07 décembre 2023

Logique Ionescienne 3

Eugène Ionesco, à l'instar de son pays d'origine, fut profondément marqué par les totalitarismes fasciste puis socialo-communiste qui ensanglantèrent le vingtième siècle. Précocement expatrié en France, il eut le bonheur d'échapper au destin tragique de la Roumanie et de jouir
 du doux cocon matériel d'une société libre et prospère. Mais au fil des années, il comprit que ce confort matériel était fragile et trompeur et qu’il pouvait se refermer telle une prison dorée pour l'esprit et un cimetière pour les grandes idées.
Son théâtre, et tout particulièrement la Cantatrice Chauve et Rhinocéros, exprime cette crainte. Dans Rhinocéros on pense bien sûr avant tout à la nazification des esprits en Europe dans les années 30, mais le totalitarisme qui est mis en scène ici est d’une nature quelque peu différente. Il est rampant. Il s’installe sans brutalité, progresse par osmose et asphyxie peu à peu mais sans violence le libre arbitre.
La Cantatrice Chauve évoque quant à elle un monde ordonné, bien pensant, mais ressemblant à une coquille vide de signification et d’émotion. Dans cet univers, tout est artificiel. Derrière la façade laquée des apparences et des principes, il n'y a plus rien qui fournisse un quelconque sens auquel s’accrocher. Les repères sont sens dessus dessous. Seul le confort matériel subsiste dans ce microcosme absurdement corseté.

Ces deux visions sont donc bien plus proches des maux qui rongent nos sociétés contemporaines que d’un énième portrait des fléaux totalitaires qui ensanglantèrent le XXè siècle. Elles nous interrogent avec une troublante acuité :
Combien de temps un tel système tournant à vide peut-il tenir ?
L'absurdité est-elle encore évitable ?
Telles sont les questions auxquelles l’écrivain nous invite à répondre.

Dans une excellente et très actuelle Interview donnée en 1976, Ionesco livre sa conception, critique, du monde de l’époque. Prenant de la hauteur, il aborde les questions essentielles que tout être humain se pose forcément un jour où l’autre: Pourquoi sommes-nous là ? Pourquoi le mal ?
Bien sûr, il n’y a dans son propos aucune prétention à répondre à des problématiques par nature indécidables, mais il s’épanche tout particulièrement sur le Mal, inhérent selon lui à toute société et à tout être humain.
Selon l’écrivain, le problème du mal est d’ailleurs “un problème cosmique”. Il est partout. Dans un jardin, très calme en apparence, “il se poursuit une guerre impitoyable, les plantes se poussent les unes les autres pour vivre”.
Partant de ce constat, il faut conclure qu’il existe un fatum incontournable imposé à tout être vivant ici bas. La Nature est mauvaise ou tout du moins hostile et l’Homme s’oppose à elle en permanence. Pire, il entre nécessairement en conflit avec ses semblables de manière souvent féroce : “nous sommes obligés de nous entretuer pour vivre”. Par voie de conséquence, “il n’y a pas de bonne société” et “les révolutionnaires qui voulaient l’égalité et la justice n’ont fait qu’installer la tyrannie, le crime, le génocide…”

Au sein de cette réalité implacable, Ionesco distingue deux grands types d’individus :
D’abord les mystiques ou contemplatifs qui vivent dans les questions essentielles. Parmi eux, les personnes qui se consacrent aux religions. De ces gens, on est en droit d’attendre une certaine sagesse et un détachement des choses matérielles. En cette fin du XXè siècle, ce n’est pas toujours le cas selon l'écrivain qui reproche notamment à l'église de trop vivre dans la modernité, dans la quotidienneté, alors “qu'elle doit vivre dans le sacré c’est à dire le permanent”. Il a même ce mot très dur, visant indirectement le pape Paul VI qui règne alors sur la chrétienté : “ceux qui tombent de la spiritualité pour les affaires quotidiennes sont méprisables…” Que dirait-il de François ?

Les politiciens représentent à l’opposé, des gens “pour lesquels les préoccupations secondaires deviennent essentielles” et qui “n’attachent pas à nos actes une importance démesurée”. Leur rôle est précisément de se consacrer au quotidien pour l’améliorer avec avant tout l’esprit pratique chevillé au corps. Malheureusement, beaucoup trop de ces gens se laissent dévorer par l’ambition et l'hubris, qui leur font perdre ces objectifs pragmatiques. Le pire étant de basculer dans les idéologies dont le XXè siècle fut hélas rempli. Il se désole en l’occurrence de voir revenir les vieux démons, notamment les gigantesques défilés militaires en Union Soviétique, et les masses chinoises, “très impressionnantes, très belles”, mais similaires aux manifestations de joie du nazisme, et d’enthousiasme pour Mussolini…

En définitive, la rhinocérite est un mal universel : “elle peut être de droite comme elle peut être de gauche”. Le théâtre ionescien n’indique pas de direction mais tente d’objectiver le péril en le tournant en ridicule. Ce n’est pas, d'après l'auteur, un spectacle de l’absurde ni de l’incommunicabilité comme on se plaît à le qualifier parfois, mais de la dérision.
Au fond, la philosophie de Ionesco côtoie celle de Pascal qui prétendait que l’homme n’est ni ange ni bête. Il la traduit toutefois de manière plus brutale en affirmant que “nous vivons entre la grâce et la merde…”

29 novembre 2023

Logique Ionescienne 2

Trois exemples de consensus peuplant de manière insensée l’actualité pourraient être intégrés sans peine à la logique folle développée par Ionesco : le réchauffement climatique, l'intelligence artificielle, et tout dernièrement les punaises de lits.
Sur ces sujets, le train hallucinant du parler creux et des fausses évidences en forme de chimères emplit l'espace médiatique de son chahut assourdissant, repoussant ou écrasant au passage les discours qui ne seraient pas à l'unisson.
Il serait vain de faire un catalogue exhaustif des choses vues et entendues. Qu'il soit permis d'en rappeler quelques pépites :

Sur l'évolution du climat, la charmante Evelyne Dhéliat croit bon de commencer son bulletin météo en nous gratifiant de commentaires oiseux du style: "il va faire très beau en ce début d'automne", ajoutant aussitôt "et ça ce n'est pas une bonne nouvelle…" Abandonnant la neutralité qui sied à sa fonction, elle rejoint donc l'opinion générale qui sévit désormais au détour de chaque phrase !
D'autres porte-voix du consensus climatique, se font encore plus catastrophistes, claironnant par exemple au terme d'une saison magnifique, que le mois de juillet, puis celui d'août, puis de septembre et maintenant d'octobre, ont été "les plus chauds jamais enregistrés depuis le début de l'humanité". Rien que ça ! Après nous avoir bassinés (sans jeu de mots)  tout l'été avec la sècheresse, les mêmes pourraient s'écrier "que d'eau, que d'eau, que d'eau !" au vu des inondations d'automne...
Parmi les inepties à ranger au titre des idées reçues sur cette thématique, on ne peut que réserver une place de choix au truisme éléphantesque émis par Jean Jouzel, grand satrape réchauffiste, et dignitaire honoris causa du GIEC : "le capitalisme est incompatible avec la lutte contre le réchauffement climatique".
Le pape François lui-même, de plus en plus étranger aux choses spirituelles, croit bon d'apporter son grain de sel, en amont de la grand-messe de la COP28, en s'écriant : "Le monde s'écroule". A l'instar des militants imbus de certitudes, il appelle sans vergogne à "une transition écologique plus contraignante…"

S'agissant de l'Intelligence Artificielle, qu'il est convenu de nommer par ses initiales IA ou mieux encore, à l'anglo-saxonne, AI, l'emballement médiatique va également bon train.
Là encore, la problématique a soudainement surgi, comme une bête faramine, inopportune et suspecte d'incarner un mal, invasif et potentiellement mortel. On oublie qu'il ne s'agit que de progrès algorithmiques, simulant le raisonnement humain, à la manière des bonnes vieilles calculettes. Certes la machine devient de plus en plus puissante et rapide mais une chose est sûre: elle reste toujours aussi dépourvue d'intelligence. Qu'importe, on en fait une sorte d'entité venue d'on ne sait où, maléfique, dotée d'un cerveau fabuleux et de tentacules innombrables. Elle fascine autant qu'elle effraie.
Comme à chaque fois que des avancées techniques se font jour, on agite le danger potentiel qu'elles représentent : "L'IA va supprimer des millions d'emplois. 300.000 rien qu'en Bretagne…"
La surenchère va bon train. Les experts dûment autorisés clament que l'intelligence artificielle fait peser des menaces d'"extinction" pour l'humanité. Un peu fort de café. Ceux là même qui ont conçu l'engin et ont largement diffusé ses applications sur internet, réclament tout à trac une pause !
Des voix s'élèvent de plus en plus nombreuses pour exiger une régulation par les gouvernements de l'IA.
Mais qui peut imaginer sans rire la machine étatique, irresponsable et dénuée de cervelle, se mettre à réguler des programmes informatiques ? Ubu peut-être...
Par un paradoxe empreint de la plus savoureuse pataphysique, l'État s'empresse d'afficher sa volonté d'encadrer sans délai la problématique, tout en manifestant, tel un converti enthousiaste, son désir de profiter de ces avancées robotiques pour doper sa matière grise défaillante : "Le gouvernement a officiellement lancé jeudi son expérimentation de l’intelligence artificielle générative dans l’administration, qui doit permettre d’améliorer les réponses aux questions des usagers des services publics."
On croirait cette profession de foi délicieusement jargonnante sortie d'une pièce de Ionesco, ou mieux encore, du moulin à phrases toutes faites de Chat-GPT. Ça promet de beaux jours !

