22 février 2015

Face au chaos, Bush avait raison...

J’ai bien peur une fois encore, de ramer à contre courant de l’opinion publique en prenant la défense de George W. Bush !
Tant pis, s’il n’en reste qu’un, je serais celui-là. Et si je me trompe, j’en demande pardon par avance aux tribunaux de l’Histoire !
Pour l’heure, face à l’embrasement du terrorisme islamique, et à la déstabilisation progressive du monde, il ne m’a jamais paru plus évident que la stratégie de l’ancien président était la moins pire, à défaut d’être la meilleure…

Pour en arriver là, il faut reprendre l’histoire au début et notamment accepter de se replacer dans le contexte du millénaire naissant, à savoir plus précisément, en 2001.
A cette époque sont survenus, comme des coups de tonnerre dans un ciel d’azur, les épouvantables attentats du 11 septembre. Trois-mille morts en une seule journée ! La folie humaine à l'état pur...
Pour beaucoup, c’était la surprise et l’incompréhension totale. On a d’ailleurs comparé ces évènements à l’attaque de Pearl Harbor, le 7 décembre 1941.

En réalité, pas plus que cette dernière, l’effondrement des tours du WTC n’était totalement imprévisible. Les deux signaient une préparation méticuleuse, une froide préméditation, et les signes prémonitoires ne manquaient pas pour ceux qui auraient voulu les voir… D’ailleurs, dans les deux cas, ce constat fut en définitive celui des commissions d’enquêtes concluant a posteriori, à de nombreuse négligences et à une insouciance coupable.

Le fait est, que bien avant ce 9/11 terrible, des foyers de terrorisme s’étaient allumés. Le plus important s’était installé dans les montagnes afghanes, sous les houlettes complices des Talibans et de Ben Laden. L’Afghanistan que les troupes soviétiques n’étaient pas parvenues à vassaliser, avait été peu à peu transformé en une enclave moyen-âgeuse. Personne ne pouvait ignorer que les femmes étaient soumises à une loi religieuse rétrograde avilissante, et chacun avaient entendu parler des destructions ignobles du patrimoine culturel, auxquelles se livraient tranquillement des hordes de fanatiques. Les exactions et les menaces vis à vis de l’Occident, avaient débordé de ce chaudron mortifère au point de devenir monnaie courante, et plusieurs attentats furent commis, dont un premier, comme un avertissement, au World Trade Center en 1993.
Au Proche Orient, Saddam Hussein de son côté, pour des raisons différentes mais tout aussi maléfiques, narguait également le Monde dit civilisé. Défait en 1991 par une première coalition, après son annexion ratée du Koweit, il reconstituait progressivement ses forces et sa capacité de nuisance. Plusieurs centaines de milliers d’hommes étaient stationnés aux frontières de l’Irak pour le surveiller en permanence, et le contraindre à respecter les termes du traité qu’il avait signé, en particulier l’interdiction de toute action contre les Kurdes. Des inspecteurs de l’ONU, chargés de vérifier qu’il ne se réarmait pas, étaient régulièrement dupés par le tyran qui prenait un malin plaisir à faire le contraire de ce qu’il disait.
Bien qu’il n’eut pas d'accointances directes avec Ben Laden, il fut le seul chef d’Etat au monde à se féliciter des attentats du 9/11 !
La dangerosité croissante de toutes ces menaces, fut sous estimée par la Communauté Internationale. Seuls les Etats-Unis, alors dirigés par Bill Clinton, s’inquiétèrent réellement de la situation, mais en répliquant mollement par des mots ou quelques opérations militaires de portée limitée, et donc inefficaces. Il fallu attendre l'électrochoc de septembre 2001 pour qu’enfin des actions de grande envergure soient entreprises sous la conduite de George W. Bush, qui a l’évidence ne les avait pas prévues dans son programme…
Pour ambitieuses et périlleuses qu’elles fussent, il faut être de mauvaise foi pour prétendre qu’elles n’avaient qu’une justification pétrolière.
L'argument massue du « mensonge délibéré de la présence d'armes de destruction massive », rabâché comme une scie par les adversaires du président américain fut largement mensonger lui-même. Saddam se vantait de posséder ces armes, et ne cachait aucunement sa volonté de les utiliser ! De toute manière qu'entend-t-on par armes de destruction massive ? Les machettes qui ont fait 800.000 morts au Rwanda dans l'indifférence générale, n'en sont-elles pas ? Saddam Hussein n'en était-il pas une à lui tout seul, lui qui fut responsable de plus d'un million de mort ?
En réalité, on a agité des contre-vérités et des leurres de part et d'autre, comme lors de tout conflit. Et cela a permis aux uns de justifier l’entrée en guerre, et aux autres d’éviter de préciser ce qu’il aurait fallu faire…

L’objectif de l’Administration américaine, pour contestable qu’il fut, avait le mérite d'être clair : il s’agissait de s'attaquer à des dictatures obscurantistes et sanguinaires, d'abord en Afghanistan, puis en Irak, avec à l'esprit la théorie des dominos. L'enjeu était de faire tomber ces régimes affreux de proche en proche, en aidant les peuples libérés à construire un modèle de société plus ouvert et respectable.
Les premières étapes furent franchies, non sans mal. Des élections libres avaient vu le jour dans ces contrées qui n'y étaient guère habituées, personne ne peut le nier, mais plus de 4000 soldats sont morts pour cet idéal, qui n'avait en soi rien de différent de celui poursuivi par les armées venues libérer l'Europe en 1944. Au demeurant, s’agissant des raisons qui poussent l’Amérique à faire la guerre, qu’est-ce qui permet de penser qu'il en soit autrement aujourd'hui qu’hier, et pourquoi agirait-elle avec les autres différemment de ce qu'elle a fait pour nous ?
Qu’il soit permis encore une fois, d'évoquer ici les termes émouvants de la « lettre aux amis américains », qu 'écrivit Saint-Exupéry en mai 1944 : «Si la guerre est toujours gagnée par les croyants, les traités de paix quelquefois sont dictés par les hommes d’affaires. Eh bien si même un jour je forme dans mon cœur quelques reproches contre les décisions de ceux-là, ces reproches ne me feront jamais oublier la noblesse des buts de guerre de votre peuple. Sur la qualité de votre substance profonde je rendrai toujours le même témoignage. Ce n’est pas pour la poursuite d’intérêts matériels que les mères des Etats-Unis ont donné leurs fils. Ce n’est pas pour la poursuite d’intérêts matériels que ces garçons ont accepté le risque de mort... »

