23 février 2011

L'ivresse socialiste

Jean Jaurès (1859-1914) fut un des fondateurs du socialisme à la française. Si aujourd'hui curieusement tout le monde politique s'en réclame, il était loin de faire l'unanimité de son vivant. Ses dithyrambes réclamant l'avènement du communisme effrayaient sans nul doute un peu, mais pis encore, à l'orée de la première guerre mondiale, ses idées pacifistes furent considérées comme du défaitisme. Cela lui valut d'être froidement assassiné par un militant nationaliste exalté, lequel fut tout bonnement acquitté en 1919, à la faveur du regain de patriotisme suivant l'armistice !

Un petit livre* permet, grâce à des textes écrits en 1894, 1898, 1901 et 1903, de se faire une idée des conceptions politiques de celui qui est devenu  un héros "panthéonisé", que François Mitterrand crut bon d'honorer la rose à la main en 1981, et que même l'actuel Président de la république se plait à citer avec emphase dans ses discours.

Nourri au lait enivrant mais pernicieux de Hegel et de Marx, Jaurès avait développé une conception séraphique du socialisme, empruntant à la fois à l'idéalisme et au matérialisme.
Bien que l'expérience désastreuse de la Révolution Française ne lui servit malheureusement pas de leçon, il est pourtant hautement probable qu'il était parfaitement sincère lorsqu'il annonçait en 1894, sous l'emblème du drapeau rouge, "la réconciliation fraternelle de tous les hommes après les séculaires combats".
En dépit d'une vision très "humaniste" du socialisme et de quelques circonstances atténuantes qu'on peut lui accorder, pour n'avoir pas vu en grandeur réelle les méfaits du collectivisme, on ne peut qu'être confondu par la naïveté dont il fit preuve, lui l'homme de terrain.

Il se livre en effet, totalement au catéchisme communiste, dont il juge "admirable" la représentation qu'en avaient donné Marx et Engels. Cette ineffable candeur suscite autant d'admiration que d'effroi. A aucun moment les contradictions, les approximations et la subjectivité dont fourmille son raisonnement, n'entament son enthousiasme.

Par exemple, Jaurès prophétise que "l'avènement du socialisme sera comme une grande révélation religieuse".
Mais cette ferveur n'a dans son esprit, rien de mystique. Au contraire, elle le conduit à préciser que "le mouvement socialiste exclut l'idée chrétienne qui subordonne l'humanité aux fins de Dieu, à sa gloire, à ses mystérieux desseins". Il reprend en l'occurrence le slogan fameux de Blanqui qui ne voulait pour l'être humain, "ni Dieu, ni Maître", ce qui n'évita pas de l'asservir à la dictature désincarnée du Parti...
Dans le même temps, il développe une vision matérialiste du monde et se rallie même à l'idée que tout ici bas obéit au déterminisme, y compris naturellement l'histoire humaine : "la force initiale de vie concentrée dans les premières granulations vivantes et les conditions générales de l'existence planétaire déterminaient d'avance la marche générale et comme le plan de la vie sur notre planète".

Par un curieux paradoxe, tout en prêchant l'abolition de la propriété et la collectivisation des moyens de production, le tonitruant député de Carmaux affirme que "le socialisme est l'affirmation suprême du droit individuel", que "rien n'est au dessus de l'individu". Cultivant sans le savoir l'art de l'oxymore, il prétend même que "le socialisme collectiviste ou communiste donnera le plus large essor à la liberté, à toutes les libertés" !
Autre étrange antinomie, alors qu'il plaide pour l'Internationale Socialiste, il fait reposer les piliers du système sur une conception proche du nationalisme : "les nations, systèmes clos, tourbillons fermés dans la vaste humanité incohérente et diffuse, sont donc la condition nécessaire du socialisme". Plus loin, il affirme même que "la patrie est donc nécessaire au socialisme. Hors d'elle, il n'est et ne peut rien..."
Dernier fait troublant, Jaurès semble hésiter quant à la nature intrinsèque du socialisme qu'il appelle de ses vœux. Il n'aurait rien à voir selon lui, avec une sorte de "communisme primitif". Mais, détail savoureux, il ne saurait non plus s'agir du "socialisme d'état", qu'il assimile au capitalisme honni : "entre le collectivisme et le socialisme d'état, il y a un abîme", car "dans cette création de services publics, il reste fidèle au système capitaliste". "Le socialisme d'Etat est une sorte de pessimisme social..."

En somme, la vision jaurèsienne du socialisme se distingue assez peu de la mystification marxiste, et s'avère entachée de contradictions, ou bien d'erreurs grossières d'appréciation.
Selon lui par exemple, "sous le régime capitaliste, la classe ouvrière est exclue à jamais de la propriété" ! Il ne prévoyait à l'évidence pas, que le capitalisme permettrait justement aux classes les plus modestes d'accéder enfin à un certain bien-être matériel, tandis que le socialisme triomphant les rendraient encore plus pauvres tout en leur interdisant de rien posséder.
On trouve en outre une conception totalement chimérique de la nature humaine et de la réalité de l'existence. On croit rêver en lisant cette angélique déclaration : "Le mineur salarié et dépendant qui descend aux galeries profondes n'est pas pleinement un homme. Il est une pièce dans un mécanisme de production brute.../... Demain, c'est l'humanité elle-même qui descendra au plus profond des puits, .../... ce ne sera plus la servitude de l'homme se mêlant à la servitude des choses, mais la haute liberté humaine façonnant la terre, sa force et ses éléments..."

Il faut reconnaître que des questions pertinentes sont parfois évoquées sous sa plume, mais il s'efforce de les chasser bien vite, ce qui démontre comment la foi peut aveugler la raison, même de gens bien intentionnés.
A certain moment, il se demande par exemple avec une soudaine lucidité si "la communauté ne sera pas tentée de tout abaisser au niveau des besoins les plus grossiers, des âmes les plus communes ? Et pour réprimer la révolte des délicats, pour supprimer les oppositions intellectuelles, si elle ne sera pas conduite à organiser un pouvoir dictatorial ?"
Il craint même dans un noir mais prémonitoire scénario, "qu'une centralisation despotique assurera un régime de médiocrité."
Même s'il se défend évidemment d'être l'oiseau de mauvais augure, on sent par moment qu'il n'en est pas loin : "Si la liberté est incompatible avec la forme socialiste de la propriété, il faut proclamer que la race humaine, au moment même où elle exalte en un rêve de fraternité, d'unité vivante et de grandeur, s'achemine à l'inévitable servitude. Mais qui osera risquer cette sombre prophétie ?"

Enfin, tout à son entreprise de glorification, Jaurès oublie, ou bien élude comme le font souvent les socialistes, les questions concrètes relatives à la mise en œuvre pratique du fabuleux projet. Le caractère fuligineux des mesures qui conduiront à la "libre et joyeuse adaptation de l'individu à l'ensemble", il l'évacue d'une pirouette : "Quand les socialistes se refusent à décrire le détail de la société de demain, on les accuse de ruser : ils respectent tout simplement la liberté de l'évolution et la richesse de la vie !"
S'agissant enfin du concept de dictature du prolétariat qui forme le cœur de la dialectique marxiste, il en minimise la portée en affirmant qu'il ne peut s'agir que "d'une formule de la tactique révolutionnaire pendant la prise de possession du pouvoir..."

