Dans la récente prestation télévisée du chef de l'Etat, ce qui frappait, ce n'était pas tant le fond que la forme.
Car en somme, on n'a pas appris grand chose d'essentiel à l'issue de ce speech, censé commenter un remaniement ministériel de pure circonstance.
En revanche, l'exercice a permis de constater une fois encore, la sclérose de notre pays, aussi frondeur que conservateur.
Après un début de mandat quelque peu "exotique", les gardiens du protocole ont tout lieu de se réjouir : le président est revenu par la force de médias bégueules, à un style ultra-classique : costard sombre, cravate bleu de prusse, décor laqué du palais élyséen, ton calme, policé, très politiquement correct (il a même rendu un hommage veule et immérité aux syndicats...).
Face à lui, se recroquevillait une brochette de journalistes amidonnés, dont la préoccupation essentielle semblait de tout faire pour ne pas rentrer au cœur des problèmes. Craignant sans doute de passer pour des "laquais", ou des "larbins" ils ont tenté tour à tour de déstabiliser l'auguste interviewé, par des artifices aussi torves que dérisoires. Mais ils en ont été pour leurs frais, faisant plutôt figures de dindons de la farce. Très en forme, et à l'aise dans ce jeu, Nicolas Sarkozy s'est joué de leurs questions, supposées embarrassantes mais dans l'ensemble très futiles, et il s'en est servi avec délectation pour lustrer son discours.
On se souvient, il n'y a pas si longtemps, de la remarque aussi audacieuse que stupide de Patrick Poivre d'Arvor comparant Nicolas Sarkozy à "un petit garçon fébrile dans la cour des grands".
Le niveau n'était guère meilleur ce 16 Novembre, tant le but du jeu restait d'asticoter le président sur des bricoles dont tout le monde parle, mais sans vrai rapport avec les difficultés réelles rencontrées par le pays, lesquelles furent systématiquement abordées par le petit bout de la lorgnette.
Un des clous du spectacle fut l'interpellation insistante des journalistes au sujet des ordinateurs volés dans les salles de rédactions de certains journaux, attirant cette réponse sarcastique, du berger à la bergère : "Pensez-vous vraiment M. Pujadas, que je doive m'en occuper personnellement ?".
Le plus croustillant, on le trouva toutefois dans les réactions rituelles qui suivirent l'intervention.
Évidemment à l'UMP on était satisfait. Rien d'étonnant et pas grand chose à redire.
Au centre "d'opposition", M. Bayrou trouvait que Nicolas Sarkozy avait "beaucoup parlé de lui" et qu'il n'avait pas de "stratégie crédible pour remettre de la production en France ". Bigre. Pour un peu on aurait dit qu'il faisait son autoportrait...
Un mot au sujet de Cécile Duflot, raillant ce qu'elle jugeait comme la mise au rebut du Grenelle de l'Environnement : "L'écologie c'est pas une mode, la crise climatique, l'augmentation du coût de l'énergie, c'est une réalité". Interpellée sur le plateau d'Arlette Chabot le lendemain par M. Daubresse, à propos de l'indigence des mesures prises en son temps par Dominique Voynet, elle fut contrainte d'avouer que cette dernière s'était trouvée "bien seule" dans le gouvernement Jospin...
La palme est cependant revenue à cette décidément balourde de Martine Aubry parlant "d'un président en panne", "déboussolé". Non seulement la critique pourrait aussi bien s'appliquer au PS, complètement à la ramasse depuis des années, mais elle était particulièrement mal venue en la circonstance. Le chef de l'Etat est apparu en effet plutôt en verve, expliquant de manière à la fois détendue et déterminée les raisons de ses décisions, et annonçant au passage deux nouveaux chantiers de réformes (dépendance, fiscalité). Au surplus il s'est payé le luxe, comme pour repousser toujours plus le PS dans l'impasse de gauche, de s'appuyer pour valoriser son action, sur des expériences socialistes "éclairées", du passé (Rocard) ou de l'Etranger.
Moralité : Bien qu'impopulaire, et loin d'être intouchable, Nicolas Sarkozy ne devrait pas avoir trop de souci à se faire, face à des gens aussi versatiles, inconséquents et si peu imaginatifs...
4 commentaires:
pitoyable mascarade en effet ! face à ces "journalistes" inconsistants, Denisot en tête !!! Ramone
Aux Etats-Unis "le presse" est devenu une blague aussi. C'est inutile d'écouter le TV ou lire le journal. Ils sont devenu un voie politique. Il faut découvrir les sources, le CSPAN, ou visiter le "think tanks" pour écouter pour soi même les pensés en direct dans un ambiance poli.
@ Ramone : merci de tes amicales et réconfortantes remarques.
@ Jeff : Hélas, il y a tellement de bonnes choses en Amérique, mais tout ce qui s'y fait n'est pas à imiter...
Je commente bien tard ce billet ; mais je te rejoins sur la vision que tu as de l'évènement. Ce qui est ressorti avant tout, c'est l'extraordinaire nullité des journalistes / présentateurs...
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