05 avril 2025

Guerre commerciale

Le grand mot est lâché : Trump a déclaré la guerre commerciale !

L’annonce par le président américain de l’augmentation des droits de douane à l’entrée des Etats-Unis, s'apparente à un pari risqué pouvant mener à davantage de protectionnisme, dont on connaît les effets néfastes. On espère qu'elle a été mûrement réfléchie, mais pour l'heure, elle a manifestement été faite avec le but de choquer.
Le résultat ne s’est pas fait attendre.
On ne compte plus les réactions, les avis d’experts autorisés, les truismes en tous genres et surtout les bêtises qui ont fusé après cette décision, que Marc Fiorentino s'est fait plaisir à colliger dans son excellente Newsletter:
"C'est une remise en cause de l'ordre économique mondial !"
"On revient aux années 30 qui ont amené la Grande Dépression et la Seconde Guerre mondiale !"
"Et évidemment tous les commentaires sur la stupidité, car il ne peut être que fou ou stupide,  avec laquelle Trump aurait calculé ses droits de douane."
"Et des brillants économistes nous expliquent avec certitude que ces droits de douane vont provoquer une flambée de l'inflation et mettre l'économie américaine à genoux."

En France bien sûr on est monté au créneau en hurlant au fou comme d’habitude. Coutumiers que nous sommes du déni de réalité, on feint de croire qu’il s’agit d’une déclaration de guerre alors que c’est nous qui avons entamé les hostilités, et ce, depuis de nombreuses années !
Combien de fois nous a-t-on expliqué qu’il fallait taxer et surtaxer les géants US de la tech, les fameux GAFAM, devenus plus récemment les 7 Magnifiques.
Mais bien avant cela, on avait procédé à quantité de mesures protectionnistes à l’encontre de l’Oncle Sam. Entre autres, on peut évoquer l’interdiction du bœuf et des volailles américaines, au motif foireux qu’ils seraient impropres à la consommation car bourrés d’hormones, d’antibiotiques ou passés au chlore. Dans le même esprit, on avait banni les céréales accusées d’être de dangereux OGM. En plus des taxes douanières, nous avons institué la fameuse TVA qui s’élève à 20% et frappe tous les produits à l’import alors que nos exportations en sont exonérées, notamment aux Etats-Unis où cette fiscalité n’existe pas. Les fiscalistes à l’imagination débordante avaient même imaginé le principe tordu d’une TVA sociale, supposée dégrever quelque peu nos entreprises au détriment de celles de l’étranger. N’oublions pas dans le domaine culturel le racket institutionnalisé ponctionnant les blockbusters made in US qui permet de subventionner notre “cinéma d’art et d’essai” et notre soi-disant exception culturelle …

C’est donc l’hôpital qui se moque de la charité lorsque notre président de la république, grand satrape du pays champion du monde des impôts, chef pitoyable d’une nation aspirée dans la spirale infernale des déficits et de la paupérisation, ose s’insurger contre la nouvelle fiscalité américaine. Il ne manque pas d’air en parlant d’une “mesure brutale, infondée”. Il fait figure d'histrion ridicule lorsqu’il promet une “riposte” et affirme qu’avec les récentes décisions trumpiennes, “une chose est sûre, l’économie américaine et les Américains, qu’il s’agisse des entreprises ou des citoyens, sortiront plus faibles qu’hier et plus pauvres.”
Il joue au despote d'opérette lorsqu'il enjoint les chefs d'entreprises françaises de cesser tout investissement aux Etats-Unis. On peut dire qu'il est brillamment secondé dans ses recommandations ubuesques, par son médiocre ministre de l'économie Eric Lombard qui leur ordonne de son côté de faire preuve de patriotisme !
Le président américain insiste quant à lui sur le fait qu’il s’agit de simples mesures de réciprocité. Chez nous, on serait bien avisé de parler d’harmonisation fiscale, mot si cher aux technocrates !

