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04 juillet 2025

Tangled Up In Blue

Derrière le personnage célébrissime, derrière ses chansons qui ont fait le tour du monde, se cache un autre Bob Dylan, plus discret mais non moins actif. Un homme éclectique en somme, qui pratique ses violons d'Ingres loin des feux de la rampe, avec humilité dans une paisible rusticité.
Il est peintre à ses heures perdues, sans doute avec moins de génie qu'en musique, mais avec une patte originale mêlant expressionnisme et modernité. Chacun jugera…
Il sait également se faire ouvrier ferronnier, maniant le chalumeau avec un certain talent. On lui doit quelques œuvres élégantes en fer, forgé à partir de pièces de récupération, avec une prédilection pour des vieux outils. Des sortes de portails finement ouvragés témoignent de l’imagination débridée de l'artiste, et ouvrent la porte si l'on peut dire à une autre passion : celle du whisky !
Depuis quelques années il s'est mis en tête, en amateur éclairé autant qu'exigeant, de promouvoir l'élaboration de breuvages d'exception. Du whiskey américain en l'occurrence, élevé dans le Tennessee où il a participé en 2018 à la mise sur pied d'une distillerie artisanale avec un but simple : créer des alcools "qui racontent une histoire”.
Entre autres contributions, ses grilles décoratives servent d'illustrations aux bouteilles emblématiques du whiskey Heaven's Door.
Avec ses coreligionnaires, il a retenu le titre d'une de ses chansons, dont les mots ne sont pas trop forts pour qualifier des nectars qui donnent en passant dans le gosier un avant-goût de paradis.
Contrairement au Bourbon classique élaboré dans le Kentucky à base de maïs, l'un des flacons est réalisé exclusivement avec du seigle (rye) maturé dans des fûts en chêne des Vosges. Il peut se boire à ce titre naturellement mais il sert également de composant, avec la déclinaison straight, au Double Barrel, probable sommet de l'appellation.
Pour tout amateur de ce genre de production, y goûter c'est se laisser prendre au jeu, subtil et délicieux pour peu qu'on évite bien sûr d'en abuser. La souplesse et l'onctuosité du liquide ambré n'ont d'égale que la puissance explosive de ses arômes lorsqu'ils viennent caresser le palais. C'est riche en saveurs où chacun trouvera ce qui lui plaît (caramel, miel, chêne grillé, vanille ,cannelle, épices,), et long en bouche comme le plaisir qui descend tandis que l'ivresse monte…
Ces sensations renvoient assez loin celles qu'on peut avoir avec les pourtant excellents Jack Daniels, BuIleit et même Woodford (elles sont également plus onéreuses…).


Rien de tel qu'un verre de cette petite mort pour accompagner le blues. Une fois n'est pas coutume, ce ne sera pas celui de Dylan aujourd'hui. Mais celui, hypersensible et fondant de Peter Green, à l'écoute notamment du recueil Man of the World. On y trouve le meilleur de ce qu'a produit l'artiste, après l'aventure Fleetwood Mac et avant celle du Splinter Group. Ce brit blues déborde de tendresse et d'émotion révélant la fragilité d'âme de celui qui évoqua l'albatros avec des riffs aériens déchirants. Cette période fut très tourmentée, avec plus de bas que de hauts, mais il en est sorti quelques magnifiques perles rassemblées dans ce double disque paru en 2014.


Pourquoi ne pas poursuivre avec Keziah Jones. Le style très personnel incarné depuis une bonne trentaine d'années par ce musicien à la silhouette efflanquée et au déhanchement quasi reptilien, est devenu un genre à part entière : le Blufunk. Il l'a revisité au cours de sessions torrides captées tout récemment dans l'intimité de son studio nigérian, à Lagos. La recette reste bien sûr la même, fondée sur des rythmiques syncopées frappées frénétiquement à même les cordes de la guitare, assorties de mélodies envoûtantes à la scansion accrocheuse. Il se déteste de quelques réinterprétations de ses propres standards (le fameux rhythm is love, Beautiful Emilie, Hello Heavenly, The Funderlying Undermentals). On trouve également une reprise très animale du The bed’s Too Big Without You de Police, et deux nouvelles compositions au balancement plus sensuel et un brin nostalgique (Melissa, Rainy Saturday).


Pour finir, on peut se délasser les méninges avec le mix blues de Michael Kiwanuka. Au choix parmi les quatre albums qui sont venus affirmer depuis 2012 un groove sensuel aux itérations rythmiques très afro, distillant au fil d'une voix chaude à la fois veloutée et granuleuse des mélodies à fleur de peau. C’est pop, parfois très seventies, planant comme du Floyd ou émaillé de sonorités plus kravitziennes.
Le premier album reste à ce jour le plus prometteur distillant des ballades mélancoliques très prenantes (Home Again). On pense à certains moments à Randy Newman (I Won’t Lie). On trouve quelques sonorités jazzy (Bones) beaucoup d'arpèges élégants à la guitare (Always Waiting) et des rythmes térébrants dont les accents exotiques rappellent qu'il est originaire d'Ouganda (comme le regretté Geoffrey Oryema).
Les trois albums suivants sont de la même veine. On peut toutefois regretter un certain manque de renouvellement dans l’inspiration et dans les arrangements. Ça reste agréable mais un tantinet langoureux et répétitif, noyé dans des orchestrations melliflues. La prise de son et les arrangements un peu trop démonstratifs, notamment dans le dernier opus bien nommé Small Changes, n’arrangent pas les choses.


