S'agissant de la conscience humaine, la seule dont nous avons la certitude, puisque chacun de nous en fait quotidiennement l’expérience, force est de constater avec Werner Heisenberg que "ce sont les mêmes forces régulatrices qui ont construit la nature dans toutes ses formes, qui sont à l’origine de la structure de notre âme, donc aussi de notre intelligence…"
Certes, le concept de conscience n’existe pas en physique et en chimie, et l’on ne peut guère imaginer qu’un tel concept puisse être déduit de la mécanique quantique. Cependant, pour Heisenberg, “dans une science qui inclut également les organismes vivants, la conscience doit tout de même trouver une place, car elle appartient à la réalité..."
Encore une fois se trouve conforté le point de vue de Kant, qui faisait de la loi morale, consubstantielle a la notion de conscience, une réalité aussi certaine et merveilleuse que la voûte céleste étoilée !
De la conscience et du dessein qui la caractérise, jusqu’à Dieu, il n'y a qu'un pas.
Le savant se garde bien de le franchir mais il livre une réflexion roborative sur le sujet, empreinte de pondération et de modestie...
Elle part pourtant de l'opinion très tranchée de Paul Dirac, pour lequel la science se conjugue naturellement avec l'athéisme.
Pour celui-ci, l’hypothèse de Dieu amène en effet "à se poser des questions absurdes, par exemple la question de savoir pourquoi Dieu a permis le malheur et l’injustice dans notre monde, l’oppression des pauvres par les riches, et toutes les choses horribles qu’il aurait pu, après tout, empêcher.”
On peut souscrire aisément à cette critique d’une vision trop bornée, trop humanisée du principe divin, et qui en outre signifierait que l’homme y serait assujetti comme une marionnette. Mais on peut également avoir une autre conception de Dieu que celle de Dirac, résumée par la célèbre formule lapidaire de Lénine, qui en faisait “l'opium du peuple”, distillé et entretenu par des gouvernants soucieux de faire taire l'envie de révolte…
Albert Einstein qui n'était pas connu pour être un dévot affirmait quant à lui que "Dieu ne joue pas aux dés". Ce faisant, il instituait de manière implicite ce dernier comme principe immanent, tout en manifestant sa réticence à s'en remettre au hasard ou au principe d'incertitude comme fin en soi.
On se souvient également de son raccourci fameux : "Dites moi ce que vous entendez par Dieu, je vous dirai si j'y crois..."
Ce positionnement à mi-chemin entre le déterminisme athée et la foi ennemie des réalités, est peut-être en définitive ce qui est le plus raisonnable, si pour paraphraser Pascal, Dieu “a ses raisons que la raison ne connaît pas…”
Certes, le concept de conscience n’existe pas en physique et en chimie, et l’on ne peut guère imaginer qu’un tel concept puisse être déduit de la mécanique quantique. Cependant, pour Heisenberg, “dans une science qui inclut également les organismes vivants, la conscience doit tout de même trouver une place, car elle appartient à la réalité..."
Encore une fois se trouve conforté le point de vue de Kant, qui faisait de la loi morale, consubstantielle a la notion de conscience, une réalité aussi certaine et merveilleuse que la voûte céleste étoilée !
De la conscience et du dessein qui la caractérise, jusqu’à Dieu, il n'y a qu'un pas.
Le savant se garde bien de le franchir mais il livre une réflexion roborative sur le sujet, empreinte de pondération et de modestie...
Elle part pourtant de l'opinion très tranchée de Paul Dirac, pour lequel la science se conjugue naturellement avec l'athéisme.
Pour celui-ci, l’hypothèse de Dieu amène en effet "à se poser des questions absurdes, par exemple la question de savoir pourquoi Dieu a permis le malheur et l’injustice dans notre monde, l’oppression des pauvres par les riches, et toutes les choses horribles qu’il aurait pu, après tout, empêcher.”