A l’instar de Shakespeare, on aurait tendance à dire que cette panique et ces hauts cris font beaucoup de bruit pour pas grand chose.
Certains ont déjà compris que l’heure était propice à l’ouverture de négociations et qu’il valait mieux être parmi les premiers à le faire, en acceptant quelques concessions.
L’intervention du Premier Ministre britannique Keir Starmer va dans ce sens, lorsqu’il invite à "garder son sang froid", à "ne pas envisager de représailles systématiques" et à discuter sans tarder avec l’Administration américaine.
La seule réaction vraiment sensée vient d’Italie, par la voix de Georgia Meloni affirmant en parlant des taxes douanières, "qu’il faut avoir l’objectif de les supprimer, non de les multiplier". Elle a dénoncé dans le même temps « les droits de douane que l’Union européenne s’est imposée à elle-même », et a appelé à une remise en cause des « règles idéologiques » du Pacte Vert.
La bataille de fait que commencer…

03 avril 2025

Parodie de Justice

La justice est une valeur cardinale de la démocratie.
Outre son rôle protecteur des citoyens consistant à sanctionner les crimes et délits, à réparer leurs fâcheuses conséquences, et à empêcher la récidive, elle est supposée agir comme un contre pouvoir politique.
Devenue divinité intouchable, elle dévore tout ce qui tombe entre ses mains et rien ni personne ne semble plus en mesure de contrecarrer son magistère, ses abus, ses erreurs, ses négligences. Aujourd’hui, avec la mesure d'exécution provisoire, elle est en capacité d’appliquer sans appel certains de ses jugements.
Jamais les juges ne sont jugés pour leurs fautes. Jamais ils n’ont à rendre de comptes. Jamais l’efficacité de leurs décisions n’est évaluée. Jamais leur impartialité ne peut être remise en cause, même lorsque l'esprit partisan relève de l'évidence. La situation est grave et rien ne paraît pouvoir enrayer une évolution qu'on pressent désastreuse.

Comme l'annonce le titre de ce billet, il y a parodie lorsque la justice se livre à des abus de pouvoir ou s’abandonne au contraire à une faiblesse coupable, lorsqu'elle démontre un esprit de parti ou qu'elle obéit sans broncher voire avec zèle à une législation inepte ou néfaste.
C'est ce à quoi on assiste en ces temps troublés et tout se conjugue, tant au plan des actions qu'à celui des responsabilités. Ces dernières incombent au Pouvoir et sont partagées entre l’Exécutif qui propose des lois, le Législatif qui les vote et le Judiciaire qui veille à leur bonne application. En démocratie, le peuple n'est pas innocent puisqu'il élit ceux qui font les lois. Mais est-on encore dans une démocratie de citoyens éclairés ? That is the question.

Le langage des juges, à l'instar des lois qui les inspirent, est souvent pontifiant, abstrus, voire hermétique au commun des mortels. Plutôt que de s'appuyer sur une jurisprudence simple et concrète, il se noie sous les artifices et les certitudes trompeuses engendrés par des lois devenues pléthoriques à force de vouloir décrire par le menu tous les cas de figures imaginables. Au pays de Boileau, de Montaigne et de Montesquieu, on a préféré le chaos jargonnant à la perspicuité, et l'idéologie au pragmatisme.
Dans l'enfer des bonnes intentions, on a cru bon d'édulcorer les concepts au risque de les rendre inintelligibles voire de les pervertir.
Entre autres exemples, on ne parle plus d’inculpation mais de "mise en examen" et même reconnus coupables en première instance, les accusés restent “présumés innocents”. Ce qui conduit de facto à une contradiction lorsqu’il s’agit de prononcer une sanction "d’exécution provisoire" en première instance.

