07 novembre 2015

Mascarades


A défaut d'actions efficaces et de mesures utiles, on pourra se souvenir longtemps des bévues, bourdes, et autres bêtises que ce gouvernement produit en tout genre et à toute heure !
Associées aux grandes kermesses, barnums et cérémonies de la liturgie socialiste, elles forment un contraste saisissant, au potentiel indéniablement comique.
Il serait difficile de tenir un compte exact de toutes ces mésaventures, tenons-nous en aux dernières en dates, après un bref rappel historique.

On connaît la propension des pouvoirs socialistes aux grandes commémorations creuses dans lesquelles ils tentent sans doute de noyer leur incurie et de redorer le caractère corrompu de l'idéologie à laquelle il se cramponnent, en désespoir de nouvelle cause.
Les défilés militaires sont évidemment l'occasion la plus emblématique de donner l'illusion de puissance et d'action. Rien de plus grotesque pourtant que ces spectacles statiques et lourdingues dont les pays communistes se sont fait une spécialité, et que la France reste un des rares pays à faire perdurer...

L'interminable règne de François Mitterrand fut quant à lui l'occasion de soumettre le peuple à quantité de cérémonies boursouflées. Cela commença dès 1981 par cette ineffable farce panthéonesque où l'on vit le Président fraîchement élu, faire gravement son numéro d'acteur avec sa petite fleur à la main. Chanta-t-il in petto les mots de Brassens, nul ne le sait... Le fait est qu'il garda un sérieux imperturbable en ces moments guignolesques.
Durant les deux calamiteux septennats, on assista à d'autres fêtes païennes où l'on dépensa en vain, beaucoup l'argent du contribuable : sommet de Versailles en 1982, inénarrable fêtes de la musique inspirées par le cher Jack, anniversaire de la prise de la Bastille de 1789, Jeux olympiques de 1992, durant lesquels s'illustrèrent sans retenue Philippe Découflé et Jean-Paul Goude. Reconnaissons tout de même à ces nouveaux bouffons du roi, un certain panache... De leur point de vue, ils auraient eu bien tort de se gêner devant la prodigalité du satrape !

François Hollande, l'héritier, aimerait manifestement marcher dans les pas de celui qui le méprisait pourtant si ostensiblement.
Las ! Le malheureux n'a pas le feeling si l'on peut dire. 
Il n'est certes pas moins inefficace que Mitterrand s'agissant de gouverner, mais en matière de spectacle, ce n'est pas ça.
On se souvient de la pitoyable remontée des Champs-Elysées sous la pluie lors de son élection en 2012. On put certes mesurer la formidable opiniâtreté dans l'erreur et l'absurdité dont était capable l'ancien secrétaire général du PS.

La suite confirme le pressentiment. Tandis que le pays s'enfonce doucement dans la crise, à la faveur d'une politique inepte et contradictoire, le Chef de l'Etat essaie désespérément de créer l'illusion qu'il existe et qu'il agit pour le bien du pays. 
A cette fin, il ne manque aucune occasion d'instrumentaliser l'actualité aussi atroce soit-elle. Cela donna cette folle journée du 11 janvier 2015 suite à l'horrible tuerie de Charlie Hebdo. Journée grandiose et sans lendemain, car ne reposant sur rien.
A côté de cette apothéose éphémère, chaque événement de l'actualité est exploité par son nullissime service de communication qui le presse de ramener sa fraise pour montrer qu'il s'intéresse au peuple.
Avec une inoxydable apparente bonne humeur, François Hollande entreprend beaucoup de voyages comme Tartarin de Tarascon, mais rien n'y fait. Le ridicule lui colle à la peau, et il restera sans doute en termes de sondage comme le président le plus constamment impopulaire.
Retour d'otages, catastrophes naturelles, inondations, accident de la route, plan de rénovation urbaine « chez Lucette », tout est bon pour organiser à la va-vite une petite cérémonie dont il ne mesure manifestement pas le caractère grotesque si ce n'est indécent.


Au surplus, il a le don de s'entourer de gens particulièrement doués pour la gaffe, et si ignorants des exigences minimales de leur mission, que cela finit par dépasser l'entendement.

On a vu Fleur Pellerin, ministre la culture « qui ne lit pas », s'extasier devant la quincaillerie obscène du prétendu artiste Kapoor, exhibée à grands frais dans les jardins du château de Versailles, et les baudruches porno-scatologiques de McCarthy, brièvement gonflées sur la place Vendôme.

On a vu la ministre du travail, madame El Khomri, s’emmêler les pinceaux dans l'infernale jungle légale et avouer son ignorance basique de la réglementation des contrats de travail.

Et on a vu pour finir, et dans l'attente d'autres péripéties, le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert, d'habitude pétri d'auto-satisfaction, se livrer à un lamentable rétropédalage dans l'océan de stupidités fiscales que lui et ses amis ont déversé sur les Français. Le voilà donc qui, pris de panique devant un système échappant à toute maîtrise, incite les contribuables à ne pas payer l'impôt ! En matière d'incompétence et d'irresponsabilité, on croyait avoir tout vu ! En définitive il faut se faire à l'idée que le pire est toujours à venir...


Désormais le Président attend avec impatience la fameuse et déjà délirante COP21 pour tenter d'effacer en grande pompe, tous ces ratages derrière l'écran des balivernes écologiques. Que va-t-il bien pouvoir inventer pour dire en même temps qu'il veut faire chauffer la croissance et l'industrie, tout en préconisant de nouvelles contraintes et de nouvelles taxes destinées à en freiner à tout prix le développement ?



Illustration : le vélo du sapeur Camember, encore autrement dénommé anémélectroreculpédalicoupeventombrosoparacloucycle, emprunté au site de la confrérie du Sapeur.

03 novembre 2015

Autumn: a dirge

Ainsi je m’abandonne au délicieux tangage
Des instants mordorés de ce jour automnal
Où le soleil ressemble à l'ultime fanal
Que le marin voir fuir au bout de son sillage.

Vers des jours ténébreux, obligé je m’engage,
Faits d’hivers et de froids, rien que de très banal,
Mais qui décidément met mon ardeur à mal
Et me fait douter même un peu de mon courage.

Pourquoi faut-il sans cesse un recommencement
Pour ponctuer le cours étrange de la vie ?
Ne suffirait-il pas qu'il soit un peu plus lent,

Comme le fil errant de cette rêverie
Qui s'attache à mêler présent et avenir
Et cherche à s'allonger pour ne jamais finir...

NB : cette poésie reprend le titre d'une oeuvre de Percy Bysshe Shelley (1792-1822)

30 octobre 2015

Big Brother Is Watching You

C'est fou comme d'une même réalité, il est possible de tirer des interprétations tellement opposées ! 
L'un des éditoriaux récents de La Lettre de Galilée, site web consacré au décryptage de l'actualité en santé, dresse un tableau édifiant en la matière, de l'arrivée des techniques de l'internet. Nous serions selon l'auteur, Philippe Rollandin, sur le point d'être ni plus ni moins livrés en pâture aux nouveaux géants de l'informatique, tels que Google, Doctissimo et autres assureurs privés, avides de colliger et de traiter à leurs seuls bénéfices, nos données individuelles, notre code génétique, tout notre patrimoine le plus intime en quelque sorte...

Pourtant, pour paraphraser le titre de l'article, en fait d'ubérisation de la santé, n'est-ce pas avant tout d'une étatisation dont il s'agit ?
En France, ce n'est pas compliqué, tout ou presque est désormais encadré, quadrillé soumis à la tutelle universelle et « bienveillante» du gouvernement. Du monopole étatisé, obligatoire de la Sécurité Sociale, à l'organisation hypercentralisée des soins, avec agences d'état à tous les niveaux, en passant par les plans quinquennaux des Schémas Régionaux d'Organisation des Soins (SROS), les régimes ubuesques d'autorisations d'activité et d'équipements, la planification de la formation, de la spécialisation et bientôt de l'installation des médecins...

Le pire est qu'on ne peut pas dire qu'il s'agisse de l’œuvre d'un pouvoir politique plutôt que d'un autre. Tous y ont contribué depuis des décennies avec la même ingénuité, avec la même ferveur, et sans dictature s'il vous plaît. A la seule faveur du consensus mou qui ramollit les esprits et transforme les élections en « piège à c... ». Le tout, assaisonné de leurres idéologiques qui voudraient faire croire au bon peuple « le plus éclairé du monde », mais aussi un des plus dépensiers en matière de santé, que celle-ci serait gratuite, qu'elle ne serait pas une marchandise, que le rapport coût/efficacité, on s'en tape, et que l'éthique et la morale peuvent se décréter en comité de salut public, ce dont les entreprises privées sont par nature, totalement dépourvues...

Force est de constater qu'année après année cette emprise étatique grandit. Il n'est que de voir la soviétisation molle des établissements de santé, dont la réforme Touraine en gestation et ses horribles Groupes Hospitaliers de Territoires constituent une nouvelle étape, les mutuelles d'entreprises obligatoires, les oppressantes campagnes de dépistages tous azimuts, le DMP (Dossier Médical Personnel), l'identifiant patient national, sans oublier la centralisation jalouse des bases de données médicalisées du PMSI (Programme de Médicalisation des Systèmes d'Informations).
Bref, en France, le Big Data sera d'Etat ou ne sera pas...

Heureusement qu'en définitive l'Internet lève un pan de cette chape étouffante, qu'il contribue à faire sauter quelques verrous, et qu'il s'attaque aux innombrables privilèges et rentes de situations que notre système a érigés pour protéger des gens ou des professions, qu'en réalité il asphyxie sous les charges, règles et taxes en tous genres.

En définitive, même s'il est à craindre que cela n'aille pas très loin, on peut se réjouir de voir l'herbe de la liberté fissurer le béton de la bureaucratie. De l'air, vite !

27 octobre 2015

Qu'est-ce que l'empirisme radical ?

La pensée philosophique de William James (1842-1910) est toujours des plus stimulantes. Frappée au coin du pragmatisme, elle se veut efficace et porteuse d'applications pratiques dans la vie quotidienne. Quoique son approche puisse apparaître au premier abord comme très « terre à terre », elle n'est pas dénuée de prolongements psychologiques très pénétrants et n'élude en rien les problèmes spirituels, notamment la force et le mystère de la foi (la volonté de croire).
En un mot, elle est assez humble pour se plier de bonne grâce aux réalités tangibles et suffisamment élevée pour intégrer quelques supputations métaphysiques.

Cependant, comme le titre de cet ouvrage le rappelle, le maître mot de cette philosophie reste avant tout l’expérience. C’est elle qui conditionne toute connaissance et tout progrès. C’est elle qui nous donne une idée du monde qui nous entoure. Et c’est d’elle que nous tirons tout ce qui peut nous être utile, et tout ce que nous jugeons vrai ici bas.
Cette conception empirique n’est pas réellement nouvelle puisqu’on la fait habituellement remonter tantôt à l’antiquité avec la Tabula Rasa d’Aristote, tantôt au Moyen-Age avec Guillaume d’Ockham et son fameux rasoir, ou bien encore à la Renaissance avec Francis Bacon et sa doctrine des Idoles de l’Esprit. On sait également qu’elle trouva ses développements les plus lumineux avec John Locke au XVIIè siècle et avec David Hume quelques décennies plus tard.

Qu’est-ce donc que l’empirisme radical auquel cet ouvrage, assez ardu, il faut bien le dire, fait allusion dans son titre ?
C’est en quelque sorte le règne  de “l’expérience pure” qui est ici consacré par le philosophe, mais encore ?
Précisons d’emblée qu’en matière d’expérience, William James va plus loin que Hume en affirmant que “Pour être radical, un empirisme ne doit admettre dans ses constructions aucun élément dont on ne fait pas directement l’expérience, et n’en exclure aucun dont on fait directement l’expérience.” En bref, ne rien ajouter à l’expérience, aucune croyance, aucune superstition, mais ne rien lui retirer non plus, dans la mesure où son champ serait universel.
De fait, James considère que font partie de l’expérience, outre les termes de l'expérience, également les relations qui l’entourent. Ce qui l’amène à préciser ce qu'il entend par là : “L’expérience pure est le nom que j’ai donné au flux immédiat de la vie, lequel fournit la matière première de notre réflexion ultérieure avec ses catégories conceptuelles…” et plus loin : “Le champ instantané du présent est à tout moment ce que j’appelle expérience pure.”

Vaste sujet sans conteste, mais il est indéniable qu’une telle conception déroute un peu celui qui considérait le pragmatisme comme quelque chose de simple, et qui comprenait l’empirisme comme étant le contraire du rationalisme !
En réalité, sans doute faut-il comprendre cette apparente dématérialisation du concept expérimental comme une tentative faite pour exprimer le fait que “les choses et les pensées ne sont point fondamentalement hétérogènes, mais qu’elles sont faites d’une même étoffe, étoffe que l’on ne peut définir comme telle, mais seulement éprouver, et que l’on peut nommer, si on veut, l’étoffe de l’expérience en général…”

L’intérêt de cette approche plutôt complexe, autant qu’on puisse en juger, est surtout de déboucher sur une conception originale de la conscience, qui fait partie intégrante pour James du monde, donc du champ de l’expérience, et qui de ce fait, n’est plus vraiment une “entité”, mais seulement une “fonction”. Cette fonction c’est de connaître...
Pour préciser sa pensée, James livre une comparaison selon laquelle “objets et conscience sont comme les pigments et le liant de la peinture." On pourrait en somme conclure avec lui que “La conscience n’existe pas en tant que telle, mais qu’elle se définit avec les choses avec lesquelles elle forment la même étoffe.”

Autour de cette ligne directrice, s’inscrivent toutefois des définitions ou assertions beaucoup plus nébuleuses. Par exemple, lorsqu’il explique que “le paradoxe de la même expérience qui figure dans deux consciences semble donc n’être en rien un paradoxe", et que "l’acquisition de la qualité consciente, de la part d’une expérience, dépend d’un contexte qui vient à elle", ce dont il découle que "que la somme des expériences n’ayant aucun contexte, ne peut en toute rigueur être dite consciente. C’est un Cela, un Absolu, une expérience pure sur une échelle gigantesque, indifférenciée et indifférenciable en pensée et en chose.” 

Gageons que ces écrits, rassemblés sous formes d’essais posthumes, auraient gagné à être mis en forme de manière un peu plus limpide par l’auteur si la destinée lui en avait laissé le temps...

Gardons en tout cas, quelques citations plus concrètes glanées de ci de là, telle celle qui stipule que “la conscience est atemporelle. Elle n’est que le témoin de ce qui arrive dans le temps, où elle ne joue aucun rôle.”
Ou bien des réflexions témoignant d’une conception empirique plus classique. Par exemple celle selon laquelle “Nous vivons vers l’avant mais nous comprenons à rebours”, celle en forme de pierre dans le jardin du rationalisme : “Toute vérité invérifiable est vaine, c’est à dire inutile ou dangereuse.”
Ou cette controverse “relativiste” qu’il eut avec John E. Russell, sur une réalité très triviale : “le pain nous nourrit-il parce que c’est un aliment ? Ou alors, est-ce un aliment parce qu’il nous nourrit ? Ou encore être un aliment et nourrir ne sont-ils que deux manières de nommer les mêmes évènements physiologiques ?"
Et pour finir : “C’est une chose pour une idée d’être vraie, c’en est une tout autre de prouver que cette idée est vraie.../… La vérité et la vérification sont par conséquent des choses différentes…”

En guise de conclusion, et de manière sans doute un peu trop simpliste mais tant pis, on peut être tenté de prendre en compte le désir exprimé par William James, derrière sa soif d’expérience “pure”, de comprendre l’humanisme “à la fois comme un théisme et un pluralisme”. Devant cette assertion lourde selon laquelle, sans conscience l'expérience n'est rien et réciproquement, qu’il soit donc permis de suggérer que l’empirisme repousse l’âme au delà de la conscience avec laquelle on a tendance à la confondre mais qu’il ne l’exclut pas, pas plus qu’il n’exclut Dieu… En somme, ce n'est que repousser les limites de la métaphysique.