Par un curieux hasard, il y a quelques jours, je tombais sur un texte peu connu du philosophe écossais David Hume** (1711-1776). J'y ai trouvé une réflexion qui pourrait magnifiquement qualifier l'ivresse socialiste de Jaurès : "Étant fondée sur un caractère fort, présomptueux et hardi, l’enthousiasme engendre naturellement les résolutions les plus extrêmes, surtout quand il a atteint une hauteur qui inspire au fanatique abusé, la croyance en des illuminations divines, un mépris des communes règles de la raison, de la moralité et de la prudence..."

* Jean Jaurès Le socialisme et la vie. Rivages Poche. Payot 2011.
**David Hume Essai sur la superstition et l’enthousiasme

20 février 2011

Incorrigible arrogance française

Que cela soit à propos de système social, d'éducation, de laïcité, de culture, ou bien encore de justice, il est un trait qui réunit beaucoup de Français : la certitude d'avoir tout inventé et de pouvoir servir de modèle au monde !
Le Président de la République, au moins sur ce point, semble à l'unisson de la grande majorité de son peuple.
On se souvient qu'il était allé il y a quelques mois, à la manière d'un Tartarin, vanter les mérites de notre sécurité sociale à New York, et donner au sujet de la réforme promue par le président Obama, quelques leçons grotesques à un auditoire poli mais non moins averti.

Aujourd'hui, il a cru bon de remettre les pieds dans le plat sur le sujet de la justice. Au risque de créer un incident diplomatique avec le Mexique, il s'est donc fait un devoir de voler au secours de Florence Cassez, "cette jeune femme française", selon ses propres termes, "condamnée dans les conditions que l’on sait à 60 ans de prison..."

Semblant la considérer, au seul motif qu'elle est française, comme une victime, alors qu'elle a été reconnue coupable à plusieurs reprises de forfaits plutôt odieux, il piétinait ainsi ses beaux discours de la veille qui stigmatisaient l'attitude complaisante des juges vis à vis des malfaiteurs dans notre pays.
Plus fort, il annonça son intention de dédier l'année du Mexique à Florence Cassez, ce qui ne manqua pas de déchainer l'ire des autorités mexicaines, regrettant qu'on lie une décision de justice à un événement culturel.
De son côté, la ministre des Affaires Etrangères, madame Alliot-Marie, qui ne rate pas une occasion de dire ou de faire des bêtises, avait mis la barre arrogante très haut, en parlant carrément de "déni de justice".
Dans le même temps, l'ensemble de la classe politique s'insurgeait d'ailleurs avec une belle unanimité, contre la décision de la justice mexicaine. Martine Aubry, annulait "pour montrer l'exemple", une exposition d’estampes mexicaines qui devait se tenir à Lille...

Sans être initié aux choses diplomatiques, on peut affirmer qu'il eut été difficile d'être plus maladroit pour défendre une cause. C'est même à se demander quel but ces chers politiciens poursuivaient. Souhaitaient-ils vraiment le transfèrement de la prisonnière ? Imaginaient-ils sérieusement qu'en prenant  ainsi à rebrousse-poil les institutions mexicaines, ils obtiendraient une mesure de clémence ?
Avaient-ils une raison inavouable et grave de se fâcher avec le Mexique pour dramatiser de manière insensée cet imbroglio juridique? Ou à l'inverse souhaitaient-ils donner à ce dernier une opportunité de médiatiser la fermeté de son système judiciaire ?
En la circonstance, on pourrait en tout cas insinuer qu'ils ont soutenu l'accusée comme la corde soutient le pendu...

Toujours est-il que ce raptus s'inscrit dans le festival des occasions manquées, au moment où notre système judiciaire donne au monde une image si pitoyable. Où il n'est pas de jour qu'on n'apprenne un nouveau fait divers témoignant de l'incapacité d'empêcher de nuire et pire de récidiver, les plus affreux assassins. Où même les juges n'hésitent plus à se mettre désormais en grève pour de médiocres raisons politiciennes, mal cachées derrière un prétendu honneur bafoué !

15 février 2011

George W. Bush avait peut-être raison...

C'est un fait, j'aime assez la provocation. Avec un tel titre je vais donc faire une fois encore figure d'iconoclaste, voire pire.
Et pourtant...
George W. Bush croyait que l'Irak et même l'Afghanistan étaient solubles dans la démocratie. D'une manière générale, il imaginait possible que toutes les nations du Proche-Orient puissent un jour être gouvernées par des dirigeants que le peuple serait en mesure de congédier, ou de renouveler par des élections libres.
Aujourd'hui, on voit des quantités de gens bien intentionnés exulter et s'ébaudir devant les promesses de lendemains qui chantent en Tunisie, en Egypte, et ailleurs. C'est à peine si un doute traverse leur esprit. La révolution, même violente, ne peut que donner naissance à la démocratie !

Puisse le cours des évènements leur donner raison.
N'empêche... Pourquoi a-t-il fallu qu'ils fassent la fine bouche (sans jeu de mot) lorsque l'Amérique, prenant la tête d'une vertueuse croisade, appela tous les gens de bonne volonté à les suivre dans leur objectif de dégommer, non sans vraie raison, des tyrannies autrement plus costaudes et cruelles que celles qui chancellent à l'instant présent ?

A ce jour, même si l'équilibre est fragile, et si de nombreux périls subsistent, l'Irak est incontestablement un pays où les élections sont libres. N'y a-t-il pas là un exemple de nature à galvaniser les foules à Tunis, au Caire et ailleurs, pour secouer le joug qui pèse sur elles depuis trop longtemps ? Difficile à affirmer, mais c'est désormais un fait : si plusieurs peuples parviennent à trouver un chemin vers la liberté, la fameuse théorie des dominos a quelques chances de devenir une belle réalité.
Et ce chemin, que Jean-François Revel évoquait autrefois en parlant de "regain démocratique", il est imaginable qu'un nombre croissant des habitants de ces pays espèrent vraiment le prendre. On peut être consterné par la nuée de Tunisiens qui s'abat soudain sur l'Europe, mais dans leur désespoir, il y a comme une légitimation du système démocratique, qui plus est, "capitaliste" : Pour nous, l'Italie, c'est le paradis !" (Figaro 14/02/11).
Si un jour pas trop lointain l'Iran est contaminé par cette fièvre d'émancipation, ce sera une région brûlante du globe qui pourrait changer de visage et accéder à une vision apaisée de la gouvernance interne et des relations internationales.

S'il est un vœu à faire, c'est que tout puisse évoluer en ce sens et que les nations libres soient en mesure d'aider la liberté à progresser. Sans naïveté, sans complaisance, sans hypocrisie, mais avec autant de fraternité et de force qu'il est possible.
Au lendemain de la dernière guerre, plusieurs dictatures infâmes s'effondrèrent grâce à la détermination des puissances alliées. Qui eut pu croire à l'époque que ces nations qui étaient devenues maudites, fussent en mesure de retrouver si vite, la voie de la respectabilité ?

10 février 2011

Solitude

Le ciel est habité par de grands oiseaux noirs
Qui voltigent en rond dans un pesant silence
Et leur noria lugubre est comme une évidence
Où planent les relents de mornes désespoirs.

