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10 décembre 2009

Napoléon Obama


Le 8 décembre étaient réunis chez Frédéric Taddeï, un joli plateau de beaux esprits pour discuter entre autres, de la stratégie afghane de Barack Obama.
Inutile de dire qu'elle se heurta ce soir là, comme souvent la politique américaine, à une hostilité générale.
Passons sur le discours assez confus du philosophe radical, plus ou moins marxisant, Jacques Rancière. Sur le sujet il se déclara de toute manière incompétent. Tout comme les écrivains "de gauche" (ils s'en vantent), Philippe Besson et Saphia Azzedine.
Dominique de Villepin, quant à lui épancha ses convictions les plus profondes, à l'occasion d'une longue et onctueuse digression dont il a le secret. Naturellement il dit surtout ce qu'il ne fallait pas faire et resta très évasif quant aux propositions d'actions concrètes...
Il faut dire que pour lui l'affaire est réglée comme du papier musique : l'opération afghane ne peut désormais plus être autre chose qu'un échec. Reprenant une antienne bien connue, dans ce conflit qui s'éternise, l'Occident selon lui s'embourbe. Tous les symptômes du désastre vietnamien sont réunis. Les contingents militaires sont ressentis comme des forces d'occupation par la population. Pire encore : faute d'avoir mis en place une « coopération sociale et culturelle », et à cause de la « méconnaissance des réalités locales », et de « l'injustice que nous faisons régner », « nous contribuons à entretenir la corruption ».
C'est bien simple, « en croyant agir pour le bien, c'est le mal que nous faisons... »
Pour ce Politique si audacieux, il faut donc partir au plus vite, afin d'aiguillonner le gouvernement afghan pour qu'il s'organise vraiment, en espérant que les pays avoisinants deviennent « acteurs et partenaires » d'un hypothétique renouveau régional.
Le clou de la soirée fut toutefois l'intervention de Jean Tulard, qui argua de son statut d'historien pour tenter de convaincre un auditoire quasi conquis d'avance. Ça tombait bien, l'autre partie du débat devait porter sur le projet d'abandon de l'enseignement de l'Histoire en classe de terminale !
De manière un peu prétentieuse, il commença par se lamenter sur le fait qu'à l'évidence et pour son malheur, le président américain n'avait lu ni ses livres à lui, ni ceux de M. de Villepin.
Pour M. Tulard en effet, le parallèle avec l'expédition espagnole de
Napoléon s'impose clairement. Pas plus que ce dernier, Obama ne peut gagner, car les analogies foisonnent à ses yeux : Napoléon en Espagne « apportait les principes de la révolution et la démocratie »... mais à la force des baïonnettes. Il installa un gouvernement à sa botte; il rencontra des difficultés liées à un terrain accidenté et montagneux, et pour finir une rébellion armée par des puissances étrangères, en l'occurrence l'Angleterre.
Evidemment tout ça peut faire mouche au premier abord.
Mais au fond même si, comme le fit remarquer finement M. de Villepin, « les mêmes causes produisent souvent les mêmes effets », l'Histoire se répète rarement à l'identique. Ça serait un peu trop facile.
Premièrement M. Tulard dans son élan, se livre à quelques approximations et raccourcis. Prétendre que Napoléon était porteur de la démocratie est un peu fort de café. Certes, comme il le dit, il supprima l'inquisition, abolit les droits féodaux, et ferma les couvents, mais est-ce suffisant pour faire d'un dictateur un vrai démocrate ?
Comparer d'autre part, le népotisme de l'Empereur, qui plaça sur le trône d'Espagne son propre frère Joseph, avec les conditions qui ont permis l'accès d'
Hamid Karzaï au pouvoir à Kaboul, est également excessif, en dépit d'une réélection entachée d'irrégularités.
Enfin, même si la guérilla en Afghanistan est sans doute alimentée de l'extérieur, aucune nation n'apporte officiellement son soutien armé aux Talibans. Autre différence notable, les armées de l'Empire se livraient en Espagne à une vraie agression. Faut-il le rappeler, la coalition en Afghanistan, répond à l'horreur du 11 septembre 2001, et aux actions terroristes menées par les Talibans et leurs amis. D'ailleurs il faut souligner que Napoléon était très isolé face à une coalition internationale, tandis que c'est l'inverse pour Obama, même si hélas, ses alliés manquent singulièrement de détermination.
Non content de sa démonstration, Jean Tulard va encore plus loin, en évoquant par contraste avec les infortunes napoléoniennes, le succès de l'expédition française de 1823 pour rétablir sur son trône, Ferdinand VII malmené par les Cortès à dominance libérale. Mais d'emblée, ce féru d'Histoire commet une imprécision, en faisant référence au Congrès de Vienne, alors que l'intervention fut décidée par le Congrès de Vérone. Surtout, il oublie de mentionner qu'elle n'était pas une initiative isolée, mais le fruit d'une coalition internationale, placée sous l'égide de la Sainte-Alliance. Ce qui n'empêcha pas Chateaubriand, qui était alors le ministre des Affaires Etrangères, de s'en attribuer sans vergogne comme à son habitude le mérite : «Enjamber d'un pas les Espagnes, réussir là où Bonaparte avait échoué, triompher sur ce même sol où les armes de l'homme fantastique avaient eu des revers, faire en six mois ce qu'il n'avait pu faire en sept ans, c'était un véritable prodige !» ( Mémoires d'Outre Tombe).
Ce fut certes un succès facile, mais peu glorieux et en tout cas impopulaire en Espagne, puisqu'il s'appuya sur les forces les plus rétrogrades du pays, et qu'il permit au roi rétabli dans ses prérogatives, de se livrer à des représailles sanglantes sur les élus du peuple.
Dernier point discutable, Jean Tulard laisse entendre que l'expédition fut pacifique ce qui est faux. Elle nécessita la mise sur pied d'une armée de 100.000 hommes, « prêts à marcher en invoquant le nom de Saint Louis pour conserver le trône d'Espagne à un petit-fils d'Henri IV », pour reprendre l'exclamation de Louis XVIII. Autrement dit un vrai « surge »... Précisons également qu'après la victoire, il fallut laisser sur place un contingent de 45.000 hommes durant 5 ans, jusqu'en 1828...
Tout ceci montre qu'en matière d'analogie historique, la prudence devrait être la règle. S'il faut tenir compte des enseignements du passé, rien n'est jamais écrit à l'avance et l'art du copier-coller peut s'avérer très vain.
Le succès de l'intervention afghane dépendra surtout de la capacité du peuple et de ses dirigeants à s'organiser, et de la conviction et de la détermination dont fera preuve la coalition internationale.
Il est vrai, s'agissant du Vietnam, que l'aventure s'est terminée par un échec cuisant. Ce n'est pourtant pas d'un manque de légitimité que les Américains, à l'époque très seuls hélas, ont le plus souffert, mais d'une stratégie trop hésitante, et d'un mouvement d'opinion international dévastateur, orchestré de main de maître par la propagande soviétique. Le malheur de ce pays (et du Cambodge à la suite), n'a en tout cas, pas été causé par la présence occidentale mais avant tout par son retrait, brutal et définitif. En revanche, là où la détermination fut plus forte, comme en Corée et à Taiwan, les populations n'eurent qu'à s'en féliciter.
En tout état de cause, déclarer comme on l'entend si souvent, qu'il est strictement impossible d'imposer la démocratie par la force, est un non sens absolu. L'exemple de l'Allemagne et du Japon, entre autres, sont là pour en témoigner...
PS : La pétition subite au secours de l'enseignement de l'Histoire en terminale S me suggère dans le contexte plus général de l'enseignement classique, l'image de jardiniers zélés, accourus pour prendre soin d'un petit arbuste moribond dans un champ de ruines. Autour, ils semblent ne pas voir que rien n'a survécu et que tout est à reconstruire...
Quand même : quel est le conseiller qui a soufflé au ministre de promouvoir une telle mesure ?

08 décembre 2009

Retour de boomerang


L'actualité dans ses fantaisies et sa versatilité renvoie parfois de drôles de hoquets au visage des adeptes de l'Histoire à sens unique.