Dernier sujet, emblématique du prêt à penser contemporain, celui des punaises de lit. Face à ce nouveau péril, le concert assourdissant des médias réunis, lance “un affreux hurlement", comme dirait le cher Baudelaire. L'alerte générale est donnée. Nous sommes envahis par ces bestioles, certes microscopiques si on les compare aux rhinocéros, mais autrement plus nuisibles !
Comme s'il s'agissait d'un fléau particulièrement menaçant, le gouvernement, toujours soucieux de "suivre son temps", entre très vite dans la danse. M. Véran, porte-parole en chef, annonce une réunion interministérielle visant à trouver une réponse « rapide et efficace qui permette de traiter tous les aspects du problème et de répondre aussi à l’angoisse légitime des Français ».
Il en appelle à la raison raisonnante et tente de rassurer la population : "Nous devons solliciter les professionnels de la filière afin de savoir s’il y a une augmentation ou non de ces punaises de lit. Tout ce travail est en train d’être réalisé par le gouvernement et ses agences pour apporter des réponses."
Mais déjà l'évidence apparaît on ne peut plus clairement, pour lui : "Le réchauffement climatique entraîne une recrudescence de ces punaises de lit dans l’ensemble des pays occidentaux, touchant plus particulièrement les pays à forte fréquentation touristique…"
La boucle est donc bouclée et force est de conclure qu'en matière de raisonnement par l'absurde, tout est dans tout et réciproquement !

23 novembre 2023

Logique Ionescienne 1

En lisant La Cantatrice Chauve et en relisant Rhinocéros, œuvres d’Eugène Ionesco (1909-1994), je suis frappé par la résonance de ces pièces de théâtre avec l'actualité de notre société.
Derrière la farce grotesque, que certains se plurent à qualifier de surréaliste, ou d'absurde, on peut en effet trouver nombre de similitudes avec le spectacle offert par notre monde abreuvé de bonnes intentions, de réglementations et d'éthique, mais errant de déconfitures en abandons.
Quoi de plus absurde en somme : est-ce l'œuvre littéraire ou bien le monde réel ?

Dans la Cantatrice Chauve, la scène représente un salon bourgeois typiquement anglais, où madame et monsieur Smith échangent des banalités polies. Le lieu est calme et ordonné. Le contexte lui-même est circonstancié avec un zèle descriptif extrême. Tout semble tourner rond dans ce microcosme feutré, parfaitement réglé. “Tiens”, dit madame Smith, “il est neuf heures. Nous avons mangé de la soupe, du poisson, des pommes de terre au lard, de la salade anglaise”. Quoi de plus naturel en somme…
Mais les apparences sont trompeuses.
Rien ne va en fait. Les Smith attendent des invités, le couple Martin. Après les avoir fait patienter pour des raisons futiles, une discussion s’engage, émaillée d’incongruités et de non sens. Les acteurs ne débitent que des platitudes, des lapalissades, des poncifs, voire des phrases sans queue ni tête. Pire, les personnages n'ont pas d'identité ou bien partagent la même et ne se reconnaissent même pas entre mari et femme. M. Smith parlant de son épouse : “Ma femme est l’intelligence même. Elle est même plus intelligente que moi. En tout cas, elle est beaucoup plus féminine.” Au sujet d'une veuve, Madame Martin qui ne sait plus qui est son mari, s’exclame : “elle est encore jeune. Elle peut très bien se remarier. Le deuil lui va si bien.” Auquel répond M. Smith “Je voyageais en deuxième classe, Madame. Il n'y a pas de deuxième classe en Angleterre, mais je voyage quand même en deuxième classe.”
L’arrivée d’un pompier, qui cherche un peu partout à éteindre des incendies qui n’existent pas, augmente les quiproquos. Avant qu’il apparaisse, on entend sonner plusieurs fois et la bonne va voir sans succès à la porte, ce qui amène dans la bouche de M. Smith le truisme suivant : "L'expérience nous apprend que lorsqu'on entend sonner à la porte, c'est qu'il n'y a jamais personne.”

Peu à peu la confusion envahit les échanges. Les sentences s'enchaînent, suivant une logique absconse, comme lors d’une bouffée délirante. Aucun sentiment ne s'exprime au décours de cette logorrhée bourrée de stéréotypes :
“Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux !” …
“Pourquoi l’État Civil, donne-t-il toujours l'âge des gens décédés mais jamais celui des nouveaux nés ?”
“La vérité ne se trouve d'ailleurs pas dans les livres, mais dans la vie.”
“On peut prouver que le progrès social est bien meilleur avec du sucre”
“Toujours, on s'empêtre entre les pattes du prêtre…”

Dans Rhinocéros, c'est l'apparition incongrue d'un pachyderme à corne qui vient rompre le quotidien banal d'une petite cité sans histoire.
Devant les premiers témoignages, c’est l'incrédulité qui se manifeste chez certains : “Je ne voudrais pas vous vexer mais je n’y crois pas à votre histoire. Des rhinocéros dans le pays, ça ne s’est jamais vu”, puis le doute chez d’autres : “Votre rhinocéros à vous, M. Béranger, si rhinocéros il y a, était-il unicorne ou bicornu .” Pour finir, la colère face à la surdité de l’administration lorsqu'un chat se retrouve écrasé au passage de "la bête": "Nous ne pouvons pas permettre que nos chats soient écrasés par des rhinocéros".
Mais passé le tohu bohu créé par cet événement étrange, les mentalités évoluent peu à peu et le contraste entre l'animal exotique et l'être humain s'estompe. Le rhinocéros n'est bientôt plus seul à parcourir les rues en barrissant. Bizarrement, ils prolifèrent et certains acteurs se mettent étrangement à leur ressembler. Ce qui paraissait choquant, saugrenu ou malséant devient presque banal. Ce qui semblait pathologique devient bénin, jusqu'à affirmer “qu'il y a des maladies qui sont saines.” Certains se résignent à cette transformation de bon gré : “Il faut suivre son temps”. La mutation se fait d'ailleurs étonnamment sans heurt et les gens atteints de rhinocérite ne sont pas malheureux, même s’il persiste parfois un certain malaise “Je ne me suis pas habitué à moi-même. Je ne sais pas si je suis moi.”

Bientôt, les convertis deviennent légions et très rares sont ceux qui résistent à la contagion. La mutation se transforme en cause sociale. On s’y rallie avec des slogans irréfutables : “s’il y a à critiquer, il vaut mieux critiquer du dedans que du dehors”. On persuade les récalcitrants qu’il s’agit d’une fatalité : “Vous allez bientôt devenir un sympathisant des rhinocéros.” On moque ceux qui réfléchissent trop: “La culpabilité est un symptôme dangereux. C’est un signe de manque de pureté”.

16 novembre 2023

Chronique d'une guerre perdue

Les dernières informations concernant le conflit russo-ukrainien semblent indiquer que les choses évoluent comme on pouvait le craindre.
La contre offensive conquérante de Kiev dont nous fûmes abreuvés durant des semaines si ce n'est des mois, s'achève en déconfiture et pire encore, le pays est la proie de sérieux remous internes.
A l'approche de l'hiver, l'État-Major de l'armée révèle au grand jour par la bouche du général Valeri Zaloujny, l'impasse militaire et l'impossibilité de percer le front russe. Peu suspect de propos spécieux et encore moins de défaitisme, cet officier pèse sans doute ses mots. Ils sont donc l'expression d'une crise grave et sonnent comme un appel pressant à un changement de tactique.
Mais face à l'enlisement, le président Zelensky s'énerve et s'entête. Il croit ou fait mine de croire toujours en une victoire, de plus en plus hypothétique, tandis que son pays semble pris d'une lassitude profonde. Près de 2 années de guerre commencent à épuiser les volontés les mieux trempées et on croit de moins en moins à un retournement de situation.

