Les maîtres-penseurs de
l'intelligentsia peuvent fêter la victoire de Barack Obama et les
bellâtres du Show Biz se goberger, après avoir battu la campagne
frénétiquement à son profit pendant des mois. Leur idole ne
quittera pas la Maison Blanche. Et leur bête noire, Mitt Romney l'a
dans les gencives !
C'est donc reparti pour 4
ans.
Sur la forme rien à
redire : M. Obama est un séducteur né. Il a la silhouette gracile
d'une « gravure de mode » comme dirait ma chère maman,
il a de la prestance et du charisme. Son sourire est une vraie
publicité pour les dentifrices et autres cures de blanchiment des
dents. Il parle bien et sait manier l'humour avec dextérité pour
conquérir les foules versatiles. Grâce à ces atouts médiatiques,
son bilan n'a somme toute pas trop pesé sur l'Opinion Publique. Le trompeur
Yes We Can a bien vite été oublié par l'inconstance populaire.
Si l'on était peu
convaincu au départ, on pourrait certes reconnaître à M. Obama quelques mérites. Se réjouir par exemple du retour
de la croissance qui vient de s'amorcer aux USA, en même temps
qu'une réduction du déficit commercial. Encore timide mais
largement supérieur à toutes les espérances en Europe. On pourrait
s'ébaudir de la bonne santé éclatante de Wall Street qui a vu le
Dow Jones passer de 8500 points fin 2008 à près de 13000
aujourd'hui. On pourrait être heureux que le président ait
renoncé à trop augmenter la pression fiscale, conservant notamment
les allègements décidés par George W. Bush. On pourrait le
féliciter d'avoir veillé à la bonne santé des banques, notamment
celle du géant Goldman Sachs à l'égard de laquelle il ordonna il y
a quelques mois l'abandon
de toute poursuite pénale relative à la crise des subprime... On pourrait lui
rendre grâce d'avoir sauvé la filière automobile en tirant d'affaire
quelques grands trusts, notamment Chrysler, General Motors... On
pourrait enfin lui tresser des lauriers pour avoir optimisé la
facture énergétique américaine en laissant libre cours aux forages
extrayant du pétrole et du gaz de schiste...
Mais paradoxalement, ces bons points, plutôt qu'égayer ses supporters, progressistes, alter-mondialistes, écologistes et autres bien pensants, devraient les faire enrager. Ce n'est pas vraiment ça qu'ils espéraient de celui en qui ils voyaient naïvement un messie. D'autant plus que ce qu'ils attendaient tarde à se concrétiser.
Il n'y a rien de nouveau
sur le front des ponts-aux-ânes sociaux tels que peine de mort, vente
libre des armes, réduction de l'émission de gaz à effet de
serre... Même sa réforme du système de santé peine à convaincre. A la fois trop audacieuse et pas assez, elle pourrait ne pas faire mieux que celle entreprise par le Gouverneur Romney dans le Massachusetts en 2006 (déresponsabilisation, couverture incomplète, augmentation des coûts pour tous les assurés et pour l'Etat, listes d'attentes...).
Mais plus grave, le
mandat qui s'achève est marqué par un appauvrissement massif du
pays. Quarante-sept millions d'Américains dépendent à ce jour de
l'aide alimentaire (contre moins de 30 en 2008). Les plans de relance
ont plombé la dette fédérale, qui a augmenté de manière
délirante, dépassant allègrement les 100% du PIB. Elle est passée
de 10.000 à 15.000 milliards de dollars, soit une progression de 4
milliards de dollars par jour pendant 4 ans ! Parallèlement le
chômage en dépit d'une embellie de dernière minute, sujette à
controverse, n'a cessé de progresser pour plafonner autour de 8%.
Facteur aggravant, le délai moyen pour retrouver du travail
s'allonge de manière dramatique (40 semaines, alors que la durée
d'indemnisation aux USA n'excède pas 27).
Passons sur la politique
internationale. Si certains sont heureux du déclin de l'influence
américaine qui s'accélère, d'autres peuvent légitimement
s'inquiéter de cette présidence en apparence indifférente au
monde, qui parle fort, mais dans les faits, prône le repli ou bien
l'inaction. Le passé a montré si souvent que les absences de
l'Amérique avaient des conséquences graves. Lorsque le chat n'est
pas là, les souris dansent...
En bref, le Président a été réélu essentiellement parce que sa séduction opère toujours auprès d'une clientèle rêveuse, plus exigeante sur le beau parler et les bonnes intentions, que sur l'action concrète et l'esprit pratique. Ce nouveau mandat sera-t-il différent ? L'expérience lui aura-t-elle apporté le pragmatisme ? Ou bien au contraire, tirera-t-il de ce succès un peu inespéré, la raison de se montrer encore plus idéologue ?
Le système américain
est ainsi fait que la brièveté des mandats et les contre pouvoirs,
pondèrent l'action du chef de l'Etat. Les citoyens n'ont pas donné
à M. Obama carte blanche. Il devra cohabiter comme il le fait depuis 2 ans, avec une chambre des
représentants hostile. Ce contexte sera-t-il propice à l'émergence d'un consensus efficace en période difficile ?
Les premières
perspectives ne sont pas très réjouissantes. Elu par des
minorités, le Président risque de continuer à les flatter. Un
chiffre issu du dernier scrutin interroge. Les Noirs ont voté à 93%
pour Obama (CNN New York Time). Ne s'agit-il pas d'un signe
inquiétant de dislocation partisane de la communauté nationale ? Que
dirait-on si 93% des Blancs avaient voté pour Romney ?
Comme beaucoup de
soi-disant « progressistes », Obama fonde une bonne part de sa
stratégie sur une démagogie dangereuse, consistant à nourrir les
illusions, en agitant de beaux, mais creux idéaux. Derrière
l'emphase et les rengaines, il n'hésite hélas pas à diviser et à
montrer du doigt les boucs émissaires. Avant de faire la paix avec
elles, il traita les banques de Fat Cat Bankers. Il dénigra la
richesse personnelle du candidat Romney. Aujourd'hui même, il annonce qu'il faut
taxer davantage les riches pour éponger les déficits accumulés par son administration. On croirait entendre du Hollande...
Un des constats de cette
élection, est que les USA semblent tendre toujours plus vers le
modèle de l'Etat-Providence, et donc à s'éloigner de celui de la
Société Ouverte. Les réformes entreprises ont presque toutes ce
caractère définitif et fermé, qui effraie ceux qui restent
attachés envers et contre tout à l'Esprit de Liberté. Les Tea
Parties, qui portaient un espoir de retour aux sources des Pères
Fondateurs semblent un peu en recul par les temps qui courent.
L'avenir est-il encore à un vrai monde libre ?