On eut droit à un magnifique feu d’artifices de belles propositions et à une flopée d’ambitieux plans sur la comète (ou plutôt sur la planète). De dépenses nouvelles il fut largement question. D’économies et de bon sens beaucoup moins…
Plusieurs sujets étaient à l'ordre du jour. Bien sûr le réchauffement climatique avait une place de choix. L’émissaire américain John Kerry, rappela que l’administration dont il dépend avait, par le biais de l’IRA (Inflation Reduction Act), dépensé 369 milliards de dollars visant notamment à subventionner la fabrication de véhicules électriques et d'autres technologies vertes. Non content de ces sommes astronomiques, il souligna que pour rester dans l’impératif de hausse des températures de l’accord de Paris, il faudrait “de l’argent, de l’argent, de l’argent, de l’argent, de l’argent, de l’argent, de l’argent.”
Emmanuel Macron, qui n’est plus à un déficit près, s’est fait un plaisir de renchérir. Décidément à mille lieues des préoccupations des agriculteurs, il s’est fait le champion du climat et de la biodiversité, quoi qu’il en coûte. Il a notamment encouragé l’Europe à émettre à nouveau de la dette commune pour investir dans « de grandes priorités d’avenir », notamment l’intelligence artificielle et le verdissement de l’industrie.
Mais le clou de la cérémonie fut incontestablement
le discours du président Javier Milei, très peu rapporté par les médias, alors qu’il valait assurément son pesant de cacahuètes. Fraîchement porté par son peuple à la présidence de la république argentine, il entend mener sa mission au pas de charge. Indifférent aux mirages climatiques, aux sirènes des taux d’intérêt et autres licornes de l’intelligence artificielle, il préféra porter le fer contre le "socialisme" dont l’idéologie règne encore selon lui un peu partout et qui "mène à la pauvreté".
Beaucoup verront évidemment les excès dérangeants d’un discours rompant avec les canons soporifiques du consensus. Beaucoup réduiront même le propos à ces outrances et le rangeront au mieux au rang des élucubrations ultra-libérales et au pire des délires populistes ou d’extrême droite.
Des exagérations il y en a assurément car le pavé est jeté avec force dans la mare, mais des vérités factuelles, il y en a également, qu’on le veuille ou non :
"Je suis ici aujourd’hui pour vous dire que l’Occident est en danger. Il est en danger parce que ceux qui sont censés défendre les valeurs de l’Occident sont cooptés par une vision du monde qui — inexorablement — conduit au socialisme, et par conséquent à la pauvreté.../...
Ayant adopté le modèle de la liberté — en 1860 — l’Argentine est devenue en 35 ans la première puissance mondiale, et qu’après avoir embrassé le collectivisme, elle a commencé à s’appauvrir systématiquement, jusqu’à tomber de nos jours au 140e rang mondial.../...
Grâce au capitalisme de libre entreprise, le monde est aujourd’hui au mieux de sa forme. Dans toute l’histoire de l’humanité, il n’y a jamais eu de période de plus grande prospérité que celle que nous vivons aujourd’hui.
Par contraste, le socialisme s’est, toujours et partout, révélé un phénomène appauvrissant, qui a échoué dans tous les pays où il a été tenté. Ce fut un échec économique, un échec social, un échec culturel. Il a tué plus de 100 millions d’êtres humains.../...
Même dans ses versions les plus modérées, la solution proposée par les socio-démocrates n’est pas plus de liberté, mais plus de réglementation, générant une spirale descendante de réglementation jusqu’à ce que nous finissions tous plus pauvres et que la vie de chacun d’entre nous dépende d’un bureaucrate assis dans un bureau luxueux.
Les socialistes ont peu ou prou abandonné la lutte des classes, mais ils l’ont remplacée par d’autres prétendus conflits sociaux tout aussi nuisibles à la vie collective et à la croissance économique. La première de ces nouvelles batailles fut la lutte ridicule et contre nature entre les hommes et les femmes.
Un autre conflit déclenché récemment est celui de l’homme contre la nature. Ils affirment que les êtres humains endommagent la planète et qu’elle doit être protégée à tout prix, allant même jusqu’à préconiser des mécanismes de contrôle de la population ou l’agenda sanglant de l’avortement."
Après avoir martelé que "Le monde occidental est en danger" face à ces lubies idéologiques, le nouveau président argentin s’est livré à une ardente apologie des chefs d’entreprises et des hommes d’affaires :
“Ne vous laissez pas intimider par les parasites qui vivent de l’État”
"Vous êtes des bienfaiteurs sociaux. Vous êtes des héros. Vous êtes les créateurs de la période de prospérité la plus extraordinaire que nous ayons jamais connue. Que personne ne vous dise que votre ambition est immorale. Si vous gagnez de l’argent, c’est parce que vous offrez un meilleur produit à un meilleur prix, contribuant ainsi au bien-être général."
Vous imaginez l'ambiance à Davos pendant cet exposé rageur. Il paraît qu’il y eut tout de même quelques applaudissements…
Pour un amoureux de la liberté pragmatique, un discours ne fait pas tout, et il y a souvent loin des intentions aux actes. Mais il est plutôt rafraîchissant d’entendre à nouveau des intonations rappelant
Reagan,
Thatcher, et les grands penseurs du libéralisme tels
Schumpeter,
Hayek,
Friedman,
Sowell ou bien notre cher
Tocqueville, qui inventa la notion d’Etat-Providence. On pense également à
Ayn Rand et à son fabuleux roman
Atlas Shrugged. Javier Milei serait-il l’incarnation du fameux
John Galt ?
Quand on connaît l’état de l’Argentine, on ne peut que souhaiter ardemment qu’il réussisse, tout en pensant que son parcours sera semé d’embûches par les ennemis de la cause…