14 février 2025

L'IA entre pitrerie et pragmatisme

Le récent sommet parisien consacré à l’Intelligence Artificielle (IA) a permis à notre président, en mal d’occupations sérieuses, de s’amuser comme un petit fou.
L’entretien qu’il donna sous la houlette de l’ineffable Laurent Delahousse, face à une journaliste indienne médusée par son arrogance, restera sans doute dans les annales. En partie parce qu’aucun des deux interviewers ne put placer un traître mot ni la moindre question tant les envolées lyriques du maître de cérémonie furent aussi intarissables qu'imperturbables.
Sans doute aussi en raison du petit montage vidéo que le Chef de l’Etat crut bon de présenter au monde entier, le montrant travesti, par le biais d’un logiciel, en toutes sortes de créatures plus grotesques les unes que les autres. Le ridicule ne tuant pas, il afficha une satisfaction béate, pensant que son petit effet à deux balles, amuserait la galerie à défaut de renseigner sur le sujet du jour et surtout de grandir son image passablement détériorée. Il ne s’attendait pas à la réaction de la journaliste Palki Sharma Upadhyay qui parvint à décocher un passing shot, affirmant que la farce “n’était vraiment pas drôle”.
L’orateur arrêté net, fut quelque peu douché par cette remarque assassine mais très opportune, à laquelle il n’est à l’évidence pas habitué, venant de la presse complaisante qui l’interroge habituellement.
Cela ne l’empêcha pourtant pas de repartir à l’assaut, se livrant à un auto-dithyrambe aussi creux que flamboyant, vantant l’avance de l’Europe en matière de balisage légal. Dans l’élan, il fit miroiter les perspectives fabuleuses qui pourraient s’ouvrir grâce à son action personnelle, évoquant notamment les quelque 109 milliards d’euros d’investissement qui vont tomber du ciel un de ces jours, on ne sait trop pour quoi faire.

On ne retiendra probablement pas ces pitreries et ces tartarinades qui ne font pas honneur à notre pays et qui consacrent l’impuissance structurelle de notre machine étatique, forte en vœux pieux mais timorée en matière d’actions concrètes.
Que restera-t-il donc de cette réunion pompeuse, consacrée bien davantage aux notions nébuleuses d’éthique, d’inclusion, d'écologie et de régulation, qu’aux débouchés pratiques de ce qu’il est convenu de nommer intelligence artificielle ?

Sans doute avant tout, l'intervention de J.D. Vance, vice-président américain, beaucoup plus pragmatique et sans fioriture ni artifice, qui envoya au sein de ce festival de beaux projets théoriques quelques missiles parfaitement ciblés.
Il affirma que les États-Unis feront «tous les efforts possibles pour encourager les politiques pro-croissance en matière d'IA», non sans avoir rappelé que son pays est "le leader" dans le domaine et qu’il entend le rester. Visant les réglementations européennes destinées à contrer l’influence américaine et celle de leurs géants technologiques, il se lança ensuite dans un réquisitoire au vitriol “contre tout ce qui pourrait restreindre la marge de manœuvre des entreprises”. Ce serait ajouta-t-il «une terrible erreur, non seulement pour les États-Unis mais aussi pour votre propre pays», a-t-il ajouté.
Il fustigea sans ménagement la bureaucratie procédurière régnant en Europe et dénonça une «régulation excessive» de l'intelligence artificielle qui «pourrait tuer une industrie en plein essor», soulignant la nécessité de mettre en place «des régimes réglementaires internationaux qui favorisent la création de technologies d'IA au lieu de l'étouffer».
Sur ce, il quitta discrètement le sommet, sans prendre le temps d’écouter les conclusions emphatiques d’un Emmanuel Macron, plus hors sol que jamais.
A bon entendeur, salut...

11 février 2025

Exhibitions barbares

L’accord de cessez-le-feu et d’échanges enfin obtenu entre Israël et le Hamas, donne lieu à un marchandage atroce, distillé au compte-gouttes. D’un côté des otages, civils, captifs innocents de monstres depuis 500 interminables journées, de l’autre des combattants et des terroristes, souvent responsables d’attentats et de meurtres. Avec une balance inégale : des dizaines de prisonniers contre un seul otage. Israël résigné, mais meurtri jusqu’au plus profond de sa société et de ses familles, n’a pas le choix. C’est ça ou rien.
Le chœur des droits-de-l’hommistes ne s’émeut guère de cet ignoble trafic d’êtres humains. Certains médias bien pensants n’ont même pas hésité, sans doute pour faire bonne mesure, à qualifier les prisonniers palestiniens “d’otages”.
L’horreur est portée à son comble, lorsqu’on voit à chaque transfert sordide, les victimes juives décharnées, portant dans leur chair l’évidence de sévices, de violences et de privations, exhibées et humiliées sur des estrades de foire par des brutes armées et encagoulées.
On en vient à comprendre les pays voisins, réputés favorables à la cause palestinienne, lorsqu'ils manifestent une réticence à aider les populations de la bande de Gaza, et surtout leur refus d'accueillir des réfugiés en provenance de ce territoire maudit.
Mais bien pire, est le silence des politiques et des dirigeants des pays dits démocratiques devant l’inqualifiable. Eux qui ne manquent pas une occasion de commémorer les atrocités commises par le IIIème Reich il y a 80 ans, restent muets devant la répétition de cette infamie, se déroulant sous leurs yeux. A l’évidence, ce n’est pas la douleur qui les tétanise, c’est la couardise et la peur. Les organisations internationales restent murées dans le même silence coupable et honteux. Hormis l’Amérique de Donald Trump, le monde est plus que jamais inerte, incapable d’action et même de mots.

Plus jamais on ne pourra croire les exhortations au “plus jamais ça”. Les donneurs de leçons a posteriori sont définitivement disqualifiés pour parler de crimes contre l’humanité.