Les alliés de l'Ukraine devraient également se poser quelques questions. Leur aide n'a donc pas suffi, faute d'une stratégie forte et cohérente, et faute d'implication directe et de vraie ligne rouge opposée à l’avancée russe. L'apport régulier d’armement n'a fait, comme c'était prévisible, que prolonger les combats et grossir le nombre de victimes de ce conflit. Les sanctions n'ont quant à elles, servi à rien tant la détermination russe est forte. Pire, elles sont détournées et aboutissent bien souvent à l’inverse de l’effet escompté. On se souvient de l’interdiction solennelle d’acheter le pétrole russe à plus de 60$ le baril. Aujourd’hui la quasi totalité de la production est écoulée autour de 80$  ! Parallèlement, on apprend qu’au 1er semestre 2023, les pays de l’UE ont acheté "plus de la moitié" du Gaz Naturel Liquifié (GNL) vendu par la Russie avec des importations en hausse de 40% vs 2022.
Force est donc de constater que les Occidentaux se sont claquemurés eux-mêmes dans une voie sans issue.

La désinformation, dont on accuse rituellement les Russes, n’a pas épargné le camp adverse. Contrairement aux rumeurs ineptes, le président russe n'est ni gravement malade, ni prêt à employer des armes de destruction massive. Sa détermination en revanche est intacte.

Envers et contre tout, la Russie a atteint l’essentiel de ses buts de guerre et entend désormais les défendre coûte que coûte. Contrairement à ce qu'on entend souvent, l'objectif d'ailleurs clairement énoncé par Vladimir Poutine dès le début de l’intervention militaire, n'a jamais été d'envahir totalement l'Ukraine ni même d'éliminer Zelensky du pouvoir. Il était de faire cesser une fois pour toutes les troubles et les violences qui ravageaient le Donbass depuis 2014 en en prenant le contrôle, et in fine, d'obtenir la neutralité militaire de l'Ukraine. Le premier objectif est en passe d'être atteint. Reste le second…

Face à cette dure réalité, l'obstination de Zelensky risque fort d'aggraver la situation. Il a jusqu’à présent refusé obstinément de considérer toutes les portes entrouvertes par la Russie. En l'absence de réponse et profitant du conflit israélo-palestinien, Vladimir Poutine consolide ses positions et pourrait même être tenté d'étendre un peu plus l'emprise russe. L’heure est donc plus que jamais à la négociation, seule manière d’arrêter ce jeu de massacre de plus en plus absurde.

Pour les alliés de l’Ukraine, non moins entêtés, comment s’extraire de ce bourbier sans perdre la face ? Comment sortir du piège des sanctions ? Comment éviter la cristallisation d'un axe anti-occidental autour de la Russie ? Aujourd’hui, Poutine n'hésite pas à faire feu de tout bois en se fournissant auprès de pays aussi infréquentables que la Corée du Nord et l'Iran. Est-il devenu leur ami, rien n'est moins certain. Il a déjà montré qu’il n’a aucune tendresse pour l'islamisme radical et a passé par profits et pertes de l’Histoire l’ère du communisme. Il paraît de bonne politique d’éviter de faire de lui un paria qui n’aurait d’autre solution que de rejoindre les rangs des nations hostiles au modèle occidental. Celui-ci est en crise. Il est prompt à donner des leçons de morale, mais il est en train de perdre ses valeurs et sa détermination. Il pourrait décliner pour de bon s’il continuait sur cette voie hasardeuse. 
Le plus souvent, les avancées de l’adversaire ne tiennent pas tant à leur force qu'à la faiblesse de ceux qui sont en face…

06 novembre 2023

L'ONU à nu

On connaissait depuis bien longtemps l'impuissance structurelle, voire l'inertie de l’ONU. Cette assemblée qui portait l’ambition d'une véritable gouvernance mondiale a fait long feu et le rêve initial, des plus louables, s’est hélas transformé en eau de boudin.

Passe encore que cette organisation n’entérine que des vœux pieux et des résolutions sans lendemain, donnant raison au Général de Gaulle lorsqu'il la considérait, non sans mépris, comme un “machin”. Paris ne s’est pas fait en un jour et il en faudra bien plus pour mettre sur pied un gouvernement mondial cher à Kant et à Ernst Jünger.
Mais hélas avec le temps, force est de constater qu’on n’est pas sur la bonne voie. Au lieu de gagner peu à peu en crédibilité et en légitimité, l’ONU dépérit. Elle n’est même plus capable à ce jour d’émettre un discours cohérent, neutre et le plus objectif possible pour tenter d’être à l’unisson d’un concert de nations très hétérogène. Le “machin” inoffensif est devenu une boussole sans repère, et son secrétaire général, le calamiteux Antonio Guterres est un moulin à paroles oiseuses, plus enclin à propager des inepties et des opinions personnelles qu’un minimum de bon sens que sa fonction devrait exiger.
Le conflit opposant Israël au Hamas est une nouvelle occasion de vérifier l’impasse tragique dans laquelle se trouve le projet pharaonique issu de la tragédie de la deuxième guerre mondiale, pour que "plus jamais" de telles horreurs ne se reproduisent.

Sur tous les sujets d’actualité M. Guterres à un avis, s'apparentant à un poncif ou bien une idée reçue conforme à l'esprit du temps, à l'instar de monsieur Prudhomme. C’est généralement moralisateur, opportuniste et inconséquent. Pour un peu, il pourrait faire cause commune avec le pape François…

Sur le COVID il avança cette lapalissade emphatique : « Cette pandémie, c’est du jamais vu !» Sa proposition d'action fut puisée au même tonneau: « Nous devons faire face à la fois à une crise sanitaire historique, à la plus grande calamité économique et aux pertes d’emplois les plus importantes que le monde ait connu depuis la Grande Dépression, ainsi qu’à de nouvelles menaces pesant sur les droits humains. »
Plus récemment, et comme pour faire écho aux rumeurs et prédictions colportées par les médias, M. Guterres s’est ému des graves dangers que fait peser l’Intelligence Artificielle sur le Monde. Du haut de sa chaire, il préconise une réponse “unie, durable et globale”, estimant que l'intelligence artificielle (IA) devrait être basée sur les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et garantir le plein respect des droits humains…"
Sur le réchauffement climatique, M. Guterres a naturellement un avis. Celui-ci ne fait pas dans la nuance puisque selon lui, nous sommes entrés dans "l’ère de l'ébullition mondiale”, c'est à dire d'un évènement "d'une portée destructrice inouïe". Entre autres prophéties gratuites, il révèle qu'il s'agit "d'une course contre la montre qu’on est en train de perdre". Alea jacta est...
Sur la guerre et sur la course aux armements, monsieur Gutteres a bien sûr un sentiment. Celui-ci n’est guère moins catastrophiste, puisqu’il se fendait en 2022, alors que le conflit russo-ukrainien débutait, d’une alerte sinistre annonçant que “l’humanité n’est qu’à un malentendu de l’anéantissement nucléaire…”
Enfin, en bon socialiste, M. Guterres ne rate jamais une occasion de flétrir le capitalisme. Ainsi, il s’est plu à dénoncer la «cupidité» des grandes entreprises pétrolières et gazières qui réalisent des profits «scandaleux» sur «le dos des plus pauvres» grâce à la crise provoquée par la guerre en Ukraine, appelant les gouvernements à les taxer. Tout est dit…

L’émotion de M. Gutteres est toutefois à géométrie variable. Les atrocités commises le 7 octobre dernier par le Hamas en Israël ne l’ont manifestement pas trop bouleversé. Il ne qualifia pas ces massacres d’actes terroristes, et osa au contraire déclarer qu'il s'agissait d'une attaque qui “n’est pas venue de nulle part”, ce qui est une forme nauseabonde de justification, et “qu’elle fait suite à 56 ans d’occupation”, ce qui est factuellement faux s’agissant précisément de Gaza. Depuis cette date, pas un jour sans qu’il ne se lamente sur les civils gazaouis tués par Tsahal (dont on sait qu’ils ont été sciemment exposés aux bombardements pour servir de bouclier humain par leurs prétendus protecteurs du Hamas). Il fut parmi les premiers à condamner le bombardement de l'hôpital Al-Ahli qu'il attribua naturellement aux israéliens alors qu'il s'agissait à l'évidence d'une roquette tirée par le Hamas sur sa propre population. Sur les agressions incessantes du Hezbollah, sur le sort des malheureux otages en revanche, on ne l’entend guère…