Alors que s'ouvre le sommet international de Copenhague, le débat sur le climat prend un tour nouveau. Hormis la voix isolée de Claude Allègre, on n'entendait en France depuis quelques années qu'un seul son de cloche, véhiculé par le biais de personnalités très médiatisées ou par la bouche des politiciens, tous plus ou moins enclins au suivisme démagogique. Une cloche quant à elle alarmiste, puisqu'elle sonne tous azimuts le tocsin de la fin du monde prochaine, en l'attribuant aux méfaits du progrès scientifique et économique.
Et puis tout à coup, à l'occasion de fuites en provenance du site internet d'une université influente, on prend conscience que ce discours reposait en partie sur un gigantesque bluff. Première révélation, le fameux GIEC qui soi disant s'inspirait des travaux convergents de l'immense majorité des scientifiques mondiaux, prenait en pratique ses informations à une source quasi exclusive, celle du Centre de Recherche sur le Climat de l'université britannique d'East Anglia !
Et quelle source ! Peu scrupuleuse sur l'objectivité, elle « arrangeait » manifestement les constats scientifiques pour qu'ils puissent coller au mieux à la thèse dominante. Les chercheurs convertis à la nouvelle religion écologique, mettaient en somme de côté les évidences scientifiques qui les dérangeaient, à la manière de ceux qui opposaient aux découvertes de Pasteur, le credo de la génération spontanée. De fait, l'argument massue mille fois lu et entendu, ressemblait étrangement à celui des docteurs d'autrefois, faisant foi scientifique d'un consensus, qui dit en substance : « Plusieurs milliers de chercheurs pensent la même chose, à savoir qu'il y a un réchauffement climatique, qu'il est forcément néfaste et qu'il a 9 chances sur dix d'être lié à l'activité humaine. » CQFD.
Coïncidence,
un sondage réalisé avant cet épisode, et publié par le magazine The Economist, révèle que les mentalités sont justement en train de changer. La question posée était : "Faut-il privilégier la protection de l'environnement au prix d'une baisse de la croissance économique, ou bien donner la priorité à cette dernière au risque de dégrader l'environnement". Depuis 1999 la première option de l'alternative était préférée par la majorité des sondés, en 2009 les proportions s'inversent (Gallup).
Évidemment, faut-il le préciser, la réponse qui s'impose, et qui n'est pas proposée au choix, se situe au milieu, consistant à trouver un compromis entre la croissance et le respect de l'environnement...
Certes la Crise qui est une réalité tangible, a tendance à influencer les avis, pourtant, il n'était pas vraiment besoin de cette affaire de mails détournés pour douter de la véracité du nouveau diktat malthusien, prônant la décroissance. Avec force arguments, certains pointaient déjà depuis quelque temps, les
méthodes peu rigoureuses des tenants du réchauffement climatique. Il n'est d'ailleurs que de voir le comportement outrancier et sectaire des militants de Greenpeace, qui encore dernièrement n'ont pas hésité à prendre d'assaut l'Assemblée nationale, pour mesurer le degré de fanatisme atteint par certains écologistes. Ils discréditent leur cause bien plus qu'ils ne la défendent.
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La votation suisse sur les minarets, envoie dans les gencives des tartufes de la démocratie, le verdict de l'opinion publique. Du coup, ceux qui il y a peu, brandissaient victorieusement les résultats du référendum européen à l'appui de leur philosophie, se mettent tout à coup à douter du bien fondé du scrutin populaire et nient purement et simplement ses enseignements. Vérité en deçà des Alpes, erreur au delà...
Il est bien connu que chez nous, où le bon sens prévaut, « la question ne se pose même pas », pour reprendre les termes de M. Colombani sur France Inter le 4 décembre. Et de citer à l'appui de sa démonstration le débat escamoté sur la peine de mort. Sur un vrai sujet de société, la question n'a effectivement pas été posée, au simple motif qu'on redoutait que la réponse ne soit pas politiquement correcte. On a donc préféré imposer le principe de l'abolition par la force des godillots des « élus de la république », et pour être à peu près certain qu'il ne puisse jamais être rediscuté, le graver dans le marbre de la Constitution. Curieuse conception de la démocratie...
Évidemment, la radicalisation du débat religieux est inquiétante. Mais en l'occurrence, qui a peur de qui et qui rejette qui ? La vraie question est sans doute de savoir pourquoi et comment on en est arrivé là. Plutôt que de jeter l'opprobre sur le peuple, plutôt que de s'insurger contre le poujadisme de certains politiciens, il conviendrait d'affronter la réalité sans tabou ni a priori. Aux yeux d'une quantité croissante de gens, l'islam apparaît sous un jour de plus en plus intolérant, dogmatique et conquérant. La plupart des pays à dominance musulmane affichent sans vergogne leur mépris pour les autres croyances et veulent ériger les leurs comme lois de gouvernement. Il y a de quoi s'alarmer. Il est plus que temps pour les Musulmans raisonnables de parler clairement et de montrer leur ouverture d'esprit qui conduira à chasser ces craintes dignes du Moyen Age.
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Enfin, la problématique de l'Afghanistan revient elle aussi en boomerang. Les défaitistes et pacifistes qui exigeaient de la coalition internationale qu'elle quitte au plus vite ce pays, et qui déclaraient que cette guerre « n'était pas la leur », sont brutalement désavoués par celui en qui ils voyaient le chantre universel de la paix.
Avec la décision d'y envoyer un contingent de 30.000 hommes supplémentaires, c'est un triplement des effectifs que le nouveau président américain aura ordonné depuis son élection ! Ils étaient 35.000 il y a un an, ils seront près de 100.000 soldats sous peu.
On pourrait s'amuser de la modération des réactions en provenance de ceux qui auraient agoni d'injures George W. Bush s'il avait fait la moitié de ce que met en oeuvre son successeur. On pourrait être dubitatif devant la stratégie qui consiste à accroitre très progressivement la présence militaire, et les hésitations à prendre les décisions en les accompagnant de moultes précautions de langage, qui pourrait
rappeler le Vietnam sous Johnson. On pourrait s'interroger sur le besoin éprouvé par M. Obama de préciser à l'avance la date de repli de ces troupes. S'il s'agit comme il le soutient, d'un objectif vital, comment peut-il être certain de pouvoir si rapidement s'en désengager ?
On pourrait enfin savourer à sa juste valeur l'appel pressant des USA à l'Europe pour envoyer conjointement un renfort d'au moins 7000 hommes. Comment va réagir la France qui adule tant le président américain ?
Objectivement, l'Afghanistan ne peut être abandonné après tous les efforts consentis pour le libérer de l'oppression des Talibans. Et à l'évidence, plus le nombre de nations engagées sera grand, plus forte sera la légitimité de la présence militaire. Le choix de M. Obama est donc logique et pas trop surprenant, sauf pour les gogos prompts à s'enticher de n'importe quelle faribole pour peu qu'elles soit couverte d'effets de style clinquants...
En définitive, il est assez clair que toutes ces problématiques tireraient meilleur profit d'une approche raisonnable, modérée, réfléchie, plutôt que des excès partisans, des a priori et des certitudes erronées, inhérentes aux idées reçues, qu'on entend trop souvent...

