17 juin 2025

Si Vis Pacem...

C’était inéluctable. La guerre éclate entre Israël et Iran, après des années pendant lesquelles le régime vicieux des Mollahs n'a cessé d'alterner le chaud et le froid, et d'entretenir les illusions occidentales sur l'issue potentiellement favorable des négociations sur le dossier nucléaire.
Les derniers constats faits par l'Agence Internationale pour l'Energie Atomique (AIEA) ne laissaient plus aucune place au doute : le point de non retour était en passe d'être franchi. Les Iraniens avaient enrichi l'uranium beaucoup plus que nécessaire pour un usage civil (60% vs 3,67). Malgré leur engagement, ils avaient accumulé un stock de matière fissile 45 fois supérieur à la limite imposée par les accords de Vienne ! Le moment de produire des bombes atomiques était donc tout proche. Connaissant la volonté affichée de rayer Israël de la carte, il n'était plus possible de continuer à laisser faire.
Pour espérer vivre paisiblement un jour, les Israéliens n'ont jamais eu d’autre choix que de préparer la guerre. Avant tout pour répondre aux agressions dont ils sont si régulièrement victimes. Mais cette fois, en raison de l’énormité de ce que préparaient leurs ennemis, ils n’ont pas attendu d'être attaqués pour intervenir.
L'Etat juif, confronté de longue date à un péril existentiel, a donc entrepris une action préventive de grande ampleur visant à démanteler l'arsenal terrifiant en préparation et à décapiter l'organigramme des dirigeants du régime.
Une fois encore, cette opération démontre l'efficacité militaire époustouflante de Tsahal et la qualité exceptionnelle de ses services de renseignement.

Malheureusement, une fois encore, le peuple juif dont la cause est pourtant devenue universelle depuis la fin de la seconde guerre mondiale, se trouve terriblement seul. C'est d'autant plus choquant qu'Israël incarne le modèle de société auquel les pays démocratiques se disent attachés.
On peut remarquer bien sûr la grande retenue des réactions en provenance de la plupart des pays arabo-musulmans.
On peut tout autant subodorer que le grand allié américain est toujours là. Les Etats-Unis sont à l'évidence à la manœuvre en coulisse avec leur gros bâton, sous forme d'aide tactique et de livraisons massives d'armes. On peut d'ailleurs supposer qu'ils ont feint de poursuivre des négociations qu'ils savaient inutiles, à seule fin de faciliter l'effet de surprise.
Comme d'habitude, la Communauté Internationale est aux abonnés absents. L'Europe est inexistante. M. Macron, fidèle à lui-même, s'embrouille dans les messages contradictoires. Un jour il déclare être prêt à reconnaître un chimérique état palestinien et vouloir sanctionner Israël, et un autre il assure qu'il l'aidera à se défendre. Comme d'habitude, il ne sort rien de concret de ces piteux cafouillages. Pendant qu’il joue les matamores d'opérette au Groenland, la France, où s'exprime impunément l'antisémitisme des nazillons mélanchonistes de LFI, offre un bien triste et honteux spectacle.

Dieu seul sait comment tout cela finira, mais il est permis d'être optimiste. Si l'intervention militaire en cours, Rising Lion, pouvait aider le peuple iranien à retrouver la liberté dont ce régime abject le prive depuis près d'un demi-siècle, ce serait une divine surprise. Et le Monde pourrait remercier Israël d'avoir grandement et courageusement contribué à éliminer un péril que les pays libres n'ont pas su enrayer avant qu'il ne devienne monstruosité (et que la France a même inconsidérément aidé). Et de vraies perspectives de paix pourraient enfin se faire jour au Proche Orient !

Illustration : fronton du centre culturel des armées. Madrid.

13 juin 2025

Harangue malfaisante

Les jeunes médecins avaient depuis l’antiquité le serment d'Hippocrate fixant les règles éthiques du métier. Les magistrats en herbe ont depuis 1974 la
Harangue de Baudot.
Ce texte émanant du substitut du procureur de Marseille de l’époque prétend leur servir de guide moral et entend “corriger quelques-unes des choses qui [leur] ont été dites”.
En réalité, il décline tous les dogmes d’une gauche rétrograde, engluée dans une idéologie post-révolutionnaire revancharde et nihiliste. Il est difficile de rester de marbre en découvrant (fortuitement il y a quelques jours quant à moi) cette accumulation de clichés nauséabonds.

Le magistrat commence très fort, en dévalorisant la fonction et en la caricaturant : “On vous a dotés d’un pouvoir médiocre : celui de mettre en prison…/… Évitez d’abuser de ce pouvoir.” Il s’attaque ensuite à l'essence même du métier en affirmant, selon le refrain fallacieux, que “si la répression était efficace, il y a longtemps qu’elle aurait réussi.”
S’il fait le constat malheureusement pertinent “qu’on rend la justice impunément”, il en tire la conclusion qu'il ne faut “pas en abuser”, c'est à dire inverse de celle qui s'impose : les juges ne sont jamais jugés, ce qui est un pur scandale. Puisque les juges sont au dessus des lois, on n'est guère étonné qu'il incite à s’en affranchir, exhortant à “ne pas en faire un usage exagéré” et à “mépriser généralement les coutumes, les circulaires, les décrets et la jurisprudence.”
Dès lors, tout devient simple, autant qu'effrayant : “la loi s’interprète. Elle dira ce que vous voulez qu’elle dise.”

Dans la seconde partie du document, l’auteur semble durant un court instant revenir à la raison en s’écriant “Ne soyez pas victime de vos préjugés de classe, religieux, politiques ou moraux.”
Mais juste après il préconise de faire l’inverse en se fondant systématiquement sur l’a priori : “surtout ne pas appliquer extensivement les lois répressives et restrictivement les lois libérales. Agissez tout au contraire.”
Il enfonce le clou de la présomption d’innocence à géométrie variable, mère de la culture de l'excuse : “Ne croyez pas qu’un homme soit coupable d’être ce qu’il est, ni qu’il ne dépende que de lui d’être autrement. Autrement dit, ne le jugez pas. Ne condamnez pas l’alcoolique. L’alcoolisme, que la médecine ne sait pas guérir, n’est pas une excuse légale mais c’est une circonstance atténuante.”
A la fin, il ne s'embarrasse plus d’aucun scrupule, ni d’aucun souci d’équité se délestant d’une tirade hallucinante : “Soyez partiaux ! Pour maintenir la balance entre le fort et le faible, le riche et le pauvre, qui ne pèsent pas d’un même poids, il faut que vous la fassiez un peu pencher d’un côté. Ayez un préjugé favorable pour la femme contre le mari, pour l’enfant contre le père, pour le débiteur contre le créancier, pour l’ouvrier contre le patron, pour l’écrasé contre la compagnie d’assurance de l’écraseur, pour le malade contre la sécurité sociale, pour le voleur contre la police, pour le plaideur contre la justice.”

Tout est donc dit explicitement. On mesure l’impact maléfique d’un tel texte quand on sait qu’il est devenu un des piliers dogmatiques du Syndicat de la Magistrature créé en 1968, représentant bon an mal an un bon tiers des magistrats et sans doute un peu plus encore de sympathisants, jusqu'au sein même du gouvernement. On pourrait sans être trop excessif, le qualifier d'ignominie, tant il va à l'encontre des principes cardinaux de la justice. C'est une vraie perversion du métier, à laquelle il semble impossible de s'opposer tant le pouvoir judiciaire échappe à toute évaluation objective. Le garde des sceaux de l'époque Jean Lecanuet tenta sans succès d'enrayer cette machine infernale idéologique en saisissant le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM), au motif du manquement au devoir de réserve. Ce dernier proposa au ministre d’infliger une réprimande à l’auteur, mais face à la collusion de plusieurs syndicats, aucune sanction ne fut prononcée. Depuis, personne n'ose plus s’indigner contre ce tonneau d'immondices. On comprend à sa lecture comment la justice est rendue dans notre pays et comment nous en sommes arrivés à la défaillance quasi généralisée d’une autorité essentielle, mettant en péril désormais la sécurité des citoyens, détruisant la confiance et minant les fondements du fameux état de droit, c’est-à-dire de la république…

Illustration : Trois juges par Honoré Daumier

10 juin 2025

L'insoutenable légèreté du pouvoir

Peu à peu, l'escroquerie écologique apparaît au grand jour. Les masques tombent à mesure qu'on découvre la fragilité de l'argumentaire sous-tendant la politique "environnementale" du gouvernement et qu'on prend en considération son peu de retombées bénéfiques eu égard à la quantité d'effets néfastes.

