Avec son air d'aimable plouc rêveur, il n'avait pas son pareil pour se délester sans en avoir l'air, d'incroyables lignes mélodiques, mélange de bends montant jusqu'au ciel comme des gémissements idéals, et d'harmoniques stridulantes déchirant avec délectation les tripes, le tout dans un style aérien, foisonnant de frénétiques "chicken pickin" .
Dans sa fabuleuse reprise de Hey Joe, même après avoir entendu Jimi Hendrix, on ne peut qu'être subjugué par les sublimes envolées suraiguës, ponctuées de brutales descentes en vibrato, au sein desquelles il place quelques mots à peine chuchotés, sortis en ruminant de sa barbe nonchalante.
Hélas, il ne resta pas longtemps au meilleur de sa forme. L'alcool, les frustrations, la pression médiatique et commerciale instillèrent progressivement en lui un poison mortel, qui l'usa prématurément.
Il galvauda souvent son talent, erra dans d'obscures et sordides impasses, ternissant parfois même sa nature de gentil garçon.
Au cours d'une soirée trop arrosée, un peu trop d'excitation, et il finit au poste de police, en cellule de dégrisement. C'est là que le 14 août 1988, à l'issue d'un raptus inopiné, profitant d'un moment d'inattention de ses geôliers, il se pendit avec sa chemise... Il avait à peine 49 ans.
A porter à son crédit, il reste quelques bribes du Paradis qu'il crut peut-être entrevoir par instants.
Avec ces images ressurgies du passé, on pourrait presque les palper au bout de ses doigts, le long des cordes torturées de sa guitare : Roy's Bluz, Sweet Dreams, The Messiah...
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