Aucune âme qui vive en ces grands entonnoirs
Tournoyant sans raison, sans but, sans existence,
Et sur ce long ennui, sur cette déshérence
La pluie verse sans fin ses navrants arrosoirs.

Au bord de l'horizon, une lueur s'élève
Mais sa clarté fait luire un spectacle sans sève
Sur lequel l'air atone étale un voile blanc.

Rien ne peut s'émouvoir dans cette molle ouate
Et tandis que le temps s'allonge en moelle mate
Je me sens triste et seul, privé de tout élan.

08 février 2011

Incurie judiciaire, combien de morts ?

L'affaire de la malheureuse Laetitia envoie une terrible claque à l'ensemble de la société.
Deux problématiques sont plus que jamais à vif, comme des plaies : comment empêcher de nuire les délinquants multi-récidivistes, et comment combler l'insuffisance manifeste de l'arsenal légal vis à vis des crimes les plus odieux ?

Comment éviter la récidive ?
On entend souvent les apôtres de la mansuétude répressive, minimiser le problème en affirmant qu'en matière de délit sexuel la récidive ne concernerait que 2,7% des délits. Or cette affirmation abrupte ne veut strictement rien dire. La vraie question n'est pas celle de la première récidive. Mais toutes celles qui suivent... La récidive appelle hélas la récidive, et malheureusement en croissant dans l'échelle de la gravité : "Qui vole un oeuf, vole un boeuf" comme dit l'adage...
En l'occurrence, à la quinzième exaction, la probabilité qu'il y en ait une seizième tient de la certitude...

En matière de récidive, la responsabilité du délinquant est certes majeure ("il a ça dans le sang", diraient certains...), mais celle du système judiciaire n'est pas moins criante. On est d'autant plus enclin à récidiver qu'on a le sentiment d'impunité. Depuis sa dernière sortie de prison, en février 2010, pas moins de quatre procédures judiciaires auraient été ouvertes contre le présumé assassin de la jeune fille. "Or, sous le coup de ces différentes poursuites, il lui a suffi de ne pas déclarer sa dernière adresse pour ne pas être inquiété." (France Soir)
Comment ne pas être "indigné", comme dirait M. Hessel ?

Comment sanctionner les crimes les plus affreux ?
Face au coupeur de tête lénifiant Vincent Peillon*, on pouvait entendre récemment (29/01/11) dans le salon kitsch et feutré de Canal Plus (Ardisson), le journaliste Robert Ménard (Reporters sans Frontières) s'insurger contre l'hypocrisie de l'abolition de la peine de mort et poser la question crûment : "Devant des gens qui se mettent hors de l'humanité parce qu'ils commettent des crimes abominables : que fait-on ?"
En guise de réponse, le dit Peillon n'eut d'autre argument que de déplorer le manque de moyens pour la justice et  il considéra gravement que la sanction ne devait pas être une vengeance, qu'en aucun cas on ne doit "faire la justice du point de vue de la victime".
Ce type de raisonnement qui a beaucoup servi, n'est vraiment plus admissible, tant il est simpliste et empreint d'hypocrisie.
A cause de ses innombrables dépenses sociales, l'Etat est en faillite; où diable peut-il encore prendre des moyens ? D'aucuns diront finement "dans la poche des riches", mais ce ne serait que repousser la question, puisqu'il est désormais démontré que plus il détrousse les contribuables, plus il s'endette !
S'agissant du second volet de la plaidoirie, c'est pire, si je puis dire. Car si l'on ne fait pas la justice du point de vue des victimes, de quel point de vue la fait-on ? Le premier objectif n'est-il pas précisément d'empêcher qu'il y ait des victimes de malfaiteurs ? Et à défaut de prévenir les crimes, du moins empêcher la récidive ? Et dans les cas où c'est encore possible, permettre aux victimes d'obtenir réparation ?
En quoi la peine de mort ressemblerait plus à une vengeance que la réclusion perpétuelle "vraie", seul moyen d'empêcher ce type d'assassin de nuire ?
On entend souvent des adversaires résolus de la peine de mort soutenir sans gêne que si l'un de leurs proches était victime d'un monstre, ils n'hésiteraient pas à se faire justice eux-mêmes. Il s'agit à mon sens du plus beau plaidoyer pour le rétablissement de la peine de mort. Car s'il faut éviter quelque chose, c'est bien cette irrépressible envie de vengeance, cette soif de se faire justice soi-même !

Combien faudra-t-il de morts pour qu'enfin le problème soit abordé sans tabou idéologique et avec vrai un souci d'efficacité ?
Face aux lacunes effrayantes de notre système judiciaire, que trouve utile de faire le chœur des magistrats éplorés ? Manifester leur mécontentement d'avoir été tancés par le chef de l'Etat ! Dans quel pays est-on ? Ces gens n'éprouvent donc aucun regret, ne se posent aucune question et s'estiment au dessus de toute évaluation, de toute réprimande. Hallucinant...
Non seulement ils ne cherchent pas à se justifier après cette monumentale bourde, mais ils ne trouvent rien de plus futé que de se mettre en grève !
Le Président qui tient sa légitimité du peuple, est sans cesse attaqué pour sa politique. On lui demande à tout moment de s'excuser, voire de congédier tel ou tel ministre pour une seule phrase malheureuse. Partout on préconise l'évaluation et les actions correctives, voire les sanctions lors de dysfonctionnements (Mediator), et la justice pourrait être exonérée de cette obligation ?

* La Révolution française n'est pas terminée  Vincent Peillon, Seuil, 2008

24 janvier 2011

Les trompe-l'oeil de l'économie

Décidément le concept de révolution est à la mode. Après celle proposée par Mélenchon, inspirée de son propre aveu, par les sinistres épisodes de 1789 et de la Commune, voici celle réclamée au plan fiscal par une brochette d'économistes "indépendants" (Thomas Piketty, Camille Landais, Emmanuel Saez).
Rejoignant ceux qui se disent "atterrés" par la marche actuelle de l'économie, et qui prétendent que l'Etat peut dépenser sans compter, en voici donc trois autres qui affirment maintenant qu'il lui serait aisé d'augmenter les recettes, à condition de revoir de fond en comble le système fiscal actuel.

Partant d'un constat que personne ne peut vraiment contester, à savoir qu'il est "complexe et peu transparent", ils en proposent une rénovation drastique, placée sous le triple principe de "l'équité, la progressivité, et la démocratie".
C'est là que le bât blesse. Car immédiatement, on subodore que ces principes sont imprégnés de considérations plus idéologiques  que pragmatiques.
De fait, Thomas Piketty qui est le chef de file de cette "nouvelle" école n'est pas un économiste que l'on pourrait qualifier de "neutre". Rappelons qu'il se vante d'être très proche du Parti Socialiste et qu'il soutint même officiellement la candidature de Ségolène Royal en 2007 (laquelle avoua après l'élection, pour excuser son échec, avoir défendu un programme auquel elle-même ne croyait pas...).
Assez logiquement, les principaux ouvrages déjà parus de M. Piketty traitent de manière quasi obsessionnelle des inégalités fiscales, en pointant d'un doigt insistant sinon réprobateur les hauts-revenus. Autant dire tout de suite qu'il est, comme la plupart des Socialistes, un défenseur du concept de l'impôt redistributeur de richesses (dont le slogan "il faut faire payer les riches", est une des triviales mais habituelles modalités d'expression)
C'est sans doute pourquoi aujourd'hui il soutient sans gêne que l'imposition en France serait injuste et surtout "régressive". A savoir selon lui, que par un paradoxe étonnant "Les Français les plus modestes sont davantage taxés que les plus riches" !
On se pince, et on se demande dans ces conditions, pourquoi les gens les plus fortunés n'ont de cesse de délocaliser leur domicile fiscal à l'étranger... Seraient-ils idiots ? On se demande également par quel sortilège, plus de la moitié des foyers qui ne paient pas officiellement d'impôt direct, seraient aussi selon cette théorie, ceux sur lesquels pèserait le plus lourdement le fisc.
Ou bien, a contrario, par quel mystère la plus lourde part de l'impôt, à savoir 80%, n'est supportée que par 20% des Français, les plus aisés...

