer ce qu’ils anéantissent ? Ils ne veulent plus de personnages historiques, suspects par nature selon eux. Certains proposent des noms d’animaux, d’autres préconisent de simples numéros. Mais au bout du raisonnement, faut-il encore des écoles ?

Et comment ne pas évoquer devant ce désastre culturel les islamistes les plus fous, détruisant pour complaire à l’idée qu’ils se font de Dieu, le patrimoine architectural et artistique des pays où ils sévissent ? Comment ne pas penser aux staliniens, maoïstes, castristes et autres polpotiens qui tentèrent au nom de l’idéal communiste d’éliminer de la cervelle de leurs victimes toute trace du monde ancien ?
On frémit à la lecture de l’article publié en 1999 par une certaine Tema Okun, qui a paraît-il servi de base de travail à la commission. Intitulé "White Supremacy Culture", on y trouve notamment prônée, la nécessité de lutter contre le "culte de l'écrit", considéré comme un aspect de la suprématie blanche, à l'instar du "perfectionnisme", du “sens de l'urgence”, de “l'individualisme” et de “l'objectivité”...
Il ne semble plus y avoir de limite à la logique psychotique dans laquelle les nouveaux singes de la bonne intention veulent plonger leurs semblables en voulant faire table rase du passé et de tout ce qui pourrait être jugé impur ou imparfait dans le présent, refusant ipso facto le futur. La démocratie semble en voie d'enfanter un monstre et Blaise Pascal doit se retourner dans sa tombe, lui qui affirmait qu’à trop vouloir faire l’ange, on fait la bête...

13 juin 2019

La Philosophie Devenue Folle (2)

Dans son ouvrage donnant son titre à cette série de billets, Jean-François Braunstein s’attache à montrer comment les concepts paraissant les plus évidents, et les repères les mieux établis, sont en passe d’éclater. Il en est ainsi de l’identité sexuelle, sous la pression de la désormais célèbre théorie du genre.

Cela commence par l’horrible histoire de David Reimer.
Première malchance pour ce garçon, la nature l'avait affligé d’un phimosis, sténose congénitale mais anodine du prépuce.

Hélas, ce qui aurait pu être résolu simplement, fut le début du drame de son existence. Il fut atrocement mutilé par le chirurgien incompétent chargé de corriger cette infirmité.
Après les complications causées par sa maladresse, il ne resta au jeune patient quasi plus rien de son pénis originel.
Pour second malheur, il fut présenté au psychologue et sexologue néo-zélandais John Money, considéré comme “pionnier dans le domaine du développement sexuel et de l'identité de genre”. Celui-ci avait une théorie bien arrêtée selon laquelle on ne naît pas garçon ou fille mais on le devient, bien plus par le biais de l’éducation que par les attributs sexuels de naissance. Pour David que son infirmité empêchait de devenir un homme dans toute sa plénitude, il suffisait donc selon lui, d’en faire une fille en commençant par l’éduquer comme telle, non sans lui avoir auparavant retiré ce qui restait de ses attributs sexuels masculins !

Les premiers résultats de cette thérapeutique radicale semblèrent favorables et passionnèrent d’autant plus Money que son patient avait un frère jumeau, né avec la même infirmité, mais élevé lui comme un garçon puisque dans son cas, l’opération s’était bien déroulée.
Fort de ce qu’il prit pour un succès, John Money parada dans les revues scientifiques affirmant peu ou prou qu’il était en passe de faire la preuve de la supériorité de la culture sur la nature. Il était tellement sûr de son raisonnement qu’il préconisa pour stabiliser dans son nouveau genre David devenu Brenda, de parfaire l’apparence d’une fille, par des traitements hormonaux et une plastie chirurgicale des organes génitaux.
Mais l’affaire tourna court car en prenant de l’âge, le malheureux se sentait au fond de lui de plus en plus garçon. A 13 ans, il refusa hormones et chirurgie et fit tout pour redevenir l’être de sexe masculin qu’il était et réussit même à se marier. Il ne parvint toutefois pas à trouver la sérénité et finit par se suicider à l’âge de 38 ans, tandis que son frère jumeau, lui aussi gravement déstabilisé, sombra dans l’alcoolisme et mourut également prématurément.
Cette tragédie édifiante ne servit nullement de leçon aux apprentis sorciers du genre. John Money nia son échec et continua d’exercer son sinistre magistère dans les établissements les plus prestigieux notamment le Johns Hopkins Hospital de Baltimore, accusant ses détracteurs d’être d’extrême-droite ou bien anti-féministes !