Forts de leur impunité, les juges semblent prendre un malin plaisir à faire tomber de leur piédestal nombre de grandes figures, maintes fois adoubées par le jugement du peuple. Pour ce faire, ils n'hésitent pas à agir au motif de délits qu'ils ne se soucient même plus d'étayer sur des preuves tangibles. L'intime conviction a toute légitimité pour s'imposer. Les faits eux-mêmes ne sont plus nécessaires, l'intention seule suffit. Conséquence logique, les réquisitoires implacables et les condamnations pleuvent comme la mitraille à Gravelotte. Le bracelet électronique remplace le boulet des forçats et tient désormais lieu de pilori d'indignité.
C'est dans ce contexte que sont menées les poursuites dont sont victimes quelques personnes autrefois célébrées, devenues têtes de Turcs. Par exemple l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, et l'acteur on ne peut plus prestigieux Gérard Depardieu. L'acharnement est si évident qu'il faut être aveugle pour ne pas le voir ou diablement hypocrite pour feindre de le nier.

Force est de constater que nombre de délits ont été créés par des législateurs embarqués dans une surenchère morale insensée, se faisant un devoir de tout codifier, de tout surveiller et de tout sanctionner. Cette moulinette ubuesque transforme le moindre écart à la norme en crime passible de procès. On aligne la morale sur les crédos du nouveau puritanisme, on contingente les frais de campagne, on réglemente l'utilisation des deniers publics versés aux élus, on étiquette politiquement chaque intervention télévisée, on fait un décompte savant du temps de parole de chacun, on encadre la liberté d'expression.
Investi d’un pouvoir exorbitant, le censeur ou le juge sanctionne selon des critères de plus en plus arbitraires. Il garrotte la liberté d’expression, ferme des médias, décide de l’éligibilité des individus.

La récente décision de justice touchant le Rassemblement National est le dernier avatar de cette justice inquisitoriale inflexible.  Le trouble, l'émoi, le scandale provoqués par la sévérité du verdict fait envisager la mise en œuvre accélérée d’une procédure d’appel, dans l’éventualité d’atténuer les peines avant la prochaine élection présidentielle. Mais si la proposition semble bienvenue, ses répercussions pourraient s'avérer pires encore pour les intéressés.
On comprend le mécontentement de Marine le Pen et sa volonté de tout mettre en œuvre pour atténuer une sanction qu'elle estime disproportionnée aux faits qui lui sont reprochés. Mais le mal est fait, à tout point de vue. La perspective, en apparence bénéfique, d'un procès en appel à l'été 2026 fait peser une épée de Damoclès sur elle et sur son parti. Cela n'écarte nullement l'éventualité d’un verdict aussi voire plus sévère, et fait planer dans l'attente, une Incertitude rendant très difficile de mettre sur pied le fameux Plan B évoqué par les journalistes. Qu'on croie possible ou non l'élection de Marine Le Pen pour ce qui serait sa 4ᵉᵐᵉ tentative, c'est le fonctionnement de l'ensemble de son parti et la crédibilité des candidats putatifs, présumés innocents mais supposés coupables, qui va être affectée durant près d’un an et demi.

Qu’attendent les élus honnêtes et raisonnables qui se prétendent scandalisés ou “troublés” pour inverser le cours des événements en invalidant à l'Assemblée Nationale les lois devenues folles ? Qu'attendent les politiciens se réclamant d'une politique débarrassée des idéaux calamiteux du socialisme, pour faire l'union sacrée de la Droite et du Centre afin d’offrir enfin une vraie majorité et une chance réelle de changement fondé sur le pragmatisme et le bon sens, voulu par un nombre croissant d'électeurs lassés de l'attentisme décisionnel et du merdoiement politique.
A l’instant présent, le Président de la République a perdu l’essentiel de sa légitimité, après avoir été rejeté massivement par les électeurs à trois reprises. Le gouvernement sans programme et ne disposant d’aucune majorité est dans la quasi incapacité d’agir. Et la candidate déclarée pour la prochaine échéance présidentielle, représentant le premier parti de France, se trouve exclue du scrutin où elle occupe à ce jour la position de favorite.
On savait le débat politique très abîmé et la démocratie affaiblie en France depuis des décennies. Il y a peu de chances de les voir restaurés dans les mois et même les années à venir...