23 janvier 2025

Un Triomphe Romain

Le faste déployé à l’occasion de l'investiture de Donald Trump en tant que 47ème président des Etats-Unis est à la mesure du caractère exceptionnel de la reconquête du pouvoir par celui qui en fut dépossédé en 2020, de manière contestable pour certains, ou avec la honte au front pour d’autres.
La fête de la victoire avait un goût de revanche que l’impétrant a savouré avec une délectation évidente, pour ne pas dire une vraie jouissance. A l’occasion du discours tenu dans l’enceinte du Capitole, il n’a pas lésiné sur l’outrance et l’auto-satisfaction. Selon ses dires, le “nouvel âge d’or de l’Amérique” est la perspective des quatre années qui s’ouvrent en majesté, sous sa domination. A bien y réfléchir c’est moins grotesque que le passage “des ténèbres à la lumière” célébré par Jack Lang en 1981 ou que le slogan” Le Changement c’est maintenant” de 2012… C’est en tout cas plus ambitieux et galvanisant.

Ces moments intenses de joie et d’exaltation, l’ancienne administration a dû les vivre douloureusement. Joe Biden, ratatiné dans son fauteuil de piteux sortant et Kamala Harris, blême et consternée, furent mis au supplice par les accusations féroces de Trump dirigées sans pitié contre eux. Œil pour œil, dent pour dent, les attaques visaient souvent juste et ne semblaient pas démesurées vu les tourments que ces gens là et leurs affidés ont fait subir à celui dont ils avaient juré la perte par tous les moyens, et qu’ils n’avaient de cesse de ridiculiser de manière caricaturale.

A côté de l’emphase et des excès de langage de cette intronisation en fanfare, il y eut cependant un message d’espoir et une leçon d’optimisme plutôt bienvenus dans cette période de déclin des valeurs occidentales, et avec elles de la Liberté chérie. On aimerait qu’un peu de cette énergie soit communiquée à nos dirigeants cacochymes, inertes, mous, affaissés et sans inspiration. On voudrait croire que les bonnes vibrations portées par cet impétueux vent d’ouest atteignent notre continent.

Hélas tout porte à croire qu’il n’en sera rien. Au moment où l’on assiste à une sorte de renaissance outre-Atlantique, on remet à Paris sur le tapis la loi réglementant la fin de vie !
Le pire est que nos politiciens persistent à ne voir dans ce triomphe républicain, que l’avènement d’une période conflictuelle.
Emmanuel Macron, dont la popularité n’a jamais été aussi basse et le pouvoir aussi faible, a exhorté l’Europe à être “unie, forte et souveraine” face à l’Amérique. Il a plaidé pour renforcer la "compétitivité, la prospérité et la sécurité", "nos démocraties" et "notre modèle économique et social". Autrement tout ce qui reflète son impuissance et constitue dès à présent l’échec de son mandat !
François Bayrou qui patauge dans la mélasse politicienne la plus sordide, est allé plus loin dans l’abjection, déplorant que sans réaction de notre part, “nous allons être dominés, écrasés, marginalisés” car "Les États-Unis ont décidé d'une politique incroyablement dominatrice par le dollar, par la politique industrielle, par la captation de toute la recherche et la captation des investissements".
On se demande parfois ce que ces gens ont dans la tête et de quelle nature est leur ambition. Utopique, évanescente ou inexistante ? Sont-ils incurablement myopes au monde qui les entoure, incapables d’action, résignés, et simplement accrochés à leurs prébendes comme tout porte à le croire ?

L’ère qui commence aux Etats-Unis ne sera sans doute pas aussi glorieuse qu’annoncé et il est toujours risqué de décrire l’avenir de manière trop radieuse. Beaucoup d’obstacles surgiront évidemment pour contrecarrer l’ambition du président, mais là où il y a une volonté, il y a un chemin, comme disait l’autre…
On ne peut pourtant que souhaiter une Amérique forte, car quand elle l’est, le monde va mieux. Plus que jamais notre vieux continent devrait profiter de cette dynamique. En tant qu’allié historique de l’Amérique, la France va-t-elle rater cette nouvelle opportunité de restaurer les liens fraternels mis à mal par la nauséabonde propagande anti-américaine dont Jean-François Revel avait dépeint avec justesse les méfaits ?