On peut souscrire aisément à cette critique d’une vision trop bornée, trop humanisée du principe divin, et qui en outre signifierait que l’homme y serait assujetti comme une marionnette. Mais on peut également avoir une autre conception de Dieu que celle de Dirac, résumée par la célèbre formule lapidaire de Lénine, qui en faisait “l'opium du peuple”, distillé et entretenu par des gouvernants soucieux de faire taire l'envie de révolte…
Albert Einstein qui n'était pas connu pour être un dévot affirmait quant à lui que "Dieu ne joue pas aux dés". Ce faisant, il instituait de manière implicite ce dernier comme principe immanent, tout en manifestant sa réticence à s'en remettre au hasard ou au principe d'incertitude comme fin en soi.
On se souvient également de son raccourci fameux : "Dites moi ce que vous entendez par Dieu, je vous dirai si j'y crois..."
Ce positionnement à mi-chemin entre le déterminisme athée et la foi ennemie des réalités, est peut-être en définitive ce qui est le plus raisonnable, si pour paraphraser Pascal, Dieu “a ses raisons que la raison ne connaît pas…”
Des propos de Heisenberg, on peut finalement déduire qu'il ne serait pas très éloigné de la notion d'"Intelligent Design" assez en vogue actuellement. Sans doute avait-il en tout cas une préférence pour un monde gardant une aspiration spirituelle, à un autre résolument matérialiste.
Il redoutait d’ailleurs l'avènement de ce dernier, comme en témoignent les lignes suivantes, écrites en 1927, comme si elles avaient été inspirées par un sombre pressentiment : “Il se pourrait que les paraboles et images de la religion perdent leur force de conviction même aux yeux des gens simples. Je crains qu’à ce moment là, notre éthique actuelle ne s’écroule également très rapidement et qu’il ne se produise des choses d’une horreur que nous ne pouvons même pas imaginer à l’heure actuelle.”
S’il faut retenir quelque chose de magique dans le spectacle de la nature, on pourrait évoquer avec Heisenberg, “le miracle de la stabilité de la nature” devant lequel s’émerveillait Niels Bohr.
Précisons que par stabilité, il entendait que “ce sont toujours les mêmes substances avec les mêmes propriétés qui apparaissent, que ce sont toujours les mêmes cristaux qui se forment, les mêmes composés chimiques qui se créent… Ainsi, même après de nombreuses modifications dues à des influences extérieures, un atome de fer redevient un atome de fer, possédant les mêmes propriétés qu’auparavant…”
C’était selon lui, paradoxalement incompréhensible selon la mécanique classique, basée sur un strict déterminisme causal des phénomènes.
Ce serait précisément à cause de la stabilité de la matière, que la physique newtonienne ne peut pas être correcte à l’intérieur de l’atome et qu’il ne peut y avoir de description visuelle de sa structure. En effet, une telle description - parce que visuelle justement - devrait se servir des concepts de la physique classique, concepts qui ne permettent plus de saisir les phénomènes. Autrement dit, “les atomes ne sont pas des objets de l’expérience quotidienne.”
Ainsi, après avoir donné des explications rationnelles à de nombreux phénomènes naturels, l’être humain en affrontant les nouvelles frontières de la connaissance, se rapproche tout à coup de l’indicible. Même un cerveau aussi puissant que celui de Werner Heisenberg manifestait un certain désarroi devant la complexité croissante des concepts manipulés par la science. Il prévoyait que pour progresser, celle-ci exigerait "une pensée ayant degré d’abstraction qui n’a jamais existé à ce point, du moins en physique". Dans le même temps, il s'avouait dépassé, supposant que pour lui, "une telle tâche serait serait sûrement trop difficile"...
Ses réflexions restent en tout cas passionnantes, car outre leur limpidité explicative, elles contribuent à donner une signification à des notions qui de prime abord défient l'entendement. En deçà ou bien au delà de l’échelle de nos sensations, dans l’infiniment petit ou dans l’infiniment grand, nous perdons facilement pied. Il est plus que jamais nécessaire d’avoir des guides inspirés pour nous aider à réfléchir, et à trouver du sens dans ce qui relève de plus en plus de la spéculation ou de l’abstraction.