18 juillet 2009

L'âme du jasmin et la vanité du Monde


Cette année notre jasmin semble avoir décidé de livrer toute la quintessence de son âme de fleur. Est-ce le fait de lui avoir fait goûter l'air frais du dehors pendant quelques semaines ? Est-ce l'effet des belles journées qui ont salué par ici l'arrivée de l'été ? Toujours est-il qu'il est couvert depuis quelque temps d'une magnifique floraison blanche dont les effluves nous envahissent dès le matin. Ah ce parfum entêtant mais enivrant qui paraît venir d'un autre monde... Il pourrait presque, à l'image du mythique népenthès, noyer dans un doux oubli les soucis et peines du quotidien...
Depuis notre retour d'Amérique je dois pourtant dire que je suis presque indifférent aux choses de l'actualité. Ce n'est pourtant pas qu'elle soit creuse mais elle me semble de plus en plus vaine.
Que s'est-il passé durant ces derniers mois qui vaille d'être retenu ?
Sont-ce les élections européennes qui témoignent une fois encore de la médiocrité du débat politique dans notre pays ? Un parti socialiste à bout de souffle incapable d'émettre la moindre idée neuve, cramponné à une idéologie déliquescente. Un soi-disant Centre situé en fait au milieu de nulle part, et qui s'engloutit dans le délire monomaniaque d'un chef aussi creux et infatué qu'obtus. Des extrêmes en morceaux ressassant opiniâtrement leurs vieilles haines recuites et leur sombre ritournelle d'imprécations revanchardes. Enfin, le parti du Président, bien rangé, qui lui non plus ne brille pas par l'originalité, mais dont l'apparente unité s'avère en définitive le meilleur argument électoral. Ah, j'oubliais cette subite flambée écologique dont les médias se gargarisent avec délectation. Le tour fut assurément bien joué par ce vieux renard de Cohn-Bendit, mais faut-il voir dans le conglomérat hétéroclite qui s'agite aux basques de l'ex-révolutionnaire d'opérette autre chose qu'une habile farce sans lendemain ?
Pendant ce temps, le gouvernement fait mine d'agir, mais on s'interroge sur le bien fondé des quelques mesures engagées de ci de là sans ligne stratégique claire. Plus grave, les dernières lois promulguées font craindre un nouveau renforcement de la bureaucratie. Ainsi en est-il par exemple des textes ruisselant de bonnes intentions baptisés emphatiquement HADOPI pour la protection des droits des artistes et HPST pour la nième réorganisation de l'Hôpital. Leur infernale complexité, et l'invraisemblable arsenal administratif sur lequel elles appuient leurs objectifs grandiloquents sont de fort mauvais augure.
D'une manière générale, la crise a hélas réduit à néant tout embryon d'audace, tout pragmatisme et tout esprit critique. Après avoir une fois encore sacrifié le libéralisme sur l'autel de la Justice Sociale, l'Etat est revenu plus fort que jamais, et tout particulièrement sa fâcheuse tendance à dépenser sans compter. Non content d'avoir approfondi dramatiquement la dette du pays, non content d'avoir négligé toute rigueur en laissant flamber les déficits, voici qu'il propose un grand emprunt, sans même donner l'impression d'avoir une idée de ce qu'il pourrait bien en faire ! Au point d'estimer indispensable de mettre sur pied une commission chargée de déterminer à quoi l'hypothétique manne devrait être dépensée ! Et en y mettant à sa tête deux des plus calamiteux représentants du microcosme technocratique. On croit parfois rêver...
Et le Monde dans tout ça ?
Il tangue au gré de la Crise. Partout les dettes se creusent. A la fin de l'année, Barack Obama aura multiplié le déficit budgétaire de l'Amérique par quatre ! Tous les repères s'estompent. Les experts ont doctement prétendu que le Krach était l'expression d'excès en matière de crédit, mais jamais on a autant hypothéqué la richesse des nations, en invoquant le retour d'une croissance qu'on qualifie dans le même temps de fléau du capitalisme...
Le Monde découvre que le nouveau président américain n'est pas un messie. La crise se moque de ses mesures pharaoniques de relance.
Quant à sa politique extérieure d'apaisement, elle ne produit pas l'esquisse de l'ébauche du changement escompté. La Corée du Nord, de plus en plus folle ignore avec forfanterie ses avertissements mollassons. L'Afghanistan vit toujours sous la menace des barbares et il faut bien se résoudre à accroître la pression armée sous peine de perdre les fragiles résultats obtenus. Selon le même principe, en Irak, le retrait des troupes engage le pays dans un avenir très incertain. Le processus de règlement du conflit Israelo-Palestinien quant à lui n'a pas avancé d'un iota. Le Pakistan est au bord du chaos. L'Iran n'hésite plus à montrer au grand jour les griffes de son abominable dictature. Certains font mine de s'en apercevoir, mais depuis 30 ans qu'elle dure, il fallait vraiment être myope ou de très mauvaise foi pour ne pas la voir. Au total si le président US se refuse à qualifier tous ces gens d'axe du mal, pour eux à l'évidence, il est toujours l'incarnation du grand Satan.
Michael Jackson a décidé lui, de tirer sa révérence. A l'instar des fleurs, il a vécu de manière spectaculaire mais brève. Paradoxalement, en dépit du charme et de la grâce dont la Nature l'avait doté, il était profondément insatisfait de son apparence physique. Pour y remédier et comme pour donner raison à cette époque qui privilégie de plus en plus la forme sur le fond, il se servit de tous les artifices techniques de la chirurgie esthétique pour transformer son corps. Il était devenu une sorte de dérisoire Prométhée du showbiz. Mais un titan très seul et plus contraint que quiconque, par le poids des chaines dorées qu'il s'était inconsciemment mises aux pieds.
Happé par un destin fulgurant et brutal, il n'eut pas le loisir de se faner derrière son masque de star aseptisée. Et puisque rien n'était plus naturel dans sa manière de braver la réalité, sa mort même avec tout ce qui l'entoure, paraît factice. Après un éblouissant et dernier feu d'artifice, il est probable que ses gentilles chansons se dissolvent sous peu en scories, dans le vide de l'univers brillant mais vain du monde contemporain...

12 septembre 2008

Raisonnement par l'absurde


Le 10 septembre, les agences de presse Interfax et Itar-Tass, se faisaient l'écho des propos quelque peu menaçants du chef des forces stratégiques russes : « Les sites qui accueilleront des éléments du bouclier antimissile américain en Pologne, République tchèque ou ailleurs pourront devenir la cible de missiles intercontinentaux russes ».
On se pince. Ne croirait-on pas ce genre de sombre logique, prise au robinet de la plus pure dialectique soviétique ?
N'est-ce pas précisément parce qu'ils craignent d'être la cible de missiles, que ces pays, douloureusement échaudés par le passé, et constatant ce qui se passe en Georgie, ressentent le besoin d'être protégés par un bouclier ?

Avec le même imparable raisonnement, il faudrait évidemment voir dans les trois navires américains dépêchés en Mer Noire, au secours des populations civiles bombardées par la Russie, des forces agressives, destinées à "réarmer la Georgie"... Et en revanche dans les bombardiers Tupolev-160 arrivés récemment au Vénézuela en renfort de la flotte de guerre croisant depuis quelques temps dans les Caraïbes, de paisibles engins effectuant des "missions d'entrainement de routine"...
Dommage que ce balourd de Chavez n'ait pu s'empêcher de vendre la mèche : "C'est un avertissement a-t-il lancé avec arrogance. Nous sommes des alliés stratégiques. c'est un message à l'empire américain" ! (Figaro 11/09/08).

S'agissant enfin du récent accord de paix signé par l'Europe et la Russie au sujet de la Georgie, des signes patents témoignent déjà du manquement à la parole donnée par Moscou.
Contrairement à l'engagement de revenir à l'état des forces d'avant le conflit, la Russie va maintenir au moins 3.800 soldats dans chacun des deux territoires, comme l'a annoncé le ministre russe de la Défense, Anatoli Serdioukov (on en comptait respectivement 1000 en Ossétie et 3000 en Abkhazie, avant les hostilités de cet été).
D'autre part, contrairement à ce que Nicolas Sarkozy affirmait, le ministre russe des affaires étrangères Serguei Lavrov a déclaré que les observateurs de l'Union Européenne ne seraient pas autorisés à entrer en Abkhazie et en Ossétie. Ils devront rester à l'extérieur de ces territoires pour exercer leur mission...

