19 avril 2010

Quand sonne la retraite...

C'est peu dire que la situation du système des retraites en France s'apparente à une vraie Bérézina.
Par refus d'anticiper les évolutions démographiques, par crispation sur l'invincibilité d'un modèle réputé idéal, c'est la déconfiture généralisée qui se profile désormais juste devant nous... Déjà 30 milliards d'euros de déficit annuel, à l'instant présent, et jusqu'à 115 par an d'ici 4 décennies d'après les scénarios les plus sombres.
Que peut-on espérer de la perspective d'une refonte, annoncée à grands renforts médiatiques, mais venant après tant de tentatives avortées ?

Aujourd'hui, le premier ministre insiste sur la nécessité d'une « réforme structurelle » et annonce un « débat sans tabou ».
Pourtant, dans le même temps, il réaffirme envers et contre toute logique, son attachement aux vieux principes : "Le système par répartition est au coeur de notre solidarité et de notre pacte républicain. Nous devons le sauvegarder. C'est ça, la priorité, pas de disserter sur un changement radical d'organisation du système auquel je ne crois pas" (Nice Matin).

Comment peut-on rester arcbouté sur un tel statu quo, alors que l'évidence saute aux yeux de tout le monde : avec à peine plus d'un d'un actif par retraité à l'horizon 2040, peut-on vraiment parler de solidarité ? Aujourd'hui certains retraités touchent davantage que les personnes censées payer pour eux, et qui occupent un emploi équivalent à celui qu'ils avaient lorsqu'ils étaient en activité ! Est-ce politiquement responsable de continuer à faire semblant de croire aux vertus d'une telle organisation, responsable à 100% du désastre, annoncé depuis des années et qui est en train de se concrétiser ?
Il y a une bonne dose d'irresponsabilité et d'hypocrisie à entretenir ainsi un mythe aussi fallacieux. Il n'est que d'interroger autour de soi. Qui  donc voit clairement le montant astronomique des cotisations qu'il paie, sachant que la partie la plus lourde est inapparente, car supportée par l'employeur ? Qui a vraiment compris que les cotisations engrangées ne sont pas destinées à financer sa propre future pension mais celle de retraités actuels ? Qui accepte en toute connaissance de cause, de courir le risque que personne ne soit là pour payer pour lui lorsque l'heure du départ sera arrivée ?
En réalité, même si les Français n'ont pas pleinement conscience de cette mystification, le montant colossal de leur épargne volontaire, notamment au titre de l'Assurance Vie, témoigne de leur manque de confiance. Probablement craignent-ils confusément de faire partie de la génération sacrifiée par cette pyramide spéculative à la Madoff...

La nouvelle réforme risque donc fort de s'inscrire dans le pseudo consensus idéologique, alimenté par les diktats démagogiques des partis politiques et des syndicats. A la manière des nombreux ersatz de rénovation vus par le passé, il y a fort à parier qu'elle se contentera de jouer sur les seuls trois leviers qu'autorise la machine : augmentation de la durée et du montant des cotisations, diminution des pensions... Enthousiasmante perspective !
Comme cela ne suffira probablement pas, de nouvelles mesures « sociales » verront sans doute le jour, utopiques ou bien aggravantes : faire payer les riches, taxer les profits des entreprises, pénaliser les banques, créer des impôts supplémentaires et paradoxalement attaquer les « niches fiscales », dont certaines font pourtant partie de la solution !

Pourquoi donc est-il aussi affreux d'envisager de recourir à d'autres formes de financement, au moins sous forme de complément ?
Le mot diabolique est capitalisation. Il est imprononçable sous peine de se faire littéralement lyncher en paroles, et traiter d'ultra-libéral fanatique, alors que la plupart des pays développés y ont pourtant recours (l'Allemagne depuis près de 10 ans).
Le pire est qu'en France même, cette solution existe, de manière détournée, sous le manteau en quelque sorte.

Hormis les placements d'épargne classiques, deux alternatives prospèrent en effet sur le mode de la capitalisation, consistant à épargner en vue de sa propre retraite :
-Le seul fonds de pension officiellement autorisé, et paradoxalement réservé aux fonctionnaires : la PREFON. On peut en rapprocher les PERP (Plan d'Epargne Retraite Populaire), créés, par.. M. Fillon en 2003 !
-L'Assurance vie, « placement favori des Français », qui permet de se constituer une épargne modulable, une rente ou un capital pour ses vieux jours.

Il y a toutefois quelques différences en terme de modalité de gestion des sommes épargnées.
La Préfon, gérée par les syndicats (CFDT, CFTC, CGE-CGC, FO) est sur son créneau, en situation de monopole. Plus ennuyeux, elle fonctionne en définitive comme un système de retraite classique : les sommes versées sont bloquées jusqu'au moment de la retraite, la sortie se fait uniquement sur le mode de la rente et n'est pas convertible en capital cessible par héritage.
L'Assurance Vie est quant à elle très souple. L'épargnant a le choix de l'assureur au sein d'une profession largement représentée. Il décide du type d'investissement (unités de compte, obligations, actions...), a toute souplesse pour choisir les modalités de versement (périodiques, ponctuels, constants, variables..). Il peut retirer de l'argent à tout moment en cas de besoin. Surtout, il se constitue un capital producteur d'intérêts annuels, qu'il peut transmettre à ses héritiers, ou bien transformer en rente.

Comparativement, il n'est pas besoin d'un examen approfondi pour mesurer la différence en terme d'efficacité sur le long terme, entre ces deux systèmes :
Un seul exemple, calculé par le site de la Prefon lui-même : vous avez 35 ans et versez 150 euros par mois jusqu'à l'âge de 65 ans (l'équivalent d'un paquet de cigarettes par jour), vous pouvez espérer une rente de 3255 euros par an. En plaçant la même somme sur un contrat d'Assurance Vie, de père de famille (4%/an d'intérêts), vous aurez acquis un capital de plus de 100.000 €, qui vous procurera au seul titre des intérêts, plus de 4000€ par an... Même en intégrant la déduction fiscale consentie aux versements effectués à la Préfon, et à condition que l'Etat cesse de rogner les quelques avantages qu'il avait accordés aux plans d'assurance vie, il n'y a pas photo, comme on dit.

En définitive, le système d'épargne représenté par l'Assurance Vie, illustre à merveille la puissance et l'efficacité du système si honni de capitalisation. Il responsabilise l'épargnant, en fait un acteur de la vie économique de son pays, et l'incite, plutôt que de dépendre de ses descendants pour toucher sa pension, à leur laisser au contraire un patrimoine ! Enfin pour lui-même, il a la possibilité de moduler son épargne et d'en user à bon escient, et à l'âge de son choix.
Comment peut-on encore prétendre qu'il s'agisse d'une solution égoïste, non solidaire, irresponsable, cupide ? C'est là la vraie question...
Hélas, même si les Gouvernants se mettaient à manifester un peu plus de courage et de pragmatisme, même si l'aveuglement idéologique cédait enfin la place au bon sens, il resterait un problème : comment éviter qu'une génération soit littéralement sacrifiée, obligée de payer pour ses ainés tout en supportant le poids de ses propres responsabilités ?

1 commentaire:

c'est Jeff ici a dit…

I have not had time to carefully read the entire post but the last paragraph aptly describes what is happening here in the United States.