Une étoile s’éteint et le monde retient son souffle un court instant, avant que la pluie d’hommages ne déverse sur le disparu son ondée bienveillante, mais tardive et versatile.
Il ne faut sans doute pas aller jusqu’à affirmer qu’Alain Delon (1935-2024) fut mal aimé mais il y a un peu de cela.
Ses avis bien tranchés, souvent à contre courant du conformisme contemporain, sa mine parfois renfrognée et un tantinet hautaine ont quelque peu nui à son image.
Mais personne n’a pu prétendre qu’il n’avait pas de personnalité, personne n’a pu sérieusement lui dénier le talent, et personne ne fut insensible à son magnétisme fascinant et naturellement à sa beauté radiante.
Il était et restera un artiste à part, une vraie légende. On ne sait à vrai dire s’il fut un très grand acteur, ni même citer un film plutôt qu’un autre tant sa seule présence s'impose dans chacun d’eux, bons ou mauvais…
A son sujet, me viennent les vers de Gérard de Nerval qu’on dirait, me semble-t-il écrits pour lui :
Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le prince d’Aquitaine à la tour abolie :
Ma seule étoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.
Dans la nuit du tombeau, toi qui m’as consolé,
Rends moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le pampre à la rose s’allie.
Suis-je Amour ou Phébus ?… Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la reine ;
J’ai rêvé dans la grotte où nage la Sirène…
Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la sainte et les cris de la fée.