Est-il besoin de souligner que sous l’égide de monsieur Guterres, des experts de l’ONU ont qualifié l'intervention de Tsahal de génocide, et que la présidence du forum social des droits de l'homme a été conférée à l'Iran !
Est-il nécessaire de préciser que depuis 2015, l'ONU a émis 140 résolutions anti-Israël vs 68 contre tous les autres pays (M. Guterres a été nommé secrétaire général de l’ONU en 2016).
Est-il indispensable enfin de dire que depuis 2006 le haut commissariat aux réfugiés de l’ONU (UNHRC que M. Guterres dirigea de 2005 à 2015) s’est illustré par autant de résolutions contre Israël que pour le reste du monde !
Bref, avec Monsieur Gutteres, l’ONU a perdu toute crédibilité tant elle s'apparente desormais à une officine vouée avant tout à l’hostilité anti-israélienne. Pour le reste, c’est le néant pontifiant dont aucune nation ne semble faire beaucoup de cas. L’ONU est à nu. Pire, elle est à l’os. Il n’en restera bientôt plus rien si ce n’est l’armada de quelque 40.000 fonctionnaires attachés à son seul secrétariat…

24 octobre 2023

Still Rolling


Sans transition, de Bach aux Rolling Stones !
A l’instar du chaos ambiant, rien ne s’oppose au mélange des genres, surtout s’il s’agit de musique qui, comme chacun sait, adoucit les mœurs…
Quoiqu'on en dise, un inédit des Rolling Stones, c'est un évènement. Inutile d'insister sur la carrière fabuleuse de ce groupe pop issu des sixties. Sans doute ces garçons devenus octogénaires n'ont-ils plus rien à démontrer, et sans doute leur initiative peut paraître quelque peu décalée par rapport à la mode actuelle.
N'est-ce pas l'album de trop ?

La jaquette à l'esthétique laquée mais impersonnelle et stéréotypée, n'a pas grand intérêt. Encore qu'on pourrait trouver à ce cœur de diamant brisé en mille morceaux par un couteau acéré, quelque allusion à la violence de l'actualité et l'explosion de haine à laquelle on assiste consterné.
S'agissant de la musique, en dépit d’assez nombreuses médiocres critiques, force est de constater que ça fonctionne encore, même si on a sans doute perdu un peu du grain de folie et d’ardeur juvénile qui faisait le sel du groupe de rock. Sex, drug and rock'n roll, le cocktail s'est bien affadi et le temps n'est plus celui du Flower Power.
Mais ça sonne encore bien. La musique regorge de rythme et d’énergie et le timbre inimitable de la voix de Mick Jagger est intact. Quand il n'éructe pas un rock acide et tonitruant, ses effets inimitables, mêlant lascivité et gémissement, sortent avec délectation de sa bouche à la fois sensuelle et carnassière. Les rides, l’émaciation des chairs n’ont en rien altéré la force du chant.
Dans cette collection de nouveaux titres on compte des rocks aux riffs bien agressifs, très entraînants à défaut d’être d’une originalité renversante : Angry, Get Close, Bite My Head Off (avec la participation robuste de Paul McCartney), Mess It Up, Whole Wide World.
Il y en a d’autres plus circonstanciés et pulpeux : Depending On You, Live By The Sword, Drive Me Too Hard
Il y a enfin de bonnes vieilles ballades langoureuses, telles Dreamy Skies, Sweet Sounds Of Heaven (on peut y entendre s’égosiller Lady Gaga et pour ceux qui ont l’oreille fine, le piano d’Elton John…).
Et avant de partir, deux petits blues. L’un susurré avec modestie et tendresse par Keith Richards (Tell Me Straight), l’autre résonnant comme l'oméga d’une aventure commencée dans le sillage du bon Muddy Waters : Rolling Stone Blues. En définitive; si les Stones ne se réinventent pas, ils font mieux qu’entretenir la flamme, ils l’attisent. Ça fait revenir des souvenirs enfouis des belles années passées trop vite, ce n’est pas si mal…

Par un hasard bienvenu, j’ai découvert via Youtube, un titre jamais édité, datant de 1997, Dream About. Incontestablement, il émane de cette chanson méconnue, un jus à la saveur supérieure à celle des décoctions présentes. Ligne rythmique hypnotique, petits accords acidulés à la guitare, et une mélodie ensorcelante, pour ne pas dire poignante, qui fait monter encore un peu plus la nostalgie...

18 octobre 2023

Intermède Goldberg

Depuis bien longtemps, j’ai pris l’habitude de me ressourcer dans l'affusion musicale inépuisable et indiciblement apaisante des variations Goldberg de Johann Sebastian Bach.
Pour échapper à l’horreur de l’actualité, au vertige de la barbarie et du non sens qui tel un trou noir nous aspire de plus en plus, je reviens donc à mon alpha, qui sera sans nul doute également l’oméga de mon destin, si tant est que je puisse pleinement en profiter jusqu’aux confins de mon existence terrestre.
La publication toute récente d’une nouvelle version de ce chef-d'œuvre par le pianiste danois Vikingur Olafsson donne l’occasion de plonger à nouveau dans cet absolu de bien et de beauté.
On retrouve sous les doigts de cet artiste, la grâce unique faite de légèreté, de fantaisie et d’inventivité qui ne sacrifie rien à la fidélité, mais qui la transcende et l’illumine. Il y a une puissance à la fois grave et joyeuse qui vous transporte quasi instantanément. Tout en faisant indéfectiblement partie d’un ensemble, chaque variation s’individualise à merveille comme un monde à part entière, empli d’une troublante évidence. Certaines sont époustouflantes de virtuosité (variation 1 et 5 enlevées avec tant de gourmandise qu'on les entend à peine passer, et 20, superbe), d’autres de profondeur (3, 13, 15, 21, 25, ainsi que le crescendo dramatique des dernières variations, et bien sûr l’énigmatique et envoûtante aria qui commence et qui termine le parcours). La prise de son est idéale, très précise, d'une pureté quasi cristalline, avec juste ce qu’il faut de réverbération et de rondeur.

Il y a tant d'interprétations à ce jour qu’il est bien difficile de savoir ce qu’apporte un énième regard, et pourtant…
Cette nouvelle exploration constitue assurément un trop bref moment d’extase et de plénitude…

14 octobre 2023

Le bon grain et l'ivraie

La tragédie en cours au Moyen Orient n'a guère de chances de trouver de solution à moindre coût humain si l'on ne fait pas l'effort de séparer le bon grain de l'ivraie, c'est-à-dire si l'on confond la cause palestinienne avec ceux qui prétendent à tort l’incarner, dont le Hamas.
Le vrai drame est là.
Supposée représenter dans beaucoup d'esprits une résistance héroïque, cette organisation abjecte ne fait que pérenniser et accroître le malheur des gens honnêtes et respectables au nom desquels elle répand la terreur.
Ceux qui ne parviennent ou qui ne veulent pas dessiller leurs yeux devant l'évidence se font consciemment ou non complices de l'horreur. Loin d'être les amis du peuple palestinien, ils risquent de se faire ses pires adversaires et les ennemis d’eux-mêmes.
Pour reprendre une expression en vogue, ce sont les idiots utiles du jihad dont le but, revendiqué haut et fort, est la destruction d'Israël, l'éradication du peuple juif, et au-delà, la fin du monde occidental et de ses valeurs.
Nos démocraties portent une très lourde responsabilité devant l'Histoire.

M. Macron dans sa dernière allocution, nous a donné un nouvel exemple de sa calamiteuse politique du "en même temps". Il réaffirme avec force la nature terroriste du Hamas et reconnaît le droit à Israël de se défendre, mais fixe de telles contraintes à son action "juste", qu'elle ne pourrait se résumer qu'à une vaine stratégie du "avance et recule".
Contrairement à beaucoup d'autres nations, son soutien est des plus mesurés, sauf en paroles. Alors que des Français ont été atrocement tués ou enlevés, il se paie de mots pour venir à leur secours. Mais d'action point. Aucun soutien militaire n'est envisagé, aucune aide technique en matière de renseignement n'est annoncée. Pire, la France s'oppose à l'interruption de l'aide européenne versée à Gaza, dont on sait qu'une bonne partie est consacrée par le Hamas à l'endoctrinement anti-juif et à l'armement des terroristes qu'il a fanatisés.

