07 février 2007

Le bazar bizarre des Beaux-Arts

Le centre Pompidou vient de fêter ses 30 ans.
Ce musée s'inscrit-il comme la manifestation d'une sincère volonté novatrice ou plus prosaïquement celle d'une certaine « branchitude » politique ?
Le président Pompidou n'était pas vraiment ce qu'on peut appeler un m'as-tu-vu avide de gloriole, il faut donc lui rendre cette justice : il crut probablement bien faire en tentant hardiment de réaffirmer la prééminence malmenée de Paris en tant que capitale artistique.
Il y réussit au premier abord si l'on s'en tient à la fréquentation de cette nouvelle Mecque des arts. Deux cents millions de visiteurs en trois décennies, on ne peut pas dire qu'il s'agisse d'un caprice réservé à quelques snobs.
Est-ce encore de l'art pour autant ?
Cette notion est si galvaudée de nos jours qu'il s'avère difficile de se prononcer. A l'évidence, le pouvoir d'attraction des manifestations dites artistiques relève davantage de la curiosité que de la quête spirituelle.
Le musée accueille en ce moment une exposition consacrée à Tintin. Même s'il on s'avoue sensible au charme dégagé par les bandes dessinées d'Hergé, il semble tout de même difficile d'y voir l'expression de l'indicible.
J'entendais il y a quelques jours Dominique de Villepin s'extasier devant les monumentales tâches noires de monsieur Soulages. Il voyait derrières ces griffures obscures, la lumière « éclater » et vantait dans le style pompier qu'on lui connaît, la sublime beauté de ces contrastes assez répétitifs.
D'autres se confondent en extase au sujet du bleu monochrome dont Yves Klein barbouillait avec jubilation tout ce qui lui tombait sous la main. Ou bien devant les géniales roues de bicyclettes de Duchamp, ses urinoirs rebaptisés « fontaines », ou encore les « installations » bancales, de feutre de métal et de graisse conçues par Joseph Beuys.
Les exemples foisonnent de ces machins sans âme, où le procédé l'emporte sur l'inspiration. Remarquez comme chaque artiste paraît de nos jours avant tout animé du désir de s'originaliser, de trouver sa marque de fabrique qui sera ensuite déclinée de manière pléonastique.
L'empreinte de la civilisation industrielle et du matérialisme de la société occidentale a bon dos.
Il n'y a dans tout cela guère d'émotion, et rien ne porte vraiment à l'élévation comme le chantait Baudelaire.
Du bâtiment, qui fit tant couler d'encre, que penser ?
Avec le recul, l'oeuvre des architectes Piano et Rogers n'est ni belle ni laide, ou bien les deux à la fois, selon l'angle sous lequel on la regarde. Assez ordinaire pour tout dire.
Elle emprunte ses matériaux, sa conception aux techniques industrielles. On l'appela d'ailleurs par dérision la "raffinerie", "l'usine à gaz", "Notre Dame des tuyaux"...
Après 30 ans, l'impression reste la même, mitigée.

L'audace paraît bien tiède quand on la compare au musée Guggenheim de Bilbao. Quant au rayonnement, il n'éclipse pas celui du MOMA.
Donc Pompidou et l'Etat tentaculaire, omniscient n'ont ni bien ni mal fait. La révolution promise a fait long feu et Beaubourg apparaît avant tout comme une sorte de bazar culturel bigarré, bien achalandé mais sonnant le creux, comme sa tuyauterie.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Good words.