Le problème est que ces experts un peu orientés présentent les chiffres à leur façon. D'abord, ils expriment la pression fiscale en % d'imposition des revenus et non en valeur absolue ce qui induit d'entrée un biais (tellement courant qu'il fait désormais partie des présupposés de presque tout raisonnement en la matière).
Pourtant, un collégien même peu doué saurait dire qu'à pourcentage d'imposition égal, l'impôt retire beaucoup plus d'argent à un "riche" qu'à un "pauvre". Le simple fait de déterminer le montant de l'imposition en proportion des revenus (tax flat), induit de fait une progression "équitable" dans le volume des contributions. Celle-ci est juste démultipliée dans notre beau système, car ce même taux, loin d'être stable, croit rapidement avec le niveau de revenus (le bouclier fiscal est supposé le plafonner à 50%). C'est en quelque sorte, la double peine...
Le plus grave toutefois, est qu'ils définissent le champ de l'impôt de manière très libre voire fantaisiste : Ils y incluent tout d'abord ce qui n'en est pas (les charges sociales, notamment la CSG, qui comme leur nom l'indique, sont des cotisations, dont la part la plus copieuse est comme chacun sait, supportée par l'employeur).
Ils extrapolent le poids relatif de la fiscalité sur les différentes classes sociales, à partir de considérations aléatoires ou peu explicites. Ainsi, prétendre comme ils le font, que la TVA pèse davantage sur les classes modestes, qui "consomment tous leurs revenus alors que les riches peuvent épargner" est une interprétation subjective, qui  occulte au passage l'existence de taux variables en fonction de la nature des biens (TVA réduite sur les biens de première nécessité) ainsi que les taxes qui obèrent le produit de l'épargne (laquelle, lorsqu'elle n'est pas investie, est quand même destinée à être dépensée...).
Last but not least, ils passent sous silence les allocations et nombreuses aides et pondérations qui atténuent sensiblement le poids de l'impôt des plus modestes.

Fort de leur diagnostic partisan, ils proposent une réforme dont la pierre angulaire consiste à fusionner l'impôt sur le revenu et la CSG, le tout grossi de quelque menu fretin (prélèvement libératoire, prime pour l'emploi..). Dans le même temps, ils suppriment le bouclier fiscal, et laissent intacts  les myriades de taxes qui gravitent comme des vautours au dessus des contribuables : l'ISF (qu'ils qualifient "d'impôt de l'avenir"), la TVA, les impôts locaux, les taxes professionnelles, l'impôt sur les sociétés, la CRDS ... 
Preuve de l'inspiration socialiste de cette mesure, on pouvait entendre ce jour même François Hollande (en visite auto-promotionnelle dans l'émission "Capital" qui la reprenait à son compte, en avouant qu'une augmentation des prélèvements était inévitable...

En somme, cette proposition ressemble vaguement aux plans mirifiques des organismes de rachat de crédits. Elle donne l'impression de simplifier les choses, tout en procurant la vague illusion d'une économie (il faut être naïf pour y croire). Mais au fond, il ne s'agit que d'un pis-aller qui augmente encore le poids total de la charge en le répartissant différemment, et surtout pousse à dépenser toujours un peu plus, au dessus de ses moyens...
Elle fait de la CSG un impôt général, ce qui revient à un tour de passe-passe. Rappelons que lorsqu'elle avait été inventée en 1990 par les Socialistes, pour "élargir l'assiette des cotisations sociales" à destinée exclusive de la Sécurité Sociale, ils avaient insisté sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'un nouvel impôt et qu'elle n'était pas vouée à augmenter (elle était même déductible pour partie des impôts). Or l'intégration dans l'impôt sur le revenu lui fera faire un bond spectaculaire... pour tous ceux qui sont imposables  ! (en vingt ans son taux a déjà été multiplié par 7, passant de 1,1% à 7,5% des revenus, et comme cela ne suffisait pas M. Juppé y a ajouté la CRDS, sur le même principe...).
Pour couronner le tout elle prévoit la retenue de l'impôt "à la source", par l'employeur. Ce dernier déjà transformé en agent de recouvrement au service des organismes sociaux du monopole d'Etat, deviendra donc celui du fisc, qui de son côté, aura benoîtement dissimulé sa ponction dans la part non visible du salaire...

Au total, ce projet qui vise à augmenter la charge fiscale, dans un pays déjà champion toutes catégories en la matière, ne répond donc à l'évidence à aucun souci d'efficacité, mais au seul diktat de la prétendue justice sociale et à l'amour de la redistribution étatique.
Il y a tout lieu de penser que le système restera aussi sinon plus complexe et impénétrable qu'avant. Les riches, mais pas seulement eux seront encore un peu plus tentés d'aller voir ailleurs. La croissance restera plus que jamais bridée, et tout gain éventuel sera de toute manière englouti par "la pompe à phynances" de l'Etat. Quant à ce dernier, il pourra continuer d'augmenter en toute impunité ses folles dépenses... jusqu'au jour où...

NB : A ce jour, l'impôt sur le revenu ou IRPP rapporte environ 60 milliards d'euros par an et la CSG plus de 84 milliards (son taux actuel est de 7,5% sur les revenus du travail, et de 8,2% sur les produits des placements). Le produit de la TVA est de l'ordre de 180Mds€.
A ce jour les prélèvements obligatoires représentent plus de 44% du PIB (contre 36% en moyenne pour l'OCDE). La dette de l'Etat est au minimum de 1500 milliards d'euros soit 81,5% du PIB, et rien que l'intérêt de cette dette coûte chaque année l'équivalent de ce que rapporte l'impôt sur le revenu...

20 janvier 2011

Un grand bond en avant

Une petite brochure intitulée "Manifeste d'Economistes Atterrés" s'affiche de manière un brin provocatrice, en ce moment à la vitrine des librairies.
Le titre à lui seul est un programme. La méthode qu'il suggère, consistant à "manifester" et à "pétitionner", évoque bien plus un discours militant qu'une analyse objective. Le vivier intellectuel d'où provient le "collectif" d'auteurs (ATTAC, CNRS, EHESS) est un autre indice subtil, laissant imaginer la teneur du propos. Quant à la flopée de louanges médiatiques qui salue l'initiative, elle ne laisse plus aucun doute (Marianne, Alternatives Economiques, Mediapart). Il ne s'agit pas d'une apologie du capitalisme...