En vérité, dans le discours crépusculaire de M. Macron, transparaissait avant tout la crainte de voir l'anti-sémitisme progresser brutalement en France, les émeutes déchirer à nouveau l'espace public et peut-être se propager une nouvelle vague d'attentats. Son appel à l'union sacrée fait partie des vœux pieux qui lui servent de politique, comme à beaucoup de ses prédécesseurs. Pour preuve, son incapacité à faire respecter l'interdiction des manifestations haineuses et violentes anti-israéliennes, qui se multiplient un peu partout, et son laisser-aller coupable face au comportement inqualifiable des partis d'extrême gauche.

Force est de constater qu'en dépit de toutes les dénégations et tous les faux semblants, l'anti-sémitisme est revenu en force. Il grandit chaque jour un peu plus, rappelant une époque sinistre qu'on pensait ne plus jamais revoir.
Sans prise de conscience de ce fléau qui a déjà fait tant de mal par le passé, les choses risquent fort d'aller de mal en pis. Il est urgent, pour celles et ceux qui désirent sincèrement la paix civile et un sort meilleur pour le peuple palestinien, de le dissocier de ceux qui parlent et agissent en son nom, sans autre légitimité que celle de la force et de la coercition. Pour aider ces populations martyres, il est vain de verser des larmes de crocodiles devant les images dramatiques, souvent manipulées, exhibées à dessein. Il faut commencer par se désolidariser sans ambiguïté des canailles. C'est le challenge auquel toutes les personnes bien intentionnées ont le devoir de se rallier, de quelque confession et de quelque parti soient-elles. Il n'est vraiment plus temps de tergiverser…

10 octobre 2023

L'Horreur

Le vieux conflit israélo-palestinien vient en quelques heures de basculer dans l’horreur.

Horreur suggérée avant tout par ces massacres odieux, qui révèlent l’indicible bêtise, la barbarie sans limite et la lâcheté infâme de leurs auteurs. Comme à chaque fois que le spectre hideux de la terreur surgit, comment ne pas compatir au sort des victimes qu’elle fait ?

Horreur à la pensée que ce nouveau drame va enterrer par son ignominie, quasi définitivement toute perspective de paix dans cette région.

Horreur à l’idée des conséquences que cette agression va provoquer, car Israël, frappé en plein cœur, ne peut pas ne pas réagir avec force. Dans cet enchaînement infernal, les morts s’ajouteront hélas aux morts. Jusqu'où ?

Horreur enfin de voir dans notre pays le comportement ignoble de certains partis politiques d’extrême gauche et de leurs dirigeants. Pour ceux qui pouvaient encore avoir des doutes quant à leur vraie nature perverse, haineuse et inconséquente, elle s’exprime ici au grand jour et fait honte à la nation dont ils sont les indignes représentants élus…

Devant ce désastre, il n’y a plus grand espoir hormis celui que les malheureux otages ne soient pas confrontés au pire, mais aussi que la riposte israélienne permette, sans trop faire couler de sang, de démanteler définitivement le Hamas et de libérer les Palestiniens aspirant à la paix, contraints de vivre sous le joug de ces fanatiques sans foi, sans coeur et sans âme.
Espoir enfin que le rapprochement en cours du monde arabe et d’Israël ne soit pas affecté par cette explosion de violence, et que les despotes qui règnent en Iran, dont l’ombre maléfique se profile derrière les terroristes, se retrouvent isolés, face à leur peuple plus que jamais animé d’une irrépressible soif de liberté…

30 septembre 2023

Madness or Common Sense ?

La situation économique du Royaume Uni n'est guère reluisante. Après des années d'une politique erratique, grevée notamment par la complexité de mise en œuvre du brexit, le pays est frappé de plein fouet par l'inflation. Plus élevée que chez nous, elle est toutefois à relativiser par le fait qu'il n'y eut ni bouclier tarifaire ni ristournes sur les tarifs de l'électricité et des carburants, destinés à soulager le budget des ménages, mais minimisant artificiellement l'augmentation des prix générale.
Au surplus, il faut souligner la bonne anticipation de la banque centrale britannique, qui fut plus réactive que la BCE pour augmenter ses taux.
Passé le choc initial, la récupération pourrait donc être plus rapide qu'ailleurs, comme lors de la crise des subprimes.

Pour l'heure, si l'Angleterre est à la peine, ses principaux indicateurs ne sont pas si mauvais que ça, surtout si on les compare à d'autres. Le chômage n'est que de 4,3%, le poids de la dette reste sous les 100% du PIB, la croissance est de 4,1%.

A titre de comparaison , les chiffres de la France pour la même période sont de 7,5% pour le chômage, 112,5% d'endettement (avec un emprunt prévu pour 2024 atteignant le chiffre record de 285 milliards d'euros), et seulement 2,6% de croissance .

Rishi Sunak, actuel Premier Ministre est tout de même inquiet pour l'avenir et voudrait assainir l'économie. Pour ce faire, son gouvernement annonce un coup de frein en matière de transition écologique. Il délivre de nouvelles autorisations de forages pétroliers et gaziers, et repousse la date butoir de cessation de production de véhicules thermiques. Il abroge les interdits locatifs sur les logements qualifiés de passoires thermiques et remet à plus tard le calendrier signant la fin des chaudières à fioul ou gaz.

Les opposants à ces mesures, les qualifient d’électoralistes. Et alors ? Peut-on reprocher en démocratie à un dirigeant de tenir compte du peuple ? Surtout, comment émettre une telle critique au moment où le consensus climatique est si fort ? C'est plutôt l'inaction qui est reprochée aux gouvernants par les temps qui courent.
Il s'agit donc plutôt de bon sens et de pragmatisme et c'est tout le contraire de ce qu'on propose chez nous, où l'on se gargarise de mots et de promesses de nouvelles dépenses publiques pour promouvoir une ruineuse et vaine course à l'échalote écologique…

25 septembre 2023

Le Fanatisme de l'Indifférence

Cet oxymore cocasse qui donne le titre de ce billet fut délivré avec pompe et circonstance par le pape François lors de son show marseillais. Il révèle qu’il y a vraiment quelque chose qui ne tourne pas rond chez lui. On le savait un peu décalé dans le rouge de la mal nommée théologie de la libération, qui cherchait en réalité à inféoder le message christique au marxisme le plus éculé. Mais c'était avant que le Saint-Esprit l'éclaire de sa lumière.
Hélas, force est de constater que ce dernier a manqué sa cible. François est resté dogmatique, sentencieux, et plus imprécateur que jamais. Devenu pontife il pontifie à tout va, avec un ton revanchard et un goût pour la provocation vaine qui témoignent d'une inquiétante inaptitude à l’élévation spirituelle.

Sa venue très théâtralisée dans la patrie de Marius pour exprimer avec des larmes de crocodile sa compassion pour les migrants est une belle pierre jetée dans le jardin honni du Capitalisme et plus généralement de l’Occident. Sans doute cela satisfera l'âme révolutionnaire du curé coco devenu leader de la chrétienté, mais quant à l'efficacité, ce n'est rien de mieux qu'un coup d'épée dans l'eau ou un hourra pour les pauvres, aussi audacieux et courageux qu'une résolution de l'ONU, contre la guerre ou pour l'amélioration du climat…

Dans quel monde vit le pape ?
A-t-il conscience du dépérissement tragique du christianisme qu'il est supposé incarner et en tout état de cause défendre avant toute chose ?
Pas un jour sans que des chrétiens ne soient insultés, ridiculisés, humiliés, violentés, assassinés par le fanatisme et l'intolérance.
Pas un jour sans que des églises ne soient pillées, vandalisées ou brûlées par des idiots animés de la plus noire des bêtises.
S'agissant du sort tragique des migrants qui semble tant remuer l’héritier au petit pied de Saint-Pierre, pas un jour sans que des passeurs cupides sans foi ni loi n'organisent l'exode périlleux de ces malheureux auxquels ils ont fait croire que l'Europe était une nouvelle Cythère.
Pas un jour sans que des ONG, irresponsables, financées par des États inconséquents, n'encouragent les candidats à l'émigration.
Pas un jour sans que les tyranneaux et les incapables qui prétendent gouverner les pays d'origine des exilés, n'accentuent en toute impunité leur emprise et leurs maléfiques agissements.
Et pas un jour sans qu'on constate avec effarement l'incapacité de nos pays, totalement débordés par l'ampleur du phénomène, à accueillir si ce n'est endiguer le déferlement de populations hagardes fuyant ces misères évitables mais que personne ne cherche vraiment à éviter.

