Une des particularités fort intéressantes du magazine TV animé par Marina Carrère d’Encausse, est d’être semé de citations édifiantes, émanant directement des hommes et des femmes qui furent ou sont aux affaires comme on dit. Avec, au sein de ce florilège de truismes, de petites lâchetés et de vaines promesses, quelques éclairs de lucidité, hélas sans lendemain...
Il y a ceux tout d'abord, qui minimisent l’importance que revêt la dette publique. Par exemple Henri Emmanuelli qui tente de rassurer à peu de frais l’opinion publique à ce sujet : “Qui peut croire au scénario catastrophe ?” s’exclame-t-il incrédule. Avec lui, il y a toute une gauche crispée sur l’idéologie, et peut-être un peu adepte de la méthode Coué, qui imagine que la dette n’est qu’une vue de l’esprit et que “ça va s'arranger avec le retour de la croissance”, allant jusqu’à clamer que “plus la crise est profonde plus le redémarrage est fort.”
Il y a même des économistes distingués, tel Paul Krugman, prix Nobel d’économie (un peu comme Barack Obama fut récompensé pour ses belles intentions sur la Paix) qui ne voit pas pourquoi on s’inquiète et qui compare la peur de la dette à une “maladie psychosomatique...”
A l’inverse, il y a ceux qui font un constat alarmiste, à l’instar d’Alain Juppé, affirmant il y a quelques années qu’il fallait “en finir avec le poison de la dette”, sous peine de voir “le système exploser.”
Il y a l’ancien ministre de l’économie Thierry Breton affirmant “ce n'est pas une honte d'avoir une dette, c'est une honte de ne pas en parler.”
Il y a Pascal Lamy, ancien Directeur général de l’OMC, avouant qu’un endettement continu durant 40 ans “est un signe grave d'un dysfonctionnement du système.”
Il y a Dominique de Villepin renchérissant sur cet inquiétant diagnostic en affirmant qu’en laissant filer ses déficits, “la France a pris le risque d'un décrochage…”
Il y a enfin Valery Giscard d’Estaing révélant gravement que sans la dette et le fardeau du remboursement des intérêts qui y sont liés, “On pourrait supprimer l'impôt sur le revenu...”
Pourtant, malgré ces apparents éclairs de lucidité, personne ou quasi ne prit à aucun moment de mesure tendant vraiment à réduire l’endettement du pays. Peut-être, comme l’affirma Michel Charasse, en raison d’une indulgence due au fait “que tout le monde en profite”. Peut-être aussi comme le déplore Giscard d’Estaing, parce que les politiciens, par nature et sans doute aussi par démagogie, “ne proposent jamais de réduction des dépenses publiques, et surtout pas lorsque la croissance est là.”
De fait, les quelques décennies passées pourraient être comparées à un grand cimetière dans lequel ont été successivement ensevelies toutes les bonnes résolutions, toutes les actions pragmatiques, et dans lequel ont fleuri les croix et les pierres blanches marquant l’échec flagrant des politiques menées avec une obstination coupable par tous les dirigeants de tous bords idéologiques.
Il faut dire qu’en dépit de leur couleur politique affichée, tous reprirent peu ou prou à leur compte le vieux mythe de la relance keynésienne.
Cette chimère économique est bien commode pour des politiciens pusillanimes. Elle leur permet d’éluder les vraies mesures d’économies qui pourraient assainir les finances du pays, et en son nom ils peuvent se faire les défenseurs du fameux "modèle social" à la française, dont on mesure pourtant de plus en plus les effets calamiteux.
Chronologiquement, le désastre est évident même s’il fut amorti par quantité d’artifices dont quelques acquis sociaux trompeurs financés par l'emprunt. Il est ralenti également par l’appartenance de la France à la Communauté Européenne, qui quoique on dise freine un peu les programmes dispendieux et démagogiques des gouvernements successifs. Il est parfois suspendu grâce au contexte international enfin, qui procure quelques embellies de croissance, dont le pays ne profite malheureusement que trop peu.
Cette lente descente aux enfers débuta dès la seconde moitié des années 70, sous Giscard d’Estaing. On eut beau jeu alors, d’incriminer les chocs pétroliers. La réalité fut que malgré le plan d’austérité du professeur Barre, le gouvernement dépensa tant et plus. La ceinture fut surtout pour les contribuables, dont les impôts augmentèrent lourdement...
