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27 décembre 2016

Sleep and Poetry

Il y a un peu plus d'un mois, disparaissait Leonard Cohen (1934-2016).


Avec quelques dernières chansons à la beauté plus grave et ténébreuse que jamais, il s’éteignait comme une bougie, dans une ambiance sépulcrale, où se mêlaient confusément la nostalgie amoureuse, la tristesse du départ et l’espérance secrète d’une indicible éternité.

Me reviennent alors quelques mots, écrits à l’occasion d’un précédent album, Ten New Songs, sorti au tout début des années 2000 et qui marquait presque joyeusement son retour, après un silence prolongé dans le confinement extatique d’une retraite bouddhique.
Jamais je n’avais apprécié le chant de cet homme autant qu’à travers ces mélopées chaudes et sourdes, qui parlent de tout et de rien, avec un art ineffable de donner l’impression, comme un funambule sur son fil, de progresser sur une seule note, bleue bien sûr...



Avant d'écouter Leonard Cohen, il est impératif de se mettre en condition. Il faut faire le calme en soi, ne rien attendre de précis, se dépouiller de toute les turbulences du quotidien, et se laisser glisser sans retenue dans une sorte de mol abandon.

Alors et seulement alors, peut se produire un petit miracle : la montée lente et majestueuse d'une extase languide, faite de quiétude et de détachement, qui vous envahit délicieusement et vous entraîne dans une subtile lévitation intellectuelle. Avec ce nouvel album, des plus intimistes et dépouillés, plus que jamais l'effet est au rendez-vous, à condition de vouloir le saisir.

"In my secret life" constitue une introduction idéale à ce monde étrange. Une humble mélodie sous tendue par une rythmique veloutée, au dessus de laquelle comme un murmure, une voix s'élève et vient planer avec une chaude gravité. Elle vous dit des choses douces, intemporelles, totalement dénuées de passion et de vanité.

Et lorsque l'allumage a eu lieu, le temps se met à défiler avec une exquise régularité, comme les grains de sable au travers d'un sablier. Ça paraît indéfini, sans heurt aucun, sans stress, et empreint de plénitude. Beau et parfait comme un minuscule jardin japonais...

A la fin, lorsque les dernières notes du magnifique Land of Plenty se dissipent dans l'air immobile, on se sent un peu engourdi, comme émergeant du sommeil ou bien comme si un court instant, on avait transcendé la réalité... 

Adieu, doux poète….

NB : Sleep and poetry est le titre d'un poème de John Keats