Dernier avatar en date, le dispositif Maprimrenov créé en 2020 était destiné à subventionner les travaux d'isolation et d'amélioration énergétique des logements. D'une efficacité douteuse, il s'avère dispendieux pour l'Etat et il a ouvert la voie à toutes sortes d’excès et de fraudes. Dans un contexte budgétaire tendu, le gouvernement a donc suspendu son application.
S'agissant des innombrables lois, réglementations, décrets qui plombent le secteur immobilier, des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent pour remettre en cause le bien fondé du Diagnostic de Performance Energétique (DPE) devenu au fil des révisions aussi stupidement punitif et contraignant qu'incompréhensible. Parallèlement, on assiste à la révision à la baisse du plan ubuesque de Zéro Artificialisation Nette (ZAN) devenu un vrai pipotron à l’image des loi ALUR, SRU et de leurs déclinaisons toujours plus délirantes qui, entre autres méfaits, contribuent à raréfier gravement l'offre de nouveaux logements.
Dans le champ dévasté de l'agriculture, on songe enfin à alléger la chape administrative pesant sur les exploitations (non sans tergiversations à l’instar de l'épisode grotesque ayant conduit à l’avortement de la loi Duplomb). Il faut dire qu'à la suite de constats scientifiques incontournables (sauf par les complotistes irréductiblement endoctrinés), la plupart des instances officielles américaines, européennes et même française "indépendantes", plaident pour la réintroduction de pesticides, dont on avait, par principe, exagéré la toxicité et minimisé les effets positifs : entre autres glyphosate, néonicotinoïdes...

Dans le secteur de l'automobile, la valse des bonus et des malus a de quoi faire sourire, ne serait-ce que pour éviter d'en pleurer. Après s'être ruiné en subventions destinées à doper la vente de véhicules électriques, chers et peu convaincants, on a réduit le périmètre de leur attribution (faute de moyens et pour protéger le marché de la concurrence étrangère). Mais vu le dépérissement rapide du secteur, on a annoncé leur renforcement prochain ! Dans le même temps on inflige au marché déjà mal en point des véhicules thermiques, la double peine du “malus masse” pénalisant leur poids - dont sont exonérées les voitures électriques - en plus des émissions de CO2. Comprenne qui pourra…
S'agissant des règles de plus en plus folles rendant quasi impossible la circulation en ville, on a vu récemment les élus battre un peu en retraite sur le dossier non moins absurde des Zones à Faible Émissions (ZFE).

En matière énergétique, on a pu admirer le ballet surréaliste des Pouvoirs Publics se félicitant du programme de fermeture des centrales nucléaires avant de plaider pour leur multiplication tous azimuts.
Le développement accéléré des énergies renouvelables fait quant à lui face à un scandale grandissant. S'agissant notamment des parcs éoliens accusés de nombreux défauts : défiguration des paysages, production aléatoire de l’électricité à un coût prohibitif, dysfonctionnements à répétition. La récente panne électrique généralisée, mal expliquée, qui a touché l'Espagne et le Portugal alimente de ce point de vue des craintes légitimes.

C'est à ce moment précis, et alors que le pays vit en permanence sous la menace de graves désordres sociaux et d'une banqueroute inédite, que le président de la République juge opportun de monter au front pour rappeler l'urgence écologique, pointant du doigt ceux qui lui reprochaient de ne pas en faire assez, et aujourd'hui d'en faire trop.
C’est “une erreur historique de céder aux facilités du moment” s'exclame-t-il. « Certains voudraient faire oublier le combat pour le climat » et « préfèrent, pendant ce temps-là, “brainwasher” sur l’invasion du pays et les derniers faits divers ».
Devant ces déclarations franglaises insensées, une question s'impose : Comment l'obstination d'un homme peut-elle mener à un tel aveuglement et un tel déni du réel ?
Don Quichotte était entré en guerre contre les moulins à vent, M. Macron en fait des chevaux de bataille avec lesquels il mouline les idées reçues, les billevesées et les chimères grandioses. Au détriment des vrais défis que sa politique erratique a conduit à faire grandir.
On aurait certes pu comprendre qu’il réagisse au détricotage des lois écologiques qu’il avait promues. L’ennui c’est que lui-même avait fait machine arrière de manière totalement inconséquente sur le dossier nucléaire. En vérité, l’impression qui domine est que peu lui chaut le péril climatique sur lequel il surfe au gré des vagues de l’opinion publique.
Rarement on vit président plus désinvolte, plus inconséquent et pour tout dire, inefficace. Combien de temps encore durera ce pitoyable cirque tournant tragiquement en rond ?

Illustration : par Folon

05 juin 2025

Fumerolles Cannoises

Après quelques turbulences médiatiques, le volcan du cinéma s'est assoupi.
Hélas la montagne a accouché d’une souris.
Il ne reste du miteux jaillissement qu’un champ de ruines au sein duquel les fumerolles témoignent surtout d'un passé héroïque, en voie d'extinction.
A Cannes, le festival n'est plus là que pour le fun. Pour l'auto-célébration d'un petit monde tournant autour d'une gloriole illusoire. Le culte du nombril y est porté aux nues jusqu'à l'extase.

Le spectacle, fort médiocre, n’est plus sur l’écran mais sur un tapis rouge défraîchi par des années d'inanité, et sur les plateaux télévisés complaisants remplis de flagorneurs aussi zélés que peu inspirés. On a donc pu y contempler l’évaporée Juliette Binoche, ornée d'un voile marmoréen qu'elle voulait sans doute suggestif de quelque cause politique, mais dont le caractère grotesque évoquait surtout une vestale de plâtre ou bien Sainte Nitouche en personne. On y a vu Laurent Lafitte, embourgeoisé par une moustache de chef de rayon suranné, débitant laborieusement une tirade pompeusement qualifiée de “sacrificielle”. Il ne s’agissait en réalité que d’aligner, avec la plate empathie qui convient, les poncifs évoquant climat, équité, féminisme, LGBTQIA +, migrants, racisme, autant de mots s’empressa-t-il de préciser, “qui ne sont plus seulement des sujets de films, mais également interdits par l’administration de la première puissance mondiale”. Belle envolée, d’une ineffable médiocrité, qui eut inspiré Bouvard et Pécuchet !
On y entendit Robert de Niro, vieillard cacochyme achevant une carrière adulée mais réduite à l’état de vestige, dans le rôle douteux d'un papy gâteux confit dans une aigre saumure revancharde contre une démocratie à laquelle il ne comprend plus rien. On dut se farcir également les vaines élucubrations du sinistre Mathieu Kassovitz, illustration parfaite du beauf gauchisant d'autant plus sermonneur qu'il sent le sol gluant de son idéologie nauséabonde se dérober sous lui…

Après toutes ces simagrées, le palmarès est passé par profits et pertes. Que reste-t-il de ce show clinquant mais creux ? Aucun titre de film n'émerge en définitive, hormis Mission Impossible, the Final Reckoning, précisément hors compétition… On ne retiendra en somme, que la prestation de Tom Cruise. Seul, terriblement seul dans son genre, il fut à la hauteur avec élégance et distinction et parla de cinéma, rien que de cinéma…

29 mai 2025

Hokusai, quand l'art dit vague...