Hélas la belle alliance des démocraties que le président George W. Bush espérait mettre en œuvre a fait défaut, et la trahison de la France fut une des plus saillantes et des plus consternantes.
L'oeuvre resta donc inachevée et les successeurs, repris par les vieux démons pacifistes, ont préféré la stratégie hasardeuse des coups d'épée dans l'eau, ou carrément l'inaction.
A partir de 2008, l’Irak a été peu à peu abandonné par la nouvelle administration américaine, et en Afghanistan, c’est à un service minimum que le président Obama cantonna ses troupes.
En Libye, on a renversé un dictateur mais sans accompagner le peuple, ce qui n'a servi à rien d’autre qu’à installer le chaos. En Syrie, on a laissé s'installer le désordre, et renaître les foyers de terrorisme qui ont bien vite essaimé un peu partout, comme les mauvaises herbes proliférant dans un jardin délaissé.
Résultat, les quelques acquis ont été quasi réduits à néant, et tout le travail est à refaire ! Il faudra tôt ou tard sans doute s’y atteler à nouveau, au risque sinon, de voir nos propres sociétés gravement menacées. Elles sont déjà, notamment la France, ébranlées économiquement par le boulet socialiste qui les endettées jusqu'au cou sans la moindre efficacité sur la misère ! Bientôt, si l'on n'y prend garde, c'est le modèle démocratique qui risque de s'effondrer. Tout amoureux de la liberté, ne peut qu’être extrêmement préoccupé par cette funeste évolution.
René Girard, d’habitude mieux inspiré, considéra l’échec du président américain, comme dû à «son incapacité de penser de façon apocalyptique ». Curieux contresens, s'agissant de George W. puisqu'on lui reproche habituellement d'avoir eu un dessein tenant précisément de la révélation, empreinte de connotation religieuse (que n'a-t-on glosé sur la lutte du bien et du mal !). Pour le coup, si la vision de Bush en était dépourvue, le mépris avec lequel on la traita, risque d’avoir une portée apocalyptique au sens effrayant du terme…

Plus de dix ans ont passé et avec le recul, il apparaît légitime de penser envers et contre tout, que cette politique était la bonne, car il semble clair que son abandon a conduit au désastre auquel on assiste aujourd'hui.
L'apathie du monde prétendu civilisé face à la barbarie qui étale ses indicibles atrocités chaque jour sous nos yeux est une grande honte, et rappelle hélas les époques précédant de grands désastres. Ce n'est vraiment pas la peine de ressasser les méfaits passés du nazisme, en récitant la rengaine contrite du « plus jamais ça », si l'on est incapable de combattre sérieusement les horreurs qui empestent le présent !
A l'inverse de ce qu'on prétend, Bush est parvenu à endiguer cette spirale pour un temps, mais les remparts qu'il avait érigés étaient fragiles. Faute d'entretien, ils sont en train de céder.
Et qu'on ne dise pas que le messianisme démocratique dont l’ancien président américain était porteur, soit contradictoire avec le respect du passé et des cultures locales. En l’occurrence, quatre mille ans d'histoire, de divisions, de luttes tribales, ethniques ou religieuses, ne sauraient conduire au fatalisme et encore moins servir de justification aux dictatures. Ces peuples n'ont pas moins de droit que nous à la Liberté et ne méritent pas moins que nous de pouvoir vivre paisiblement, avec un peu de prospérité... On voit les minorités enragées, mais on n'entend jamais les majorités silencieuses…
Pourrait-on admettre une fois pour toute que l'intérêt principal des USA soit tout simplement que les peuples vivent libres ? Et que l’intérêt de toute nation libre soit de les rejoindre sur cet objectif ?

Mais les grandes démocraties croient-elles encore vraiment à leur modèle, chérissent-elles encore cette Liberté pour laquelle de valeureux aïeux ont donné leur sang ? C'est bien là la question...
Plus que jamais la fameuse citation de Churchill s'impose : " Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur. Vous avez choisi le déshonneur, et vous aurez la guerre. "

18 février 2015

Vacuité politique

Après le livre de Nathalie Kosciusko-Morizet désignant le Front National comme ennemi politique numéro 1*, celui dont vient de se délester Geoffroy Didier**, scelle un assez navrant constat où l’on voit la Droite française désormais enferrée dans une impasse idéologique dont elle aura du mal à sortir. Avec un FN autour de 30%, et sans autre proposition face à lui que le rejet sans nuance, le défi apparaît en effet de plus en plus difficile à relever.

Le scrutin du Doubs augure mal de l’avenir : le FN frôle à lui tout seul les 50% de votants. Ce n’est qu’une élection locale, et ce n’est certes pas la moitié des électeurs, mais ceux qui ne se déplacent plus deviennent de plus en plus nombreux. Ils n’ont plus envie de choisir entre la peste et le choléra. L’un des deux étant ce conglomérat informe dont se moquent les frontistes mais qui est bien une réalité : l’UMPS…
Scrutin après scrutin, le pseudo "Front Républicain" qui tente de contrer la progression du FN constitue une dérisoire muraille qui peine de plus en plus à faire illusion. Cet amalgame incohérent de partis à bout de souffle et d’inspiration, hurlant sans cesse au loup, convainc de moins en moins de gens.

Ce qui tient lieu de programme aux adversaires réunis du FN est loqueteux.

Ils se disent européens mais ne démontrent ni foi ni conviction dans la défense de la belle idée fédérale. Ils nous parlent d’un vague conglomérat d’états-nations, étriqué dans ses ambitions, et crispé sur la seule problématique économique, qu’ils abordent avec de mesquines préoccupations de petits boutiquiers.
En politique intérieure, ils se récrient face à la montée de l'intolérance et se font les défenseurs de la liberté d’expression, mais leur action se limite à des voeux pieux et des lois liberticides !

Ils font du chômage leur priorité absolue, mais n'ont d'autre projet que de faire de vaines incantations à la croissance.
Pour tenter de se démarquer les uns des autres, ils se combattent à la manière de Lilliputiens, à coup de réformettes dont le nombre est inversement proportionnel à l'efficacité, et celles que les uns promulguent, les autres les abrogent...
Bref une vraie mascarade qui, faut-il le préciser, communie quand même sur l'essentiel, à savoir le credo étatiste, le règne de la bureaucratie, et l'amour des taxes et des prélèvements obligatoires ! Grâce à leurs efforts conjugués, 57% de la richesse nationale est désormais confisqué par l'Etat : un record !

En définitive, plus que jamais, le résultat des manipulations et lâchetés politiques paraît de plus en plus évident : la Gauche, depuis les menées machiavéliques de François Mitterrand, s'ingénie à faire monter en puissance le FN, tandis que la Droite qui s’est jetée à pieds joints dans le piège pourtant grossier, contribue en excluant tout dialogue avec lui, à le radicaliser, et lui abandonne une bonne partie de ses thèmes. Au bout du bout, c’est la déconfiture assurée !