17 août 2008

Ombres chinoises, poupées russes


A Pékin, les jeux sont quasi faits. Le ballet des protestataires s'est dispersé, pas un athlète ne manque à l'appel et après une cérémonie d'ouverture époustouflante, la quête de médailles occupe désormais entièrement les esprits.
Elles paraissent bien lointaines les vitupérations des anciens maoïstes, comparant les Jeux Olympiques de 2008 à ceux de 1936 en Allemagne.
J'entends encore Daniel Cohn Bendit sur France Inter, la veille de la cérémonie d'ouverture, s'étrangler de rage à propos de ce qu'il considérait comme un scandale inacceptable.
Même s'il refuse à titre personnel, l'étiquette d'ancien « mao », il ne paraissait pas trop gêné de défiler avec eux en 68, le poing tendu, sous le portrait du Grand Timonier... A l'instar de nombre de benêts qui se targuent d'être des consciences éclairées, mais qui encensaient de sinistres dictateurs à une époque où il n'était pas permis d'ignorer leurs méfaits, ils trouvent aujourd'hui que la Chine ne se débarrasse pas assez vite de leurs méthodes infâmes... Autre temps, autres moeurs !
Ces gens, qui n'ont pas tiré grand enseignement de leurs erreurs passées, continuent donc de pérorer leurs leçons, à cheval sur les grands principes.
Reprenant la bonne vieille rhétorique de la reductio ad hitlerum, ils comparent le communisme de 2008, en pleine déconfiture
au national-socialisme de 1936, en pleine ascension. A Berlin, c'était Hitler qui paradait. Aujourd'hui, à Pékin, les dirigeants chinois font plutôt profil bas. Ils n'ont plus d'idéologie à faire valoir et le communisme est à l'état vestigial. La Chine qui a certes encore de grands progrès à faire pour ressembler à une démocratie moderne, n'a fort heureusement plus grand chose à voir avec le pays de Mao. L'immense paquebot que constitue cette nation a changé de cap, mais le mouvement se fait avec lenteur et inertie.
Les sages du Comité Olympique ont pris une lourde responsabilité en accordant à Pékin les Jeux. Mais ils l'ont fait en connaissance de cause et une fois la décision prise, il n'y a plus vraiment lieu de continuer les jérémiades. A bien y regarder, ce n'est d'ailleurs pas Berlin en 1936 qui fut la cause de tant de malheur mais plutôt Munich en 1938.
Mieux vaut agir lorsque cela est raisonnablement envisageable, plutôt que de se répandre en récriminations vertueuses mais inefficaces. S'agissant du Tibet, à l'instar du Dalaï Lama lui-même, il y a lieu de saisir toutes les occasions pour tenter d'infléchir la position des dirigeants chinois, mais il convient d'éviter la politique du chiffon rouge, génératrice de crispation.
A peine, l'affaire des Jeux s'estompe-t-elle qu'une nouvelle arrive, mettant en scène un autre ancien bastion du communisme. La Russie, au mépris de toutes les règles internationales envahit brutalement la Georgie, pays démocratique, sous prétexte que cette dernière réprimait trop durement les velléités d'indépendance d'une de ses composantes sécessionnistes : l'Ossétie du sud.
L'Ossétie et ses quelques 70.000 habitants ne pèse pas lourd sur l'échiquier international et son désir d'indépendance en dit long sur le degré de fragmentation de l'ex-empire soviétique. La Georgie qui compte elle-même moins de 5 millions d'âmes n'est qu'un petit pays. Avant d'accéder à l'indépendance, elle faisait partie intégrante de la Russie dès le début du XIXè siècle. Elle fut la terre natale de Staline... De nos jours encore, malgré la tenue d'élections libres, des allégations font état de comportements douteux de la part des dirigeants : violence, coups bas, corruption... Il faut d'ailleurs convenir que les répressions auxquels ils se sont livrés
en Ossétie, relèvent d'une stratégie plutôt expéditive...
Mais voilà, la Georgie, comme l'Ukraine, et beaucoup d'autres républiques autrefois asservies à l'URSS, aspire désormais à rejoindre le club des démocraties occidentales. Elle n'a d'yeux que pour l'Europe et a demandé en 2007 son intégration à l'OTAN. Depuis des années, elle défie ouvertement sa grande et menaçante voisine.
Derrière ces conflits locaux se profile donc une confrontation bien plus gigantesque, opposant en réalité la Russie à l'Amérique, avec au milieu l'Union Européenne. En d'autres termes, d'un côté l'Est pantelant, humilié, dont les rouages s'éparpillent, mais dont le coeur est encore battant à Moscou, de l'autre l'Ouest triomphant et parfois arrogant ou inconséquent.
En matant la Georgie, la Russie trouve une belleoccasion d'affirmer sa volonté de puissance et d'hégémonie sur ses anciens vassaux. Elle veut manifestement continuer de rayonner sur la région et faire contrepoids à l'Alliance Atlantique. Elle ne craint guère en la circonstance l'Europe dont elle connaît derrière les discours, la langueur, et les faiblesses pacifistes. Certes Nicolas Sarkozy en tant que président de l'Union n'a pas ménagé sa peine pour parvenir à une solution négociée, mais dans l'ensemble peu de voix se sont élevées pour réprouver l'intervention russe. Quant aux Etats-Unis, à la veille de l'élection présidentielle, il y a peu de chances qu'ils puissent rétorquer de manière très forte. Au surplus, la Russie a beau jeu de rappeler les interventions en Serbie, en Afghanistan, en Irak. En accourant au secours de l'Ossétie, elle estime répondre en quelque sorte au zèle mis par toutes les nations occidentales à reconnaître l'indépendance du Kosovo, il y a quelques mois.
Le risque est qu'elle s'enhardisse à la suite de cette opération qui s'annonce comme un succès, et qu'elle cherche alors peu à peu à reprendre son emprise sur ses voisins. Sans être aussi pessimiste qu'Yvan Rioufol sur les intentions réelles des dirigeants russes et sur les capacités de réaction des démocraties occidentales, la question angoissante face à l'agression d'un pays dit ami, est tout de même de déterminer où se situe la limite extrême au delà de laquelle il deviendrait incontournable d'envisager une riposte armée, sous peine de voir se reproduire une situation rappelant fâcheusement 1938...

06 juillet 2008

Un mystère colombien

L'intense battage qui accompagne la libération d'Ingrid Bétancourt fait naître une certaine perplexité. Après la révolte, la compassion, l'émotion, puis enfin le soulagement, un étrange sentiment se fait jour. Ou plutôt une interrogation. Pourquoi un tel débordement médiatique ? Qui l'orchestre vraiment ? La Presse ? Les Politiques ? A quelle fin ?
Comme lors des tragiques attentats du 11 septembre 2001, les images diffusées en boucle finissent par être assommantes, donnant l'impression d'une distorsion soudaine et artificielle de l'actualité. Une nouvelle fois, les journalistes en font trop, braquant de manière inconsidérée leurs micros et projecteurs sur tout ce qui brille, sans une once de réflexion et pas le moindre recul. Résultat ils disent n'importe quoi. Un flot de rumeurs non fondées, de suppositions hasardeuses, et de gloriole clinquante submerge l'évènement.
Est-il normal qu'une personne, aussi sympathique soit-elle, devienne en quelques jours
par le truchement des médias, le centre du monde ? D'où tient elle la grâce qui fait qu'elle soit soudain parée de toutes les vertus ?
Certains la voient déjà Présidente de la République Colombienne par le seul mérite d'avoir été otage durant six longues années. Nicolas Sarkozy l'inscrit d'autorité sur la liste des prochains promus à la Légion d'Honneur. Etrange consécration. On finit par avoir des doutes.
Est-elle héroïne malgré elle ou bien s'agit-il d'une mise en scène habile ?
On est interloqué par sa bonne forme apparente, lorsqu'on la compare à l'image de pauvresse résignée, ressassée il y a quelques mois. On la disait mourante de maladies et de mauvais traitements, la voici pimpante et volubile comme si elle sortait d'une cure de thalassothérapie.
On la présente comme la figure emblématique de la politique colombienne, mais son premier geste est de s'envoler pour la France. A-t-elle seulement rencontré le président Uribe, artisan de sa libération, a-t-elle rencontré le Peuple Colombien qu'elle affirme vouloir servir ? On n'en a rien vu. Etrange, si l'on se rappelle que les sondages ne la créditaient pas de plus de 2% d'intentions de vote lorsqu'elle envisageait de se présenter il y a quelques années à la Présidence de la République,...
Vraiment cela fait beaucoup de mystères autour de cette histoire. Ajoutés au discrédit dans lequel on tient, on ne sait trop pourquoi, en France le président Uribe (parce qu'il n'est pas de gauche ?), aux conditions bizarres de la capture d'Ingrid Bétancourt par les FARC, et à la complaisance avec laquelle on les a trop longtemps considérés, nimbés qu'ils sont par l'aura guevaresque de justiciers du peuple, au rôle guignolesque joué par Chavez, ça fait tout de même un peu beaucoup de ficelles qui s'agitent sans qu'on voie clairement qui les tient...
Ne pas oublier que derrière ces torrents de liesses, il reste encore au bas mot 800 otages en captivité...

03 avril 2008

Le dilemme afghan

Le débat actuel sur l'envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan permet de pointer l'étrange attitude de l'Opposition et de bon nombre de ceux qui invoquent si souvent les droits de l'homme. D'un côté ils exigent une grande fermeté, vis à vis de la Chine par exemple, eu égard à ce qui se passe au Tibet, de l'autre ils accumulent les arguties pour éviter un engagement plus conséquent de la France en Afghanistan.
Alors que, plus ou moins conscients de leur impuissance face au géant chinois, ils ne trouvent rien de mieux à proposer que le boycott de la cérémonie d'ouverture des jeux Olympiques, ils sont prêts à tirer un trait sur les succès chèrement acquis et encore fragiles pour libérer Kaboul.