Même si l'on ne connaît le peintre japonais Hokusai (1760-1849) que par ouï dire, on ne peut ignorer qu'il fit des vagues…
A la veille d’une grande rétrospective qui lui sera consacrée prochainement à Nantes, on peut se laisser tenter par le film du cinéaste japonais Hajime Hashimoto, sorti en 2020 qui raconte - en partie - sa destinée étonnante.
Vie longue est complexe s’il en fut. L’homme fut difficile à suivre. Rien qu’en patronymes, on le connaît sous pas moins de 120 noms et pseudonymes !
Le film tente d’approcher quelques périodes clés de ce parcours trépidant très anticonformiste, épris de liberté, parfois même rebelle, resté pour une large part mystérieux.

A cheval sur les XVIIIème et XIXème siècles, il illumina de sa patte colorée extrêmement novatrice, l'art pictural au pays du soleil levant. On le considère souvent comme le précurseur du genre manga (nom générique donné d’ailleurs à ses carnets de croquis). Mais outre son talent d’illustrateur élégant et de coloriste audacieux, il exprima une symbolique puissante d’une modernité étonnante et d’une poésie aérienne, parfois éthérée.
C’est ce que montre avec un certain succès le film qui s’attache à créer une ambiance hiératique, ultra dépouillée, très japonaise en somme.
La réalisation est des plus soignées, et les images somptueuses. L’itinéraire de l'artiste est raconté de manière aussi légère que le pinceau déposant un filet d'encre sur le papier. L’art est ici tout en finesse, et en délicatesse.
En se focalisant sur quelques épisodes, le réalisateur encourt toutefois le reproche d'effleurer le sujet, de le survoler plutôt que d'explorer l'œuvre et la longue vie du peintre (il s'éteignit à presque 89 ans). Au surplus, il déroute quelque peu en pratiquant des sauts chronologiques en forme de grands écarts, voire en prenant quelques libertés avec la réalité historique (le sort tragique de l'écrivain Tanehiko par exemple).

Il n’en reste pas moins qu’une fois contemplés, ses paysages extatiques flottant entre mer et ciel, ses cascades cataractant en réseaux arachnéens, ses poulpes aux tentacules lascifs, et bien sûr sa grande vague s'élevant irrésistiblement à la manière d’une montagne, restent gravés dans la mémoire, témoignant de la richesse et de l'originalité de la culture extrême-orientale.


L’influence d'Hokusai fut considérable. Entre autres exemples, on pense à Kamisaka Sekka qui inscrivit une oeuvre marquée par cet héritage à la jonction des XIXème et XXème siècles… En Europe, on lui doit la mode du japonisme à laquelle cédèrent nombre de peintres impressionnistes. Sa modestie était proverbiale. A l’article de la mort, il prononça ces mots d’une humilité touchante : « Si le ciel m'avait accordé encore dix ans de vie, ou même cinq, j'aurais pu devenir un véritable peintre… »



28 mai 2025

Deep Deep Fake

Le mensonge en politique est une vieille histoire.
On pourrait dire, sans être trop caricatural, qu'il est consubstantiel aux jeux de pouvoir. Qu'on ne nous la fasse donc pas avec le nouvel anglicisme des fake news, et qu'on ne tente surtout pas de nous faire croire que l'Etat, ses agences et ses hautes autorités, Presse, médias et experts accrédités, seraient devenus tout à coup capables de distinguer, en lieu et place du bon peuple, le vrai du faux.
Le fact checking est un leurre. Nous citoyens, n'avons pas besoin qu'on nous indique ce qu'il faut croire, juste qu'on nous laisse en juger par nous-mêmes en nous donnant l’accès le plus libre à toutes les informations.
Le cas Biden vient d'en administrer une preuve cinglante. Avec la sortie du livre-enquête sobrement intitulé Original Sin, il y a le feu au lac.
Il y est révélé que l'ancien président américain était atteint de sénilité avant même son élection, en 2020, et que personne l’ayant approché ne pouvait l'ignorer. Il était donc dans l'incapacité notoire d'exercer la fonction, et cela a été caché !
On pourrait arguer que cela relevait de l'évidence et qu'il fallait être aveugle ou bien ne pas vouloir voir pour être dupe. A moins d'être stupidement partisan bien sûr comme nombre de médias et de stars “engagées” du showbiz… Mais comment expliquer que le seul fait d’évoquer le problème vous faisait passer pour un complotiste ? Comment justifier la collusion incroyable de tant de médias, et de tant de gens informés, unis dans un mutisme d'autant plus coupable qu'il s'accompagnait de la négation de la réalité ?
On apprend par la même occasion que l'ancien président démocrate est atteint d'un cancer de la prostate avec des métastases. Autant dire que le diagnostic ne date pas d'hier...
Autant dire également que l'élection présidentielle fut biaisée si ce n'est truquée. Avec le contexte du Covid et les soupçons pesant sur la régularité des votes par correspondance, ça commence à faire beaucoup… Donald Trump, qui est si régulièrement qualifié de menteur par les bien pensants, n'avait donc pas vraiment tort d'affirmer que l'élection lui avait été volée !

L’occultation de la réalité n’est pas un procédé nouveau. Il fut utilisé pour masquer l'incapacité de Roosevelt.
En France, nous n'avons pas de leçon à donner. On se souvient comment on a caché la maladie du président Pompidou. On se rappelle comment François Mitterrand, après avoir promis une transparence totale, avait falsifié ses bulletins de santé dès 1981 et comment les médias réunis avaient pudiquement passé sous silence toutes les turpitudes du vieux politicard. Plus récemment, on fit de même pour minimiser les conséquences de l'accident vasculaire cérébral dont fut victime Jacques Chirac…

Il n’est pas besoin d’être complotiste pour voir le mensonge partout. Par omission, par dénégation, ou bien par affirmation. On connaît l’adage qui dit que plus c’est gros, plus ça passe… Il n’y a pas plus aveugle que celui qui ne veut pas voir.
L’Etat français s’est gravement compromis par le passé lors des scandales étouffés du sang contaminé, de l’hormone de croissance, du nuage de Tchernobyl et plus récemment du COVID-19. Aujourd’hui encore on continue officiellement de vanter l’efficacité du vaccin. Mais qu’est-ce donc qu’un vaccin qui n’évite pas d’être porteur du virus et de le transmettre, n’empêche pas les symptômes de la maladie, et qui tout au plus limiterait le risque de formes graves, sachant que le virus a perdu naturellement quasi toute virulence ?

Lorsque surgissent des conflits, les mensonges redoublent d’intensité. On pourrait dire beaucoup sur les affabulations et les assimilations simplistes mais partisanes faites au sujet des conflits opposant Israël au Hamas et la Russie à l’Ukraine.
On pourrait s’interroger sur l'annulation de la récente élection présidentielle en Roumanie sur la foi de l’affirmation “officielle”, non démontrée à ce jour, selon laquelle il y aurait eu des ingérences étrangères.
En France, il y a beaucoup à dire sur la mystification du “barrage républicain” permettant de frapper d’ostracisme un parti et ses électeurs depuis des décennies, faussant gravement le jeu démocratique, jusqu’au résultat lamentable que l’on connaît, d’un pays à la dérive, livré aux factions et ingouvernable.

Il faudra encore attendre un certain temps pour juger des effets annoncés comme dévastateurs du réchauffement climatique, mais dès à présent on peut mesurer les erreurs commises au nom d’un principe de précaution à sens unique, qui entre autres fadaises, a conduit à fermer des réacteurs nucléaires et rouvrir des centrales à gaz et à charbon…
Saura-t-on un jour la cause exacte de l’incroyable incendie de la cathédrale Notre-Dame, et de l’explosion en 2001 de l’usine AZF ? Il y a tout lieu d’en douter…

18 mai 2025

Mémoricide

A la lecture du dernier ouvrage de Philippe de Villiers, on retrouve tout le panache du chevau-léger au service d'un souverainisme idéalisé et de traditions sacrées. C'est le combat de sa vie, la cause à laquelle il aura tout donné. Le meilleur de lui-même mais aussi quelques outrances destructrices.
Son dernier ouvrage* se lit sans déplaisir, quasi d'une traite, car sa plume est aussi ardente que brillante. Son érudition a l'accent de la sincérité. Il assène ses vérités à coups de massue mais jamais il n'est pédant.
Parfois il tient un peu de Don Quichotte lorsqu'il entre en guerre contre des moulins à vent, ou qu'il mène des combats perdus d'avance car ils sont d'un autre âge. C'est qu'il semble rétif à l'évolution des choses et plutôt que de tenter d'infléchir leur cours, il préfère les pourfendre à la hussarde.