Il eut une flopée d’épigones qui bien que critiquant parfois le maître, continuèrent sur la même voie, destructrice. Notamment Anne Fausto-Sterling, pour laquelle le sexe n’existe pas indépendamment du genre, ou bien Judith Butler qui remit en cause le dogme selon lequel il n’existerait que 2 sexes. En vertu du principe qui veut qu’une fois les bornes franchies il n’y a plus de limites, tout cela évolua vers une espèce d’indistinction générale. Selon les Diafoirus du genre, on peut en somme exprimer une infinité de nuances, voire changer au gré de ses humeurs, être fille le matin, garçon l’après-midi ou l’inverse, peu importe… Parallèlement, le corps et son apparence peuvent être modifiés, selon ses envies ou bien ses lubies, des plus douces, comme le tatouage redevenu très tendance, ou le piercing, jusqu’aux plasties en tous genres plus ou moins esthétiques, voire aux perversions les plus folles telle l’apotemnophilie, qui conduit à vouloir se faire amputer d’un ou plusieurs organes.

Parvenu au terme de cette plongée d’un nouveau genre, Jean-François Braunstein s’interroge: “comment savoir quelle identité est la nôtre dès lors qu’il n’y a plus aucun indice matériel qui nous indique ce vers quoi nous tendons ?”
Si l’on pouvait être certain qu’un jour le bon sens finisse par s’imposer à nouveau et si les conséquences n’étaient parfois pas si graves, on pourrait peut-être en rire. Au vu notamment des proportions prises par ces controverses nées aux USA, lorsqu’il s’est agi de redéfinir l’accès aux toilettes publiques et la signalétique autorisant les personnes à utiliser les toilettes qu’elles désirent selon le genre auquel elles s’identifient, au-delà de leur sexe biologique.
Au moment où la civilisation occidentale semble en phase de déclin, tout cela n’est pas sans rappeler les querelles byzantines concernant le sexe des anges, au moment même de la chute de Constantinople…

14 février 2014

L'égalitarisme entre doctrine et duplicité


Le porte-à-faux intellectuel qui fragilise tôt ou tard toute pensée dite “de gauche”, se manifeste de manière particulièrement palpable par les temps qui courent.
Faute de pouvoir poursuivre le raisonnement jusqu’au bout de sa logique destructrice, comme au temps du communisme, le décalage entre l’idéologie et la réalité contraint les soi-disant progressistes  à réviser sans cesse leurs positions.
Ils se livrent à des contorsions de langage confinant parfois carrément au comique, pour masquer leurs reculades ou bien dissimuler les restes peu avouables du catéchisme auxquels ils se raccrochent encore. Mais parfois, sous leurs pieds la faille s’élargit tellement qu’elle les conduit au grand écart dont ils ne se sortent qu’au prix de mensonges éhontés.


En matière économique, les atermoiements et renoncements du Président de la République sont risibles. Autant ses charges contre la Finance Internationale et sa vindicte à l’encontre des Riches sonnaient faux comme du toc, sauf pour des gogos décérébrés par une haine primaire du capitalisme, autant son prétendu virage social-démocrate ne peut convaincre que les sots ou les amateurs de couleuvres (il semble au vu des sondages, qu’ils soient finalement assez peu nombreux...).

Dire tout et son contraire, voilà certes un travers assez partagé au sein de la classe politique, mais dans le genre palinodique, il faut bien reconnaître que les Socialistes ont porté la technique à un paroxysme.
A propos de la fumeuse “théorie du genre”, qui agite les esprits, et de sa déclinaison bouffonne sous la forme des “ABCD de l’égalité”, combien de sottises, de contrevérités et de propos de mauvaise foi peut-on entendre de la bouche des satrapes qui tiennent les ficelles du pouvoir !
Puisque leurs intentions sont facilement déchiffrables par tout un chacun, et pour imbéciles qu’elles puissent paraître, ils pourraient au moins avoir le courage de les défendre. Au lieu de ça on a droit de leur part à un festival de faux semblants assez indignes.

Pour preuve, Manuel Valls, ci-devant ministre de l’intérieur, a sombré dans l’idiotie pure, en assimilant
la “manif pour tous” du dimanche 2 février, avant même qu’elle ne se déroule, aux “forces sombres de la division”, allant jusqu’à accuser ses participants “de faire régner un climat comparable à celui des années 30” et à promettre "une très grande sévérité" de la part des forces de police.
Mais la championne grinçante de cet art de la dissimulation et de l’amalgame, est la ministre “des droits des femmes”, Najat Belkacem. Affichant un sourire carnassier, elle fusille systématiquement d’un regard noir, assassin, toute personne osant s’élever contre les dogmes sur lesquels elle veille, comme une louve, sur ses petits. On a pu la voir lors d’une récente émission télévisée, à propos de l’infâme bouillon idéologique égalitaire concocté dans le grand chaudron de l’Education Nationale, ne pas hésiter à nier l’évidence. A la manière d’une mécanique sinistre et sans âme, elle n’eut de cesse de reprocher à ses contradicteurs, tantôt de propager des rumeurs, tantôt de se poser en adversaires du louable dessein tendant à instaurer l’égalité hommes-femmes.
Son registre est limité mais parfaitement maîtrisé. Quelque soit la force de l’argument qu’on lui oppose, telle une apparatchik disciplinée, jamais elle ne dévie d’une ligne dialectique aussi simple que fallacieuse, au risque de faire injure à son intelligence, qu’elle a pourtant vive. Enfermer son esprit dans un tel carcan, si jeune, c’est atroce et si vain...