Donald Trump a réservé sa première visite de président élu à notre pays à l’occasion de la cérémonie clôturant la rénovation de la cathédrale Notre-Dame. Avant d’être considéré avec dédain par M. Macron, il avait manifesté à son égard une sympathie qui paraissait des plus sincères et chaleureuses. Une chose est sûre, il n’est pas l’ennemi de notre nation. Il souhaite assurément, comme la plupart des dirigeants américains, une Europe unie, et alliée, partageant un même idéal de liberté sur la base d’une concertation loyale et d’échanges commerciaux équitables. Nous interdisons l’importation de bœuf US au motif qu’il est élevé aux hormones et des volailles parce qu’elles sont passées au chlore. Nous faisons de même avec les OGM au nom du principe de précaution. Nous surtaxons les denrées agricoles, les automobiles, nombre de produits made in USA, et avons dans la visée de notre gros canon fiscal les géants de la Silicon Valley. Autant de mauvaises raisons qui cachent un objectif bassement protectionniste.

Lorsque nous abolirons ces barrières absurdes, nul doute que Donald Trump se fera beaucoup plus conciliant…

20 janvier 2025

L'effluve sauvage du Musk

A l’instar de Baudelaire*, j’ai toujours aimé les parfums musqués. Ils ont quelque chose d’animal et d’indompté. Un mélange explosif de sensualité et de liberté.
Ces qualificatifs s’appliquent à merveille à la personnalité extravagante d’Elon Musk. Rien ne semble résister à son audace et rien ne paraît pouvoir s’opposer à son sourire carnassier. Il incarne une Amérique novatrice et conquérante.
En plus d’être un chef d’entreprise hors normes, il règne désormais sur l’univers prolixe et tentaculaire des fameux réseaux sociaux. Dire qu’il fait la pluie et le beau temps dans l’opinion publique serait excessif. Mais il n’a pas son pareil pour mettre les pieds dans le plat des idées reçues.
Il n'est donc pas étonnant que les pisse-vinaigre du vieux monde, confits dans leurs préjugés et leur pusillanimité, le prennent en grippe (c’est la saison…)

Depuis qu’il a pris le contrôle de Tweeter, on ne compte plus les esclandres dont il s’est fait une spécialité. Il donne sans vergogne son opinion sur nombre de sujets brûlants. S’il s’agissait de monsieur lambda, cela ne ferait guère de remous, mais voilà, le trublion est suivi par plusieurs millions de lecteurs et il fait partie des plus proches conseillers du nouveau président Trump. Il est le maître à bord et n’est pas de gauche. Pire, il est américain, mâle, blanc, et incarne à lui tout seul le capitalisme. Autant de péchés mortels pour les dévots du progressisme.
Ses prises de position à propos du parti allemand AFD (Alternative Für Deutschland) ont scandalisé le chœur des bien pensants. Beaucoup de ces gens ne savent rien de cette formation, hormis ce que la plupart des médias en disent en le réduisant habituellement à un groupuscule néo-nazi. C’est grotesque mais ce n’est pas ici le sujet.
Même lorsque Elon Musk se fait lanceur d’alerte en dénonçant le scandale de l’horrible traite des blanches au Royaume Uni par des grooming gangs pakistanais et l’inaction des Pouvoirs Publics, il choque les ligues de vertus. Elles appellent ça de l’ingérence, au motif que Musk accuse l’actuel Premier Ministre anglais Keir Starmer d’indulgence coupable lorsqu’il était Director of Public Prosecutions. Dans cette affaire, la mauvaise foi des donneurs de leçons est si flagrante qu’elle est à ranger dans les dérives idéologiques qui ont conduit à occulter tant de crimes.

Pour les commissaires politiques dignes des pires heures du socialisme, Elon Musk serait un dangereux propagateur de fake news qu’il est urgent de museler. Ces gens savent par essence mieux que le peuple ce qui est bon à entendre ou à lire par lui.
Au premier rang de ces censeurs figure Thierry Breton, ancien commissaire européen au marché intérieur et homme d’affaires plutôt calamiteux si l’on en juge par le sort peu glorieux des entreprises qu’il a dirigées (France Telecom, Thomson, Atos…). Son passage à la Commission européenne reste marqué par les nombreuses lois inutiles dont il fut l’instigateur, empoisonnant le quotidien des honnêtes gens au nom de leur protection (RGPD, DSA…). Il s'était juré de faire plier à ses lubies l'homme d'affaires américain, avant "d'être démissionné" par Mme von der Leyen...
M. Macron lui-même n’apparaît guère plus inspiré en la circonstance. Tout en faisant risette au nouveau Donald Trump, il ne tarit pas d’invectives à propos d’Elon Musk qu’il qualifie de leader de "la Nouvelle Internationale Réactionnaire" !