Son lyrisme flamboyant donne le vertige tant il emporte tout sur son passage.
Avec son épée de preux chevalier, il est un peu Roland à Roncevaux. Il voudrait ouvrir une brèche dans la muraille des idées reçues, terrasser l'hydre des idéologies insanes. Mais cette tâche est titanesque, et il s'épuise à charger trop d'ennemis à la fois, confondant même, à certains moments, le bon grain et l'ivraie, les alliés et les adversaires..
S'il peut se targuer de belles réalisations concrètes (Le Puy du Fou, le Vendée Globe), son verbe héroïque semble hélas vain, à l'instar de son combat politique. Qui trop embrasse mal étreint en quelque sorte.

Bien sûr on peut le suivre lorsqu'il déplore les errances morales de l'époque, la perte des repères historiques, la déliquescence de l'esprit civique, la dissolution des valeurs sociétales dans un magma éthique illusoire, la dérive partisane de la justice, la faillite de l'éducation, et pour finir, le chaos migratoire auquel on fait face, non pas en l'endiguant mais en cassant les frontières.
Sa comparaison avec le Titanic est à ce dernier sujet pertinente. Le naufrage du paquebot fut expliqué par l'absence de tout cloisonnement de la coque sous la ligne de flottaison. Une seule brèche a suffi pour inonder rapidement l'ensemble du navire et l'entraîner vers l'abîme.

La protection de l'Union Européenne par ses seules frontières extérieures est une chimère.
L'Europe n'est pas un tout stable, uni, et cohérent. C'est un simple agrégat économique de pays aux intérêts souvent divergents. l'Europe n'est pas une nation, et c'est bien là que le bât blesse. Philippe de Villiers en fait le constat amer mais il va plus loin. Contrairement à Julien Benda, il répugne au concept d'une nation européenne.
Son discours est franco-centré sur un pays figé dans ses traditions ancestrales, et sur les souvenirs d’un passé glorieux, comme l'atteste l'angoisse qui hante ses nuits, dont il fait état au début du livre : “Que vont devenir les petits Français dans vingt ans ? Dans trente ans ? Seront-ils des étrangers dans un pays nominal qui n'aura plus de France que le nom, Sur une terre exotique ?”
La crainte est fondée mais il y a très peu d'ouverture au monde dans son esprit. Il faudrait en vérité que rien ne change pour que tout change... Et l'Europe est bien loin de représenter un espoir à ses yeux.
Comme D'Artagnan, le monde dont il est si nostalgique est mort à Maastricht.

Non seulement il ne croit pas au projet européen, mais il est convaincu qu'il repose sur une supercherie, voire un complot, ourdi par les Etats-Unis. Il l'affirme et le réaffirme à qui veut l'entendre. Rien ne l'en fera démordre. Jean Monnet, Robert Schuman, loin d'être des pères fondateurs ne furent selon lui que des boutiquiers cupides ou des félons au service de l'oncle Sam.
Philippe de Villiers n'est pas pro américain, c'est peu dire. Pire, il accuse les Etats-Unis d'avoir ouvert la porte à la marchandisation du monde. C’est quasi une idée fixe chez lui, répétée, livres après livres. Ainsi, il rappelle qu'avec Jimmy Goldsmith, il s'était fait le dénonciateur du capitalisme libéral qui avait “dénaturé le travail et réinventé un esclavagisme des plus faibles au XIXe siècle”. Il évoque, en sous entendant qu'il l'a fait sienne, l'opinion de son père qui “renvoyait dos à dos le socialisme collectiviste et le libéralisme individualiste” !

A la fin de la seconde guerre mondiale, l'objectif des USA aurait donc été de faire de l'Europe une fédération vassale, calquée sur le modèle américain.
C'est évidemment du pur fantasme, et si par extraordinaire cela s'était produit, il y aurait tout lieu de s'en féliciter. On imagine sans peine la force que représenterait l'alliance de deux fédérations unies par un même objectif de démocratie et de liberté. Faut-il rappeler que la logique s'inscrivait dans un vrai projet européen, celui défini par Kant dans son merveilleux petit ouvrage traitant de la Paix Perpétuelle.
L'Amérique nous a offert une liberté dont nous n’avons pas su faire grand chose. L’arrogance gaullienne et le retour au vieil ordre féodal ont éteint toute velléité fédérative et le concert cacophonique des Etats-Nations a accouché d'une bien fade et peu efficiente Communauté Européenne.

Philippe de Villiers reste donc accroché à son morceau de France comme un naufragé s'agrippe à une épave.
Comme il le reconnaît lui-même, il a peur du vide. Mais il est plus effrayé encore par les grands espaces et les vastes perspectives. S'il faut bien reconnaître que l'idée européenne a fait fiasco, il y a bien peu à espérer d'une France souveraine ayant retrouvé sa grandeur d'antan, une parousie selon lui.
Ainsi, une fois encore, le fondateur du météorique Mouvement Pour la France (MPF), nous embarque sur une voie qui fait fausse route, malgré son beau tracé, ses nobles ambitions et sa rectitude morale.
Elle est dans un monde auquel on peut rêver avec nostalgie mais elle ne s'inscrit pas dans une vision pragmatique de la réalité présente et des temps à venir…


* Mémoricide. Fayard 2024

15 mai 2025

Faut-il suivre Antigone ?

On voit souvent dans le mythe d'Antigone, fille d'Oedipe, raconté par Sophocle puis revisité par Jean Anouilh (1910-1987), l'exaltation de l'esprit de résistance. On admire la bravoure, la force de caractère, la détermination de la jeune princesse, tragiquement “destinée à mourir”.
Mais dans sa volonté inflexible de s'opposer à son oncle, le roi Créon, on peut voir tout et son contraire.
Rappelons que pour son malheur, elle estima de son devoir de rendre les hommages funéraires à son frère Polynice mort en un combat fratricide.  Elle enfreignit ainsi l'ordre formel de Créon de laisser sa dépouille pourrir dans l'indignité, en raison du crime dont il fut accusé, d'avoir trahi et déchiré sa patrie, Thèbes. 
Le contexte dans lequel a été écrite cette pièce, en 1942, prête certes à privilégier une interprétation. L'auteur n'écrivit-il pas que L'Antigone de Sophocle avait été un choc pour lui pendant la guerre, le jour des petites affiches rouges, le poussant à la réécrire à sa façon, avec la résonance de la tragédie que nous étions alors en train de vivre."
L'ennui est qu'il a procédé à cette réécriture bien avant la publication de la fameuse affiche rouge, datant de 1944.
D'ailleurs s'il avait fait une œuvre de résistance explicite à L'occupant allemand, comment expliquer qu'il ait obtenu l'imprimatur de ce dernier en 1942 ?
Toujours est-il que la pièce fut jouée pour la première fois le 6 février 1944 et qu'elle reçut un accueil favorable assez unanime, sachant que des officiers allemands assistaient à la représentation. Les vraies polémiques ne vinrent qu'après, les uns y voyant une allégorie de la résistance, les autres une incitation à la collaboration.