27 juillet 2020

Black Peter


In memoriam Peter Green (1946-2020)


Il affectionnait la pénombre
Où l'acuité de son regard
N’abandonnait rien au hasard
Pour voir la beauté la plus sombre

Mais il craignait la foule en nombre
La gloire et le trop plein d’égard
Qui, le savait-il, tôt ou tard
Vous font lâcher la proie pour l’ombre

Alors, timide et vacillant
Mais l’esprit et les doigts agiles
Il s’abstint des choix trop faciles

Son génie fut un pur diamant
Mi-blues et mi-métaphysique
Toujours taillé pour la musique...

02 octobre 2008

When you got a good friend

Ce joli titre d'une chanson de Robert Johnson (1911-1938), donne à merveille à mon sens, la mesure de ce que représente dans le coeur de beaucoup d'amoureux du Blues, un musicien hors norme, d'une sensibilité exceptionnelle : Peter Green.

Natif de Londres, en 1946 pour être précis, il pinça ses premières cordes auprès de John Mayall, notamment au sein de son mythique groupe The Bluesbreakers. Sorti brillamment de cette excellente école, il fut le guitariste fondateur et compositeur de Fleetwood Mac à la fin des années soixante. On lui doit notamment les superbes Albatross et Black Magic Woman.
Mais, anti-star caractérisée, il ne supporta pas le succès fulgurant du groupe et sombra dans une sorte de terrible dépression arrosée de quantité de substances toxiques. Cette affreuse descente aux enfers le maintint hors des sunlights pendant de longues années. Alors qu'il errait dans un état second, Il fut en quelque sorte repêché par une bande de copains, musiciens chevronnés et amateurs invétérés de Blues. Bien décidés à le remettre en selle, ils formèrent autour de lui en 1996 le Splinter Group. Le résultat fut d'emblée éblouissant, donnant naissance à de merveilleux enregistrements, une ribambelle de nouvelles compositions, et une nouvelle vie sur la route des salles de concerts à travers le monde.


Peter Green est un remarquable représentant du blues anglais, courant très original, illustré par une pléiade de grands noms (qui outre Mayall, compte Mick Taylor, Eric Clapton, Alvin Lee, Jeff Beck et dans une certaine mesure Rory Gallagher, Gary Moore, Jimmy Page...) Comme beaucoup de ses compatriotes, il fut toutefois saisi par le charme ensorcelé des chansons de Robert Johnson.
Grâce à son jeu fluide, un peu décalé, superbement mélodique, et à la douceur nostalgique de sa voix écorchée, il parvient à donner une intonation sublime à cette musique au charme rustique mais à l'inspiration céleste.

L'histoire de cet artiste à nul autre pareil, est donc celle d'une chaude amitié. Celle avant tout qui le lie à travers l'éternité au grand pionnier du Delta, et lui fit consacrer un vibrant hommage en 1998 sous forme d'un CD avec le Splinter Group : The Robert Johnson Songbook, et un autre deux ans plus tard : Hot Foot Powder.
Bien sûr Peter Green revient de loin. Il est marqué, et sa voix est parfois un brin chevrotante. Mais ça fait vraiment chaud au coeur de voir sa bonne bouille ronde s'illuminer de joie lorsqu'il joue avec ses amis (dans un superbe DVD tiré de sa tournée 2003). En acoustique aussi bien qu'en électrique, on est littéralement sous le charme. Ses interventions à la guitare gardent un feeling incomparable et lorsqu'il chante on est envahi par l'émotion, malgré ou peut-être à cause du timbre usé de sa voix et de sa diction hésitante. De toute manière, Nigel Watson, qui lui prodigue manifestement une affection gigantesque, se révèle à ses côtés, un guitariste hors pair doublé d'un chanteur exceptionnel. Enfin Roger Cotton au piano et la section rythmique parfaitement réglée (Neil Murray, basse, Larry Tolfree batterie), complètent admirablement cet ensemble très homogène.

De vrais petits bijoux, à posséder si l'on est amateur de travail bien fait et d'émotion. Et qui donnent un deuxième sens à l'amitié : celui du lien mystérieux entre cet archange du blues et tous ceux qui éprouvent parfois la dureté de la vie et qui trouvent auprès de lui une intense et chaude consolation...

When you got a good friend, that will stay right by your side
When you got a good friend, that will stay right by your side

Give her all of your spare time, love and treat her right


I mistreated my baby, but I can’t see no reason why
I mistreated my baby, but I can’t see no reason why
Anytime I think about it, I just wring my hands and cry

Wonder, could I bear apologize, or would she sympathize with me
Mmm, or would she sympathize with me
She's a brownskin woman, just as sweet as a girlfriend can be

Mmm, baby I may be right or wrong
Tell me your feeling, I may be right or wrong
Watch your close friend, baby, then you enemies can't do you no harm

When you got a good friend that will stay right by your side
When you got a good friend that will stay right by your side
Give her all of your spare time, love and treat her right.....