A l'instar du discours lénifiant de M. Didier, ex leader de la "Droite forte", il ne reste plus rien qu’une admiration niaise pour une France de héros disparus, qu’une compassion feinte et une écoute vaine des souffrances des gens qui se tournent vers le FN. Ces doléances qui se font écho d’un bout à l’autre du pays constituent le leitmotiv du bouquin de G. Didier : "On ne se sent plus chez nous en France !", "La France va mal et ne nous apporte que des problèmes !", "On ne supporte plus les discours politiques !"
Mais plutôt que d’en tirer une ligne politique déterminée et pragmatique, il se perd en récriminations contre le Front National. Faut-il avoir une courte vue pour espérer que ces simagrées soient de nature à provoquer un renversement de tendance !
Et quelle rage de devoir entendre tous ces discours inutiles, dans cette pauvre France, semblant décidément perdue sur un chemin sans issue !


*Le Front anti-national
** La fronde nationale

05 février 2015

Tempête sous un crâne d'oeuf

Décidément, le débat politique en France ne cesse de s’abîmer, et l’infâme marigot dans lequel il s’enfonce inexorablement, a de quoi désespérer tout démocrate et naturellement tout amoureux de la liberté.

L’élection législative dans le Doubs, dont tout le monde se moque mais que les médias s’ingénient à rendre croustillante, en apporte encore une fois la preuve navrante. Par la faute de l’ensemble des partis politiques prétendus “républicains”, une fois encore le Front National se trouve en position d’arbitre, et toute réflexion semble condamnée à tourner bêtement en orbite autour de lui !
Derrière cette logique manichéenne totalement stérile, c’est à un hideux festival de manoeuvres, de compromissions, et de retape immonde auquel le peuple assiste impuissant. Les hiérarques du Parti Socialiste voudraient nous faire croire que leur candidat, arrivé par une divine surprise en position de se maintenir au second tour, serait le dernier rempart contre la barbarie, à laquelle il faudrait opposer la belle unité d’un front républicain. Vaste fumisterie évidemment, mais force est de reconnaître que dans les autres partis, notamment dits “de droite”, c’est la déconfiture.
Pas la moindre aspiration, pas le moindre élan, pas la plus petite volonté n’émerge de ce désastre. Nicolas Sarkozy, seul leader charismatique, à défaut d’avoir des convictions chevillées au corps, semble quelque peu sonné par les évènements, pendant que les petits chefs mènent une danse macabre autour du tombeau de leurs espérances évanouies.

M. Juppé, qui ne veut pas être le dernier des Mohicans, ramène à tout propos et surtout sans qu’on le lui demande, son carquois fatigué et ses plumes défraîchies. Le voilà qui se met à gratifier les Français du fruit de ses réflexions, qui lance des appels tous azimuts, et tout ça pour quoi, je vous le demande ? Pour aboutir à révéler que s’il était électeur de la 4è circonscription du Doubs, il voterait socialiste ! Merci du conseil...
Après avoir promu le nullissime candidat UMP qui a trouvé le moyen de s'étaler dès le premier tour, non seulement il ne fait pas acte de contrition, mais le voilà qui prend des grands airs pour faire la leçon.

Mais pour qui se prend-t-il donc ? Que valent les recommandations stratégiques de ce technocrate vieillissant, qui sut si bien, il y a 20 ans, gâcher en quelques semaines à peine, le mandat que le peuple français lui avait donné grâce à l’élection de Jacques Chirac ? Lui qui fut l'artisan brillant du monumental fiasco de la dissolution de 1997 ! Lui qui assomma de TVA, de CSG, de CRDS et autres taxes et prélèvements, ceux qu’avec le grand Jacquot, il avait enfarinés durant toute la campagne électorale, sur l'air du “Trop d’impôts tue l’impôt” ! Lui qui soviétisa un peu plus le système de santé avec le "plan" qui porte son nom, et dont on voit aujourd’hui les effets calamiteux. Lui l'hypocrite qui se disant l'ami des femmes, se vanta d'en nommer une douzaine dans son gouvernement, et qui les débarqua sans ménagement 6 mois plus tard !
Lui enfin, qui, “droit dans ses bottes”, se montra inutilement rigide dans ses réformes stupides, pour finir par en abandonner une bonne partie, non sans avoir provoqué un gigantesque mouvement social !


Bravo donc à cet archétype du crâne d’œuf dont la bureaucratie française a le secret. Il ferait en somme bon ménage avec les Socialistes.
Par le biais “d’un jeu plein de sales parfums” politicards, nous avons hérité des pires gouvernants qu’on ait vus depuis bien longtemps, et Dieu sait que dans notre malheureux pays, la concurrence en la matière est serrée ! Celui que le peuple a par dépit, porté à la tête du pays, n’a cessé d’accumuler autour de lui, les échecs, les bourdes, les malversations et les revers. N’empêche, il croit encore à son destin ! Tout requinqué par les retombées inattendues d’un atroce attentat, il s’imagine sans doute qu’il suffit de quelques basses récupérations, pour pouvoir se maintenir à la barre du navire qu’il conduit avec opiniâtreté au naufrage…
Et c’est pour ce bateau qui prend l’eau de toutes parts, que M. Juppé propose de tenir l’écope !

26 janvier 2015

Monnaies de singes

Faut-il se réjouir des bonnes nouvelles économiques claironnées par le grand bazar médiatique ? Le bout du tunnel est-il en vue ? On ne demanderait qu’à le croire, mais hélas rien n’est moins sûr, notamment en France où tant de verrous restent envers et contre tout bloqués.
La baisse assez spectaculaire de l’euro constitue un fait marquant auquel peu de monde s’est vraiment intéressé dans un contexte dominé par l’émotion due aux attentats. Pourtant, entre Mai 2014 où elle plafonnait à presque 1,40$ et aujourd’hui où son cours est autour de 1,11$, la monnaie européenne a perdu 20% de sa valeur !
Il y a là certes de quoi mettre le cœur en joie de ceux qui se plaignaient d’un euro trop fort depuis des années ! Cela sera sans nul doute à leurs yeux, de nature à doper enfin les exportations et à freiner l’invasion de tous les produits achetés dans une devise qui se renchérit face à la nôtre.
Malheureusement, il y a encore loin de la coupe aux lèvres !