Avec le recul, il est permis de penser que la pièce se situe au dessus des polémiques partisanes, posant bien plus de questions qu'elle n'apporte de réponses et plaidant en définitive avant tout contre les jugements trop manichéens.
A l'instar des tragédies antiques, le drame s'inscrit dans une logique fataliste des plus implacables. A partir du moment où Antigone viole la loi, elle se condamne elle-même et provoque en toute conscience un enchaînement qui va la conduire à la mort. Son amoureux Hémon, qui est le fils de Créon, est si désespéré qu'il ne voit d'autre issue que de mettre fin à ses propres jours, suivi de près par sa mère, Eurydice. Ainsi Créon demeure maître en son royaume mais il est désespérément seul.

Dans cet engrenage terrible, qui a tort, qui a raison, il est bien difficile de conclure. Antigone est dévouée corps et âme à des principes immanents tandis que Créon est prisonnier de sa fonction et de la Loi qu'il incarne. Aucun des deux n'est un monstre et chacun éprouve même de l'affection pour l'autre. Mais chacun obéit à sa propre logique. Il semble au début qu'un moyen terme raisonnable soit possible, mais au fil du temps et des arguments, les positions deviennent irréconciliables et conduisent à une extrémité absurde. Voilà ce qu'il en est de beaucoup de comportements humains lorsqu'ils confinent à l'entêtement.
C'est pour avoir montré cela de manière simple et crue à partir d'un mythe millénaire, qu'Anouilh a fait une œuvre durable, intemporelle, et en même temps novatrice. Enfermer son propos dans une logique partisane ou dans un contexte trop étroit ne fonctionne pas. Le mythe d'Antigone et de Créon est au fond de chacun d'entre nous. En prendre conscience marque peut être le début de la sagesse...

30 avril 2025

Élégie


Au bord de l'océan mes amours et mon âme
Suivent la fantaisie du vent
Il semble les couver puis soudain fait l'infâme
En les dispersant vertement

Plus au Nord le soleil inonde la Lanterne
Vigile antique et rassurant
Mais l’esprit de la Chaîne entrave ma gouverne
Et me laisse bien seul, errant

Tout paraît vaciller, Saint Nicolas s’écroule
Non sans une infinie douceur
Son air un peu penché fait s'éloigner la foule
Pressentant quelque avant-coureur.

Le pont de fer par où l’on arrivait en ville
Émet de tristes geignements
Tel un vieillard usé perçu comme inutile
Par des gens très indifférents

Feu le Pape s'élève au dessus du tumulte
Avec l'espoir de meilleurs cieux
Et qu’on soit ici-bas moins sot et plus adulte
Quant à moi, je ferme les yeux…

25 avril 2025

Tristes Pâques

Qu’un pape trépasse le lendemain du jour de Pâques, on pourrait y voir une coïncidence troublante, si ce n’est un symbole. Mais comme l’interprétation des symboles ne change pas le cours des choses, autant faire des supputations sur le sexe des anges…
Toujours est-il que l’évènement a beaucoup agité les médias cette semaine, les commentaires ont fusé de toutes parts, sans produire pour autant la moindre révélation. Derrière les foules confites en dévotion, ce sont les non croyants qui ont salué avec le plus de vigueur et d’admiration le pape défunt. C’était déjà le cas de son vivant…
Plusieurs articles de ce blog ayant déjà été consacrés au Pape François lorsqu’il était en fonction (15/12/13, 18/12/20, 25/09/23), il ne reste plus qu’à souhaiter paix à son âme.

Ce qui reste plus terre à terre si l’on peut dire en cette période de fête, et qui n’incite guère à se réjouir, c’est l’état de la France. Toujours incapable d’avancer tant elle est empêtrée dans les grands principes, elle est encore une fois ramenée à son passé avec l’interminable et sordide feuilleton Betharram. Il ne sortira rien de ce cold case datant de plus de 30 ans, mais c’est l’occasion pour certains de flétrir une fois encore la religion catholique et derrière elle l’enseignement privé.
Le premier ministre est bien embarrassé par cette affaire dans laquelle certains l’accusent d’être juge et partie.
Avec ou sans ces soucis, son gouvernement patine dans la semoule. La situation budgétaire du pays est telle que la Cour des Comptes a menacé de ne plus certifier ceux de l’Etat ! Incapable d’imaginer la moindre action de redressement, ce dernier cherche désespérément de nouvelles ressources.
Puisqu’il est difficile d’annoncer de nouvelles hausses d’impôts, la chasse aux niches fiscales est ouverte (ce qui revient au même). Il y en a pour tout le monde, car on n’en dénombre pas moins de 474 ! Pour l'heure, ce sont les retraités qui sont visés par l’éventuelle suppression de l’abattement forfaitaire de 10%.
Dans ce contexte, le Président de la République et son obscur ministre de l’Economie demandent aux entreprises, tentées de fuir l’enfer fiscal qui s’acharne sur elles, de faire preuve de patriotisme. La belle affaire !
En réponse, quelques grands patrons ruent dans les brancards. Bernard Arnault, PDG du groupe LVMH déplore une Europe qui “n'est pas dirigée par un pouvoir politique mais par un pouvoir bureaucratique”. Il avertit qu’il ne peut investir davantage en France vu le poids des réglementations et la fiscalité confiscatoire. Se faisant un brin provocateur, il réclame l’instauration d’une zone de libre échange entre les Etats-Unis et le vieux continent. Il est soutenu dans cette initiative par le président du MEDEF Patrick Martin.
Le PDG de Michelin Florent Menegaux de son côté, déplore “qu’on tue économiquement la France en imposant des taxes beaucoup plus élevées que dans d'autres pays”. Face aux menaces de représailles dirigées contre les Etats-Unis, consistant à se livrer à l’escalade des droits de douane, il annonce tout en sous-entendus, qu’il sera “très délicat de comprendre quelles seront les conséquences”.
Le patron du groupe Safran, spécialisé dans l’aéronautique militaire, Olivier Andriès, furieux contre les contraintes et attaques en tous genres commises au nom de la défense de l’environnement, déclare qu’ il n’est plus question d’investir en France dans des villes gérées par une majorité écologiste ».
On apprenait tout récemment enfin que le groupe ArcelorMittal, confronté au manque de compétitivité de l’acier européen, s’apprêtait à supprimer plus de 600 emplois en France.

Madame Pannier-Runacher, calamiteuse ministre de la Transition écologique, toujours aussi idéologue de la pire espèce, a jugé bon de fustiger les "responsables d'entreprises qui s'alignent sur des positions qui sont, on le sait très bien, contre l'Europe et contre la France". Devant tant d’incompréhension et si peu de sens des réalités, on peut craindre le pire…

Et pendant ce temps, c’est encore et toujours la guerre, en Ukraine et au Proche Orient. Hélas, les vœux pieux du Pape sont restés sans écho…

17 avril 2025

Un système à l'état de gasps

Comment diable le système de santé français, autrefois presque unanimement présenté comme étant le “meilleur du monde”, est-il devenu ce “grand corps malade” que tout le monde déplore, malgré l’abondance de lois, de réformes, de moyens et d’ordonnances en tous genres dont il a fait l’objet ?
Force est de constater qu’en dépit des fabuleux progrès techniques dont les soins ont bénéficié, il est à bout de souffle à force d’avoir été trop administré.
En médecine, on a coutume d’appeler gasps les dernières inspirations inconscientes et vaines d’un mourant semblant chercher désespérément l’air.
Les récentes mesures proposées par l’Etat s’apparentent à ces râles agoniques. Techniquement on pourrait parler de pis-aller ou encore d’expédient. Les anciens auraient parlé de “cautère sur jambe de bois”.

L’objectif n’est pas de rappeler les innombrables réformes ni les tombereaux d’argent public déversés depuis des décennies. Il est simplement d'observer que malgré ses échecs répétés, la même politique perdure envers et contre tout.
Le constat a été fait maintes fois par le passé, mais plus la potion se montre inefficace, plus on augmente sa dose.
Hélas, il semble qu'il soit très difficile de freiner la bureaucratie qui crée sans cesse de nouveaux besoins à financer, et se fonde sur des principes intangibles déconnectés de la réalité.
Il n'est donc question ici que du dernier projet de loi en date, déjà validé en première lecture par l’Assemblée nationale, destiné à réguler l’installation des jeunes médecins. C’était à peu près la dernière liberté qui restait aux praticiens, quasi totalement assujettis au monstre tentaculaire de la Sécurité Sociale.