Le petit jeu de ces "économistes" dont on a compris l'inspiration altermondialiste, consiste tout simplement à nier en quelque sorte l'évidence (dix évidences pour être précis).
Ça serait amusant s'ils ne prenaient pas leur théorie pour argent comptant, si je puis dire. Malheureusement c'est qu'ils font mine d'y croire les bougres, n'hésitant pas, pour appuyer leurs thèses, à accumuler les contre-vérités !
Le coeur de leur discours, désormais assez classique, consiste à minimiser l'ampleur de la Dette Publique et de toute manière à soutenir qu'elle n'est pas un problème en soi. Au contraire même, il ne faudrait pas hésiter, selon ces nouveaux prophètes, à l'alourdir pour relancer l'économie !

Première révélation, qu'ils l'affirment haut et fort, l'envolée des dettes de l'Etat Providence ne serait pas due à un excès de dépenses ! En voilà une nouvelle, qu'elle est bonne ! Devrait-on en déduire qu'on manque de rentrées ?
Rappelons qu'en France, l'Etat n'a jamais bouclé un budget en équilibre depuis 1974, bien qu'il n'ait eu de cesse d'augmenter ses recettes par tous les moyens... des contribuables. Et contrairement à ce que ces savants un peu bigleux affirment, les impôts et charges ont tellement progressé qu'ils sont désormais les plus élevés du monde développé. Entre 1974 et 2005 leur poids est passé de 35,4 à 44,1% du PIB (moyenne OCDE en 2005 : 36,2) ! S'il y a "concurrence fiscale" comme ils disent, nous sommes donc vraiment compétitifs... mais dans le mauvais sens !

Par un paradoxe cruel mais criant, la pression fiscale tous azimuts de l'Etat, ne conduit qu'à détériorer le rapport qualité/prix du Service Public dont à peu près tous les indicateurs "sociaux" restent désespérément au rouge (chômage, pauvreté, éducation, logement, sécurité...)
Comme par hasard d'ailleurs, la croissance, dont ils admettent qu'elle est susceptible d'aider à résorber les déficits, est chez nous durablement une des plus faibles de ce même monde. Logique, à chaque fois qu'elle fait mine de décoller, paf ! une augmentation des "prélèvements obligatoires" vient la plaquer au sol.

S'agissant des dépenses publiques, ces brillants esprits ont là aussi quelque peu tendance à mésestimer la réalité, en affirmant "qu'elles sont stables ou en baisse dans l'Union européenne depuis le début des années 1990". Aimable plaisanterie. Ils oublient juste de dire qu'elles sont passées dans notre beau pays, de 39,3% à 52,7% du PIB entre 1974 et 2008 (selon le gouvernement lui-même).
Le pire est que ces dépenses sont entièrement dévolues au puits sans fond de la prétendue "justice sociale". Elles sont donc structurelles, incoercibles, liées à l'inflation permanente du soi disant "Service Public". Aucun retour sur investissement n'est à espérer dans cette mécanique infernale. Une dépense en entraine une autre, sans fin. Selon le refrain bien connu, il faut toujours "plus de moyens", mais les résultats ne viennent jamais. Et de toute manière, il ne faut pas chercher à les évaluer, ce serait bassement "marchand"...

Comme tout est à la même enseigne dans cet édifiant opuscule, on pourrait conclure que si nous sommes aujourd'hui au bord du gouffre, il suffirait d'appliquer ne serait-ce qu'a minima les recommandations qu'il propose, pour faire un grand pas en avant...

17 janvier 2011

Vae Victis

L'affaire du Mediator n'en finit pas de défrayer la chronique.
Après plusieurs semaines de surenchère médiatique, elle a pris la tournure d'une catastrophe sanitaire de grande ampleur (plus de 2000 morts selon les projections théoriques les plus outrancières).
Dans la foulée, et selon la bonne vieille habitude, les Pouvoirs Publics aux abois ont cru bon, pour circonscrire l'incendie, de se délester par IGAS* interposée, d'un "rapport".
Ce rapport est "accablant" pour le Laboratoire, coupable de négligence voire de "manœuvres" ou de "tromperie". Pour lui, c'en est donc probablement fini, maintenant qu'il est ainsi cloué au pilori. La curée peut commencer. Au moment où la crise transforme tous les entrepreneurs qui réussissent en salauds, que dire de ceux qui sont présentés comme n'hésitant pas à vendre des produits mortifères pour satisfaire leur cupidité ? Alors qu'aucune vraie enquête judiciaire n'est commencée, M. Servier, est déjà cité à comparaître devant le Tribunal Correctionnel. Et tout le monde veut déjà se servir sur la bête. Les patients d'abord, poussés par le "sens de l'histoire", et de zélés avocats, constituent leurs dossiers de doléance. La demande de création d'un fonds d'indemnisation est sollicitée d'urgence. L'Assurance Maladie n'est pas en reste. L'avocat de la CNAM souhaite que cette dernière soit indemnisée par Servier à hauteur de 220 millions d'euros pour la période 2000-2009...

Ce rapport est accablant également pour les organismes publics, non moins sévèrement pointés du doigt pour leur "lenteur", leur "lourdeur", leur "manque de réactivité", et leur "inefficacité". Pourtant , dans ce contexte, cela va de soi, personne en particulier ne sera selon toute probabilité, inquiété (sans doute, l'adage "responsable mais pas coupable" fera jurisprudence). Au contraire, on peut déjà prévoir que la machinerie étatique pourtant gravement mise en défaut, renforcera encore son emprise. On procédera à une nouvelle réforme interne, on changera sans doute une fois de plus le nom des institutions chargées de "réguler" et "d'encadrer" la commercialisation des médicaments. On peut s'attendre également à un alourdissement de la bureaucratie déjà très complexe supposée autoriser, réglementer, contrôler. M. Bertrand commence déjà à invoquer pour protéger les organismes d'état, le principe très commode du "renversement de la preuve"...
Etrange histoire pour un médicament dont le rapport bénéfice/risque était d'emblée médiocre et connu de tous, et qui fut pourtant trente ans durant, avalisé par toutes les autorités dites compétentes, remboursé par une Sécurité Sociale complaisante, prescrit par des médecins pas trop regardants, et consommé par des patients très demandeurs, surtout dans ses indications non reconnues, à savoir celle de coupe-faim...
Mais le fait est que lorsque le scandale est là, malheur aux vaincus...

