26 février 2025

Le drapeau noir flotte sur la marmite

Notre pays s’enfonce chaque jour un peu plus dans le marasme. Marasme à tous les étages : politique, décisionnel, juridictionnel, idéologique. En lieu et place du fameux bouillon de culture qui infusait autrefois (il y a bien longtemps...), il ne reste qu’une infâme marmite, dans laquelle il n’y a plus ni jus ni effervescence. Juste la pression croissante de gaz nauséabonds à l’effet asphyxiant.

On sait depuis belle lurette qu’en France la liberté d’entreprendre est très contrainte par une bureaucratie prolifique et une fiscalité décourageante. Le droit de s'exprimer est quant à lui sévèrement réglementé par des lois iniques interdisant tout propos supposé heurter la doxa régnante. Des commissaires tatillons peuplent une myriade de petits soviets à la solde du gouvernement. Ils calculent à la seconde près le temps de parole de chacun, évaluant leur teneur politique à l'aune du credo bien pensant officiel, et infligent des amendes exorbitantes aux contrevenants.
Aujourd’hui, on a franchi un nouveau cap.
Désormais, la chape s'abat sur les médias libres.

Cette semaine sera marquée par la fermeture arbitraire de deux chaînes de télévision privées, C8 et NRJ12. Les deux étaient florissantes en matière de popularité. Elles offraient à ceux qui le souhaitaient des émissions variées, mêlant divertissement, réflexion, culture, documentation, vie animale… C8 était même parmi les chaînes de la TNT, celle qui avait le plus d’audience, ne coûtant rien au contribuable.
Dans quel régime sommes-nous donc pour en arriver à de telles extrémités ?

La décision est inepte, injuste, abracadabrante, mais le pire est qu’elle passe sans rébellion ou quasi.
Le Conseil d’Etat a validé l'oukase émis par l’ARCOM. Le Chef de l’Etat n’a pas bougé un sourcil, plaidant de manière hypocrite l'indépendance de l’ARCOM, mise en place par ses soins. Alors que la menace d’une démission aurait dû s'imposer pour éviter une telle crapulerie partisane, aucun des ministres n’a bronché, pas même celle de la culture. Ils se sont bornés, comme Tartuffe, à déplorer avec des larmes de crocodile le fait accompli. Hormis quelques exceptions notables, on n'entend rien du côté des journalistes prétendument attachés à la liberté et à l’indépendance des médias, et pas davantage venant des associations clamant la défense des droits de l’homme et la liberté d’opinion.

Le 1er Mars 2025, lorsque apparaîtront les deux trous noirs au sein du paysage audio-visuel français, ce sera un jour de honte pour le pays, et d’indignité pour tous ceux qui se seront tus devant l’infâmie. Honneur au vice-président américain Vance, qui alerta notre vieux continent sur la faillite en cours de la liberté d’information et d’expression sur notre vieux continent.
Mais est-il déjà trop tard pour s’opposer au règne débilitant de la censure ?

23 février 2025

Donald Trump est-il illuminé ?

Pas un jour sans qu’on parle de lui. Le Monde semble graviter autour de son imposante silhouette de commandeur et chacune de ses paroles devient sujet d’actualité. Dire qu’il fait la pluie et le beau temps serait excessif, mais il est évident que la Maison Blanche est devenue the place to be.
Le parler rude et provocateur de Donald Trump hérisse beaucoup d’âmes sensibles. Ce n’est pourtant ni nouveau ni surprenant et cela ne semble guère le perturber. Depuis longtemps, il a pris l’habitude d’être “l’homme que les médias adorent détester”. Il ne s’en émeut pas et se fait un devoir de prendre le contre-pied des a priori haineux qui se déversent sur lui. On se souvient notamment des révélations qu’il fit dans un ouvrage publié avant 2016 :“Je n’hésite jamais à faire parler de moi en étant polémique ou en contre attaquant.../… Il m’arrive de faire des commentaires choquants, leur donnant ainsi ce qu’ils attendent…./…. Ils savent ce que j’ai dit, ils savent ce que j’ai voulu dire, mais ils en font des citations tronquées ou bien les interprètent de manière à en donner un sens différent.../… J’ai toujours attiré une foule de journalistes qui attendaient comme des requins que je fasse couler le sang… J’essaie d’honorer cette attente !”