La rengaine fataliste est bien rodée mais plutôt pitoyable tant elle est marquée par la mauvaise foi : La production d'opium n'aurait jamais été aussi importante que depuis l'intervention internationale, « l'occupation » étrangère ne ferait que renforcer les extrémismes, les soldats risqueraient d'être exposés aux combats, ce serait s'aligner servilement sur la position américaine, et pis que tout, ce serait le signe que la France envisage d'intégrer le commandement de l'OTAN....
Manifestement les fulminations vertueuses contre le régime taliban qui asservissait les femmes et démolissait l'éducation et la culture, sont bien loin ! Quant à la menace permanente que fait peser Al-Qaïda, elle est quasi niée...
Pourtant, si les choses restent problématiques en Afghanistan, ne serait-ce pas comme souvent, par manque de détermination et d'unité de la Communauté Internationale ? Et les bonnes âmes si promptes à militer pour un monde meilleur, ne pourraient elles pas profiter de cette occasion à la mesure de nos moyens, pour accepter le principe d'actions concrètes ? L'engagement actuel de notre pays dépasse à peine 1500 hommes alors que le Royaume Uni en aligne près de 5000 et l'Allemagne plus de 2000. L'heure ne serait-elle pas, après avoir rendu l'hommage qu'ils méritent, aux hommes déjà présents sur place, de leur apporter des renforts qui sans nul doute faciliteraient leur tâche ?

20 décembre 2007

Le cirque Kadhafi


Ouf, il est passé ! A l'évidence, il a fait la joie des petits et des grands... médias ! Pas un qui n'ait relaté par le détail les moindres instants de ce voyage savamment orchestré. Pauvres spectateurs impuissants de ces exhibitions braillardes, nous avons été gavés jusqu'à l'écoeurement par les rodomontades grotesques des tartufes de la morale en chambre.
Tous ces commentateurs zélés, bourrés de faux scrupules, courant aux basques du Guide qui affichait lui, sa splendide indifférence, ça valait son pesant de cacahuètes. Dans ce théâtre de marionnettes, ce fut édifiant de voir les mimiques tantôt ébahies, tantôt réprobatrices des sainte-nitouche au passage du grand padischah. Sa visite de Versailles, habillé comme un moujik de Sibérie, fut un des clous de ce barnum insolite.
Mais qui les obligeait donc, ces vertueux porte-voix de l'actualité, à donner un tel retentissement à un événement qui les choquait en apparence si fort ?
En vérité, beaucoup ont des indignations sélectives et surtout à retardement. Le colonel Kadhafi fut sans doute une menace autrefois. Chacun sait son soutien actif au terrorisme pro-palestinien pendant les années 80. A l'époque, les Etats-Unis cherchaient à l'empêcher de nuire et faillirent même réussir. Mais de l'aveu de celui qui était alors ministre des Affaires Etrangères, Roland Dumas, la France fit capoter l'opération montée par l'administration Reagan, en refusant au dernier moment le survol de son territoire par l'US Air Force... Résultat de cette brillante stratégie, Kadhafi eut le temps de se carapater. Seuls quelques militaires et sa fille adoptive périrent. Probablement décida-t-il de se venger. Deux attentats s'ensuivirent, à Lockerbie en 1988 (270 morts) et au Niger en 1989 (170 morts dont 54 Français).
Aujourd'hui, certes l'homme n'inspire toujours guère la sympathie, mais indéniablement il n'est plus ce qu'il a été. Son pays est loin d'être une démocratie, mais il est sur une meilleure voie que beaucoup d'autres dans la région. Il ne représente plus pour le monde un danger mais un espoir. Il est donc vraiment un peu tard pour s'égosiller contre lui, et ces récriminations semblent bien vaines voire contre-productives.
Heureusement dans l'univers superficiel qui vit de la chasse au scoop, un titre remplace vite l'autre. Après Kadhafi à Versailles, voici Sarkozy et Carla à Disneyland. Et on va crier naturellement à la peoplisation de la politique...

26 novembre 2007

Les obscurs fondements de la haine


On apprenait ces derniers jours l'inculpation pour crimes contre l'Humanité, de l'ancien vice-premier ministre et surtout président du Présidium d'Etat du Cambodge, Khieu Samphan.
Plus de 30 ans après les faits, on peut se demander si un procès est encore utile. Le vieillard n'est plus que l'ombre du bouillonnant révolutionnaire d'antan. Le rire sauvage et carnassier a laissé place sur son visage décomposé, à une moue molle et dédaigneuse. Il est malade et se déplace avec peine. Comment pourrait-il donc encore nuire ?
Mais si l'on peut estimer aujourd'hui qu'un procès est bien dérisoire, c'est pour mieux se demander comment de tels individus ont pu continuer à jouir d'une totale liberté depuis leurs forfaits ? Comment ces gens qui en moins de 4 ans ont massacré le tiers de leur pays sont parvenus à se faire oublier si longtemps ?
Il y a des mystères troublants...

Faut-il revenir sur cette sombre histoire où sous les yeux d'un Occident lâche et complaisant, un peuple fut massacré, ruiné, humilié ? Faut-il rappeler que ces insurgés qui s'emparèrent du pouvoir à Pnomh Penh en 1975, sortaient tout droit des universités françaises ? Qu'ils y avaient appris sous un jour enchanteur les vertus supposées de la révolution et de la dialectique marxistes ? Et qu'ils avaient été encouragés à mettre en pratique ces monstruosités, par les plus hautes sommités intellectuelles de l'époque ?
Oui car ils le firent avec un zèle hallucinant.
Chez les révolutionnaires du « Kampuchea démocratique », tout était froidement calculé, planifié.
En 1977 Khieu Samphan était fier de déclarer : « Nous devons exterminer l’ennemi. Tout doit être fait avec ordre et à fond. Il ne faut pas se laisser distraire mais continuer le combat en supprimant toute apparence d’ennemi en tout temps. »
Pour avoir une idée des abominations de cette époque,
on ne saurait trop conseiller de revoir l'admirable et bouleversant film de Roland Joffé, la Déchirure (The killing Fields)
Aujourd'hui Khieu Samphan, ce monstre sans âme démontre qu'au surplus, il est veule. Il n'a toujours pas conscience de l'énormité de ses crimes et ne regrette en la circonstance que sa « naïveté ». Pire, il tente misérablement de minimiser son action passée. « Mon rôle était largement honorifique. Dans les faits, j'assumais plutôt un travail de bureau » bafouillait-il médiocrement dans un entretien au Figaro en 2004 !
Lui qui fut l'instigateur de cette révolution, qui la mit en oeuvre de bout en bout, qui assuma les plus hautes responsabilités gouvernementales pendant cette sinistre période, et qui ne fut jamais inquiété par les purges sanglantes décimant régulièrement les rangs même du Parti, lui qui commanda sans aucun doute possible toutes ces atrocités, il voudrait faire croire qu'il n'était en somme qu'un grouillot !
Mais plus que la mesure du poids des responsabilités pesant sur un homme, ce qui fascine dans cette affaire, c'est l'indulgence dont on fait preuve encore de nos jours pour le socialisme. Cette idéologie a inspiré toutes les horreurs qui ont ensanglanté le XXè siècle. Du nazisme au stalinisme, du trotskisme au maoïsme, du Vietnam au Cambodge, de la Corée à Cuba, le socialisme partout apporte la misère et la désolation.
Certes il se montre parfois sous un visage plus présentable, en apparence inoffensif, toujours paré des beaux idéaux d'égalité et de justice sociale. Mais si le poison pur tue net, une seule goutte suffit à pervertir le moindre breuvage. Dans le règne des idées, il en est de même. On peut penser que la plupart de nos systèmes politiques sont heureusement suffisamment robustes pour résister à ces effets néfastes. Mais à bien y réfléchir, à défaut de celle du prolétariat, la dictature des principes empoisonne bel et bien à petit feu nombre de problématiques très actuelles. Qu'on pourrait espérer résoudre dans de bien meilleures conditions si le seul souci d'objectivité prévalait...

02 février 2007

Le président fait boum...