Pour lutter contre la désertification croissante des campagnes et des territoires devenus invivables, le législateur est en passe d’accorder une nouvelle mission aux Agences Régionales de Santé (ARS). Il s'agit de contraindre les jeunes médecins à poser leur plaque dans les régions sinistrées en les empêchant administrativement de le faire dans celles mieux dotées, généralement plus attrayantes. En bref, dans les endroits jugés suffisamment pourvus, il faudra attendre le départ d’un confrère et obtenir l’autorisation de l’agence avant de s’installer. On imagine sans peine la course à l’échalote que cela va engendrer et tous les stratagèmes de contournement dont devront user les impétrants pour tenter de s’établir coûte que coûte là où ils le souhaitent.
Non contents d’avoir provoqué si ce n’est organisé cette désertification par une centralisation insensée des services publics, et l’accumulation de normes ubuesques, les Pouvoirs Publics vont donc mettre en place une nouvelle usine planificatrice digne des soviets.
Le spectre du calamiteux NHS britannique n'a jamais été aussi présent, avec son lot de conséquences fâcheuses : files d'attente, pénuries, démotivation, piston et passe-droit en tout genre.
On ne saurait mieux parler de ce texte de loi “transpartisan”, proposé par le député socialiste Guillaume Garot, que ne l'a fait François Arnault*, président du Conseil National de l'ordre des médecins (CNOM) :
“Nous devons à l’obstination déraisonnable d’un député le vote d’une loi de coercition enlevant la liberté d’installation aux médecins. Une nouvelle fois, des députés, enfermés dans leur certitude que le désastre démographique de 95 % du territoire français est imputable aux seuls médecins qui refusent de s’installer dans les zones sous-denses, ont trouvé une majorité pour contraindre les médecins. Ce sont donc les ARS qui vont répartir la pénurie. Contraindre qui à aller où ? Dans les villes où il n’y a plus de médecins, dans les campagnes où les services publics ont déjà tous fermé leurs portes. Des parlementaires vont porter la responsabilité de la catastrophe qui s’annonce. Les jeunes confrères vont fuir cet exercice territorial auprès des patients, déjà difficile à choisir, pour rejoindre les postes hospitaliers et autres activités qui ne seront pas régulées comme, par exemple, la médecine esthétique ! Quel coup de maître, monsieur le député !”

* bulletin mensuel du CNOM Avril 2025

11 avril 2025

Lettre ouverte aux maires de France : réponse de M. Lisnard

Avec un peu de retard, voici la réponse apportée par M. David Lisnard, en date du 25 janvier 2025, à une lettre ouverte publiée sur ce blog en novembre 2024.

Dont acte, même si elle ne répond pas hélas à toutes les interrogations. Le président de l'Association des Maires de France ne peut évidemment porter la responsabilité de tout ce qui ne va pas dans l'ensemble des communes de France. Cannes, dont M. Lisnard est maire, est loin de mériter le bonnet d'âne s'agissant de sa gestion. En matière de fiscalité, il faut souligner la diminution récente de la taxe foncière, et l'absence - sauf erreur - de surtaxe sur celle qui frappe les résidences secondaires. C'est suffisamment rare pour être mentionné.








05 avril 2025

Guerre commerciale

Le grand mot est lâché : Trump a déclaré la guerre commerciale !

L’annonce par le président américain de l’augmentation des droits de douane à l’entrée des Etats-Unis, s'apparente à un pari risqué pouvant mener à davantage de protectionnisme, dont on connaît les effets néfastes. On espère qu'elle a été mûrement réfléchie, mais pour l'heure, elle a manifestement été faite avec le but de choquer.
Le résultat ne s’est pas fait attendre.
On ne compte plus les réactions, les avis d’experts autorisés, les truismes en tous genres et surtout les bêtises qui ont fusé après cette décision, que Marc Fiorentino s'est fait plaisir à colliger dans son excellente Newsletter:
"C'est une remise en cause de l'ordre économique mondial !"
"On revient aux années 30 qui ont amené la Grande Dépression et la Seconde Guerre mondiale !"
"Et évidemment tous les commentaires sur la stupidité, car il ne peut être que fou ou stupide,  avec laquelle Trump aurait calculé ses droits de douane."
"Et des brillants économistes nous expliquent avec certitude que ces droits de douane vont provoquer une flambée de l'inflation et mettre l'économie américaine à genoux."

En France bien sûr on est monté au créneau en hurlant au fou comme d’habitude. Coutumiers que nous sommes du déni de réalité, on feint de croire qu’il s’agit d’une déclaration de guerre alors que c’est nous qui avons entamé les hostilités, et ce, depuis de nombreuses années !
Combien de fois nous a-t-on expliqué qu’il fallait taxer et surtaxer les géants US de la tech, les fameux GAFAM, devenus plus récemment les 7 Magnifiques.
Mais bien avant cela, on avait procédé à quantité de mesures protectionnistes à l’encontre de l’Oncle Sam. Entre autres, on peut évoquer l’interdiction du bœuf et des volailles américaines, au motif foireux qu’ils seraient impropres à la consommation car bourrés d’hormones, d’antibiotiques ou passés au chlore. Dans le même esprit, on avait banni les céréales accusées d’être de dangereux OGM. En plus des taxes douanières, nous avons institué la fameuse TVA qui s’élève à 20% et frappe tous les produits à l’import alors que nos exportations en sont exonérées, notamment aux Etats-Unis où cette fiscalité n’existe pas. Les fiscalistes à l’imagination débordante avaient même imaginé le principe tordu d’une TVA sociale, supposée dégrever quelque peu nos entreprises au détriment de celles de l’étranger. N’oublions pas dans le domaine culturel le racket institutionnalisé ponctionnant les blockbusters made in US qui permet de subventionner notre “cinéma d’art et d’essai” et notre soi-disant exception culturelle …

C’est donc l’hôpital qui se moque de la charité lorsque notre président de la république, grand satrape du pays champion du monde des impôts, chef pitoyable d’une nation aspirée dans la spirale infernale des déficits et de la paupérisation, ose s’insurger contre la nouvelle fiscalité américaine. Il ne manque pas d’air en parlant d’une “mesure brutale, infondée”. Il fait figure d'histrion ridicule lorsqu’il promet une “riposte” et affirme qu’avec les récentes décisions trumpiennes, “une chose est sûre, l’économie américaine et les Américains, qu’il s’agisse des entreprises ou des citoyens, sortiront plus faibles qu’hier et plus pauvres.”
Il joue au despote d'opérette lorsqu'il enjoint les chefs d'entreprises françaises de cesser tout investissement aux Etats-Unis. On peut dire qu'il est brillamment secondé dans ses recommandations ubuesques, par son médiocre ministre de l'économie Eric Lombard qui leur ordonne de son côté de faire preuve de patriotisme !
Le président américain insiste quant à lui sur le fait qu’il s’agit de simples mesures de réciprocité. Chez nous, on serait bien avisé de parler d’harmonisation fiscale, mot si cher aux technocrates !

