04 octobre 2010

Autruche Blues

En cet automne : rien.
A la réflexion, deux ou trois bricoles sans beaucoup d'importance. Juste quelques remugles de "pourriture noble" dont la France raffole.
L'automne est la saison de la chasse, et pour le gibier gouvernemental, c'est l'heure de la curée. Revigorés par des sondages durablement baissiers, les Opposants de tous poils jettent toutes leurs forces de Lilliputiens en colère, dans une dérisoire bataille de mots. 
Tout est bon pour faire du feu à ce foyer là. Une maladresse commise par un grouillot ministériel zélé dans la rédaction d'une circulaire, un lapsus croustillant, une phrase malheureuse ou inconsidérée forment le combustible de cette orgie infinitésimale. 
La haine recuite de tous ces roquets aboyeurs se nourrit du vertigineux néant de leur pseudo "Résistance". Avec une jouissance obscène, ils emplissent frénétiquement cette poche immonde, de superlatifs ronflants et d'amalgames nullissimes. Les Fâcheux anti-facho voudraient faire croire que les heures terribles, qui peuplent leurs fantasmes glorioleux sont de retour. Que la Patrie, dont ils n'ont soit dit en passant que faire, est en danger. Que c'est un devoir pour tout citoyen, que d'affronter ce Pouvoir si "brutal", si "injuste", si "menteur", en un mot si odieux.

C'est vrai l'action des Satrapes qui nous gouvernent n'a vraiment rien d'enthousiasmant. Malheureusement, par un troublant paradoxe, c'est l'inverse de ce qu'on était en droit d'attendre, qui se produit. Alors qu'il est enseveli sous les critiques et les invectives, le gouvernement ne montre en réalité pas plus d'audace ni d'imagination que ses pusillanimes et démagogues prédécesseurs, de tous bords. 
Les beaux et robustes projets de réformes s'évanouissent comme les feuilles flétries que le vent d'automne disperse. On ne saurait dire si une seule des réformes entreprises ou annoncées est arrivée à terme. Un seul exemple: le chantier saugrenu consistant à supprimer la publicité sur les chaînes de télévision publique, stoppé à mi chemin, sans plus de raisons qu'il n'avait commencé...
En guise de "Lois nécessaires", il ne reste que de piteux succédanés, et la fameuse "rupture" n'est au fond qu'un ersatz au goût d'évaporé. Le glaive victorieux du changement a fait place au rabot à niches fiscales...

Une question se pose, hélas sans réponse : Pourquoi, en dépit des convictions qu'il affichait si haut, et de la légitimité acquise par les urnes, le Chef de l'Etat se montre-t-il aussi timoré ? Pourquoi aussi peu de prise de risques, alors qu'il savait trop bien que de toute manière il serait confronté au verdict outrancier et stupide de la rue ? Quitte à endurer l'impopularité pourquoi ne faire que la moitié de ce qu'on annonçait ?
Dans la préface à l'édition française de ses mémoires récemment publiés, Tony Blair, dont on ne saurait contester le savoir faire politique, faisait cette remarque : "Certains jugent qu'il [Sarkozy] affronte des réformes impopulaires et que pour être réélu, il devra les édulcorer. Je pense précisément le contraire. S'il s'éloigne de ses réformes il perdra..."

D'autant plus regrettable que de toute manière il n'y a dans notre malheureux pays, ni opposition digne de ce nom, ni débat intéressant (on en est réduit à nier les problèmes ou à les couvrir d'un voile d'hypocrite désinvolture, des retraites au terrorisme en passant par le délabrement social et la faillite de l'Etat...). Il y a bien les gesticulations du Tartarin égocentrique du Béarn, les rodomontades de l'Histrion revanchard des salons parisiens, les gueulantes un peu enrouées de quelques extrêmes, et les braillements habituels de la meute disparate des socio-alter-coco-quelque-chose. Mais tout cela est si vain, si creux, si répétitif.

Rien en somme, comme dans ces vers délicieusement hermétiques et un brin surréalistes de Stéphane Mallarmé (1842-1898):
Rien, cette écume, vierge vers
A ne désigner que la coupe;
Telle loin se noie une troupe
De Sirènes mainte à l'envers...

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