Avec le virage socialiste pris par le pays en 1981, le mirage keynésien s'imposa de plus belle. A l’initiative du président Mitterrand, on dépensa tant et plus, et la fiscalité continua son ascension, proportionnelle à la dette…
Jacques Chirac ne fit pas mieux. Après avoir martelé que "trop d’impôts tue l’impôt", il assomma littéralement les contribuables en invoquant "la fracture sociale", laquelle ne fit que s’ouvrir un peu plus au fil des dépenses publiques.
Après le fiasco de la dissolution de 1997, les Socialistes reprirent à nouveau, dans un souci de "justice" et "d'égalité" l’antienne keynésienne, et malgré une belle phase de croissance, dilapidèrent les quelques économies potentielles, qualifiées de "cagnotte". Le chantier inepte des 35 heures, promu par le tandem Aubry/Stauss-Kahn, acheva de ruiner les espérances, et l’endettement repartit de plus belle.
Au passage, le pacte de stabilité européen vola en éclat, faute d'être réellement appliqué, ouvrant la voie au surendettement, comme le déplora Dominique de Villepin. Devenu Premier Ministre, ce dernier bénéficia lui aussi d’une phase de croissance de l’économie mondiale. Mais si la dette française se tassa légèrement, les dépenses ne diminuèrent pas vraiment…
En 2007 on crut enfin à un nouveau cap, avec l’élection de Nicolas Sarkozy. La volonté affichée était de baisser les impôts et les charges pesant sur les entreprises, tout en réduisant les dépenses d’Etat. le Président claironna que cette politique audacieuse permettrait de ramener la dette en dessous de 60% du PIB, et François Fillon, premier ministre, promit l’équilibre budgétaire pour 2012.
Hélas, la crise dite des subprime changea la donne et bizarrement, ce qui était vrai hier devint faux. Nicolas Sarkozy subitement métamorphosé en Besancenot, se livra à de violentes charges contre le capitalisme. Il renia en bloc toutes ses prétendues convictions et se rallia piteusement aux lubies keynésiennes de la relance étatique.
En guise de réponse à la crise, il décida d'accélérer massivement les décisions d'investissement qui dormaient dans les cartons. Les dépenses flambèrent, la fiscalité itou. Oublié le paquet fiscal et notamment la mesure emblématique de bouclier fiscal…
La vraie raison de ce chambardement fut donnée sans doute par Eric Woerth: "il ne fallait surtout pas affoler les prêteurs et rassurer les Français pour qu'ils ne descendent pas dans la rue." Résultat, en 2009, le déficit est de 8% et la dette flambe mais la croissance de revient pas...
En haut lieu, personne ne nie qu'on soit "en situation désastreuse mais ce n'est pas une bonne idée de le dire..." Dans le même temps, les Agences de Notation dont personne n'avait jamais entendu parler, se font oiseaux de mauvais augure, multipliant les mauvaises appréciations, mais elles seront bien vite oubliées.
Tandis que la crise se répand en Europe, notamment à Athènes, les réunions de crise se succèdent. Les nouvelles dépenses également. L'argent public renfloue le budget grec au bord de la banqueroute (13% de déficit, dette à 120% du PIB). Deux cent milliards d’euros sont ainsi collectés en deux ans, en vain…
Portugal, Espagne, Irlande ne valent guère mieux. C’est toute l’Europe qui vacille sur ses fondations trop fragiles aux yeux de certains. Ainsi Alain Juppé révèle qu’on a “sous estimé la différence de compétitivité entre Etats et que la convergence ne s'est pas produite.” Il ne dit pas pour autant combien de temps il sera possible de continuer avant l’effondrement...
En 2012 François Hollande arrive au pouvoir, goguenard, avec son slogan “le changement c’est maintenant”, et ses nouvelles promesses. Jouant les redresseurs de tort, il déplore les 600 milliards de dépenses de Sarkozy et promet l’équilibre en 2017, objectif qu’il qualifie même “d’obligation”. Cela ne l’empêche pas, sitôt élu, de se rendre comme son prédécesseur à Bruxelles pour négocier penaud, un nouvel assouplissement des contraintes budgétaires (le fameux 3% de déficit jamais tenu).
On connaît la suite...Nouvelles dépenses, report des économies, déficit, endettement, chômage, le roue tourne toujours dans le même sens.