A l’instar de Shakespeare, on aurait tendance à dire que cette panique et ces hauts cris font beaucoup de bruit pour pas grand chose.
Certains ont déjà compris que l’heure était propice à l’ouverture de négociations et qu’il valait mieux être parmi les premiers à le faire, en acceptant quelques concessions.
L’intervention du Premier Ministre britannique Keir Starmer va dans ce sens, lorsqu’il invite à "garder son sang froid", à "ne pas envisager de représailles systématiques" et à discuter sans tarder avec l’Administration américaine.
La seule réaction vraiment sensée vient d’Italie, par la voix de Georgia Meloni affirmant en parlant des taxes douanières, "qu’il faut avoir l’objectif de les supprimer, non de les multiplier". Elle a dénoncé dans le même temps « les droits de douane que l’Union européenne s’est imposée à elle-même », et a appelé à une remise en cause des « règles idéologiques » du Pacte Vert.
La bataille de fait que commencer…

03 avril 2025

Parodie de Justice

La justice est une valeur cardinale de la démocratie.
Outre son rôle protecteur des citoyens consistant à sanctionner les crimes et délits, à réparer leurs fâcheuses conséquences, et à empêcher la récidive, elle est supposée agir comme un contre pouvoir politique.
Devenue divinité intouchable, elle dévore tout ce qui tombe entre ses mains et rien ni personne ne semble plus en mesure de contrecarrer son magistère, ses abus, ses erreurs, ses négligences. Aujourd’hui, avec la mesure d'exécution provisoire, elle est en capacité d’appliquer sans appel certains de ses jugements.
Jamais les juges ne sont jugés pour leurs fautes. Jamais ils n’ont à rendre de comptes. Jamais l’efficacité de leurs décisions n’est évaluée. Jamais leur impartialité ne peut être remise en cause, même lorsque l'esprit partisan relève de l'évidence. La situation est grave et rien ne paraît pouvoir enrayer une évolution qu'on pressent désastreuse.

Comme l'annonce le titre de ce billet, il y a parodie lorsque la justice se livre à des abus de pouvoir ou s’abandonne au contraire à une faiblesse coupable, lorsqu'elle démontre un esprit de parti ou qu'elle obéit sans broncher voire avec zèle à une législation inepte ou néfaste.
C'est ce à quoi on assiste en ces temps troublés et tout se conjugue, tant au plan des actions qu'à celui des responsabilités. Ces dernières incombent au Pouvoir et sont partagées entre l’Exécutif qui propose des lois, le Législatif qui les vote et le Judiciaire qui veille à leur bonne application. En démocratie, le peuple n'est pas innocent puisqu'il élit ceux qui font les lois. Mais est-on encore dans une démocratie de citoyens éclairés ? That is the question.

Le langage des juges, à l'instar des lois qui les inspirent, est souvent pontifiant, abstrus, voire hermétique au commun des mortels. Plutôt que de s'appuyer sur une jurisprudence simple et concrète, il se noie sous les artifices et les certitudes trompeuses engendrés par des lois devenues pléthoriques à force de vouloir décrire par le menu tous les cas de figures imaginables. Au pays de Boileau, de Montaigne et de Montesquieu, on a préféré le chaos jargonnant à la perspicuité, et l'idéologie au pragmatisme.
Dans l'enfer des bonnes intentions, on a cru bon d'édulcorer les concepts au risque de les rendre inintelligibles voire de les pervertir.
Entre autres exemples, on ne parle plus d’inculpation mais de "mise en examen" et même reconnus coupables en première instance, les accusés restent “présumés innocents”. Ce qui conduit de facto à une contradiction lorsqu’il s’agit de prononcer une sanction "d’exécution provisoire" en première instance.

Forts de leur impunité, les juges semblent prendre un malin plaisir à faire tomber de leur piédestal nombre de grandes figures, maintes fois adoubées par le jugement du peuple. Pour ce faire, ils n'hésitent pas à agir au motif de délits qu'ils ne se soucient même plus d'étayer sur des preuves tangibles. L'intime conviction a toute légitimité pour s'imposer. Les faits eux-mêmes ne sont plus nécessaires, l'intention seule suffit. Conséquence logique, les réquisitoires implacables et les condamnations pleuvent comme la mitraille à Gravelotte. Le bracelet électronique remplace le boulet des forçats et tient désormais lieu de pilori d'indignité.
C'est dans ce contexte que sont menées les poursuites dont sont victimes quelques personnes autrefois célébrées, devenues têtes de Turcs. Par exemple l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, et l'acteur on ne peut plus prestigieux Gérard Depardieu. L'acharnement est si évident qu'il faut être aveugle pour ne pas le voir ou diablement hypocrite pour feindre de le nier.

Force est de constater que nombre de délits ont été créés par des législateurs embarqués dans une surenchère morale insensée, se faisant un devoir de tout codifier, de tout surveiller et de tout sanctionner. Cette moulinette ubuesque transforme le moindre écart à la norme en crime passible de procès. On aligne la morale sur les crédos du nouveau puritanisme, on contingente les frais de campagne, on réglemente l'utilisation des deniers publics versés aux élus, on étiquette politiquement chaque intervention télévisée, on fait un décompte savant du temps de parole de chacun, on encadre la liberté d'expression.
Investi d’un pouvoir exorbitant, le censeur ou le juge sanctionne selon des critères de plus en plus arbitraires. Il garrotte la liberté d’expression, ferme des médias, décide de l’éligibilité des individus.

La récente décision de justice touchant le Rassemblement National est le dernier avatar de cette justice inquisitoriale inflexible.  Le trouble, l'émoi, le scandale provoqués par la sévérité du verdict fait envisager la mise en œuvre accélérée d’une procédure d’appel, dans l’éventualité d’atténuer les peines avant la prochaine élection présidentielle. Mais si la proposition semble bienvenue, ses répercussions pourraient s'avérer pires encore pour les intéressés.
On comprend le mécontentement de Marine le Pen et sa volonté de tout mettre en œuvre pour atténuer une sanction qu'elle estime disproportionnée aux faits qui lui sont reprochés. Mais le mal est fait, à tout point de vue. La perspective, en apparence bénéfique, d'un procès en appel à l'été 2026 fait peser une épée de Damoclès sur elle et sur son parti. Cela n'écarte nullement l'éventualité d’un verdict aussi voire plus sévère, et fait planer dans l'attente, une Incertitude rendant très difficile de mettre sur pied le fameux Plan B évoqué par les journalistes. Qu'on croie possible ou non l'élection de Marine Le Pen pour ce qui serait sa 4ᵉᵐᵉ tentative, c'est le fonctionnement de l'ensemble de son parti et la crédibilité des candidats putatifs, présumés innocents mais supposés coupables, qui va être affectée durant près d’un an et demi.

Qu’attendent les élus honnêtes et raisonnables qui se prétendent scandalisés ou “troublés” pour inverser le cours des événements en invalidant à l'Assemblée Nationale les lois devenues folles ? Qu'attendent les politiciens se réclamant d'une politique débarrassée des idéaux calamiteux du socialisme, pour faire l'union sacrée de la Droite et du Centre afin d’offrir enfin une vraie majorité et une chance réelle de changement fondé sur le pragmatisme et le bon sens, voulu par un nombre croissant d'électeurs lassés de l'attentisme décisionnel et du merdoiement politique.
A l’instant présent, le Président de la République a perdu l’essentiel de sa légitimité, après avoir été rejeté massivement par les électeurs à trois reprises. Le gouvernement sans programme et ne disposant d’aucune majorité est dans la quasi incapacité d’agir. Et la candidate déclarée pour la prochaine échéance présidentielle, représentant le premier parti de France, se trouve exclue du scrutin où elle occupe à ce jour la position de favorite.
On savait le débat politique très abîmé et la démocratie affaiblie en France depuis des décennies. Il y a peu de chances de les voir restaurés dans les mois et même les années à venir...

22 mars 2025

L'Esprit des Lumières

Ce petit ouvrage, particulièrement opportun en ces temps de pénombre intellectuelle, a le mérite de mettre à l'honneur les grands esprits qu’on appelle communément Lumières, nommés ainsi pour avoir illuminé l’horizon philosophique et scientifique du XVIIIe siècle.

A tout seigneur tout honneur, sans surprise, Rousseau, VoltaireDiderot, Montesquieu, Condorcet y occupent une place de choix. Mais d’autres sont également évoqués au fil des sujets et des citations : Locke, Hume, Newton, Lavoisier, Kant, Beccaria...