La Tunisie s'embrase.
La Tunisie était le pays du Maghreb le plus souvent cité en modèle. Celui qui quoique sans ressources naturelles avait les meilleurs indicateurs socio-économiques, qui s'était le plus modernisé, qui pouvait afficher les meilleurs chiffres en matière d'alphabétisation et d'éducation. Un des pays musulmans enfin, où la religion semblait manifester le moins d'agressivité (au fil des siècles, toutes les autres avaient tout de même été à peu près complètement éradiquées de son sol...)
Aujourd'hui, ce pays sombre brutalement dans la révolution. Hélas, même avec le doux nom du jasmin, et même si elle est présentée comme une entreprise de libération, elle compte déjà des dizaines de morts, et à l'instant présent, montre au monde le visage hideux des lynchages, des saccages, des pillages, des accusations à l'emporte-pièce...
Certes le régime établi depuis 23 ans par le président Ben Ali désormais déchu, n'était pas un parangon de démocratie. Elu et réélu depuis 1987 avec des scores généralement supérieurs à 90%, il témoignait d'une absence quasi totale d'opposition et d'un quadrillage policier permanent.
Tout n'était certes pas au beau fixe dans ce pays, mais cela n'empêchait pas des millions de touristes joyeux et insouciants d'affluer chaque année sur ses plages idylliques. Certains commençaient même à s'y faire soigner, preuve des progrès accomplis en la matière ! Cela n'empêchait pas non plus les entreprises d'y délocaliser leurs chaines de production, et une nombreuse clientèle d'acheter les produits qui y étaient fabriqués, en raison de leur prix très attractif. Cela n'empêchait pas enfin, l'Internationale Socialiste de compter avec beaucoup de mansuétude dans ses rangs, le parti au pouvoir à Tunis, à savoir le RCD (au même titre que celui de Laurent Gbagbo d'ailleurs...)
Personne n'a donc de leçon de vertu à donner et il n'y a guère de raison d'ironiser sur l'attitude quelque peu gênée aux entournures, du gouvernement français, observant dans un premier temps sans mot dire (si ce n'est des maladresses) le soulèvement populaire.
Ce fut de toute manière le lot de la plupart des pays. Et d'ailleurs que pouvait-on dire ou faire de plus que pour la Côte d'Ivoire où se déroule depuis plusieurs semaines, une pitoyable mascarade. Où l'on voit un président clairement rejeté par la volonté populaire, narguer la communauté internationale, et se maintenir en place par la force, après avoir, lui aussi, fait tirer sur ses compatriotes...
S'agissant de la Tunisie, plus rien n'empêche maintenant que le dictateur est en fuite, les langues de se délier subitement. Désormais, la France exprime "un soutien déterminé" au peuple tunisien, elle réclame "au plus vite des élections libres", et dixit la Presse en chœur : "La quasi-totalité de la classe politique française a salué la chute du régime tunisien".
Encore une fois malheur aux vaincus...

Ces deux histoires n'ont strictement rien en commun, cela va de soi. Mais dans les deux cas,  il faut bien évidemment souhaiter que le droit sorte renforcé de ces désordres, et qu'on y gagne plus de responsabilité et de liberté. Mais on peut hélas avoir quelques doutes...

*IGAS : Inspection Générale des Affaires Sociales

13 janvier 2011

Chine morte, Chine transfigurée

Lorsque Pierre Loti (1850-1923), à la fin du mois de septembre 1900, aborde le golfe de Petchili, par où l'on accède  par voie maritime à Pékin, un été terrible s'achève. Quelques mois auparavant, la révolte furieuse des Boxers avait en effet mis cette région à feu et à sang.
Né au sein d'une confrérie influente d'adeptes du Kung Fu, et dirigé initialement contre les derniers héritiers de la dynastie des empereurs mandchous, accusés d'avoir laisser déchoir le pays, ce brusque soulèvement se tourna avec une particulière violence vers les étrangers et par extension vers les Chrétiens, jugés coupables de piller les ressources du pays depuis près d'un siècle.

En ce début d'automne, au terme du fameux siège de Pékin, long de 55 jours, la rébellion vient d'être matée et sévèrement réprimée par l'alliance conjoncturelle de huit nations, dont la France.
Le monde que va découvrir Loti porte encore la marque nauséabonde de ces horreurs. Le spectacle est consternant. Dans les jardins de l'évêché de la ville impériale par exemple, "les puits dévastés remplissent aujourd'hui le voisinage d'une odeur de mort. C'étaient trois grands puits ouverts, larges comme des citernes, fournissant une eau si pure qu'on l'envoyait de loin chercher pour le service des légations. Les Boxers les ont comblés jusqu'à la margelle avec les corps mutilés des petits garçons de l'école des frères et des familles chrétiennes d'alentour. Les chiens tout de suite sont venus manger à même l'horrible tas qui montait au niveau du sol; mais il y en avait trop; aussi beaucoup de cette chair est-elle restée, se conservant dans la sécheresse et dans le froid, et montrant encore des stigmates de supplice. Telle pauvre cuisse a été zébrée de coupures, comme des entailles faites sur les miches de pain par les boulangers. Telle pauvre main n'a plus d'ongle. Et voici une femme à qui l'on a tranché avec quelque coutelas une partie intime de son corps pour la lui mettre dans la bouche, où les chiens l'ont laissée entre les mâchoires béantes..."

Derrière ces décombres fumants, les vestiges d'une civilisation vieille de trente siècles vont pourtant s'imposer au nouvel arrivant à la manière d'une révélation sublime et tragique.
La Chine à l'orée du XXè siècle est un paysage étrange, où la mort et la désolation côtoient sans cesse les merveilles du passé.
La mort est en effet partout. Celles des récents massacres avant tout. Mais aussi les tombeaux qui peuplent cet univers laqué : "Des tombeaux, toujours beaucoup de tombeaux; la Chine, d'un bout à l'autre, en est encombrée".
Et d'une manière plus générale, la poussière "soufflée par les déserts de Mongolie", qui envahit l'atmosphère et semble couvrir le pays d'une sorte de linceul : "la poussière, l'éternelle et souveraine poussière, confond les objets, les gens, la foule d'où s'échappe un bruit d'imprécations, de gongs et de clochettes, dans un même effacement d'image estompée."

Mais dans ce monde qui semble désespéré, au sein de la confusion et du désastre, se dessinent pourtant peu à peu des formes d'une surprenante beauté. Et pour le bonheur du lecteur, l'écrivain excelle dans l'art de dépeindre les sensations qui croissent en lui à mesure qu'il fait la connaissance de cet environnement stupéfiant auquel tant de "barbares d'Occident" sont restés hermétiques : "Au-dessus de l'invraisemblable poussière, rayonne une clarté blanche et dure, et resplendit cette froide et pénétrante lumière de Chine, qui détaille les choses avec une rigueur incisive. Tout ce qui s'éloigne du sol et de la foule se précise par degrés, prend peu à peu en l'air une netteté absolue. On perçoit les moindres petits monstres, au faîte de ces arcs de triomphe, si haut perchés sur leurs jambes minces, sur leurs béquilles, sur leurs échasses qui semblent se perdre en dessous, se diffuser, s'évaporer dans le grouillement et dans le nuage. On distingue les moindres ciselures au sommet des stèles, au sommet des hampes noir et or qui montent piquer le ciel de leurs pointes; et même on compterait toutes les dents, les langues fourchues, les yeux louches de ces centaines de chimères d'or qui jaillissent du couronnement des toits."