Et le retour à l’équilibre est désormais vaguement envisagé à l’horizon 2020.... Autrement dit aux calendes grecques….
Il y a ceux tout d'abord, qui minimisent l’importance que revêt la dette publique. Par exemple Henri Emmanuelli qui tente de rassurer à peu de frais l’opinion publique à ce sujet : “Qui peut croire au scénario catastrophe ?” s’exclame-t-il incrédule. Avec lui, il y a toute une gauche crispée sur l’idéologie, et peut-être un peu adepte de la méthode Coué, qui imagine que la dette n’est qu’une vue de l’esprit et que “ça va s'arranger avec le retour de la croissance”, allant jusqu’à clamer que “plus la crise est profonde plus le redémarrage est fort.”
Il y a même des économistes distingués, tel Paul Krugman, prix Nobel d’économie (un peu comme Barack Obama fut récompensé pour ses belles intentions sur la Paix) qui ne voit pas pourquoi on s’inquiète et qui compare la peur de la dette à une “maladie psychosomatique...”
A l’inverse, il y a ceux qui font un constat alarmiste, à l’instar d’Alain Juppé, affirmant il y a quelques années qu’il fallait “en finir avec le poison de la dette”, sous peine de voir “le système exploser.”
Il y a l’ancien ministre de l’économie Thierry Breton affirmant “ce n'est pas une honte d'avoir une dette, c'est une honte de ne pas en parler.”
Il y a Pascal Lamy, ancien Directeur général de l’OMC, avouant qu’un endettement continu durant 40 ans “est un signe grave d'un dysfonctionnement du système.”
Il y a Dominique de Villepin renchérissant sur cet inquiétant diagnostic en affirmant qu’en laissant filer ses déficits, “la France a pris le risque d'un décrochage…”
Il y a enfin Valery Giscard d’Estaing révélant gravement que sans la dette et le fardeau du remboursement des intérêts qui y sont liés, “On pourrait supprimer l'impôt sur le revenu...”
Pourtant, malgré ces apparents éclairs de lucidité, personne ou quasi ne prit à aucun moment de mesure tendant vraiment à réduire l’endettement du pays. Peut-être, comme l’affirma Michel Charasse, en raison d’une indulgence due au fait “que tout le monde en profite”. Peut-être aussi comme le déplore Giscard d’Estaing, parce que les politiciens, par nature et sans doute aussi par démagogie, “ne proposent jamais de réduction des dépenses publiques, et surtout pas lorsque la croissance est là.”
De fait, les quelques décennies passées pourraient être comparées à un grand cimetière dans lequel ont été successivement ensevelies toutes les bonnes résolutions, toutes les actions pragmatiques, et dans lequel ont fleuri les croix et les pierres blanches marquant l’échec flagrant des politiques menées avec une obstination coupable par tous les dirigeants de tous bords idéologiques.
Il faut dire qu’en dépit de leur couleur politique affichée, tous reprirent peu ou prou à leur compte le vieux mythe de la relance keynésienne.
Cette chimère économique est bien commode pour des politiciens pusillanimes. Elle leur permet d’éluder les vraies mesures d’économies qui pourraient assainir les finances du pays, et en son nom ils peuvent se faire les défenseurs du fameux "modèle social" à la française, dont on mesure pourtant de plus en plus les effets calamiteux.
Chronologiquement, le désastre est évident même s’il fut amorti par quantité d’artifices dont quelques acquis sociaux trompeurs financés par l'emprunt. Il est ralenti également par l’appartenance de la France à la Communauté Européenne, qui quoique on dise freine un peu les programmes dispendieux et démagogiques des gouvernements successifs. Il est parfois suspendu grâce au contexte international enfin, qui procure quelques embellies de croissance, dont le pays ne profite malheureusement que trop peu.
Cette lente descente aux enfers débuta dès la seconde moitié des années 70, sous Giscard d’Estaing. On eut beau jeu alors, d’incriminer les chocs pétroliers. La réalité fut que malgré le plan d’austérité du professeur Barre, le gouvernement dépensa tant et plus. La ceinture fut surtout pour les contribuables, dont les impôts augmentèrent lourdement...