Au cours d’un de ses entretiens avec Bohr, Heisenberg eut cette interrogation anxieuse : “Si la structure interne des atomes est aussi peu accessible à une description visuelle que vous le dites, et si au fond nous ne possédons même pas de langage qui nous permette de discuter de cette structure, y a-t-il un espoir que nous comprenions jamais quelque chose aux atomes ?”
Le célèbre savant Danois eut un moment d’hésitation, avant de répondre : “Tout de même, oui. Mais c’est seulement ce jour là que nous comprendrons ce que signifie le mot comprendre…”
Il redoutait d’ailleurs l'avènement de ce dernier, comme en témoignent les lignes suivantes, écrites en 1927, comme si elles avaient été inspirées par un sombre pressentiment : “Il se pourrait que les paraboles et images de la religion perdent leur force de conviction même aux yeux des gens simples. Je crains qu’à ce moment là, notre éthique actuelle ne s’écroule également très rapidement et qu’il ne se produise des choses d’une horreur que nous ne pouvons même pas imaginer à l’heure actuelle.”
S’il faut retenir quelque chose de magique dans le spectacle de la nature, on pourrait évoquer avec Heisenberg, “le miracle de la stabilité de la nature” devant lequel s’émerveillait Niels Bohr.
Précisons que par stabilité, il entendait que “ce sont toujours les mêmes substances avec les mêmes propriétés qui apparaissent, que ce sont toujours les mêmes cristaux qui se forment, les mêmes composés chimiques qui se créent… Ainsi, même après de nombreuses modifications dues à des influences extérieures, un atome de fer redevient un atome de fer, possédant les mêmes propriétés qu’auparavant…”
C’était selon lui, paradoxalement incompréhensible selon la mécanique classique, basée sur un strict déterminisme causal des phénomènes.
Ce serait précisément à cause de la stabilité de la matière, que la physique newtonienne ne peut pas être correcte à l’intérieur de l’atome et qu’il ne peut y avoir de description visuelle de sa structure. En effet, une telle description - parce que visuelle justement - devrait se servir des concepts de la physique classique, concepts qui ne permettent plus de saisir les phénomènes. Autrement dit, “les atomes ne sont pas des objets de l’expérience quotidienne.”
Ainsi, après avoir donné des explications rationnelles à de nombreux phénomènes naturels, l’être humain en affrontant les nouvelles frontières de la connaissance, se rapproche tout à coup de l’indicible. Même un cerveau aussi puissant que celui de Werner Heisenberg manifestait un certain désarroi devant la complexité croissante des concepts manipulés par la science. Il prévoyait que pour progresser, celle-ci exigerait "une pensée ayant degré d’abstraction qui n’a jamais existé à ce point, du moins en physique". Dans le même temps, il s'avouait dépassé, supposant que pour lui, "une telle tâche serait serait sûrement trop difficile"...
Ses réflexions restent en tout cas passionnantes, car outre leur limpidité explicative, elles contribuent à donner une signification à des notions qui de prime abord défient l'entendement. En deçà ou bien au delà de l’échelle de nos sensations, dans l’infiniment petit ou dans l’infiniment grand, nous perdons facilement pied. Il est plus que jamais nécessaire d’avoir des guides inspirés pour nous aider à réfléchir, et à trouver du sens dans ce qui relève de plus en plus de la spéculation ou de l’abstraction.
Au cours d’un de ses entretiens avec Bohr, Heisenberg eut cette interrogation anxieuse : “Si la structure interne des atomes est aussi peu accessible à une description visuelle que vous le dites, et si au fond nous ne possédons même pas de langage qui nous permette de discuter de cette structure, y a-t-il un espoir que nous comprenions jamais quelque chose aux atomes ?”
Le célèbre savant Danois eut un moment d’hésitation, avant de répondre : “Tout de même, oui. Mais c’est seulement ce jour là que nous comprendrons ce que signifie le mot comprendre…”
Le Tout et la Partie. Werner Heisenberg. Champs Sciences. Flammarion 2010