La France terre de paradoxes, cultive opiniâtrement, surtout lors des grandes échéances électorales, un rite étrange, nourri de croyances archaïques et de craintes fantasmatiques.
Cette religion, accrochée à la vieille souche marxiste-léniniste, n'en finit pourtant plus de s'effriter en exhalant de pestilentiels remugles, au dessus d'un jus d'épandage nauséabond où surnagent comme de dérisoires falots fumants, les vestiges figés d'illusions évanouies.
Mais faisant fi de leurs désastreuses erreurs passées, les prêtres de cette foi obtuse continuent d'ânonner leurs antiennes éculées, comme de vieux calotins égrenant compulsivement leurs chapelets. Et plus ils sentent l'avenir leur échapper, plus ils deviennent sectaires et venimeux.
Cette manière de penser, crispée sur une idéologie défaite, incapable du moindre effort de rénovation, tente de pérenniser envers et contre tout une vision névrotique et rétrograde de la société. Et, forte des chimères démagogiques instillées sans relâche depuis des décennies dans les cervelles, elle parvient encore à entretenir un semblant de rayonnement, basé sur des a priori réducteurs et une haine féroce pour tout ce qui dévie de ses dogmes arrogants quoique moribonds. Grâce à ses innombrables relais médiatiques et à la complaisance veule et masochiste de bourgeois farcis de mauvaise conscience, elle exerce une police permanente sur les esprits et continue d'asséner comme vérités révélées ses contresens diaboliques.
Elle semble avoir définitivement refusé de confronter ses grands principes au verdict de l'expérience et du pragmatisme, et comme l'avare serre jalousement ses trésors inutiles dans des coffres obscurs, elle maintient enfermées ses rogues certitudes derrière les murailles grises d'une dialectique de plus en plus étriquée. Mais à l'image des bandelettes sur une momie, ses imprécations revanchardes ne défendent plus qu'un corpus sans vie, en voie de dessiccation. Son coeur est devenu un caillou noir et ses aspirations soi-disant altruistes sont pétrifiées dans une gangue égocentrique qui se dégrade en anathèmes de plus en plus approximatifs. Plus rien ne trouve grâce à son regard de poisson mort.
Dans son aveuglement incurable, elle refuse obstinément de voir la liberté qui forme le terreau du libéralisme. Assise sur les belles espérances des Lumières, elle ne croit ni au génie humain, ni à l'initiative individuelle et n'imagine le contrat social que dans l'omnipotence étatique, le planisme administratif et la bureaucratie procédurière.
Ses dignitaires enturbannés qui méprisent le petit peuple du haut de leurs snobs salons dorés se vantent avec un pharisaïsme insolent de n'aimer pas les riches et encensent de louanges hypocrites l'Impôt qui fait la charité des uns avec l'argent des autres...
A la manière de comptables filous qui confondent leur portefeuille avec la caisse de l'entreprise, ils démolissent les repères établis, et bousillent par leur mauvaise foi inoxydable toutes les problématiques auxquelles ils s'attaquent. Assimilant par exemple leur engagement politique à la vertu immanente, ils se croient autorisés à donner à tour de bras, des leçons de morale aussi doctrinaires que celles de l'Inquisition. Mais leurs oeillères idéologiques bornent désespérément le champ de leur imagination. Ils n'ont aucun sens de la perspective, aucune notion pratique, et noient sous des peurs irrationnelles quelques uns des plus beaux progrès de la civilisation technique. Plutôt que d'en prôner une maîtrise éclairée et responsable, ils opposent des veto moyen-âgeux à ce qui participe de l'émancipation réelle du genre humain, tout en qualifiant d'avancées, de sordides bricolages scientistes, pourvu qu'ils satisfassent leur éthique froidement matérialiste.
Ces cuistres qui ne comprennent rien du monde réel, le rejettent avec dédain. Après avoir voulu imposer à l'univers entier le morne et brutal totalitarisme collectiviste, ils déclarent une guerre stupide contre le libre-échange, et le fédéralisme démocratique au nom d'une alter-mondialisation prétentieuse et destructrice. Pire, en brandissant le droit des nations à disposer d'elles-mêmes, ils avalisent les plus affreuses tyrannies et refusent à des peuples martyrs la liberté dont ils profitent égoïstement, sans avoir rien fait pour la mériter.
Cette doctrine qui emprunte l'essentiel de sa quincaillerie conceptuelle au vieux socialisme révolutionnaire, a répandu partout ses poisons pernicieux déguisés en grandes idées généreuses. Mais à force de donner du bonheur une vision emphatique qui n'aboutit en règle qu'à la tristesse et à la désolation, ces sophismes trompeurs font de moins en moins illusion et laissent apercevoir à travers le voile qui se déchire, leur vraie nature faite d'intolérance et de ressentiment.
Les yeux trop longtemps abusés semblent se dessiller enfin. Là où les armes et la dictature ont fini par devenir impuissantes à les garder, les remparts de la forteresse mordent la poussière par pans entiers sous la pression de populations assoiffées de liberté. Les uns après les autres les fiefs soumis au carcan se libèrent et voient enfin le jour autrement qu'à travers les barreaux d'une doctrine désespérante.
Même en France les grands étendards se ratatinent comme des chiffons dérisoires, durcis par le jus aigre des rancoeurs accumulées et le sang desséché des combats perdus.
L'élection présidentielle voit encore s'aligner 11 candidats sur 12 se réclamant peu ou prou de ces conceptions obsolètes, de ce rejet primaire du monde, mais l'idéal a rétréci comme une peau de chagrin.
Le programme de ces tartufes bornés se réduit au misérable slogan « Tout sauf Sarkozy » qu'ils répètent apeurés en agitant fébrilement leur vieilles crécelles. Accrochés à leurs chaires qui s'effondrent, ils tentent désespérément d'enfermer dans leurs pièges sémantiques usés, le seul qui ait osé utiliser des mots neufs, et briser quelques tabous.
Mais tout ça sonne de plus en plus faux et le royaume arrogant d'antan se transforme en microcosme lilliputien.
Encore un peu de patience et le bocal se refermera peut-être sur ces derniers résidus lyophilisés, qu'on pourra ranger alors définitivement au musée, dans le rayon des horreurs déconfites...