Avec le virage socialiste pris par le pays en 1981, le mirage keynésien s'imposa de plus belle. A l’initiative du président Mitterrand, on dépensa tant et plus, et la fiscalité continua son ascension, proportionnelle à la dette…
Jacques Chirac ne fit pas mieux. Après avoir martelé que "trop d’impôts tue l’impôt", il assomma littéralement les contribuables en invoquant "la fracture sociale", laquelle ne fit que s’ouvrir un peu plus au fil des dépenses publiques.
Après le fiasco de la dissolution de 1997, les Socialistes reprirent à nouveau, dans un souci de "justice" et "d'égalité" l’antienne keynésienne, et malgré une belle phase de croissance, dilapidèrent les quelques économies potentielles, qualifiées de "cagnotte". Le chantier inepte des 35 heures, promu par le tandem Aubry/Stauss-Kahn, acheva de ruiner les espérances, et l’endettement repartit de plus belle.
Au passage, le pacte de stabilité européen vola en éclat, faute d'être réellement appliqué, ouvrant la voie au surendettement, comme le déplora Dominique de Villepin. Devenu Premier Ministre, ce dernier bénéficia lui aussi d’une phase de croissance de l’économie mondiale. Mais si la dette française se tassa légèrement, les dépenses ne diminuèrent pas vraiment…
En 2007 on crut enfin à un nouveau cap, avec l’élection de Nicolas Sarkozy. La volonté affichée était de baisser les impôts et les charges pesant sur les entreprises, tout en réduisant les dépenses d’Etat. le Président claironna que cette politique audacieuse permettrait de ramener la dette en dessous de 60% du PIB, et François Fillon, premier ministre, promit l’équilibre budgétaire pour 2012.
Hélas, la crise dite des subprime changea la donne et bizarrement, ce qui était vrai hier devint faux. Nicolas Sarkozy subitement métamorphosé en Besancenot, se livra à de violentes charges contre le capitalisme. Il renia en bloc toutes ses prétendues convictions et se rallia piteusement aux lubies keynésiennes de la relance étatique.
En guise de réponse à la crise, il décida d'accélérer massivement les décisions d'investissement qui dormaient dans les cartons. Les dépenses flambèrent, la fiscalité itou. Oublié le paquet fiscal et notamment la mesure emblématique de bouclier fiscal…
La vraie raison de ce chambardement fut donnée sans doute par Eric Woerth: "il ne fallait surtout pas affoler les prêteurs et rassurer les Français pour qu'ils ne descendent pas dans la rue." Résultat, en 2009, le déficit est de 8% et la dette flambe mais la croissance de revient pas...
En haut lieu, personne ne nie qu'on soit "en situation désastreuse mais ce n'est pas une bonne idée de le dire..." Dans le même temps, les Agences de Notation dont personne n'avait jamais entendu parler, se font oiseaux de mauvais augure, multipliant les mauvaises appréciations, mais elles seront bien vite oubliées.
Tandis que la crise se répand en Europe, notamment à Athènes, les réunions de crise se succèdent. Les nouvelles dépenses également. L'argent public renfloue le budget grec au bord de la banqueroute (13% de déficit, dette à 120% du PIB). Deux cent milliards d’euros sont ainsi collectés en deux ans, en vain…
Portugal, Espagne, Irlande ne valent guère mieux. C’est toute l’Europe qui vacille sur ses fondations trop fragiles aux yeux de certains. Ainsi Alain Juppé révèle qu’on a “sous estimé la différence de compétitivité entre Etats et que la convergence ne s'est pas produite.” Il ne dit pas pour autant combien de temps il sera possible de continuer avant l’effondrement...
En 2012 François Hollande arrive au pouvoir, goguenard, avec son slogan “le changement c’est maintenant”, et ses nouvelles promesses. Jouant les redresseurs de tort, il déplore les 600 milliards de dépenses de Sarkozy et promet l’équilibre en 2017, objectif qu’il qualifie même “d’obligation”. Cela ne l’empêche pas, sitôt élu, de se rendre comme son prédécesseur à Bruxelles pour négocier penaud, un nouvel assouplissement des contraintes budgétaires (le fameux 3% de déficit jamais tenu).
On connaît la suite...Nouvelles dépenses, report des économies, déficit, endettement, chômage, le roue tourne toujours dans le même sens.
Et le retour à l’équilibre est désormais vaguement envisagé à l’horizon 2020.... Autrement dit aux calendes grecques….