06 janvier 2009

Itinéraires maritimes


Une belle exposition parisienne, sise dans les murs du Musée de la Marine, célèbre pour quelques semaines encore (jusqu'au 2 février), un peintre étonnant : Albert Marquet (1875-1947)

Héritier des Impressionnistes, compagnon de route des Fauves, à cheval sur deux siècles, ce peintre a en définitive laissé une empreinte très personnelle.
Identifiable entre mille en dépit de son apparente simplicité, elle est faite d'une subtile combinaison de rusticité et d'élégance.

Simple, Marquet le fut dans toutes les acceptions du terme. Petit père binoclard, à la vie bien rangée, il ne payait pas de mine. Peu soucieux de la gloire, il n'était pas difficile, ne demandant selon le témoignage de son épouse Marcelle, « que de la tranquillité et de la vie ».

Les quelques 77 tableaux exposés au Palais de Chaillot retracent les « itinéraires maritimes » de cet artiste natif de Bordeaux, amateur de liberté et de mouvement, et qui tout naturellement avait une prédilection pour les voyages et pour l'eau.
De Rotterdam à Alger, des Sables d'Olonne à Saint-Tropez, du Havre à Venise, il parcourut nombre de littorals, cherchant peut-être à vérifier « sur le motif », la formule merveilleuse de Bachelard : « L'eau est un destin essentiel qui métamorphose sans cesse la substance de l'être ».

Ce qui fascine c'est la sûreté du trait et un art consommé du contraste. Devant des lointains brumeux, au dessus de vastes étendues liquides, Marquet n'a pas son pareil pour donner un relief saisissant aux objets qui font la réalité triviale et pesante du monde terrestre : un quai, un pont, un entrepôt, des docks, une digue deviennent les piliers de ces audacieuses constructions picturales. Et même noyés dans des camaïeux de gris ces mornes reliefs ne sont jamais tristes. Il suffit de quelques silhouettes posées ici ou là, évoquant des promeneurs, d'un drapeau flottant au vent, ou du feuillage d'un palmier, pour leur donner vie.

Les bateaux, machines humaines si complexes, sont croqués de quelques coups de pinceau parfaitement maitrisés. Bien enchâssés dans l'eau, ils sont à la fois grossiers et gracieux. Ils glissent avec volupté sur la mer, sur laquelle ils impriment doucement le froissement de leur sillage, donnant profondeur et gaieté au paysage.

Il n'y a pas d'enluminure, pas d'allégorie, pas d'artifice, et ni symbole, ni decorum dans la peinture de Marquet. Seul, le doux et prégnant mystère de la vie qui bouge paisiblement au gré des formes et des couleurs...

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