Le pape, qui semble ignorer les liens de causalité, n’eut pas un mot pour ces fléaux terribles, pas un mot pour déplorer le chaos migratoire qui s’apparente de plus en plus à un désastre humanitaire. Au lieu de cela, il se livra à une litanie marmonnée avec onction et componction, cachant derrière de vagues propos lénifiants, un lit de pointes venimeuses et d'accusations fielleuses, destinées non pas aux fauteurs de ces troubles, mais à ceux qui y sont confrontés ! Pire, ses condamnations à sens unique et ses leçons de morale pharisiennes risquent d’alimenter et d’attiser, consciemment ou non, l'incendie.

A défaut de convaincre ses paroissiens et de déclencher des vocations pour sa religion en voie d'extinction, il devient l'idole de ses adversaires et de tous ceux qui n'ont rien à faire de la sainteté dont il est le dépositaire désigné.
Profitant de l'aubaine, l'infâme Mélenchon ramène avec une torve jubilation sa fraise, couleur du sang des révolutions d'antan. Lui qui ne vit que dans l'espoir de voir revenir le temps des coupeurs de têtes et de la lutte fratricide des classes, à laquelle il ajoute celle des races et des sexes, il s'accroche indécemment aux basques du pontife cacochyme et décarochant, espérant par ses simagrées, tel le joueur de flûte de Hameln, faire venir à lui, comme futurs électeurs, les foules étiques et désemparées que le pape bénit de ses vœux insanes.

23 septembre 2023

Planification Ecologique

Cette fois c’est dit : le gouvernement a un plan pour accélérer la fameuse transition écologique ! Et c'est à marche forcée, encadrée par une nouvelle flopée d'ukases et de réglementations qu’il entend nous faire progresser sur le sentier lumineux de la régulation du climat.

Non échaudée par son piteux revirement en matière d’énergie nucléaire, madame Borne a présenté son train de mesures supposées infléchir la courbe française des émissions de gaz à effet de serre.

Ce nouvel avatar du planisme étatique est assorti d'une palanquée d’objectifs chiffrés, comme aux plus mauvais jours de l’union soviétique, et d’un coût astronomique, aux frais du contribuable : 7 milliards d’euros qui s’ajoutent aux dépenses publiques rien que pour 2024 (qui correspondent en réalité à des engagements pluriannuels de 10 milliards €) !

A tout seigneur tout honneur, la voiture électrique devenue l'étendard des tripatouillages bureaucratiques commis au nom de l'écologie, devra s'imposer coûte que coûte. Plus un seul véhicule dit "thermique" ne devra sortir des chaînes de production à compter de 2035 et la part de marché de l'électrique devra atteindre 66% dès 2030. Autrement dit, plus aucun investissement n'est dès à présent envisageable par les constructeurs français qui seront sous peu contraints de procéder à des licenciements massifs car il est clair qu'il faudra moins de ressources humaines pour élaborer, construire et entretenir des bagnoles électriques, ce d'autant qu'elles seront fabriquées à moindre coût en Chine..

Le gouvernement entend endiguer le tsunami imminent des importations par d'illusoires lignes Maginot. Mais, comme à chaque fois qu'on recourt à des expédients protectionnistes, des augmentations substantielles de prix sont prévisibles pour les consommateurs, que l'Etat va tenter de contenir à coup de ruineuses et complexes primes, bonus et autres subventions. Paradoxe amusant, après avoir instauré un bouclier tarifaire destiné à maintenir la consommation des bons vieux produits pétroliers, la Première Ministre encourage désormais les distributeurs à les vendre à perte ! A l'incohérence politique, on ajoute le non sens économique. On croit rêver…

Dans le souci de favoriser les "mobilités alternatives", le réseau des pistes cyclables offrira 150.000 Km aux cyclistes contre 60.000 aujourd’hui : si la décroissance est en marche, celle du marché des vélos, souvent asiatiques, va atteindre des sommets !
La SNCF, RATP et consorts sont également mis à contribution. Alors qu’ils sont déjà totalement débordés et de moins en moins efficients, ils devront progresser dans des proportions vertigineuses : plus 20 milliards de km-voyageurs rien que pour les transports ferroviaires !
En matière d’agriculture, il s'agira de favoriser la filière bio. Bien qu’elle soit l'objet d'une désaffection croissante de la clientèle, vu la qualité discutable et le coût élevé des produits, elle est supposée croître, par la magie des injonctions étatiques, à hauteur de 20% de part de marché ! Peut-être y arrivera-t-on en réduisant la production globale vu l'interdiction drastique de l'usage des pesticides, et des engrais. A la place, les champs vont se couvrir d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques
Passons sur la volonté de baisser de 75% le nombre des chaudières à fioul et de 20% celles à gaz. Pour ce faire, la prodigalité sans limite des Pouvoirs Publics devrait faire exploser le nombre des bénéficiaires du dispositif Maprimerenov, dont resteront bien sûr exclus les propriétaires nantis de résidences secondaires…

En revanche, rien ne semble prévu pour limiter les transports aériens, ni pour améliorer la gestion de la terre, de l’urbanisme, du traitement des eaux de pluie, de l'entretien des forêts, et rien sur le ferroutage, promis par les écologistes et sans cesse reporté aux calendes..
Rien n'est dit non plus au sujet des essais prometteurs de biocarburants (e-fuels) qui permettraient pourtant de recycler le CO2 de l'atmosphère...

Au total, l'adaptation pragmatique au prétendu dérèglement du climat est largement négligée et la priorité, chimérique, reste celle de changer le climat “quoiqu'il en coûte”.
M. Macron, incapable de régler les problèmes du quotidien, se fait fort de faire rentrer dans les clous de sa bureaucratie les aléas de la météo !

Sous l’effet de ces mesures, peut-être verra-t-on, conformément au Gosplan, décroître les émissions de CO2 de 403 à 270 millions de tonnes annuelles. Mais une chose est sûre dans ce monde incertain, la proportion du dioxyde de carbone dans l’air ambiant (aujourd’hui de moins de 0,04%) ne variera pas d’un iota. Pire, elle progressera grâce aux émanations en provenance d’autres pays !
N’en doutons pas cependant. Tout ce fatras de normes n’empêchera pas le gouvernement d’être régulièrement accusé “d’inaction climatique”. S’agissant des différents partis politiques qui ont eu la primeur de cet arsenal législatif, les critiques ne s'adressent qu'à l'insuffisance du dispositif. Comme l’a fait remarquer très subtilement M. Faure, représentant du vestigial PS, “une guerre contre le climat, ça suppose une économie de guerre, et on en est très, très loin…”

Alors que l'État s’abandonne à l’absurdité contagieuse, un scientifique révèle qu'il a dû biaiser la présentation d'un travail pour qu'il soit conforme à la doxa climatique et puisse ainsi être publié dans la prestigieuse revue Nature. Une autre revue, European Physical Journal Plus, décide carrément de dépublier un article sous la pression de lobbies réchauffistes, au motif que ses auteurs seraient des climato-sceptiques notoires.
Avec le Plan, voici le règne des comités de censure. Le doute scientifique n'est donc plus permis dans ce monde en proie à la folie des certitudes vaines. Le bon sens et la sagesse reculent un peu plus chaque jour. Après les errements de la revue médicale Lancet au temps du COVID, on en vient à perdre confiance en ce qui semblait incarner la raison et l'objectivité.
Si les mesures présentées dans ce plan relevaient d'un progrès évident, y aurait-il besoin de mettre en place une telle armada législative pour convaincre de leur bien-fondé ? Si le réchauffement climatique s'imposait comme une vérité intangible, et si les gens avaient encore un peu d’esprit critique, y aurait-il besoin de museler les contradicteurs ?

18 septembre 2023

Statistiques et Transhumanisme 2

Lors de cette session des “Visiteurs du Soir” (10/09/23), animée par Frédéric Taddéï, le second débat avait pour objet le thème du transhumanisme.
Dire précisément de quoi il s’agit serait difficile tant le concept est sujet à interprétations. On se situe en effet dans une sorte de nébuleuse portant l’idée que le progrès technique aboutira tôt ou tard à une transformation radicale de l’être humain. Selon les plus enthousiastes zélateurs de cette théorie, l’Homme deviendra plus intelligent, plus puissant, résistant à quasi toutes les maladies, et à terme, il pourra peut-être accéder à l’immortalité.