En découvrant les temples et les palais de la ville impériale, Loti est ébahi. Il a "la révélation d'un art chinois, que l'on ne soupçonne guère en Occident, d'un art au moins égal au nôtre, bien que profondément dissemblable. Portraits d'empereurs en chasse ou en rêverie solitaire dans des forêts, dans des sites sauvages qui donnent l'effroi et le nostalgique désir de la nature d'autrefois, du monde inviolé des rochers et des arbres. Portraits d'impératrices mortes, peints à l'aquarelle sur des soies bises, et rappelant un peu la grâce candide des Primitifs italiens; portraits pâles, pâles, presque incolores, comme si c'étaient plutôt des reflets de personnes, vaguement fixés et prêts à fuir; la perfection du modelé, obtenue avec rien, mais toute l'intensité concentrée dans les yeux que l'on sent ressemblants et qui vous font vivre, pour une étrange minute, face à face avec des princesses passées, endormies depuis des siècles sous les mausolées prodigieux... Et toutes ces peintures étaient des choses sacro-saintes, que jamais les Européens n'avaient vues, dont ils ne se doutaient même pas. "

Il s'émerveille du talent, de l'imagination et de la précision diabolique dont ont fait preuve les artistes chinois pour faire parler les matières : "même dans les mille détails des broderies, des ciselures, dont la profusion ici nous entoure, combien cet art est habile et juste, qui, pour rendre la grâce des fleurs, en exagère ainsi les poses languissantes ou superbes, le coloris violent ou délicieusement pâle, et qui, pour attester la férocité des êtres quels qu'ils soient, voire des moindres papillons ou libellules, leur fait à tous des griffes, des cornes, des rictus affreux et de gros yeux louches... Elles ont raison, les broderies de nos coussins : c'est cela, les roses, les lotus, les chrysanthèmes! Et, quant aux insectes, scarabées, mouches ou phalènes, ils sont bien tels que ces horribles petites bêtes peintes en reliefs d'or sur nos éventails de cour... "

"Le grand luxe inimitable de ces salles de palais, c'est toujours cette suite d'arceaux d'ébène, fouillés à jour, qui semblent d'épaisses charmilles de feuillages noirs. Dans quelles forêts lointaines ont poussé de tels ébéniers, permettant de créer d'un seul bloc chacune de ces charmilles mortuaires? Et au moyen de quels ciseaux et avec quelle patience a-t-on pu ainsi, en plein bois, jusqu'au cœur même de l'arbre, aller sculpter chaque tige et chaque feuille de ces bambous légers, ou chaque aiguille fine de ces cèdres, — et encore détailler là dedans des papillons et des oiseaux"

Au printemps 1901, au moment de quitter cette Chine dans laquelle le sentiment dramatique se mariait si étroitement à l'extase, Loti fait un constat déchirant : "Cette « Ville impériale », c'était un des derniers refuges de l'inconnu et du merveilleux sur terre, un des derniers boulevards des très vieilles humanités, incompréhensibles pour nous et presque un peu fabuleuses."

Le titre de l'ouvrage le dit sans détour, pour l'auteur la Chine millénaire avait vécu ses dernières heures et il faut bien dire que sa vision de l'avenir avait de quoi inquiéter : "Mon Dieu, le jour où la Chine, au lieu de ses petits régiments de mercenaires et de bandits, lèverait en masse, pour une suprême révolte, ses millions de jeunes paysans tels que ceux que je viens de voir, sobres, cruels, maigres et musclés, rompus à tous les exercices physiques et dédaigneux de la mort, quelle terrifiante armée elle aurait là, en mettant aux mains de ces hommes nos moyens modernes de destruction!... Et vraiment il semble, quand on y réfléchit, que certains de nos alliés aient été imprudents de semer ici tant de germes de haine et tant de besoins de vengeance. "

De fait, après la terrible révolte des Boxers, vint l'écroulement définitif de l'Empire, les débuts très tourmentés de la République, la défaite humiliante face au Japon, puis l'avènement monstrueux du communisme, et de nouveaux morts, cette fois par dizaines de millions.
Même si les sombres prévisions se sont donc révélées assez justes, il est difficile de déterminer dans quelle mesure l'analyse de l'écrivain, qui contenait en germe la culpabilité du monde occidental, le fameux "sanglot de l'homme blanc", était juste. Même si elle eut à souffrir de certaines menées impérialistes européennes, la Chine ne dut la plupart de ses malheurs qu'à elle-même.
Que dirait Loti, aujourd'hui que se dresse fier et arrogant, sur les ruines de l'ancien, et après tant de misères, un nouvel Empire ? Le verrait-il avancer en paix vers plus de liberté et de maturité, et en capacité de contribuer à nouveau au progrès du Monde ? Le croirait-il en mesure de tirer parti des merveilles de civilisation dont témoignent les vestiges de son passé, si lumineusement et si amoureusement évoqués ici ?

03 janvier 2011

Lumières dans la nuit

Avec un poème, je terminais 2010, avec un autre, je voudrais saluer ce nouvel an. Avec juste un poème, écrit par quelqu'un dont je ne connaissais guère que le nom il y a quelque jours encore.
Avec quelques vers d'un poète, né et mort dans une cité légendaire : Alexandrie. Une ville qui fut une sorte de trait d'union entre le monde antique et le monde moderne, et qui embrassa au cours de siècles tumultueux, les religions aussi bien que les civilisations. Une ville autrefois splendide, cosmopolite, éclairante, et qui aujourd'hui même se trouve ensanglantée par une barbarie sans nom. Un monde de sortilèges magnifiés par Lawrence Durrell, et qui est en train de déchoir, de s'éteindre, entrainé dans une mortelle et désolante dérive.
C'est par l'auteur du Quatuor que j'avais entendu parler de Constantin Cavafy (1863-1933), auteur très secret et très subtil, égyptien de villégiature, helléniste d'inspiration, et européen de culture. Et c'est par un heureux hasard, que dans le doux asile d'une librairie parisienne, j'ai pu en approfondir ma connaissance, en faisant l'acquisition d'un recueil de poésies nouvellement traduites*. Elles ont un charme difficile à définir, un mélange de grâce et de légèreté, de nostalgie et de désinvolture. Une sorte de fragile et lointaine élégance.

Alors qu'une nouvelle orbite astrale commence et nous emmène vers je ne sais quel destin, j'ai trouvé dans ce livre, quelques strophes délicates, qui pourraient constituer une charnière idéale entre deux années. Dans la pénombre dévorante de l'univers, soyons attentifs aux étoiles qui scintillent... Elles sont les repères de notre espérance.

Les jours de l'avenir se tiennent devant nous
Comme une rangée de petits cierges allumés, -
Petits cierges dorés, chauds et lumineux.

Les jours passés restent en arrière,
Morne rangée de cierges éteints;
Les plus proches fument encore,
Cierges froids, fondus et courbés.

Je ne veux pas les voir; leur aspect m'attriste
Et m'attriste aussi le souvenir de leur clarté.
Je regarde devant moi mes cierges allumés.

Je ne veux pas me retourner, ne pas voir avec effroi
Combien vite s'allonge la ligne sombre
Combien vite augmentent les cierges éteints.

Constantin Cavafy Poèmes traduits du grec par Ange S. Vlachos, Editions Héros-Limite 2010.