Lorsque la valeur d'une monnaie baisse c’est avant tout la richesse relative de ceux qui la possèdent qui diminue. Tous ceux qui voyagent où qui achètent des denrées importées s’en rendront bien vite compte. Quant aux exportations, il n’est pas évident que la France en tire tout le profit espéré, vu que son problème de fond reste de n’avoir pas grand chose à vendre, sauf dans le domaine du luxe qui marche déjà très bien et où la clientèle n’est pas trop sensible au prix…
On peut toutefois se rassurer un peu en songeant qu’à l’intérieur de la zone euro les échanges ne s’en trouveront a priori pas affectés...

Second évènement d’importance, la baisse du prix du pétrole et de certains produits plus ou moins indexés sur lui, comme le gaz.
Les économies devraient être réelles pour les consommateurs, en terme de chauffage et de carburant pour leurs automobiles… A condition toutefois que l’euro ne baisse pas trop par rapport au dollar, avec lequel nous réglons la facture aux producteurs, et que le gouvernement n’en profite pas pour augmenter les taxes, ce qu’il vient justement de faire sur le gazole !
S’agissant du bénéfice pour la nation et les entreprises, il restera modeste puisque 85% de l’électricité consommée est comme chacun sait d’origine nucléaire.

Là dessus, tombe tout à coup le nouveau plan massif d’injections de liquidités, proposé par la Banque Centrale Européenne (BCE). Pas de moins de 1100 milliards d’euros sur moins de 2 ans, créés ex nihilo, sur lesquels les interprétations varient d’un expert à l’autre.
A vrai dire, l’impression qui domine est que personne ne comprend trop les tenants et les aboutissants de ce colossal Quantitative Easing (QE), que certains traduisent pudiquement par un “assouplissement quantitatif”, que d’autres, ébahis, qualifient de “bazooka monétaire” et dans lequel en fin de compte, beaucoup voient un très prosaïque “recours à la Planche à Billets...”

Avec des yeux de béotiens, peu accoutumés aux arcanes de la science économique mais vaccinés contre les effets d’annonce, on reste pantois devant ce gigantesque nouveau plan de relance.
D’abord parce qu’on ne peut que s’étonner de la création aussi massive d’euros au moment précis où le cours se casse la figure. Pourquoi ne pas avoir fait cela plus tôt, lorsqu’il était jugé trop haut par tant d’analystes ? M. Draghi fait en l’occurrence figure de carabinier et risque d’ajouter l’inflation à la dévaluation.
C’est dira-t-on le but recherché puisque les grands argentiers craignaient la déflation.
Certes
une légère baisse des prix avait été notée en fin d’année dernière (-0,2% en décembre, expliquée en grande partie par la chute du cours du pétrole). Mais en réalité, on observait surtout jusqu’à ce jour leur stabilité ce qui est le gage d’une économie saine : l’argent qu’on possède ne s’use pas et c’est la meilleure garantie pour les commerçants de vendre au juste prix. Et lorsque les salaires restent désespérément bloqués, c’est aussi celle de conserver son pouvoir d’achat…

Parallèlement à cette injection monétaire, la BCE promet de racheter tous azimuts de la dette étatique. Bel effort, mais qui peut-être aussi bien vu comme un terrible pousse-au-crime, lorsqu’on voit l’inflation régulière des dites dettes, favorisée par la faiblesse actuelle des taux d’intérêts ! On en veut pour preuve la réaction réjouie de François Hollande, grand dépensier s’il en est, saluant le plan de la BCE (après l’avoir dévoilé quelques jours avant l’annonce officielle, ce qui s’apparente d’ailleurs à une bourde, si ce n’est un délit d’initié…)

La victoire de l’extrême-gauche aux élections législatives grecques accentue cette crainte. Pourquoi ces gens rembourseraient-ils leurs dettes à une banque si riche et si prodigue ? Rappelons que la Grèce au bord de la banqueroute, a bénéficié ces dernières années de deux plans d'aide d'un montant total de 380 milliards d'euros, accompagnés d'un programme draconien d'ajustement budgétaire, sous le contrôle de la fameuse troïka UE-BCE-FMI, dont le vainqueur du jour M. Tsipras annonce méchamment la fin !
Aujourd’hui, avec l’arrogance revancharde des parvenus, il se fait fort d’exiger une nouvelle négociation de la dette de son pays, tout en promettant d’en créer de nouvelles avec une foultitude de mesures plus démagogiques les unes que les autres. S'agit-il d'une farce marxiste "tendance Groucho" qui se perdra très vite dans les désillusions de la real-politik, ou bien d'une lame de fond destructrice risquant de laminer un peu plus les bases fragilisées d'une Europe dont on se demande comment elle tient encore debout ? That is the question !

Et pendant ce temps, les députés français commencent à plancher sur l’inénarrable et microscopique loi Macron. Ainsi, après l’avoir préalablement plombée de 495 amendements (sur les plus de 1700 proposés en commission spéciale), ils vont débattre doctement du nombre de dimanches ouvrables et mesureront au compte-gouttes le nombre des lignes d’autocar autorisés à grignoter le monopole de la SNCF….
Décidément, on n’arrête pas le progrès et le futur ne manque pas d’avenir comme dirait l’autre...

22 janvier 2015

Défense de Voltaire

Longtemps je me suis interrogé sur Voltaire
Non sans une certaine répulsion tant j’avais en tête le refrain chanté par Gavroche qui veut que tout et plus encore, soit “la faute à Voltaire et à Rousseau”. Non sans un certain dégoût même, lorsque je me remémorais les vers sarcastiques du Rolla de Musset (Dors-tu content Voltaire et ton hideux sourire....). Comme beaucoup de jeunes, j’eus mon époque romantique, et je m'imagine parfois poète, alors que Voltaire c’est précisément le contraire du romantisme et de la rêverie poétique (bien qu’il produisit plus de 250.000 vers) !

Et puis mon opinion vint à changer peu à peu. A mesure sans doute que je découvrais l’Esprit de Liberté, et que ce dernier prenait possession de mon être, corps et âme, en l’éclairant de ses Lumières…
J’appris ainsi que derrière ses airs de vieux père fouettard grimaçant, derrière sa silhouette chenue, si empreinte de classicisme, il y avait la figure tutélaire d’un intrépide et infatigable défenseur de la liberté.
En somme au delà de ses bons mots, de ses outrances et de ses provocations, Voltaire s’est imposé comme l’archétype du libéral français, pétillant de malice et d’intelligence. Et si aujourd’hui, s’il m’est difficile de prétendre que je fasse de ses écrits une consommation assidue, le personnage est désormais pour moi une référence incontournable. Un ami et admirateur de Locke et de Newton ne peut être totalement mauvais tout de même...
Aussi lorsqu’on l’attaque, je réagis. Surtout s’il s’agit d’un ami blogueur que je respecte, lorsqu’il relaie l’accusation d’antisémitisme portée contre celui que je considère pour ma part, comme un sage. Je lui réponds ici en toute amitié !