Pour en débattre, le premier protagoniste était Michel Onfrayphilosophe bien connu, très médiatique et surtout très prolixe en ouvrages célébrant une vision athée, quelque peu nietzschéenne du monde, fermement ancrée dans un socialisme utopique, de type proudhonien. Le second, Laurent Alexandre, fut chirurgien, cofondateur du site web Doctissimo, auteur de nombreux ouvrages consacrés à l’avenir des sciences et des biotechnologies, également habitué des plateaux télévisés et tout aussi engagé politiquement, mais quant à lui, dans une sorte de libéralisme de centre gauche, néo-macroniste, selon ses propres déclarations.

Le point de départ de la discussion se fondait sur un objectif en apparence partagé : celui d'améliorer les perspectives d’avenir pour l'Humanité. La visée est on ne peut plus louable, mais il ne fallut pas attendre bien longtemps pour comprendre que les voies préconisées pour y parvenir étaient largement divergentes.

Laurent Alexandre propose une voie résolument optimiste, et se fait le démiurge d’une nouvelle humanité. Selon ses dires, “l’Homme 1.0 est mort, vive l’Homme 2.0”! Emporté par la passion, il lui arrive même d'appeler ce dernier Homo Deus.
Les progrès rapides en biologie, en génétique, en intelligence artificielle (IA), en nanotechnologies, l’incitent en effet à penser que l'être humain est en passe d’être transfiguré. Tout ce qui semblait relever de la Nature sera selon lui revisité par la technique. Ainsi “le bébé à la carte” deviendra la règle eugéniique, et la grossesse et l’accouchement ne seront bientôt plus qu’un souvenir, grâce à l’avènement de l’utérus artificiel. Ce dispositif permettra d’optimiser la gestation, et de doter le foetus d’extraordinaires capacités physiques et intellectuelles. La famille réunie autour de la machine, trônant dans le salon durant 9 mois, pourra même suivre le bon développement du futur enfant... 
Dans ce monde idéal, il n'y aura peut-être même plus besoin de travailler. Un revenu universel sera versé aux oisifs et tous les désirs pourront être satisfaits sans délai par l'Intelligence Artificielle, omniprésente. 

Inutile de dire que cette description horrifia Onfray, qui y voit la concrétisation maléfique du fameux "Meilleur Des Mondes". Lui à l'opposé, reste envers et contre tout attaché à un monde fondé sur le respect des traditions. Il veut l'avènement d'un modèle de société libre et joyeuse, ouverte aux délices de l'épicurisme, tout en garantissant la protection des citoyens contre toute emprise excessive du Pouvoir, des Médias, des Commerçants, des Religions, de la Mondialisation, et in fine de la Technique et de l'Informatique.

Taddei qui se trouvait pris entre le marteau et l'enclume tenta quelques incursions visant à rapprocher les deux paradigmes mais rien n'y fit. Bioconservatisme contre transhumanisme, c'est de toute manière irréconciliable, et dans les deux cas, extravagant. On pouvait supposer d'ailleurs, que l'animateur ne penchait n'y d'un côté ni de l'autre tant les paradoxes et les contradictions étaient légions, quelque soit l'option considérée.

Le scientifique exalté se veut le chantre d’une nouvelle humanité assujettie à la technique, sans aspiration spirituelle autre que “de tuer la mort”, et dont la foi et la morale se réduisent à un fumeux “théo-logiciel”. Une perspective d’évolution entièrement consacrée à la réalisation narcissique d'un idéal de perfection, plein de vanité, donc de vide. Par un étrange oxymore, le culte de l'individu le plus exacerbé s'inscrit dans une vision holistique de la société au sein de laquelle les citoyens valent à peine mieux que des fourmis au comportement programmé.
Il imagine avec un sérieux confondant qu’on pourra rendre les gens plus intelligents par la magie de la biotechnologie, en leur greffant des puces dans la cervelle ! Comme si l'intelligence pouvait être aussi simple, comme si la machine, aussi perfectionnée soit-elle, pouvait être qualifiée d'intelligente, et comme si elle excluait totalement par nature la bêtise ! Dans un beau geste altruiste, il voudrait que ces progrès profitent à tout le monde, prioritairement aux gens défavorisés par la nature, et qu'ils soient remboursée par la Sécurité Sociale ! Une telle naïveté ruine la crédibilité qu'on serait tenté d'accorder à ce modèle caricatural.
Mais on n’est pas plus convaincu par son interlocuteur Michel Onfray, proposant une version amendée du rêve ancestral de société juste et égalitaire.
Le philosophe, aussi brillant qu’idéaliste, qui se veut novateur, ne fait rien d’autre que recycler de vieilles lunes révolutionnaires d'inspiration collectiviste, toujours désastreuses lorsqu’elles furent mises en œuvre par le passé. Oubliant ces expériences malheureuses, et alors qu’il se prétend libertaire, il en vient à considérer le libéralisme, incarné selon lui par son interlocuteur, comme aussi néfaste que le communisme ! Il s'oppose de toutes ses forces à “la réification du monde” mais reste envers et contre tout fidèle au socialisme, fondé quelque soit la version mise en œuvre, sur une vision matérialiste et athée qui symbolise le mieux cette réification.

Au bout du compte, à l'issue de la confrontation, l'envie qui se faisait jour était de renvoyer dos à dos les deux conceptions, car décidément, l'une mélange science et scientisme, l'autre continue de confondre philosophie et utopie …

14 septembre 2023

Statistiques et Transhumanisme 1

Les téléspectateurs ayant suffisamment d’ouverture d’esprit pour s’aventurer de temps à autre sur la chaîne CNews purent assister à deux débats édifiants ce dimanche 10 septembre. Sous la houlette de l’excellent Frédéric Taddéi, un des meilleurs animateurs de talk show, on vit s’affronter beaucoup des contradictions que notre monde véhicule, entre utopie et science.
La première confrontation portait sur le mésusage des statistiques et sur leur dévoiement pour servir une cause idéologique. La discussion tourna autour du récent ouvrage de Sami Biasoni intitulé "
Le Statistiquement Correct". 

Beaucoup d’exemples furent donnés des stupidités chiffrées qu’on entend colportées par les médias à longueur d’année. Un seul suffirait à donner la mesure de la bêtise, si ce n’est de la mauvaise foi, de certaines sentences proférées par les politiciens et autres “penseurs autorisés”, pour reprendre l’expression de Coluche.
Pour légitimer et défendre la limitation de vitesse à 30 km/h que presque toutes les villes, dans un bel élan panurgien, sont en train d’imposer aux automobilistes, l’ébouriffé représentant du parti Europe Écologie Les Verts, Julien Bayou, présenta la mesure comme généreuse au motif qu’on roule déjà en moyenne à Paris à 11,6 km/h entre 7h et 20h !
On pourrait tout de go lui demander de s’expliquer sur la nécessité d’une telle limitation puisqu’on circule en pratique déjà nettement en dessous. Mais le plus grave et le plus contestable est de fournir un chiffre qui ne veut rien dire. S’il est vrai au sens statistique, il ne représente pas la réalité puisqu’on ne roulait avant cette réglementation quasi jamais à cette vitesse, mais toujours soit en dessous lors des embouteillages, soit en dessus lorsque la voie était libre. C’est donc avec ce genre de raisonnement pernicieux qu’on promulgue des normes inapplicables.
Pour illustrer autrement le caractère parfois fallacieux d’une moyenne ou d’une valeur médiane, il suffit d’imaginer un établissement de santé qui ne comporterait qu’une maternité et qu’un service de soins pour personnes âgées. L’âge moyen se situerait autour de 50 ans ce qui n’a évidemment, dans un tel contexte, aucun sens.

Le nombre de slogans appuyés par une présentation biaisée des chiffres ne fait que croître et pour celles et ceux qui n’ont pas le temps ni la volonté d’approfondir les choses, ces contre-vérités finissent par s’imposer. “Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose”, selon le dicton bien connu.
Ainsi, on put entendre tout récemment Jean Jouzel, ancien haut dignitaire du GIEC, assénant tranquillement que le capitalisme est incompatible avec la lutte contre le réchauffement climatique.
Le refrain est connu mais venant de quelqu’un qui se targue d'être un savant impartial, une telle ineptie qui prétend faire d’une opinion politique une vérité incontestable, démontre un parti pris de plus en plus radical et intransigeant qui invite à lui seul à devenir climato-sceptique ! On sait que M. Jouzel n’a jamais caché son engagement “toujours à gauche”, et on sait dorénavant qu’il confond cet engagement partisan avec l’objectivité scientifique. Il rejoint ainsi la cohorte d’esprits torves, clairement assujettis à une doctrine, mais qui essaient en toute connaissance de cause de faire passer cette dernière pour un corpus assis sur des faits établis. On se souvient de l’illustre idiot qui osa clamer qu’il préférait "avoir tort avec Jean-Paul Sartre que raison avec Raymond Aron" ! D’autres diraient qu’au Loto, "100% des gagnants ont tenté leur chance…"

07 septembre 2023

Jazz Me Blues

Fin d’été chaleureuse.
Pour paraphraser les slogans du satrape en chef du machin ONU, qu’il est doux de rentrer en douce ébullition sous la caresse ardente du soleil, de s’effondrer avec suavité dans les enveloppements tièdes du maudit réchauffement climatique !
Surtout si l’on a la chance d’écouter dans le même temps les envolées musicales torrides d’une des plus belles sessions de jazz qui fut : Art Pepper Meets The Rhythm Section.