22 décembre 2010

Une femme disparaît

En saluant devant les portes de l'éternité, la mémoire de Jacqueline de Romilly (1913-2010), c'est évidemment un bel et noble esprit que je voudrais honorer.
C'est aussi le souvenir ébloui de la merveilleuse épopée que toute sa vie durant, elle chercha à faire revivre par la pensée et par l'écriture : la Démocratie Athénienne.
Il y aurait sans doute une foule de choses à dire sur cette œuvre monumentale, pas toujours facile d'accès, mais une de ses forces fut de montrer avec éclat, l'importance que revêt l'éducation dans l'édification et la pérennisation d'une société de liberté et de justice.
Dans un de ses ouvrages traitant des "Problèmes de la Démocratie Grecque*", elle évoquait superbement ce point de vue en s'appuyant sur certains penseurs de l'antiquité. Isocrate par exemple, qui dans l'aréopagitique soulignait que "c'est par l'effet d'une mauvaise éducation que l'on prend l'indiscipline et la licence pour la liberté démocratique".
A contrario, "les gens qui ont été élevés dans la vertu savent obéir aux plus imprécises des lois".
On ne saurait rêver plus belle vision, ô combien prophétique du rêve de self-government qui pourrait caractériser selon certains Libéraux, une société parvenue à l'âge de raison et donc de liberté et de responsabilité.
Cette conception frappe en tout cas, par son intrépide modernité.
Lorsque, forte de sa connaissance du monde ancien, Jacqueline de Romilly affirme que "l'éducation est la condition de la vertu, qui seule permet le bonheur et la liberté des Etats", on ne peut s'empêcher de faire le parallèle avec l'idéal des pères fondateurs de la démocratie américaine, tel qu'il apparaît notamment dans la déclaration d'indépendance.
Il y a plus qu'un écho entre ces deux expériences, l'américaine et la grecque, séparées par deux millénaires, mais une chose est sûre : toutes deux furent caractérisées par de spectaculaires progrès dans tous les domaines de ce qu'on peut appeler la civilisation.
Hélas, l'aventure athénienne périclita, si je puis dire, à la fin du siècle de Périclès. Beaucoup de malheurs s'ensuivirent pour l'humanité et beaucoup de siècles de régression se succédèrent avant de renouer avec l'idéal démocratique. J'ignore si le fait de ne plus cultiver l'amour de l'antiquité et d'abandonner la pratique des langues mortes constituent des signes prémonitoires du déclin de la démocratie occidentale. S'agissant de l'éducation, il est certain qu'elle bat de l'aile. Il est non moins sûr qu'il s'agit d'un mauvais augure, eu égard au délitement de la pensée, et au navrant galvaudage de l'idée de liberté auxquels on assiste en parallèle. Plus que jamais il y a lieu de se souvenir de l'avertissement d'Isocrate, relayé par Jacqueline de Romilly.

Pour conclure, il me vient l'idée d'évoquer ici le souvenir du grand poète français André Chénier (1762-1794), qui fut la victime innocente des "bourreaux barbouilleurs de lois" de la Révolution. Il aimait passionnément l'antiquité, et voulait la réconcilier avec son temps à travers le syncrétisme de la poésie : "Sur des pensers nouveaux, faisons des vers antiques".
Sans nul doute cet extrait délicieux des Bucoliques, pourrait s'adresser à cette femme, écrivain magnifique, esprit irradiant, qui vient de nous quitter...

Vierge au visage blanc, la jeune Poésie
En silence attendue au banquet d'ambroisie,
Vint sur un siège d'or s'asseoir avec les Dieux,
Des fureurs des Titans enfin victorieux.
La bandelette auguste, au front de cette reine
Pressait les flots errants de ses cheveux d'ébène;
La ceinture de pourpre ornait son jeune sein,
L'amiante et la soie, en un tissu divin,
Répandaient autour d'elle une robe flottante,
Pure comme l'albâtre et d'or étincelante.
Creux en profonde coupe, un vaste diamant
Lui porta du nectar le breuvage écumant.
Ses belles mains volaient sur la lyre d'ivoire.
Elle leva ses yeux où les transports, la gloire,
Et l'âme et l'harmonie éclataient à la fois
Et, de sa belle bouche, exhalant une voix
Plus douce que le miel ou les baisers des Grâces,
Elle dit des vaincus les coupables audaces,
Et les cieux raffermis et sûrs de notre encens,
Et sous l'ardent Etna les traîtres gémissants...

* Jacqueline de Romilly. Problèmes de la démocratie grecque. Editions Hermann 1975. Réédité en poche : Agora Pocket 1996

20 décembre 2010

Larmes d'Ivoire

J'avais pensé intituler cette chronique Guignol's Band tant la situation actuelle en Côte d'Ivoire, avec ses deux présidents élus, pourrait parfois prêter à rire.
Malheureusement, c'est un drame qui semble se nouer derrière cette pantomime électorale. Le peuple de ce pays risque d'en faire les frais, mais la Communauté Internationale joue gros également.
L'ONU qui a cru bon (et qui pourrait le lui reprocher ?) de se porter garante du bon déroulement du dernier scrutin destiné à élire le président de la république, se trouve aujourd'hui dans une situation inconfortable.
Il est clair que le despote qui revendique une souveraineté devenue illégitime aux yeux du monde entier, ne manifeste aucune intention de faire machine arrière.
Que peut dorénavant faire la Communauté Internationale ?
S'en tenir à des avertissements musclés mais verbaux, et brandir la menace d'hypothétiques sanctions comme l'a déjà fait le président Sarkozy ? Il y a peu de chance que Laurent Gbagbo n'obtempère avant longtemps à ces pressions. Au point où il est rendu, il perdrait tout, et serait sans doute passible de poursuites judiciaires. Son acharnement a déjà causé la mort de plusieurs dizaines de ses concitoyens.
Faire tenir aux Casques Bleus la position de plus en plus intenable et absurde d'observateurs dans ce pays en proie à l'instabilité et à un début de guerre civile ? Ce serait proprement ridicule et indigne.
Ou bien menacer de déloger manu militari le gouvernement indésirable ? Ce serait évidemment l'engrenage infernal, et le risque de se trouver confronté à une situation rappelant fâcheusement l'intervention en Irak. Pire sans doute, car Gbagbo n'est pas accusé de détenir des armes de destruction massive, ne menace pas les pays voisins, et ne s'est pas rendu coupable d'une oppression sur son peuple, comparable à celle de Saddam Hussein.
On lui reproche surtout d'avoir truqué le résultat d'élections et bien qu'il ne fasse guère de doute qu'il soit mis en minorité, il conserve des appuis nombreux et puissants dans son pays. Une intervention extérieure ne serait donc vécue comme libératrice que par une partie de la nation. Contexte explosif s'il en est.
Pour l'heure, toutes les parties semblent jouer le pourrissement de la situation, espérant un improbable et heureux dénouement "à l'amiable", mais certains signes font craindre un abandon progressif du terrain par la Communauté Internationale.
On apprenait le dimanche 19/12 par Le Monde que le Royaume Uni avait recommandé à ses ressortissants de quitter le pays et que le Département d'Etat américain "avait ordonné aujourd'hui aux employés non-essentiels de leur ambassade en Côte d'Ivoire et à leurs familles de quitter le pays" en raison d'une "détérioration de la situation politique et sécuritaire" à Abidjan et d'un "sentiment anti-occidental croissant" dans le pays...
Un sombre pressentiment commence à étreindre tous ceux qui espèrent encore une résolution pacifique à cette affaire. L'ONU y joue sa crédibilité. Une fois encore la question se pose : jusqu'où peut aller le fameux droit d'ingérence ?

Jusqu'à présent en tout cas, les Droits-de-l'hommistes sont plutôt discrets. C'est pourtant dans ces moments qu'on aimerait qu'ils proposent de belles et bonnes solutions...