Après un instant de calme relatif dû au choc de sa réélection magistrale, voilà les anti-Trump primaires qui reviennent à la charge.
Pour beaucoup de ces gens, le nouveau président américain serait un fou dangereux.
Les plateaux télévisés sont remplis d’experts qui se targuent de décrypter sa pensée, sa politique et ses objectifs en soulignant systématiquement leur caractère néfaste si ce n’est délirant. Cela ne les empêche nullement d’affirmer dans le même temps qu’il est imprévisible. On n’est plus à un paradoxe près !

A y regarder de plus près et à considérer ce que Trump fait plutôt que prendre au pied de la lettre tout ce qu’il dit, on n’est pas si loin des fameuses Lumières d’autrefois, qu’il est convenu de vénérer sans toujours bien comprendre leur enseignement. On pourrait en somme dire qu’il est illuminé au bon sens du terme.
Deux exemples pour s’en convaincre :
Son fameux Art dof the Deal, ne s’inscrit-il pas dans l’esprit du doux commerce vanté par Montesquieu ?
Ce dernier posait dans l’Esprit des Lois, que «L'effet naturel du commerce est de porter à la paix. Deux nations qui négocient ensemble se rendent réciproquement dépendantes : si l'une à intérêt à acheter, l'autre a intérêt à vendre, et toutes les unions sont fondées sur des besoins naturels...».
On accuse régulièrement le tycoon devenu homme d’État d’être resté avant tout un affairiste, âpre au profit. Si c’est vrai, n’est-il pas tout simplement dans la lignée de beaucoup de ses prédécesseurs ? On se souvient notamment du président Coolidge qui affirmait en 1925 que « L’affaire de l’Amérique c’est de faire des affaires ».
On lui reproche son slogan America First et plus récemment son fameux MAGA. On lui en veut d’être protectionniste. Il suffit pourtant de lire ses écrits pour savoir que s’il l’est, ce n’est que par pur pragmatisme et non par conviction idéologique. S’il brandit souvent la menace des droits de douane, il la met rarement à exécution, préférant de loin la négociation au conflit, tout en cherchant ce qui semble bien naturel, à préserver les intérêts de son pays. Les dirigeants français sont mal placés pour lui en faire reproche, eux qui après avoir tout fait pour plomber l'agriculture locale et pousser les entreprises à délocaliser, rivalisent de chauvinisme. Il se gargarisent bien vainement du made in France et cherchent par tous les moyens à bloquer le traité de libre échange du MERCOSUR avec l’Amérique du Sud. Mieux vaut en rire...

D’une manière générale, Trump répugne à la guerre. Sa stratégie, parfaitement résumée dans l’ouvrage cité plus haut consiste à “user de douceur et brandir un gros bâton…” “Nous avons besoin”, dit-il, “d’une armée si forte que nous n’aurions pas besoin de nous en servir”. Quoi de scandaleux ? Ce n’est jamais que le bon vieux principe romain si vis pacem, para bellum
On a fait des gorges chaudes de sa proposition d’associer le Canada aux États-Unis et de trouver un compromis associatif avec le Groenland. Pourtant, objectivement, ce n’est rien d’autre qu’une nouvelle formulation du projet kantien de paix perpétuelle « Si par bonheur un peuple puissant et éclairé en vient à former une république (qui par nature doit tendre vers la paix perpétuelle), alors celle-ci constituera le centre d’une association fédérale pour d’autres états, les invitant à se rallier à lui afin d’assurer de la sorte l’état de liberté des Etats conforme à l’idée du droit des gens. »
On pourrait s’étonner que l’Europe, mère patrie de Kant et des Lumières, ne s’inscrive pas dans cette perspective excitante dans laquelle il y aurait beaucoup à gagner. Il suffit d’imaginer la puissance qu’aurait une alliance de fédérations de part et d’autre de l’Atlantique pour se désoler de voir toujours ramenées au niveau de l’antagonisme les relations entre le vieux continent et le nouveau.