Aujourd’hui, beaucoup des détracteurs de X (anciennement Tweeter) menacent de quitter le réseau. Grand bien leur fasse ! Souvent ils doivent une bonne partie de leur éphémère gloriole aux messages provocateurs dont ils l’ont inondé en toute occasion.
Elon Musk a entrepris de rétablir une véritable liberté d’expression sur son média. Il en chasse les auto-prétendus fact-checkers qui agissaient à la manière de comités de censure et met en place un système plus efficace de community notes. Preuve que cette stratégie n'est pas si mauvaise, elle est imitée par Mark Zuckerberg sur Facebook.
Que les mécontents s’en aillent, bravo ! Ils se retrouveront entre eux quelque part et feront de leur repère une forteresse inaccessible à tout opposant, et à tout contradicteur. Ils risquent de se retrouver assez seuls et surtout en pleine absurdité, à l’image du fou ayant réussi à escalader le mur de l’asile et qui voyant un passant dans la rue en contrebas, l’interpelle : "Dites mon brave, combien êtes-vous là dedans ?”

* "Il est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
- Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,

Ayant l'expansion des choses infinies,
Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
Qui chantent les transports de l'esprit et des sens..."

03 janvier 2025

Et Omnia Vanitas

Les allocutions présidentielles célébrant la nouvelle année n'ont en général guère d’intérêt. 2025 ne fera pas exception à la règle.
On n'avait rarement entendu de la part d’Emmanuel Macron un discours aussi court, plat et peu inspiré.
Comme toujours, il apparut très satisfait de lui, clips allégoriques à l’appui. Notamment d’avoir montré au Monde ébahi, “qu’impossible n'est pas français”.
Il se vanta en la circonstance d’avoir grandement contribué à l’égalité hommes femmes grâce à la constitutionnalisation de l’IVG. Il se targua d’avoir organisé les jeux olympiques, la restauration de Notre-Dame, et le quatre-vingtième anniversaire du débarquement…
En bref, on retrouva sa propension à jouer les maîtres de cérémonie, beau parleur, dispensateur de vœux pieux et enfonceur de portes ouvertes.

En matière de projets à venir, c’est le désert des Tartares. Après avoir fait tout juste une amende honorable au sujet de la dissolution de l’Assemblée, il promet de redonner la parole aux citoyens.
Occultant ses échecs électoraux à répétition, il entend les faire “trancher sur des sujets déterminants”, sans préciser naturellement sous quelle forme ni sur quelles thématiques.
Tout le monde supputa fissa qu’il pourrait s’agir de référendums, ou bien de conventions citoyennes et de grands débats. Autant de propositions qu’on sait par expérience vaines et sans lendemain.
Les référendums, ce n’est pas faute d’en avoir promis, mais aucun ne fut concrétisé en 7 ans. Il faut dire que les quelques expériences faites par les prédécesseurs de l’actuel chef de l’État tournèrent au fiasco.
Vu la conjoncture actuelle, quelle que soit la question posée, un référendum se traduirait inévitablement par un plébiscite sur sa personne, conduisant selon toute probabilité à un rejet massif. Autant proposer une nouvelle dissolution dès l’été prochain et conditionner son maintien à l’Elysée à l’obtention d’une vraie majorité…
Quant aux grands débats et conventions citoyennes, il y en eut certes, mais on a vu comment ces expédients donnaient la mesure de la vacuité démagogique…
S’agissant enfin des questions à trancher, s’il s’agit comme certains le suggèrent, de la fin de vie, ou de l’apocalypse climatique autrement dit de la fin du monde, la perspective est assez déprimante pour une nouvelle année.
Mais sur quoi d’autre un président en fin de mandat, en position de roi nu, pourrait faire semblant d’agir ?

01 janvier 2025

Vanitas Vanitatum...

















Les années s’en vont, l’âge passe
Et c’est au seuil du nouvel an
Qu’on hésite à prendre l’élan
Pour sortir de sa carapace.

Qu’un jour nouveau bientôt remplace
Celui qu’on enterre en dansant,
Ne fait pas oublier le temps
Ni l’ennui, ni même l’angoisse.

Pour conjurer les mauvais jours
On s’envoie des voeux illusoires,
Vite disparus des mémoires.

La vie reprend sitôt son cours,
Passée l’ivresse de la fête
On reste bien seul dans sa tête.