Il est certes aisé de trouver dans l’abondante littérature de l’auteur de Candide, maints traits paraissant choquants à l’encontre du peuple juif. S’agit-il pour autant de l’expression d’un antisémitisme caractérisé, il est permis d’en douter…
D'abord parce que le contexte historique ne s'y prête pas, le terme n'ayant absolument pas la même signification de nos jours que celle qu'on aurait pu lui attribuer au XVIIIè siècle. Ensuite parce que les critiques de Voltaire visaient bien davantage le peuple juif de l’antiquité que ses contemporains, et ne se focalisaient pas sur une race ou une religion mais sur tous les comportements relevant à ses yeux de l'obscurantisme, de l'intolérance ou du fanatisme.
De ce point de vue, Voltaire fut assurément irrévérencieux vis à vis des croyants. C’est un fait acquis et revendiqué pourrait-on dire. Mais s’il se montra acerbe, et sans doute excessif, ce fut surtout pour condamner les atrocités qu’on commet au nom de Dieu.

Tout porte à croire que l'homme fut extrêmement réticent à porter des jugements à l'emporte pièce, dont il fut lui-même victime, nombre de ses oeuvres, notamment son fameux “dictionnaire philosophique”, ayant fini sur un bûcher, et lui-même plus d’une fois en prison pour ses idées...
A l'article « tolérance », on peut ainsi lire: « que nous devons nous tolérer mutuellement, parce que nous sommes tous faibles, inconséquents, sujets à la mutabilité, à l'erreur. »

S'il n'avait sans doute pas la foi, Voltaire n'était pas davantage athée. En homme pétri de bon sens et d'esprit pratique, il écrivit ainsi que « la foi consiste à croire, non ce qui semble vrai, mais ce qui semble faux à notre entendement ». Cela ne l'empêcha pas d'affirmer, de manière prémonitoire lorsqu’on pense aux ravages du nazisme et du communisme, « que l'athéisme est un monstre très pernicieux dans ceux qui gouvernent et que s'il n'est pas aussi funeste que le fanatisme, il est presque toujours fatal à la vertu... »
A l'article fanatisme, enfin, on peut trouver cette question tragiquement actuelle : « que répondre à un homme qui vous dit qu'il aime mieux obéir à Dieu qu'aux hommes, et qui, en conséquence, est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ? »

En définitive, Voltaire n’était pas si éloigné de l’idée de Dieu qu’on pourrait le penser. Et s’il fut virulent vis à vis du judaïsme, il en voulait également à l’islam ( auquel il s’attaqua au travers d'une pièce de théâtre sur Mahomet), et manifestement plus encore au christianisme. 
A l’article “fanatisme”, on peut lire par exemple que le plus détestable fut “celui des bourgeois de Paris qui coururent assassiner, égorger, jeter par les fenêtres, mettre en pièces, la nuit de la Saint-Barthélemy, leurs concitoyens qui n’allaient point à la messe.”
Et pour lui laisser le mot de la fin, s’il avait cette rancoeur toute particulière à l’égard du christianisme, c’est sans doute aussi parce qu’il était mortifié à l’idée que, “ de toutes les les religions, la chrétienne est sans doute celle qui doit inspirer le plus de tolérance, quoique jusqu’ici les chrétiens aient été les plus intolérants de tous les hommes…”

PS : j’avais déjà écrit sur Voltaire (derrière ce lien), suite à la lecture de la biographie fort élogieuse que lui avait consacré André Maurois, peu suspect de complaisance vis à vis de l’antisémitisme...

17 janvier 2015

Fausses notes

On n’est pas responsable de sa famille ni de son entourage, pour peu qu'il s'agisse de personnes majeures. Charb pas davantage qu’un autre. Il n’avait sans doute pas, le malheureux, pensé à organiser la grande cérémonie laïque de ses funérailles. D'autres l'ont fait...


Passons sur la présence quasi obligée de trois ministres, affligées par devoir. Peut-être ont-elles quelque chose à se faire pardonner…
Passons sur l'hommage graveleux du dessinateur Luz à son confrère, et sur le n-ième couplet "conchiant le libéralisme", donc la liberté...
Mais que penser de l’initiative d’accompagner en terre le cercueil du défunt au son de l’Internationale, cet hymne entonné, poing levé, par tant de fanatiques socialistes voulant par tous les moyens, y compris les armes et la terreur, convertir à leur idéologie le “genre humain” ! Que penser de ceux qui demandèrent au haineux Mélenchon, de débiter un des sermons outranciers dont il est coutumier, barbouillé à l’encre rouge du communisme…

Ainsi l’on voit avec les cendres des dessinateurs assassinés, s’effilocher l’esprit de Charlie, et sa prétendue indépendance…. Tant pis. On subodorait bien que l’union sacrée autour du fameux slogan Je Suis Charlie, n’était qu’une illusion d’optique. Une fallacieuse communion hypnotique en quelque sorte.
D’ici peu de temps, que restera-t-il donc de cette union de façade et de l’esprit provocateur de Charlie ? On sait bien qu’il ne fonctionnait plus guère, sauf à l’égard de l’Islam. C’était le courage de la Rédaction que d’avoir administré le même traitement à cette religion qu’à toutes les autres, ainsi qu’à toutes les institutions qu’il s’échinait à pourfendre avec un marteau pilon. Le pire eut été qu’il atténue la dureté des attaques adressées à celles exposant à un vrai risque.
Mais demain ? Les rescapés auront-ils encore la force d’asséner ces coups dévastateurs ? Il est permis d’en douter.

De toute manière, c’est peut-être à d’autres d’ouvrir les yeux sur la tragique réalité à laquelle est confronté le pays, et au delà, une bonne partie du monde. Pendant qu’on se lamente, les massacres continuent, hélas...

