Les contorsions intellectuelles des politiciens au sujet de l'ineffable taxe carbone pourraient prêter à rire si elles ne donnaient pas plutôt envie de pleurer. Comment dire une chose et son contraire tout en gardant son sérieux, voilà l'exercice auquel se livrent ministres, élus et hauts fonctionnaires depuis quelques semaines. Ou comment mettre en place un nouveau prélèvement que rien ne justifie vraiment en dehors de vagues considérations démagogiques, tout en assurant qu'on s'efforce avant tout de contenir la pression fiscale.
Rien de plus simple en fait. Car en politique, tout est possible tant l'oxymoron est devenu habituel en matière de langue de bois. On peut donc déclarer en toute quiétude comme Alain Juppé : "Oui à la taxe carbone, non à un impôt de plus" (Figaro 1/9/09). Ou bien comme le premier ministre, annoncer le montant "définitif" de la taxe tout en assénant "qu'il n'y aura pas de hausse des prélèvements obligatoires"...
Stricto sensu, un esprit simple pourrait évidemment s'interroger sur l'intérêt de créer une taxe dont le montant sera c'est promis, "déduit de la feuille d'impôt" (dixit le ministre du budget Mr Woerth). Est-ce une lumineuse application du principe des vases communicants mise au service de la pédagogie écologique ? Ou bien du foutage de gueule pur et simple ?
Certes la protection de l'environnement exige bien quelques sacrifices. Mais 7 ou 8 centimes de plus en moyenne par litre d'essence est-ce bien raisonnable quand on sait que l'Etat prélève déjà plus 150% du prix de ce litre tel qu'il sort de la pompe, soit environ 80 centimes de taxes pour 50 de produit ( le calcul est simple et effrayant : TVA de 19,6% sur le prix de base, plus environ 60 centimes de TIPP, additionnée elle-même de 19,6% de TVA...).
Surtout comment croire une seule seconde à la neutralité d'un système fiscal de prélèvement-redistribution ? Comme le déplorait déjà en son temps l'économiste Frédéric Bastiat, la machine fiscale n'a rien d'une « rosée fécondante », redistribuant équitablement et intégralement ce qu'elle prélève. Si le prélèvement est certain, la restitution est beaucoup plus aléatoire et il est aisé de constater dans tous les cas, que l'engin « pompe » bien davantage qu’il ne redistribue en raison des lourdeurs de la bureaucratie qui lui est attachée.
La logique des gouvernants est souvent difficile à suivre. Il faut à chaque instant donner le sentiment qu'on agit, quitte à nager dans les contradictions et les incohérences. Exemple, un jour, pour doper la consommation, on promeut la vente des automobiles en instituant un « prime à la casse », le lendemain on multiplie les dispositions destinées à pénaliser leur utilisation... Comprenne qui pourra.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire