En feuilletant distraitement le dernier numéro de l'Express, je tombe sur un entretien accordé à la revue par Jean-Noël Jeanneney, président de la Bibliothèque Nationale de France.
Ça commence plutôt bien car il commente avec enthousiasme le fabuleux développement de l'internet et cherche à convaincre des bienfaits des techniques de numérisation qu'il voit comme « un moyen de sauvegarder les livres », et « de mettre à portée de tous les richesses accumulées au long de siècles ».
Mais il émet aussitôt des réserves sur la manière d'y parvenir, critiquant sans ménagement l'initiative de Google, qui prévoit de numériser en 6 ans pas moins de 15 millions d'ouvrages.
On peut certes comprendre qu'il soit un peu frustré par l'ampleur du projet. Ça fait évidemment beaucoup par rapport à celui de la BNF, Gallica, qui propose à ce jour 80.000 livres en ligne et qui espère en produire désormais 120.000 par an.
En réalité, c'est la nature même de la démarche qui le chiffonne : Google, « c'est un environnement américain qui préside au choix des livres et à la manière de les présenter », « C'est le royaume du vrac », asservi « à une logique marchande », dans lequel « un algorithme aussi secret que la recette du Coca-Cola », privilégie quelques références « comme les têtes de gondoles dans les librairies ».
Mr Jeanneney est choqué et il enfonce le clou. Pour lui c'est clair, « si l'état ne surplombe pas le marché, la diversité culturelle sera écrasée ».
Curieuse manière de raisonner : il s'insurge contre « les grands monopoles » tout en constatant la profusion difficilement égalable de leurs offres, il craint la « loi du marché » qui présente en premier ce qui se demande le plus, et il en déduit étrangement que seul l'Etat, par ses serviteurs zélés, est capable de régenter l'univers culturel !
En citant le général de Gaulle : « Ne soyez pas aveugle en face du marché », il donne pourtant lui-même une clé intéressante. On a vu par le passé les ravages de la culture d'Etat. Le marché quant à lui, n'impose les choses qu'aux gens qui se les laissent imposer. Soyons éclairés et le marché le sera. Mais pourquoi donc abandonner à d'autres les choix qui nous incombent ?
Aujourd'hui même on pouvait lire dans la presse que la Commission de Bruxelles n'avait jamais enregistré autant de fusions d'entreprises qu'en 2006, plus de 345 ! Ce qui est habituellement salué comme un évènement heureux et encouragé par les Pouvoirs Publics, autant d'ailleurs pour les entreprises nationalisées que privées, ne laisse pas d'inquiéter. J'aimerais, en bon libéral jeffersonien que je suis, être certain que cette tendance concentrationnaire ne constitue pas un danger pour l'émulation et le progrès...
INDEX-PROPOS
Ça commence plutôt bien car il commente avec enthousiasme le fabuleux développement de l'internet et cherche à convaincre des bienfaits des techniques de numérisation qu'il voit comme « un moyen de sauvegarder les livres », et « de mettre à portée de tous les richesses accumulées au long de siècles ».
Mais il émet aussitôt des réserves sur la manière d'y parvenir, critiquant sans ménagement l'initiative de Google, qui prévoit de numériser en 6 ans pas moins de 15 millions d'ouvrages.
On peut certes comprendre qu'il soit un peu frustré par l'ampleur du projet. Ça fait évidemment beaucoup par rapport à celui de la BNF, Gallica, qui propose à ce jour 80.000 livres en ligne et qui espère en produire désormais 120.000 par an.
En réalité, c'est la nature même de la démarche qui le chiffonne : Google, « c'est un environnement américain qui préside au choix des livres et à la manière de les présenter », « C'est le royaume du vrac », asservi « à une logique marchande », dans lequel « un algorithme aussi secret que la recette du Coca-Cola », privilégie quelques références « comme les têtes de gondoles dans les librairies ».
Mr Jeanneney est choqué et il enfonce le clou. Pour lui c'est clair, « si l'état ne surplombe pas le marché, la diversité culturelle sera écrasée ».
Curieuse manière de raisonner : il s'insurge contre « les grands monopoles » tout en constatant la profusion difficilement égalable de leurs offres, il craint la « loi du marché » qui présente en premier ce qui se demande le plus, et il en déduit étrangement que seul l'Etat, par ses serviteurs zélés, est capable de régenter l'univers culturel !
En citant le général de Gaulle : « Ne soyez pas aveugle en face du marché », il donne pourtant lui-même une clé intéressante. On a vu par le passé les ravages de la culture d'Etat. Le marché quant à lui, n'impose les choses qu'aux gens qui se les laissent imposer. Soyons éclairés et le marché le sera. Mais pourquoi donc abandonner à d'autres les choix qui nous incombent ?
Aujourd'hui même on pouvait lire dans la presse que la Commission de Bruxelles n'avait jamais enregistré autant de fusions d'entreprises qu'en 2006, plus de 345 ! Ce qui est habituellement salué comme un évènement heureux et encouragé par les Pouvoirs Publics, autant d'ailleurs pour les entreprises nationalisées que privées, ne laisse pas d'inquiéter. J'aimerais, en bon libéral jeffersonien que je suis, être certain que cette tendance concentrationnaire ne constitue pas un danger pour l'émulation et le progrès...
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