Ces gens espèrent-ils par ces stratagèmes médiocres, pouvoir encore longtemps mystifier l’opinion publique ? Hélas, même si les cotes de popularité s’effondrent, si le rideau mité du Socialisme se déchire de part en part, si les illusions se dissipent, on sait trop que la crédulité se nourrit des mensonges et de la duplicité… Jusqu’à quand ?

15 septembre 2011

Confusion des genres


Certains débats contemporains ont la vanité de querelles byzantines.
La récente polémique sur l'enseignement de la "théorie du genre" aux lycéens en est l'illustration édifiante. Alors que l'ensemble du système éducatif de notre pays est en plein naufrage, cette insane controverse est proprement hallucinante.

Pour mémoire, il s'agit de concevoir l'identité sexuelle, non pas comme une réalité anatomique et physiologique, mais comme la résultante d'une conjonction complexe de facteurs sociaux-culturels et environnementaux, formant une "histoire de vie"... Pour paraphraser la fameuse lapalissade de Simone de Beauvoir : "On ne naît pas femme, on le devient..."
Il est bien difficile de déterminer l'utilité de cette élucubration fumeuse, même s'il est prétendu qu'elle serait de nature à décomplexer tous ceux qui sont mal dans leur peau, en déconstruisant tout concept trop normatif, et toute évidence trop clairement imposée par la nature.

A l'âge où les enfants ne savent rien ou quasi de la réalité des chromosomes et qu'ils n'ont de leur propre schéma corporel qu'un sentiment confus, on entreprend donc de jeter le trouble sur une notion qui semblait établie depuis le début du monde.
Le pire est qu'on ait choisi le manuel de science naturelle (pardon, SVT...) pour exposer cette cogitation intellectuelle, qui relève au mieux de la spéculation philosophique.

Car au plan physiologique, quoi de plus évident, quoi de plus aisé à percevoir que la spécificité sexuelle qui distingue les individus ? C'est d'ailleurs heureux car il serait fâcheux d'avoir des doutes à chaque fois qu'on rencontre quelqu'un. Comment par exemple pourrait-on mettre en œuvre la fameuse parité s'il fallait s'enquérir auprès de chaque individu de son orientation intime en la matière ?
Même l'homosexualité ne pose en règle aucun problème. Car en dépit de leur attitude équivoque, les gays restent des hommes ou des femmes.
Il reste évidemment l’ambiguïté anatomique, sous-tendue par des désordres génétiques, qui est une vraie énigme, et surtout un drame pour les malheureux qui en sont victimes. Et le malaise psychologique de quelques personnes qui n'assument pas le sexe que la nature leur a donné, et qui seront bien avancées de savoir qu'il n'y a là rien anormal... Préféreront-elles comme remède, ce beau cataplasme métaphysique, ou bien l'aide d'un traitement hormonal ou chirurgical ?

Bien que la "théorie du genre" vienne parait-il des Etats-Unis, il n'est pas étonnant qu'elle trouve des développements en France, où l'on adore couper les concepts en quatre et mettre du sexe en toute chose, quitte à engendrer de cocasses incohérences. D'où par exemple, une table tient donc sa féminité puisqu'il ne s'agit au fond que d'un meuble ? Et de quel genre est donc le sexe masculin puisqu'on l'appelle tantôt le pénis, tantôt la verge ? Quant au vagin, ce n'est qu'une cavité, tandis qu'un testicule ou un ovaire représentent chacun une gonade...
Autant dire que la théorie du genre empoisonne la vie des écoliers depuis des lustres ! Elle avait même accru sa maléfique pression il y a quelques années lorsque les satrapes du Gouvernement, épaulés par les experts d'une obscure "Commission Générale de Terminologie", crurent bon de féminiser quelques appellations restées neutres. On a donc vu, entre autres fantaisies, surgir tout à coup des "professeures", des "proviseures", des "auteures" …
O tempore o mores...