Ça se passe en janvier 1957 dans les studios de la maison Contemporary Records à Hollywood, mais la tonalité est si légère, si éblouissante et suspendue en quasi lévitation, qu’on se croirait en pleine extase estivale .
Le saxophoniste, âme damnée de la Beat Generation et du West Coast Jazz, est entouré d’une section rythmique de rêve: celle qui accompagne habituellement Miles Davis, à savoir Red Garland au piano, Paul Chambers à la basse et Philly Joe Jones à la batterie.
Les ingénieurs du son, peut-être conscients de vivre un instant unique, font preuve d’un petit miracle pour sublimer les émanations de ce quatuor improvisé. Avec la technique dont ils disposent, ils se mettent en quatre pour donner à chaque instrument une véritable existence, faite de pulpe, de fruité, et de densité. Le résultat reste aujourd’hui absolument époustouflant d’équilibre, de puissance, de musicalité.

Du temps des 33 tours, je débutais toujours par la face B, s'ouvrant sur le saisissant Jazz Me Blues, bondissant, virevoltant joyeusement autour d’un beat ravageur. Brillant prélude au festival qui s’ensuit avec les pétillants You’d Be So Nice To Come Home To, Waltz Me Blues, et Tin Tin Deo & Co...
Au titre des morceaux de bravoure, s’impose naturellement le trépidant Straight Life qu'incarne si bien l’artiste, avec ses frasques, son inspiration et sa spontanéité. Et pour finir en douceur un petit régal fait de l’onctueuse rêverie de Star Eyes et du splendide Imagination, qui évoquent si bien l’alchimie envoûtante, mêlant farniente et rage de vivre. Entre cool, beat et bop…

Une édition récemment remastérisée, et numérisée en très haute définition (192 Khz et 24 Bits), donne un incontestable surcroît de saveur à ce moment magique. On vibre aux frôlements lascifs de l’archet sur les cordes, on goûte avec des frissons de bonheur la rondeur acidulée du piano, on savoure avec exaltation les claquements feutrés des toms et de la caisse claire et last but not least, on s’enivre de la pulsation hypnotique du sax débordant d’énergie et de sensualité. Tout cela est parfaitement maîtrisé, d'une clarté cristalline. Joie, joie, joie, pleurs de joie comme disait ce cher Blaise…

30 août 2023

Pas d'impôt, juste des taxes

L'été est propice à la floraison des taxes, peu importe la météo, et envers et contre toutes les dénégations gouvernementales. Ne pas croire donc le président de la république qui annonce sans cesse des baisses d'impôts à venir. Ne pas se laisser abuser par les discours amidonnés, remplis de vœux pieux et d'auto-congratulation, du ministre des finances Bruno le Maire. Ne pas prêter l'oreille aux paroles d’Élisabeth Borne, premier.e ministre, qui assure que le prochain budget sera exempt de hausse d'impôt.
Lorsqu'on entend ce genre de propos, ça sent le roussi. L’État étant incapable de réduire ses dépenses, il lui faut évidemment toujours plus d'oseille. Et si ce n'est pas l'impôt, ce sont les taxes et cotisations obligatoires.
On vient d'apprendre par l'INSEE qu'en matière de fiscalité, 2022 avait inscrit un nouveau record. Cette année là, comme dit la chanson, la moisson n'avait jamais été aussi productive et près de la moitié de la richesse nationale était consacrée de facto au service de l’État (45,4% du PIB selon l'INSEE). Toujours plus de fonctionnaires, toujours plus de dépenses sociales, toujours plus de normes et de réglementations à mettre en œuvre et à contrôler, il faut bien payer tout cela... Comme le faisait déjà malicieusement remarquer Clemenceau : "Semez des fonctionnaires, vous récolterez des taxes…"

Il ne faut pas être dupe, en premier lieu, des baisses de la fiscalité en trompe-l'œil.
Il en est ainsi de la suppression de la taxe d'habitation. Puisque le gouvernement garantit les mêmes ressources "à l'euro près" aux communes, il ne s'agit à l'évidence que d'un simple transfert de charges. D'ailleurs, la hausse vertigineuse de la taxe foncière est là pour attester du subterfuge. Avantage substantiel, l'assiette de prélèvement est plus large que celle de la taxe d'habitation, de laquelle étaient exonérés beaucoup de gens. Quant aux propriétaires de résidences secondaires, ils sont gâtés. Non seulement ils restent les seuls à payer, pour des logements qu'ils n'habitent que partiellement, mais ils ont droit en prime à une surtaxe punitive qui peut s'élever à 60% ! Contrairement à l'objectif affiché, ce sera tout bon pour les communes ciblées, de n'avoir que des résidents secondaires : ils consomment peu de services publics et les paient plein pot !
Le raisonnement est identique avec la disparition de la redevance TV. A ressources égales garanties pour les chaînes d’État, il faudra bien trouver de nouvelles contributions …

Passons sur les baisses d'impôts annoncées et jamais appliquées ou bien toujours repoussées.
Il en est ainsi de l'impôt sur le revenu (IRPP) dont le montant, selon Bruno Le Maire, sera atténué, "quand les conditions seront réunies". A la Saint Glinglin peut-être ?
S'agissant de la Contribution sur la Valeur Ajoutée (CVAE) dont la suppression avait été promise aux entreprises pour 2024, elle est repoussée à 2027, en toute fin de quinquennat, ou pour le suivant, si tout va bien…

En matière fiscale, l'imagination et le zèle des fonctionnaires rémunérés grâce à l'impôt, sont sans limite. Et l'écologie offre des perspectives épatantes.
Elle permet par exemple de justifier l'augmentation délirante du malus automobile qui sera bientôt plus onéreux que la voiture elle-même ! Elle permet de légitimer les limitations de vitesses, devenues complétement folles, dont l'apport au Trésor Public, via les contraventions, est certainement bien supérieur à celui supposé bénéficier à la protection de l'environnement. Elle permet enfin d'étendre le stationnement payant en ville, censé favoriser les "mobilités douces" mais qui renfloue les budgets au risque d’accélérer la mort des commerces et la désertification des cœurs de cités.
Il en est de même ou quasi, de l'augmentation des taxes sur les billets d'avion et sur les sociétés gérant les autoroutes. En l'occurrence, surtout ne pas croire le ministre des transports Clément Beaune, lorsqu'il affirme qu’elles n’impacteront pas le prix des péages…

On pourrait au même chapitre, rire jaune aux annonces de hausses "modulées" des taxes sur l'eau, sur les sodas et autres aliments jugés trop gras ou trop sucrés, sur le traitement des déchets …

Au plan plus général, on pourrait s'appesantir sur le doublement prochain des franchises médicales. Ce "reste à charge", presque indolore car caché derrière les remboursements de la sécu, augmente progressivement et inexorablement à la manière de la CSG, sans la moindre diminution des cotisations à l'Assurance Maladie obligatoire.
On pourrait citer la proposition faite par l'Inspection Générale des Finances, de mettre fin à la TVA réduite pour les dépenses relatives à l'amélioration du logement, ce qui conduirait à la faire passer de 10 à 20%.
On pourrait évoquer la fin du bouclier tarifaire sur l'électricité et les carburants. Il donnait l'illusion d'un blocage des prix, mais n'était qu'un artifice comptable, augmentant le solde débiteur de la Nation.
En attendant, la hausse du prix du baril de pétrole fait bien l'affaire du gouvernement, qui voit se majorer mécaniquement, en proportion, ses rentrées fiscales, tout comme l'inflation qui fait croître pareillement le montant perçu au titre de la TVA.

Décidément, avec le pseudo ultra-libéral Emmanuel Macron, la France est manifestement bien décidée à conserver son titre de championne du Monde de la fiscalité.