En à peine plus d’un mois de gouvernement, l'application de ces principes assez simples a fait bouger les lignes. Naturellement, on ne saurait tirer de conclusions hâtives à propos de l'action du président fraîchement réélu. Mais le bilan de son premier mandat plaide en sa faveur et certaines avancées sont réelles.
Le Hamas se voit enfin contraint de libérer les otages israéliens et un projet ambitieux pour la région se dessine à l’horizon.
La fin du conflit entre la Russie et l’Ukraine apparaît comme possible, même s’il faut regretter la défaite de cette dernière, contrainte de céder du terrain. C'était hêlas prévisible dès le début du conflit, faute d’engagement direct des puissances occidentales et faute même d'avoir défini la moindre ligne rouge. Il faut en la circonstance déplorer l’impuissance chronique de l’Europe, généreuse en paroles mais incapable d’articuler la moindre stratégie concrète.
Certains semblent nourrir encore des pensées bellicistes. C’est pure vanité car à moins de provoquer une conflagration mondiale insensée, l’heure est venue de faire cesser ces vaines atrocités et de réamorcer des relations avec la Russie. C’est ce que veut faire Trump. Hélas, dans cette négociation, nous ne pouvons espérer qu’un petit strapontin, à la mesure du poids devenu dérisoire et de la faiblesse de l’Europe, plus incohérente et indéterminée que jamais.

Il faut souhaiter que le grand bouleversement qui s’annonce ne soit pas gâché par les a priori et les outrances qui fusent de toute part.
Dans ce contexte, il paraît dérisoire d’accuser Donald Trump d’être fautif d’un état de fait dû à l'incurie des gouvernants qui l’ont précédé.
Pour ces raisons, même si cela peut sembler choquant, il faut espérer que l’Administration Trump obtienne des résultats positifs durables et qu’elle ouvre la voie au retour du bon sens de la raison.

14 février 2025

L'IA entre pitrerie et pragmatisme

Le récent sommet parisien consacré à l’Intelligence Artificielle (IA) a permis à notre président, en mal d’occupations sérieuses, de s’amuser comme un petit fou.
L’entretien qu’il donna sous la houlette de l’ineffable Laurent Delahousse, face à une journaliste indienne médusée par son arrogance, restera sans doute dans les annales. En partie parce qu’aucun des deux interviewers ne put placer un traître mot ni la moindre question tant les envolées lyriques du maître de cérémonie furent aussi intarissables qu'imperturbables.
Sans doute aussi en raison du petit montage vidéo que le Chef de l’Etat crut bon de présenter au monde entier, le montrant travesti, par le biais d’un logiciel, en toutes sortes de créatures plus grotesques les unes que les autres. Le ridicule ne tuant pas, il afficha une satisfaction béate, pensant que son petit effet à deux balles, amuserait la galerie à défaut de renseigner sur le sujet du jour et surtout de grandir son image passablement détériorée. Il ne s’attendait pas à la réaction de la journaliste Palki Sharma Upadhyay qui parvint à décocher un passing shot, affirmant que la farce “n’était vraiment pas drôle”.
L’orateur arrêté net, fut quelque peu douché par cette remarque assassine mais très opportune, à laquelle il n’est à l’évidence pas habitué, venant de la presse complaisante qui l’interroge habituellement.
Cela ne l’empêcha pourtant pas de repartir à l’assaut, se livrant à un auto-dithyrambe aussi creux que flamboyant, vantant l’avance de l’Europe en matière de balisage légal. Dans l’élan, il fit miroiter les perspectives fabuleuses qui pourraient s’ouvrir grâce à son action personnelle, évoquant notamment les quelque 109 milliards d’euros d’investissement qui vont tomber du ciel un de ces jours, on ne sait trop pour quoi faire.