Tzvetan Todorov décline son propos sous plusieurs têtes de chapitres jugées par lui cardinales : autonomie, laïcité, vérité, humanité, universalité.
Il apparaît rapidement que ces thématiques sont en réalité étroitement liées et on suit volontiers l’auteur lorsqu’il part de la première qui consiste à se libérer des dogmes et des croyances. C’est l’essence même du mouvement, et il n’est pas le premier à comparer ce bouleversement à la révolution copernicienne.
La Terre a perdu sa position centrale, intangible, dans la nouvelle cosmogonie. Dieu perd la sienne dans la nouvelle perspective philosophique. C’est l’Homme qui devient l’objet focal vers lequel tout converge. Il ne peut ni ne doit rien attendre de qui que ce soit, hormis de lui-même. C’est un changement fondamental.
L’Homme étant par nature libre, rien ni personne n’a la légitimité de l’asservir et plus aucun dogme n’a d’autorité, plus aucune institution n’est sacrée. Les gouvernements et les lois sont nécessaires mais n’ont plus de caractère divin. A noter qu'il n’est toutefois pas nécessaire de récuser les religions, simplement d’adopter une attitude de tolérance et de liberté de conscience

Comme l’être humain est fait pour vivre en société, il est impératif de conserver des règles de vie communes, pour éviter le chaos et l’anarchie. La notion de contrat social devient rapidement incontournable, développée par John Locke puis par Rousseau. Le corpus réglementaire qu’il suppose repose sur le respect de la liberté individuelle, notamment, celle d’expression et de publication. Et le progrès vers lequel tend naturellement la société se fonde sur la connaissance et la recherche de vérité.

Parvenu à ce stade, le lecteur a passé en revue les thématiques servant de canevas à l’ouvrage et s’il était ignorant du contexte historique et de l’esprit des Lumières, le voilà bien éclairé sur quelques notions essentielles.
Il peut rester sur sa faim car la réflexion se fait parfois un peu courte notamment lorsqu'il s'agit d'analyser l'évolution et les applications pratiques de ce courant de pensée.
Les rejets et les détournements font l’objet d’un chapitre, mais ils se bornent à des réflexions générales, parfois sujettes à controverse.
A juste titre, Todorov souligne la dérive colonialiste dont Condorcet se fit l’apôtre dans le dessein “d’apporter la lumière à tous”. Mais il peine à imputer aux Lumières les désastres révolutionnaires qui ont été commis au nom des grands principes, de la terreur de 1793 aux totalitarismes du XXème siècle. Pire, il semble confondre parfois le bon grain et l’ivraie, renvoyant par exemple dos à dos le marxisme-léninisme et le libéralisme.
A cette fin, il interprète de manière hasardeuse la pensée du pape Jean-Paul II, évoquant notamment un écrit dans lequel ce dernier affirme que “le drame des Lumières” est qu’elles ont rejeté le Christ, et que “par là s’est ouverte la voie vers les expériences dévastatrices du mal qui devait venir plus tard”.
Todorov se croit autorisé à en déduire que selon l’opinion papale, "le marxisme totalitaire et le libéralisme occidental sont des variantes à peine distinctes de la même idéologie". Cela semble très éloigné de la conception de Jean-Paul Il qui mit toute son énergie à lutter contre le fléau du communisme mais ne manifesta jamais un tel acharnement à propos du libéralisme, même s'il s'est élevé contre certains excès permis par la liberté, notamment le matérialisme, l'égoïsme et la cupidité. Il faudrait en la circonstance évoquer plutôt son successeur François, qui flétrit régulièrement le libéralisme avec plus qu'un brin de mauvaise foi si l'on peut dire…

Lorsque l’on poursuit le parcours intellectuel des Lumières jusqu’à notre monde contemporain, on se trouve tôt ou tard à la croisée des chemins entre le socialisme et le libéralisme qu’on peut considérer comme deux évolutions divergentes des mêmes idéaux. Même s’il faut éviter d’être trop manichéen, il faut bien choisir. Le flou idéologique duquel Todorov se montre incapable de s'extraire est la vraie faiblesse de l'ouvrage.
Rousseau, qu’il qualifie abusivement de “plus profond penseur français au temps des lumières”, peut être jugé proche des principes menant au marxisme, même si rien ne prouve qu'il les eut approuvés. En tout état de cause, ses frères de pensée ont bien plus de parenté avec les Pères Fondateurs de la Démocratie Américaine, laquelle représente l'application la plus aboutie de l'idéal de société porté par les Lumières.

L’Amérique n’est pas la seule à avoir cherché à mettre en œuvre les préconisations des Lumières, mais elle représente, qu’on le veuille ou non, le modèle le plus équilibré et durable de démocratie éclairée, et elle est celle qui a poussé le plus loin la logique de liberté individuelle. Au surplus, c’est elle qui a appliqué avec le plus de pragmatisme celle d’égalité.
Ces deux notions auraient gagné à faire l’objet de développements plus approfondis par Todorov.

Le libéralisme n’entend pas séparer la liberté en plusieurs composantes comme le fait le socialisme, qui en rejette certaines, notamment celle relevant du domaine économique. Dans ses pires acceptions, le socialisme, par essence collectiviste, va même jusqu'à piétiner les libertés individuelles au nom du Bien Commun. C’est un non sens, en contradiction flagrante avec la philosophie des Lumières.
A l'inverse, le socialisme fait un tout de l’égalité :égalité des chances, égalité des droits, égalité des conditions. C’est encore une aberration étrangère au libéralisme qui privilégie les deux premières au détriment de la troisième jugée néfaste à tout progrès et initiative. C’est beaucoup plus conforme à l’esprit des Lumières, tel qu’il apparaît chez David Hume. Dans son enquête sur les principes de la morale parue en 1751, le philosophe écossais mit solennellement en garde contre l’égalitarisme prôné à l’époque par les Levellers, ancêtres des Socialistes. Il les accusa même, de se comporter comme « une sorte de fanatiques politiques, dérivée de l’espèce religieuse »

On pourrait faire d’autres reproches à Todorov.
Celui d'avoir occulté l'importance de l'esprit critique, indispensable à toute démarche scientifique, et d'être passé trop rapidement sur les aspects moraux de la philosophie des Lumières si magnifiquement développés par Immanuel Kant. Ou bien de n’avoir pas évoqué le fédéralisme, qu’on peut considérer comme un principe cardinal, car il fut préconisé par le même Kant, comme moyen de tendre vers la paix perpétuelle et le progrès. Encore une fois, les États-Unis cochent la case…
En revanche, son argumentation faisant de l’abolition de la peine de mort un prérequis des Lumières, est des plus discutables, relevant quasi du hors sujet. Selon lui, “si l’assassinat privé est un crime, comment l’assassinat public ne le serait-il pas ?” On pourrait lui répondre par une autre interrogation : comment mettre sur un pied d'égalité un délit criminel et une décision de justice ? Le faire conduit à nier la légitimité de cette dernière, ce qui revient à contrevenir à un des principes fondamentaux des Lumières. Qu'on soit pour ou contre la peine de mort, cela relève du débat d'opinions et non d'un quelconque postulat philosophique.

Au total, ce texte est salutaire, mais hélas trop fragmentaire et inabouti pour servir à l’édification des foules et à la glorification de la belle aventure des Lumières !

18 mars 2025

Pas son genre


in memoriam Emilie Dequenne (1981-2025)


Elle avait vraiment tout pour plaire
Dans le ciel bleu gris de ses yeux
Quelque chose de malicieux
Et un grand sourire d’eau claire

A vrai dire on aurait beau faire
A voir son charme lumineux
Et son air mutin et joyeux
Il n’y avait rien à parfaire

Telle elle fut ici ou là
Telle elle reste et restera
Jeune et vive au sein des mémoires

Ainsi va la vie, chacun part
Et chacun sa petite part
Pour faire un Tout de tant d’histoires…