Interrogé lundi dernier par des journalistes du New York Times, Jacques Chirac a manifesté une inquiétante propension aux errements intellectuels.
L'entretien qui devait porter sur les changements climatiques et le développement durable a dérapé lorsque le président a souligné la nécessité pour les programmes basés sur l'énergie nucléaire, d'être transparents et maitrisés.
Evoquant spontanément les vélléités iraniennes en la matière, il a considéré tout d'abord comme très dangereux le fait que l'Iran refuse de cesser la production d'uranium enrichi. Mais l'instant d'après il déclara qu'il n'y aurait pas grand chose à craindre s'il se dotait d'une, voire de deux bombes atomiques : "Où pourraient tomber de telles bombes ?" a-t-il demandé. "Sur Israël ? Elles n'auraient pas parcouru deux cent mètres que Téhéran serait rasée !" (sous-entendait-il une prompte et drastique intervention de la France, où suggèrait-il une piètre qualité des explosifs perses comme MAM au sujet de la Corée...)
Les bombes n'étant donc pas en soi dangereuses, il affirma que le véritable risque était l'émulation que leur possession pouvait entrainer notamment auprès de pays comme l'Egypte et l'Arabie Saoudite.
Propos plutôt étonnants d'autant qu'aucune de ces deux nations n'a émis le moindre désir d'engager à ce jour un programme nucléaire alors qu'il venait de confirmer implicitement que le programme soi-disant civil iranien cachait à l'évidence un objectif militaire.
Quelle mouche a donc piqué le président français ? Il a certainement eu conscience d'avoir gaffé puisque dès le lendemain, il jugea nécessaire de se rétracter. Les journalistes furent en effet rappelés afin qu'ils enregistrent des déclarations plus politiquement correctes.
Ces derniers relatent que Jacques Chirac donnait l'impression d'être mal à l'aise lors du premier entretien. Il tremblait, se faisait fréquemment souffler par son entourage des réponses, et en lisait d'autres sur un papier, dactylographiées en gros caractères surlignés en jaune ou en rose...
Les journalistes américains évoquent l'antécédent d'accident vasculaire cérébral dont fut victime l'hôte de l'Elysée il y a quelque temps, et rapportent que plusieurs personnalités font état de propos beaucoup moins précis depuis cette date...
On comprend mieux dès lors, qu'il puisse confondre libéralisme et communisme dans la même abjection !
Pourvu qu'il n'appuie pas sur le bouton en croyant éteindre le réchauffement climatique !

17 janvier 2007

L'Irak entre espoir et chaos


En France, rarissimes sont les voix pour croire encore à une évolution heureuse. Même Nicolas Sarkozy semble un peu lâchement s'être rallié à la position dominante, puisqu'il a cru bon dans son discours d'investiture comme candidat à la présidence de la république, de rendre hommage à Jacques Chirac pour avoir refusé d'engager la France dans ce challenge, qu'il qualifie dorénavant de « faute ».
Il n'empêche, on trouve encore quelques esprits courageux ramant contre la marée défaitiste de la pensée unique. Par exemple Ivan Rioufol dans sa chronique au Figaro (12/01) dans laquelle il se prend à imaginer « qu'une raison, une seule, peut faire réussir l'ultime plan Bush, qui veut responsabiliser les Irakiens : ceux-ci ne peuvent se reconnaître dans la caricature qu'ils donnent au monde, d'un peuple musulman s'entretuant et refusant la liberté et la démocratie. »
Autre voix, celle d'Alexandre Adler qui dans le même Figaro (14/01) se fait l'avocat du président américain. Il constate en premier lieu que si les critiques pleuvent dans le camp occidental, pas un pays proche de l'Irak ne proteste contre l'envoi de nouvelles troupes américaines. Probablement parce qu'en réalité, aucun d'entre eux n'a intérêt à ce que la situation tourne à la guerre civile totale. Et aucun n'a les moyens d'intervenir avec plus de succès que l'Amérique dans ce terrain miné.
Adler voit en revanche se dessiner l'ébauche d'un consensus de raison.
D'un côté, « le bloc sunnite modéré tout d'abord qui se groupe autour du roi d'Arabie et inclut la monarchie jordanienne, les orphelins de Hariri au Liban, le Fatah en Palestine ». De l'autre, « les modérés iraniens, qui procèdent calmement et systématiquement à l'encerclement politique de leur président énergumène Ahmadinejad », et qui pourraient « accepter tacitement l'écrasement des hommes de Sadr qui n'ont de rapport à Téhéran qu'avec l'extrême droite chancelante des hodjatieh ».
Dans ce contexte, selon Adler, « si les Américains agissent à présent non pas en missionnaires allumés d'une démocratie inexistante mais en brokers honnêtes des intérêts à long terme des modérés saoudiens et iraniens, ils peuvent encore se sortir d'Irak la tête haute. »
Puissent ces observateurs avoir raison.


Leur analyse paraît en tout cas conforme à la logique développée par madame Rice lors de son récent voyage dans la région, qui esquisse les contours « d'un autre Moyen-Orient, dans lequel il y aurait véritablement un réalignement des forces », entre d'un côté « des réformateurs et des dirigeants respon­sables » en Israël, Jordanie, Égypte, Irak, Arabie saoudite ou les Territoires palestiniens et, dans le camp adverse, « des extrémistes de tout calibre qui utilisent la violence pour propager le chaos, saper les gouvernements démocratiques et imposer leurs programmes de haine et d'intolérance ».

En définitive, dans cette douloureuse affaire, l'attitude de notre pays, notamment de ses gouvernants attachés aux sondages d'opinion comme des toutous à leur gamelle, est décidément désolante. Il ne suffit pas de dire que les Américains ont fait une faute. Il ne suffit pas de clamer qu'on veut parler « toujours à l’Amérique comme une amie », et prendre un ton un peu supérieur pour lui dire « toujours la vérité » et « lui dire non quand elle a tort », « quand elle viole le droit des nations ou le droit des gens qu’elle a tant contribué à forger, quand elle décide unilatéralement, quand elle veut américaniser le monde alors qu’elle a toujours défendu la liberté des peuples. »
On sait bien que c'est dans les difficultés qu'on reconnaît ses vrais amis. Je ne sais si l'Amérique finira par obtenir un succès dans l'objectif ambitieux qu'elle s'est donné. Ce qui est certain c'est qu'elle ne devra rien à la France...

11 novembre 2006

Regards furtifs sur l'Arabie heureuse...


Le Yémen est probablement parmi les pays de culture arabe, un des plus fascinants. Peut-être parce qu'il est lieu même de ce qu'on appelle l'Arabie heureuse. Peut-être parce qu'il fut le pays de la mythique reine de Saba.
Ou bien tout simplement en raison de ses sauvages paysages montagneux dans les flancs desquels les hommes sont parvenus à dessiner à la force des poignets, de superbes terrasses de verdure et à enchâsser de stupéfiants villages à l'a-pic des ravins. Faits de maisons hautes et étroites, serrées les unes contre les autres, ils semblent défier dans un silence hiératique, les étendues désertes qui les entourent. Rarement l'oeuvre humaine n'a fait autant corps avec la nature.
Par la magie de la télévision, on peut s'imprégner des mystères et de la beauté intemporelle de ce pays.
Le 6 novembre, France 3 diffusait un excellent reportage dans l'émission « Faut pas rêver ». On pouvait y voir notamment comment on fabrique de père en fils des vitraux dans les ateliers de la capitale, Sanaa. Comment d'habiles artisans armés de rustiques compas, de règles et de couteaux ouvragent les blocs de plâtre encore chaud, y creusant avec virtuosité les cercles, les étoiles et les moresques destinés à servir d'encadrement gracieux à des verres multicolores.
A les voir travailler paisiblement, peut-on imaginer ces ouvriers se transformant en guerriers du jihad, en brutes vindicatives assoiffées de sang ?


Je ne veux pas pour ma part m'y résoudre et je m'interroge sur l'avenir de ces pays de tradition islamique. L'esprit d'humanité sera-t-il assez fort pour les empêcher de basculer complètement dans l'obscurantisme oppressif et belliqueux qui paraît gagner du terrain ces derniers temps ?
Le Yémen du sud à vécu plusieurs décennies sous la férule marxiste. Désormais réuni avec les provinces du nord, comprendra-t-il que l'émancipation éclairée constitue la plus belle perspective de progrès, dans le respect de ce que la culture ancienne a de meilleur ?

L'émission fournit une magnifique illustration de ce principe avec l'initiative d'un homme d'affaires chassé de son pays lorsque Moscou régentait Aden. Revenu riche de ses entreprises, Mohammed Bugshan a commencé de restaurer le palais familial, quelque part dans la vallée de Wadi Dawan, pour en faire un hôtel. La belle et noble façade colorée montre comment il est possible de mettre en valeur ce pays, qui demeure hélas à ce jour un des plus pauvres du monde.
Je reprends mes notes rédigées à l'occasion de l'émission Ushuaia de Nicolas Hulot le 8/2/06 :D'étranges sentiments naissent en voyageant grâce à l'objectif de la caméra, à travers ces contrées brûlées de soleil. L'oeil suit le faîte des dunes, qui dessine d'infinies arabesques ondulant entre le bleu éclatant du ciel et le jaune onctueux du sable.
Au creux d'une vallée, bordée d'à-pics tranchants on découvre une cité éblouissante, Shibam, la « Manhattan du désert ». Des immeubles rudimentaires, étroits et allongés, détachent de la montagne leurs façades blanches, percées d'obscures meurtrières et d'énigmatiques moucharabiehs, comme un fragile empilement de formes géométriques.