On ne retiendra probablement pas ces pitreries et ces tartarinades qui ne font pas honneur à notre pays et qui consacrent l’impuissance structurelle de notre machine étatique, forte en vœux pieux mais timorée en matière d’actions concrètes.
Que restera-t-il donc de cette réunion pompeuse, consacrée bien davantage aux notions nébuleuses d’éthique, d’inclusion, d'écologie et de régulation, qu’aux débouchés pratiques de ce qu’il est convenu de nommer intelligence artificielle ?

Sans doute avant tout, l'intervention de J.D. Vance, vice-président américain, beaucoup plus pragmatique et sans fioriture ni artifice, qui envoya au sein de ce festival de beaux projets théoriques quelques missiles parfaitement ciblés.
Il affirma que les États-Unis feront «tous les efforts possibles pour encourager les politiques pro-croissance en matière d'IA», non sans avoir rappelé que son pays est "le leader" dans le domaine et qu’il entend le rester. Visant les réglementations européennes destinées à contrer l’influence américaine et celle de leurs géants technologiques, il se lança ensuite dans un réquisitoire au vitriol “contre tout ce qui pourrait restreindre la marge de manœuvre des entreprises”. Ce serait ajouta-t-il «une terrible erreur, non seulement pour les États-Unis mais aussi pour votre propre pays», a-t-il ajouté.
Il fustigea sans ménagement la bureaucratie procédurière régnant en Europe et dénonça une «régulation excessive» de l'intelligence artificielle qui «pourrait tuer une industrie en plein essor», soulignant la nécessité de mettre en place «des régimes réglementaires internationaux qui favorisent la création de technologies d'IA au lieu de l'étouffer».
Sur ce, il quitta discrètement le sommet, sans prendre le temps d’écouter les conclusions emphatiques d’un Emmanuel Macron, plus hors sol que jamais.
A bon entendeur, salut...

11 février 2025

Exhibitions barbares

L’accord de cessez-le-feu et d’échanges enfin obtenu entre Israël et le Hamas, donne lieu à un marchandage atroce, distillé au compte-gouttes. D’un côté des otages, civils, captifs innocents de monstres depuis 500 interminables journées, de l’autre des combattants et des terroristes, souvent responsables d’attentats et de meurtres. Avec une balance inégale : des dizaines de prisonniers contre un seul otage. Israël résigné, mais meurtri jusqu’au plus profond de sa société et de ses familles, n’a pas le choix. C’est ça ou rien.
Le chœur des droits-de-l’hommistes ne s’émeut guère de cet ignoble trafic d’êtres humains. Certains médias bien pensants n’ont même pas hésité, sans doute pour faire bonne mesure, à qualifier les prisonniers palestiniens “d’otages”.
L’horreur est portée à son comble, lorsqu’on voit à chaque transfert sordide, les victimes juives décharnées, portant dans leur chair l’évidence de sévices, de violences et de privations, exhibées et humiliées sur des estrades de foire par des brutes armées et encagoulées.
On en vient à comprendre les pays voisins, réputés favorables à la cause palestinienne, lorsqu'ils manifestent une réticence à aider les populations de la bande de Gaza, et surtout leur refus d'accueillir des réfugiés en provenance de ce territoire maudit.
Mais bien pire, est le silence des politiques et des dirigeants des pays dits démocratiques devant l’inqualifiable. Eux qui ne manquent pas une occasion de commémorer les atrocités commises par le IIIème Reich il y a 80 ans, restent muets devant la répétition de cette infamie, se déroulant sous leurs yeux. A l’évidence, ce n’est pas la douleur qui les tétanise, c’est la couardise et la peur. Les organisations internationales restent murées dans le même silence coupable et honteux. Hormis l’Amérique de Donald Trump, le monde est plus que jamais inerte, incapable d’action et même de mots.

Plus jamais on ne pourra croire les exhortations au “plus jamais ça”. Les donneurs de leçons a posteriori sont définitivement disqualifiés pour parler de crimes contre l’humanité.