On nous promet dès à présent des lois plus sévères pour punir l’intolérance, le racisme et tutti. On nous annonce un encadrement plus serré de l’internet et un contrôle étatique renforcé de la liberté d’expression. Mais à quoi bon ces lois sécuritaires, fondées par nature sur des critères discutables, qui risquent d’asphyxier le débat et l'esprit critique, si elles ne s’accompagnent pas de l’arsenal répressif destiné à contrecarrer les vraies actions dangereuses ?
Les entraves pesant a priori sur la liberté d'expression, associées au laxisme répressif à l’égard des délits avérés, n’est-ce pas précisément l’inverse d’une société adulte, faite de citoyens responsables ? Dans ce modèle, ces derniers ne sont-ils pas aptes à distinguer par eux-mêmes le bon grain de l’ivraie et à traiter par l’indifférence les sottises et les contrevérités ? On se souvient de l’avertissement de Benjamin Franklin : " Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux. "
En revanche, dans une société ouverte, n'est-on pas en droit d'attendre de l’Etat une sévérité à la mesure des exactions commises à la faveur de la liberté ?
En l’occurrence, si les terroristes avaient été pris vivants, qui aurait osé ne serait-ce qu’évoquer la peine de mort, seul châtiment pourtant raisonnable vis à vis des actes dont ils se sont rendus coupables ? Heureusement ils ont eu le cran de s’exposer eux-mêmes aux balles des policiers…

10 janvier 2015

Etat de choc

Le massacre perpétré dans les locaux de Charlie Hebdo a frappé le pays de stupeur et d'effroi. A croire que le monde s'est arrêté de tourner et d'exister.

Moment vertigineux. Tout à coup, le cours du temps s'arrête sous le flot de lamentations dont les médias se font l'écho répercuté à l'infini. Les foules se mettent à communier avec une ferveur touchante, en se conformant à un rite où la grégarité le dispute à la candeur. Je suis Charlie devient l'expression abrupte de cette empathie subite, ressassée de manière mécanique par un peuple tétanisé.
Pour beaucoup, le monde du "care" s'est transformé en jungle cruelle. Et certains semblent découvrir que l'humanité puisse se révéler sous un jour aussi épouvantable. Ils avaient oublié ou n’avaient jamais appris que l'homme n'étant ni ange ni bête, bien souvent "celui qui veut faire l'ange fait la bête". Aujourd'hui c'est au nom de Dieu que des imbéciles fanatisés tuent leurs semblables. Hier, c'était au nom de la belle et soi-disant généreuse idéologie sans Dieu qu'est le socialisme. Quelle différence au fond ? Le plus grand danger auquel est confronté l’être humain, c’est toujours lui-même, et pour paraphraser Saint-Exupéry, ce que ces assassins ont fait, "jamais aucune bête ne l'aurait fait…"

Qu’il soit permis en ces heures dramatiques de réunir dans la même compassion, toutes les victimes de la barbarie et de rappeler humblement que la Liberté, si essentielle à l’émancipation de l’homme, a un prix. C’est un combat permanent qui impose de voir la réalité en face, et d’affronter les périls sans en travestir la nature, par faiblesse, démagogie ou esprit partisan. Ni amalgame, ni aveuglement.

A l’issue de la tragédie, on apprend qu’un des terroristes était un délinquant multi-récidiviste, condamné pour la dernière fois en 2013 à 5 ans de prison pour avoir tenté de faire évader un dangereux jihadiste, mais libre depuis un an ! Que les deux autres, qui s’étaient mis il y a quelques années, à fréquenter assidûment la mosquée, étaient sur la liste noire des islamistes fichés par les Etats-Unis, et que l’un d’entre eux s’était entraîné au Yémen dans les camps d’Al-Qaida … On sait aussi avec quelle détermination glaciale ils ont expliqué sans ambiguïté, en pleine cavale, les motivations religieuses de leur action meurtrière, et confirmé leur appartenance à un réseau organisé.

Aussi, lorsqu’au milieu de ses déclarations ronflantes, le président de la république soutient aux Français que “ceux qui ont commis ces actes n'ont rien à voir avec la religion musulmane”, il est permis de s’interroger. N’a-t-il donc rien compris, ou bien tente-t-il une fois encore de faire prendre des vessies pour des lanternes ?
Quant au premier ministre qui révèle gravement “qu’aujourd'hui nos compatriotes musulmans ont peur”, à quel jeu joue-t-il donc ? Fait-il de la provocation à destination de tous les autres ? Ou bien, se livre-t-il à une forme subtile d’instrumentalisation de la peur sous-tendue par de basses préoccupations électoralistes ?
Enfin, l’invitation qu’ils ont faite, urbi et orbi à participer à une gigantesque “marche républicaine” ce dimanche, dépasse l’entendement. Leurs homologues des pays voisins peuvent difficilement refuser d’y participer. On imagine la démesure des “mesures de sécurité massives” que
Manuel Valls a lui-même annoncées. Etait-ce bien nécessaire de mettre ainsi sur les dents, les forces de police sérieusement éprouvées par les temps qui courent ?
Et pour quel résultat, puisque l’union sacrée qu’ils appellent de leurs voeux n’est qu’une illusion, dans un pays qu'ils n’ont pas su préserver par leur action, de la radicalisation des esprits et des déchirements sociaux ?


PS: je me permets de rappeler un billet daté de 2012 dans lequel je prenais la défense de Charlie, à une époque où il était malmené, notamment par quelques uns de ses "amis"...

05 janvier 2015

Impression soleil levant

En contemplant ce tableau fondateur de l'impressionnisme il est permis de s’interroger. S'agit-il d'un lever ou bien d'un coucher de soleil ? Benjamin Franklin se posait la même question en 1787, durant les longs débats préludant à l’élaboration de la Constitution Américaine, en regardant le demi soleil sculpté dans le dossier du fauteuil de George Washington, qui présidait la convention siégeant à Philadelphie. Ce n’est qu’à la fin des sessions, lorsque enfin le texte fut adopté, qu’il eut la conviction que c’était bien un astre se levant, à l'image de l'espoir... Le tableau de Claude Monet (1840-1926) est si novateur qu’il paraît pareillement évident d'imaginer le début d'une aventure plutôt que la fin...

Après maintes supputations expertes sur l’oeuvre, le doute n’est de toute manière plus permis. Grâce à une enquête minutieuse, fondée sur l'analyse de données topographiques, de bulletins météorologiques et le calcul des trajectoires célestes, on est parvenu à déterminer que ce tableau fut peint un matin de novembre 1872, probablement le 13, autour de 7h35 du matin, dans le vieux port du Havre !

Cette toile emplie de grâce aérienne est la vedette d’une exposition sise au Musée Marmottan, à Paris (jusqu’au 18/01/15). Elle démontre avec quelques autres, comment Monet révolutionna en douceur l’art de peindre et comment il donna en quelques années à l’impressionnisme la dimension d’un nouveau classicisme. Il y a tellement d’équilibre, tellement de maîtrise dans ses compositions, dans ses harmonies de couleurs, qu’elles provoquent chez le spectateur ce sentiment de tranquille évidence qui définit le mieux l’autorité naturelle et le rayonnement s'imposant à tous.

