Tout cela est peu probable dans des délais si courts. En tout cas rien n'accrédite de telles suppositions.
Bien sûr on avait sans doute exagéré l'ampleur prévisible de la fameuse « vague bleue ». Peut-être même était-on parvenu en agitant ce spectre, à dissuader quelques personnes d'aller voter, ou au contraire à encourager d'autres à le faire pour opposer un rempart à la déferlante annoncée.
Mais il y a de toute évidence autre chose.
Peut-être une sorte de pressentiment sur la tournure à venir des évènements.
Peut-être après tout est-ce justement ce qui effraie...
Car en dépit d'une appellation rassurante, ça fleure avant tout l'impôt nouveau. Et ça rappelle diablement, parmi d'autres hausses, l'augmentation de 2 points de la TVA dès l'accession de Jacques Chirac au pouvoir en 1995...
On a beau nous dire qu'elle permettra de diminuer les charges sociales pesant sur les entreprises, on a beau nous assurer qu'elle ne conduira à aucune augmentation des prix, il y a de quoi être sceptique. Comment croire les gens qui affirment que pour baisser les impôts, il faille avant tout les augmenter ?
Alors qu'on invoque le pouvoir intransigeant de la Commission de Bruxelles pour faire mariner depuis des années les restaurateurs qui espèrent un allègement de la leur, voilà qu'on annonce sans rire une augmentation de cinq points de la TVA générale !
Mais le pire si je puis dire est qu'il faille aux gouvernants une « mission d'experts » pour garantir que cette invention ne jouera aucun rôle néfaste sur le pouvoir d'achat ! Les Français ont sûrement fait leurs comptes à l'aide de leur simple bon sens. S'agissant de tous les produits importés, dont quantité concernent les activités de loisir, l'augmentation des prix ne fait aucun doute.
Pour les autres cela dépendra de la bonne volonté des entreprises, à supposer qu'elles soient satisfaites des baisses de charges consenties par le gouvernement. A supposer aussi que ces baisses soient durables dans le temps, car nul doute que la TVA elle, restera accrochée pour longtemps aux sommets...
Quant aux effets bénéfiques sur les délocalisations, il faut être bien confiant pour y croire. Même si elle y parvenait, cette mesure qui n'est en somme qu'un artifice protectionniste, pourrait pénaliser tôt ou tard nos exportations, ne serait-ce qu'en provoquant de la part des partenaires commerciaux des actions de rétorsion.
Tout ça n'est franchement pas très sérieux. Le problème n'est pas de savoir comment répartir différemment la charge écrasante des prélèvements, mais plutôt de parvenir à les faire enfin vraiment diminuer.
Il est temps sans aucun doute d'engager la responsabilité de chacun, mais ici encore la méthode choisie est-elle la plus opportune ?
Le procédé semble hélas devoir une fois de plus s'intégrer dans la politique suivie depuis de nombreuses années, consistant à augmenter continuellement les prélèvements et les cotisations tandis qu'on diminue parallèlement les prestations servies aux assurés sociaux.
Les franchises quant à elles ne sont pas nouvelles. La première d'entre elles en matière d'assurance maladie ne date pas d'hier. Il s'agit bien évidemment du ticket modérateur laissé à la charge de l'assuré après remboursement du prix des soins.
Sitôt créé, il eut pour conséquence de provoquer l'apparition d'un régime d'assurances complémentaires privées, créant de fait une entorse au principe de l'égal accès aux soins pour tous. Pour en atténuer la nature perverse, il fallut inventer la notion d'affection de longue durée bénéficiant d'une prise en charge à 100% par le régime « obligatoire » de la Sécurité Sociale. On créa dans la foulée quantité d'exceptions au ticket modérateur : actes exonérants, supérieurs à K50, aide médicale gratuite, prise en charge intégrale des interruptions volontaires de grossesses, et pour finir la CMU. Mais dans le même temps, les zones de franchise s'étendirent : « déremboursement » progressif des médicaments, forfait journalier, 1 euro non remboursable, seuil incompressible de 18 euros pour les actes exonérants... On alla jusqu'à inventer un diabolique « parcours coordonné de soins » avec des pénalités pour les usagers « déviants »... Et naturellement les cotisations ne furent pas en reste : augmentation des cotisations de base, invention de nouvelles contributions : CSG, RDS, taxes diverses sur les alcools, le tabac...
Résultat, le système à l'instant présent est d'une effroyable complexité, les usagers sont toujours aussi irresponsables, les médecins guère moins, et la Sécurité Sociale continue de s'abîmer dans les déficits et la gabegie, tandis que les politiciens ne cessent de brandir l'idéal usé de la « santé gratuite ».
Il n'est pas possible non plus de demander toujours plus à un nombre décroissant de gens. Si les franchises sont inévitables elles doivent être significatives, s'imposer à tous avec avance réelle de frais, mais s'accompagner en contrepartie d'un allègement non moins significatif des cotisations et prélèvements. En définitive, il faudrait que chacun désormais ait la responsabilité de gérer une partie de son portefeuille de santé. Probablement faudrait-il également que les citoyens puissent librement déterminer le niveau de couverture qu'ils souhaitent et plus encore qu'ils puissent choisir leur assurance. Puisque la Sécurité Sociale s'avère incapable de garantir la prise en charge optimale des soins pour tous, elle doit abandonner ses prérogatives exorbitantes et monopolistiques, acquérir une vraie indépendance vis à vis de l'Etat et se soumettre à la concurrence.
A vrai dire, la partie sera probablement en passe d'être gagnée lorsque les patients, cessant d'exiger toujours plus au motif « qu'ils sont à 100% », demanderont à leurs médecins de les soigner le mieux possible mais au meilleur coût.