On découvre ensuite Socotra, l'île enchanteresse, au large du golfe d'Aden. Sur ce massif isolé, comme égaré hors du temps, on trouve une végétation étonnante. Des sandragons, arbres aussi ancestraux que les dinosaures, qui soutiennent de leurs arborescences sèches et raides, des parasols de verdure serrée. On extrait de leurs troncs une poudre colorante, dite « sang du dragon ».
A flanc de falaise, des câpriers en forme de bouteilles, accrochés à la roche, narguent les vents et la pesanteur. De leurs troncs ventrus sort une maigre végétation ornée de fleurs délicates.
Des Botswellia enfin, dont on extrait les perles d'encens qui valaient autrefois des fortunes.
Cette île, qui selon Pline était la demeure du Phénix, recèle des grottes spectaculaires dans lesquelles croissent depuis des millénaires, des forêts de stalactites. On y trouve, comme en Périgord, les curieux excentriques ignorant des lois de la gravité qui étendent dans toutes les directions de l'espace leurs doigts pétrifiés.
Enfin ce reportage magnifique s'achève sur les « hommes fleurs » : de rudes montagnards barbus aimant être propres et parfumés. Ils cultivent des fleurs odoriférantes, pélargoniums, géraniums, dont ils se font des couronnes qu'ils portent autour du cou ou de la tête.
Mais une question hante le spectateur pendant toute la durée de l'émission : Où donc sont les femmes ? A quelques rares exceptions, on n'en voit que les silhouettes fugitives enveloppées dans de funèbres niqab. A peine si l'on aperçoit deux yeux dardant un regard énigmatique. Comment diable font-elles pour se reconnaître dans la rue ? Comment parviennent-elles à supporter cette chape sinistre qui les confine à l'anonymat, raye pour ainsi dire leur existence aux yeux du monde ?
Paradoxe étonnant, on devine derrière cette sombre prison d'étoffe, les signes intacts de la séduction féminine : un maquillage raffiné, des mains soignées et décorées, des pieds graciles parfois chaussés de jolies sandales, un sac à main élégant duquel on voit même parfois surgir le symbole éclatant de la civilisation technique : un téléphone portable !
 
A ce qu'il paraît, rien dans l'islam et notamment dans le Coran, n'oblige au port du voile. Certaines femmes en sont dépourvues et paraissent parler librement aux hommes. Rien dans le comportement de ces derniers n'aide à comprendre pourquoi il faille cacher à ce point leurs compagnes. Et quel Dieu pourrait être assez borné pour exiger de masquer si tristement ce qu'il a créé, sauf peut-être pour le protéger des morsures du vent de sable et des brûlures du soleil dans le désert ?
Pourquoi donc ce retour à des pratiques médiévales ?

12 octobre 2006

Le pays du matin calme vous salue bien

C'est étrange, les voix qui chantaient à l'unisson la faute à Bush lorsque ce dernier décidait de s'en prendre à Saddam Hussein, celles qui conseillaient de s'occuper plutôt de la Corée, sont bien silencieuses tandis que Ministaline fait joujou avec ses bombes du côté de Pyongyang.

Il est vrai que notre président est très pris par les temps qui courent. C'est fou les éclairs de lucidité qui frappent tout à coup son auguste personne au terme d'une carrière de près d'un demi-siècle. Après avoir découvert les injustices flagrantes touchant la retraite des anciens soldats coloniaux, il veut désormais "réformer le dialogue social" (Le Figaro 11/10) ! Vaste programme...
Quant au reste de la classe politique ils sont bien trop occupés à s'éliminer les uns les autres, au grand jeu de la primaire, comme à la Star-Ac...
Rendons-leur justice, ils se préoccupent tout de même des grands problèmes internationaux, puisqu'ils viennent d'obtenir à l'Assemblée Nationale le vote d'un texte ferme et efficace, sanctionnant un pays « voyou » : la Turquie de 1915, pour ses pogroms en Arménie ! On peut dire qu'ils ont l'esprit d'à propos...
Encore un peu de patience et ils vont bientôt s'attaquer à la révolution bolchévique !


Soyons sérieux, qui fait du barouf au sujet de la Corée, à part sa voisine du sud et le Japon qui sont trop proches géographiquement pour être crédibles : encore et toujours Bush ! Zut alors, on lui a déjà fait comprendre : la France n'est pas une vassale des USA. Bush aura beau s'époumoner à l'ONU, il n'engagera que lui.
En plus, il nous refait le coup des armes de destruction massive alors que selon Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, il n'y a vraiment pas de quoi fouetter un chat. Elle doute qu'il s'agisse d'une bombe atomique et a déclaré sur Europe 1, mercredi 11 octobre, que même "s'il s'agissait d'une explosion nucléaire, il s'agirait d'une explosion ratée, si je peux dire" . Ça aurait fait pschiit comme dirait l'autre (en Iran aussi, mais ça fait plutôt chiite...)
Entre nous soit dit, une explosion ratée, n'est-ce pas plus inquiétant encore qu'une explosion réussie ?


PS : Pendant ce temps, le Parlement irakien, élu démocratiquement, avance doucement. Entre mille périls, il a définitivement adopté mercredi 11/10 la loi créant un Etat fédéral (L'Express). Sans doute ignore-t-il les propos d'Artaban-Villepin, affirmant en toute modestie que pas «un pays ne conteste aujourd'hui la justesse de la position française» (Grand Jury- RTL-Le Figaro-LCI 9/10)

08 septembre 2006

Ah ! ça Iran, ça Iran, ça Iran...

Mr Douste-Blazy donne parfois l'impression de faire de la politique étrangère comme d'autres font du macramé : en amateur. Au sujet de l'Iran par exemple, on serait même prêt à lui reconnaître un certain sens du comique si ce n'était aussi grave.
En août 2005, il s'insurgeait courageusement sur France-Inter, affirmant « qu’il fallait empêcher l’Iran de fabriquer la bombe atomique » et qualifiant « d’inacceptables les pressions actuelles de Téhéran »
Au début de l'année 2006, alors qu'on pouvait encore espérer une négociation, il était encore plus explicite : «Aujourd'hui c'est très simple : aucun programme nucléaire civil ne peut expliquer le programme nucléaire iranien » avait-il déclaré, « donc, c'est un programme nucléaire militaire clandestin.»
Depuis le conflit au Liban, il semble curieusement avoir tourné casaque et son ardeur a fondu comme neige au soleil, alors que la situation est plus inquiétante que jamais. Chacun a compris en effet que le Hezbollah était la créature de l'Iran et que ses buts fièrement revendiqués sont la destruction d'Israël et la création d'une république islamique au Liban. Chacun a pu voir que cette organisation ne se contentait plus de menaces, mais qu'elle était passée à l'action, montrant dores et déjà la mesure de sa capacité de nuisance.
Chacun peut entendre enfin les propos agressifs et intolérants des dirigeants iraniens et constater qu'ils deviennent de plus en plus arrogants et déterminés.

Eh bien c'est ce moment précis que notre sémillant ministre choisit pour déclarer qu'il faut considérer l'Iran comme "un acteur respecté et important", qui joue un "rôle de stabilisation dans la région" !
Alors que George Bush alerte une fois encore la communauté internationale sur la menace représentée par un pays dirigé par des fanatiques, et qu'il tente de rameuter la cavalerie : « Les nations du monde libre ne permettront pas à l'Iran de produire l'arme nucléaire. », Mr Douste trouve très fin de se désolidariser par avance en minimisant le danger, mettant même en garde contre une dérive vers une « guerre de civilisations » entre les Occidentaux et le monde musulman, et ridiculisant à mots couverts le président américain : « Le mal et le bien ne sont pas décrétés par des Occidentaux dans un pays donné ».
Après Dominique de Villepin face à Saddam, Mr Douste volant au secours du président Ahmadinejad dans l'espoir de sauver la paix, cela rappelle de bien mauvais souvenirs.
En avril 1938, Daladier trouvait des accents martiaux pour illustrer la détermination de la France à défendre son alliée la Tchécoslovaquie : "Si la France et la Grande-Bretagne continuent de s'incliner devant la violence, si l'esprit politique qui leur est commun est inspiré par la faiblesse, elles ne feront que précipiter de nouveaux appels à la force et en préparer le succès". L'ennui c'est qu'en septembre de la même année, il s'inclinait piteusement avec Neville Chamberlain devant les exigences du Führer, évitant temporairement la guerre, mais oubliant les promesses faites aux Tchécoslovaques et préparant le séisme qui allait ravager l'Europe et le monde moins de 2 ans plus tard.
Churchill avait trouvé le 5 octobre 1938 devant les Communes, les mots justes, mais effroyables pour qualifier cette lâcheté :
« Tout est fini. La Tchécoslovaquie muette, triste, abandonnée et brisée s'enfonce dans les ténèbres », et parlant des brillants négociateurs : "Ils ont eu le choix entre le déshonneur et la guerre ; ils ont choisi le déshonneur, et ils auront la guerre"...
Daladier de son côté, quoique faible, n'était pas dupe. Il fut surpris du triomphe que la foule lui fit à son retour de Munich. Il laissa échapper dans un murmure qui n'échappa pas à son entourage immédiat : "Les cons, s'ils savaient..."
Certes l'Iran de 2006 n'est pas l'Allemagne de 1938 et Israël n'est pas la Tchécoslovaquie, mais tout de même, l'histoire a parfois un goût de déjà vu...
INDEX-PROPOS

18 août 2006

La France prise à son jeu

La France a cherché à jouer un rôle de premier plan dans le conflit qui vient de ravager le Liban.
Elle a, comme le rappelle le Figaro, « largement contribué à rédiger » la résolution 1701 de l'ONU, qui a permis de mettre fin aux hostilités et qui promettait le déploiement d'une force internationale d'interposition d'au moins 15000 hommes.
Aujourd'hui elle reproche à ce texte son caractère évasif et revoit à la baisse les effectifs qu'elle compte incorporer à la FINUL. Au lieu des 3000 hommes vaguement promis, elle propose désormais d'en envoyer 200, ce qui ne l'empêche pas de revendiquer le commandement de ces troupes...
Au vrai, tout se passe comme si les belligérants avaient pris les négociateurs à leur propre jeu, tant le scénario qu'on voit se dérouler ces derniers jours paraît irréel :
-la fin aussi abrupte des combats, au jour dit, à l'heure dite.
-le déploiement subit de l'armée libanaise – pas moins de 60.000 hommes tout de même – On se demande bien d'où ils peuvent sortir « après 40 ans d'absence au Sud-Liban » et plusieurs semaines d'affrontements meurtriers sans qu'on parle un seul instant d'eux.
-Le renforcement enfin de la FINUL. Une semaine après le cessez-le-feu, on ne sait toujours pas à quoi elle va servir, de combien d'effectifs elle va disposer, et sous quel commandement elle va être placée. Il faut rappeler que la « Force Intérimaire des Nations Unies pour le Liban » compte à ce jour 2000 hommes, dont 200 Français. Elle est en place depuis plus de 20 ans, sans possibilité de faire usage de ses armes. Pour quelle efficacité ?

02 août 2006

Nouvelles du front

Les dirigeants européens, à l'exception des Anglais et des Allemands, réclament un « cessez-le-feu immédiat » au Liban. On pourrait sourire de cette magnifique exhortation, aussi vaine que bien intentionnée. Un peu comme celle adressée « avec la plus grande fermeté » au président Ahmadinejad au sujet de son programme nucléaire.
On pourrait en sourire si dans le même temps, n'était condamnée l'attitude d'Israël, accusé de frapper délibérément les civils, et d'aggraver l'animosité du monde arabe en entamant une intervention de grande envergure. Cette dernière est d'ailleurs assez largement jugée inefficace et on entend même dire qu'elle pourrait avoir pour seul résultat de tout détruire dans ce malheureux pays sauf le Hezbollah !
Ces couplets pacifistes, relayés la bouche en coeur par une partie de la Presse, ressemblent fort à ce qu'on entend à propos de l'Irak et de l'Afghanistan et à ce qu'on entendit au moment des attentats du World Trade Center, de Madrid, de Londres... Et ces subtiles arguties ont comme un arrière-goût rance de vieille cuisine munichoise...
Je lis dans un blog américain, ce résumé affreux mais trop vrai, de la problématique simple et dramatique, des Israéliens :
Si les Arabes déposent aujourd'hui, les armes la violence devrait sous peu cesser d'exister
Si les Juifs déposent aujourd'hui les armes, Israël devrait sous peu cesser d'exister...
Pendant ce temps, le président Chavez fait le tour des popotes anti-américaines et antidémocratiques. Lui le président de gauche, si près du peuple, que fait-il de son bel argent sorti du sol sous forme d'or noir ? Comment envisage-t-il donc de le distribuer ?
Probablement sous forme de pruneaux. On apprend en effet qu'il vient de passer auprès de la Russie, une commande de plus de 3 milliards de dollars d'armements divers : avions de chasse Sukhoï 30, hélicoptères de combat, usine de fabrication de Kalachnikov... Il est vrai que le Vénézuela compte tant d'ennemis acharnés autour de lui...

28 juillet 2006

Du sang de la haine et de la mort

Le Liban éclate à nouveau comme une noix sous la pression « disproportionnée » des obus et des missiles de Tsahal.
C'est un peu comme si le bel alphabet antique d'Ahiram volait en morceaux sous la fureur barbare.
Comme si le voile de cendre et de suie qui envahit le ciel, éteignait la splendeur du passé phénicien, éclipsant Byblos, Tyr, et Baalbek, l'ancienne Héliopolis, derrière une grisaille affreuse.
Le Liban pays martyr n'en finira donc pas de rouvrir ses plaies. Et les enfants, les pauvres enfants, continueront encore longtemps de mourir dans un monde qu'ils entrevoient mais qu'ils ne pourront jamais comprendre...
A Beyrouth le gouvernement est un mirage fuyant. Plus on l'espère, plus il s'éloigne. Pour son grand malheur, le pays s'éparpille en mille groupes, en mille religions. Le Président Lahoud soutient le Hezbollah. Or "le Hezbollah ne fonctionne plus comme un état à l'intérieur de l'état mais comme l'état lui-même" (Time). Un Etat qui expose les enfants et les laisse se noyer dans leur propre sang, sans imaginer qu'il contient un peu de celui du Prophète. Les scouts d'Al-Mahdi endoctrinés, brandissent leurs bras encore potelés comme le faisaient avant eux les jeunesses hitlériennes...
Une spirale de haine infernale poursuit de sa malédiction le peuple palestinien. Il semble repousser avec une obstination morbide toute occasion d'aller vers un destin paisible. Chaque espoir se perd dans les sables et devient aussitôt impossible à rattraper.
Israël avec une volonté de fer a bâti une démocratie et a fait émerger du désert un verger. Les Palestiniens refusent obstinément de donner naissance aux leurs à côté. Ils préfèrent encore la désolation et l'odeur perpétuelle de la mort au voisinage des Juifs. En leur sein même hélas, les milices se divisent sans fin, Hizb Allah contre Amal, Hamas contre Fatah. Partout les querelles naissent, croissent et dégénèrent en conflits meurtriers.
Ils ont épuisé la patience de leurs coreligionnaires en Egypte, en Jordanie, en Arabie, mais ils servent de jouets diaboliques à de grands prédateurs. L'Iran qui s'enfonce chaque jour que Dieu fait, un peu plus dans l'intolérance et le fanatisme, achète le sang de ces âmes perdues pour en faire le terreau de ses révolutions. La Syrie actionne des leviers pervers dans le jeu desquels ils font office de courroies de transmission.
La Communauté Internationale assiste impuissante à cet atroce théâtre de l'absurde. Les « gardiens de la paix » onusiens, inutilement mêlés aux combattants de l'ombre, sont de vaines victimes. Les crocodiles bien intentionnés pleurent mais sont impotents. Ils ont ouvert la voie à la Charia en Iran, ils ont couvert avec complaisance de sombres dictatures, devant le drame irakien, ils se lavent les mains. Maintenant ils craignent "qu'on veuille détruire le Liban" et réclament à grands cris un chimérique cessez-le-feu, sorti de nulle part. A l'évidence, les « plus jamais ça » psalmodiés rituellement devant les portes noires des anciens camps d'extermination ne sont en la circonstance plus trop d'actualité...

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