Certes Monet trouva sans doute une bonne partie de son inspiration chez des précurseurs plus ou moins proches de lui au plan chronologique ou simplement par la liberté d’expression, tels Turner, Corot, Jongkind, ou encore Boudin. Mais ces derniers n’avaient pas rompu de manière aussi délibérée que lui le lien avec le monde ancien.
Certes le mouvement impressionniste compta quantité d’autres artistes talentueux, mais ni Renoir, ni Sisley, ni Pisarro, ni aucun autre ne parvint à exprimer avec autant de force et de plénitude ces fameuses fugaces impressions qui parlent autant au coeur qu’à l’intellect.

Monet seul, réussit à communiquer une étrange sensation de stabilité et d’éternité aux liquides, aux vapeurs, à l’air, aux fleurs et à toutes ces choses volatiles dont il fixa de manière indicible l’existence à travers l’image de leurs reflets colorés. Jusqu’à ses derniers jours, il explora ces nouvelles frontières qu’il dépassa largement au strict plan formel, pour culminer dans les sublimes et vertigineux panoramas peuplés de nymphéas conservés au Musée de l’Orangerie. Jamais sans doute on est allé si loin dans la quête picturale de l’infini et de l’extase.

Il est donc permis de continuer de rêver en voyant ce soleil orangé percer la brume nuageuse bleutée… Gageons, au seuil d’une nouvelle année, que cette aurore voilée soit aussi porteuse d’espérance pour une France semblant hélas bien crépusculaire...


28 décembre 2014

Il est interdit d'interdire

Qu’il est loin le slogan libertaire des gauchistes de 1968 !
C’est peu de dire qu’en matière d’expression et de droits nous sommes entrés dans une ère de glaciation. 

On nous rebat les oreilles de droits nouveaux, mais quels sont-ils bon Dieu ! Droit de mourir “dans la dignité”, droit au mariage “pour tous”, droit au logement “opposable”.... Autant de fadaises qui masquent une dérive progressive du droit d’être libre tout simplement.

Depuis les lois odieuses encadrant la liberté d’expression, promulguées en 1990 à l’initiative du communiste Gayssot, on ne compte plus les interdits de toute nature qui empoisonnent notre quotidien et nous éloignent chaque jour un peu plus du modèle démocratique d’une société de citoyens responsables.
Comme au temps des féodalités, ces derniers sont assujettis à une tutelle débilitante, incarnée aujourd’hui par l’Etat Providence. Partout surgissent les tourelles de ses Hautes Autorités aussi pompeuses qu’inefficaces, les forteresses légales que sont commissions, instituts, et agences soi disant affectées à la veille et à la régulation. Telle la soeur Anne, elles surveillent, mais ne voient jamais rien venir à temps.

Pendant ce temps, chaque jour que Dieu fait amène son lot d’ukazes, d’excommunications et de polémiques plus ridicules les unes que les autres. 

A l’instar de cette mesure proposée par la préfecture de police de Paris, interdisant aux particuliers de faire des feux dans leurs cheminées. Ou bien ce projet concocté par la maire de la capitale et ses écolos de service, d’empêcher tout véhicule diesel d’entrer dans sa ville !

Les Pouvoirs Publics et leurs zélotes associatifs ou syndicaux se font un devoir de mettre sous contrôle tous nos faits et gestes.

Y a-t-il plus ridicule que ces tergiversations légales sur le nombre de dimanches pendant lesquels les commerces seraient autorisés à ouvrir ? Ou ces atermoiements sur les horaires de leur fermeture obligée, en soirée ? Quelle misère que ce débat grotesque sur les professions dites réglementées ! Un jour on fait mine de libéraliser les statuts des notaires ou des pharmaciens mais dans le même temps on protège les rentes de situation des taxis en pénalisant les entreprises de VTC, ou bien celles de buralistes en interdisant l’achat de tabac sur internet ! 
Résultat, partout on voit émerger de nouveaux systèmes marchands cherchant à échapper à l’emprise asphyxiante des réglementations et du fisc. Le Web apporte une bouffée d’oxygène et de liberté à ces entreprises : chambres d’hôtes, ecommerce, covoiturage, enchères… Certaines useraient dit-on, de tous les stratagèmes pour ne pas payer leurs impôts en France. Allez donc savoir pourquoi !

La liberté d’expression elle-même est pareillement étouffée par des hordes de censeurs pudibonds et bornés. Après les affaires Soral, Dieudonné, ou Finkielkraut, il faut empêcher Zemmour de parler, ou dans un tout autre genre, Valérie Trierweiler. Peine perdue, leurs ouvrages et spectacles font florès…
En la circonstance, la sottise peut mener très loin. On a même vu des libraires participer de manière stupide à cette censure insensée en s’interdisant la vente de ces best sellers !
Pour d’anodins propos, la chanteuse Zaz et l’entraîneur de football Willy Sagnol ont été cloués au pilori médiatique. Même Bob Dylan lors d’une tournée en France, fut convoqué par des magistrats pour répondre au sujet de propos tenus dans un magazine à propos des oustachis Croates !
Et que dire de la polémique à propos de l’affiche illustrant ce billet, qui fut proposée par la municipalité de Saint-Brieuc, pour lancer la quinzaine commerciale de Noël ? L’opposition socialiste qui n’a manifestement vraiment rien à dire, s’érigeant en ligue de vertu, crut bon de demander le retrait de cette image jugée “sexiste” au motif que la Mère Noël était représentée peu vêtue et dans une position lascive. On pourrait rire de ces gloussements si on n’avait vu venir en renfort de ces dames patronnesses, l’illustre et inconnue Pascale Boistard, secrétaire d'État paraît-il chargée des Droits des femmes…
Comme dirait l'autre, quand les bornes de la bêtise sont franchies, il n'y a plus de limite. Mais s'il n'y a plus de limite à quoi bon interdire ?

19 décembre 2014

Hypnose (Kôdéia)

Sans coup férir cette heure avance
Au gré d’un léger trémolo
Comme une barque allant à l’eau
Saoule mais non sans vigilance

Elle est ravie et se balance
Emprisonnée dans un halo
Tiède surgi ex-nihilo
Qui l’enlace dans sa mouvance

A Dieu ne plaise le retour
Trop brutal de ce doux voyage
Si loin et si près du rivage

Pour qu’en un délicieux détour
Utopique, le temps s’allonge
A l’instant même où seul, je plonge...

13 décembre 2014

Dylan, brut de décoffrage

A l'instar des rescapés du Pink Floyd qui étoffent et redorent d'anciennes ébauches délaissées dans des placards, pour tenter d'en faire du neuf, Bob Dylan ressort de ses vieilles malles ses légendaires Basement Tapes, captées dans l'intimité en 1967, alors qu'il se remettait à la campagne, d'un accident de moto.

Mais à l'inverse des premiers, il les propose dans leur jus, sans fioriture ni artifice. Ça dégage un petit parfum boisé et acide dans lequel remonte, un peu confite mais très prégnante, l'ambiance rebelle des sixties.

Et c'est une nouvelle occasion de se confronter au mystère Dylan. Notamment cette scansion nasillarde que certains trouvent insupportable, et qui derrière son apparente monotonie, surprendra toujours en même temps qu'elle les ravit, les aficionados. Elle touche parfois au sublime dans ces sessions débridées où son lamento stridulant fait merveille. Parmi les nombreuses mélopées soutenues efficacement par le quintette si attachant du bien regretté The Band, on retiendra des standards éprouvés, telle cette version déchirante du fameux I Shall Be Released, des perles jamais entendues (Sign On The Cross) ou restées à l'état de géniales improvisations (I'm Not There).

Un livret instructif et richement illustré complète ce double album très root qui apporte un éclairage intéressant sur ce baladin lunatique, aux messages aussi envoûtants qu'énigmatiques...



Bob Dylan and The Band. The Basement Tapes, raw. 2014 
On apprend au passage qu'un nouvel album se prépare pour 2015 :Shadows In The Night. Wait And See...

12 décembre 2014

Pink Fade...

Ce jeu de mot oiseux qui m’a été inspiré par un bon ami après l’écoute de l'ultime opus du Floyd est à double détente.

Bien sûr il est possible de trouver très pâles ces fragments épars, ressortis des vieux cartons de 94, rehaussés d’un peu de rimmel instrumental ici où là, et même de quelques paroles, faisant émerger une vague chanson de ce magma liquoreux. Tout ça n’a bien sûr ni queue ni tête et ne peut apparaître dans ces conditions, autrement qu’un ersatz.

Pris dans son acception anglo-saxonne, c’est aussi la manière d’exprimer le doux anéantissement vers lequel tout est condamné à filer dans ce monde sublunaire. Syd Barrett oublié, Roger Waters enfui, Rick Wright disparu, que reste-t-il donc ? Ces réminiscences au parfum quelque peu évaporé, qui vous plongent dans la nostalgie en même temps qu’elles vous font parfois frissonner au souvenir des heures extatiques évanouies.

Alors, tant pis, montons de bonne grâce dans cette frêle et illusoire embarcation, et abandonnons nous à l’ineffable tangage, né de cet océan de nuages, indéfini...

Pink Floyd The Endless River 2014

03 décembre 2014

Chaconne



Ce chant si beau demain peut-être
Aura vaincu les pesanteurs
Dont il émane avec des pleurs
Sans oser vraiment tout promettre

Il traverse tendrement l'être
Comme le silence des fleurs
Leurs parfums ou bien les douceurs
Du jour au  moment d'apparaître

Il dit plus que les infinis
Qui sont au dessus de nos têtes
Et dans ses accents inouïs

Résonnent d'indicibles fêtes
Au cœur d'un grand jardin radieux
Peuplé d'archanges et de dieux...


****************************
Inspiré par l'écoute de la Chaconne de la Partita no2 en ré mineur de J.S. Bach, magistralement interprétée à la guitare par John Feeley (à voir et à entendre derrière ce lien)

23 novembre 2014

Edmond About, un libéral inattendu

En flânant dans une librairie, il y a quelques jours, je tombai sur une étonnante petite collection d’ouvrages dans laquelle un titre attira particulièrement mon attention. Intitulé “La Liberté”, il portait la signature d’un illustre inconnu : Edmond About.
Mais peu importait en fin de compte la notoriété de l’auteur. Le titre alléchant, le prix des plus raisonnables, la dimension modeste de l’opuscule (à peine une cinquantaine de pages), et quelques passages plutôt plaisants lus à la va-vite me décidèrent à en faire l’acquisition.
C’est ainsi que j’appris qu’Edmond About (1828-1885) fut un écrivain jouissant d’une belle renommée à son époque. Journaliste et critique d’art très apprécié, il fut également l’auteur de quelques romans à succès, ce qui lui valut même d’entrer à l’Académie Française ! Il ne put y siéger malheureusement, car la mort le saisit juste après son élection, alors qu’il n’avait que 56 ans…

C’est tout à l’honneur des Editions Berg International, sous le patronage avisé de Damien Theillier, d’avoir ressorti un extrait de son ABC du travailleur. Ce texte fut écrit en 1868, à la demande d’un syndicat d’ouvriers parisiens navrés d’en connaître si peu en matière économique, et désireux de pouvoir disposer d’une sorte de traité d’économie pour les nuls, avant l’heure.
Pour ce faire, l’auteur eut l’idée de reprendre le sillon gorgé de bon sens qu’avaient ouvert avant lui Turgot et Jean-Baptiste Say, et livra quelques savoureuses réflexions personnelles dont certaines ont gardé toute leur fraîcheur dans le monde d’aujourd’hui.

Ça commence par une salve de questions dont la forme interrogative ne fait que souligner la nature évidente des bases sur lesquelles repose le capitalisme :
“Pourquoi le capital et le travail, deux alliés inséparables par nature, sont-ils éternellement en défiance pour ne pas dire en guerre ? Pourquoi les plus honnêtes gens du monde s’accusent-ils réciproquement de crimes épouvantables, les uns criant qu’on veut leur prendre ce qu’ils ont, les autres protestant qu’on leur a volé ce qu’ils n’ont pas ? Pourquoi les riches, ou du moins certains riches, méprisent-ils stupidement ceux qui travaillent ? Mais, malheureux ! Votre fortune n’est-elle pas autre chose que du travail mis en tas ? Pourquoi les pauvres haïssent-ils généralement les riches ? Vous ne savez donc pas que vous seriez cent fois plus pauvres, c’est à dire travaillant plus pour gagner moins, s’il n’y avait que des pauvres autour de vous ?”

Avec pertinence, Edmond About tente de tordre le cou au vieux préjugé, qui déjà de son temps faisait du libéralisme quelque chose d’amoral, voire d’immoral. En réalité, écrit-il, “la saine économie donne la main à la morale, et contre-signe, après elle, la loi de solidarité. “Hier elle vous disait : Tous les hommes sont frères. Elle vient nous dire aujourd’hui : Tous les hommes sont libres.” “Libres de travailler quand et comme il leur plaît, de produire, de consommer, d’échanger, à prix débattu, les biens et les services de tout genre.”
About détaille avec méticulosité toutes les entraves mises en travers de cette voie, à chaque époque de l’Histoire, par l’Etat, et par ses lois soi-disant protectrices.
Lorsque ce dernier était représenté par un souverain de droit divin, l’immaturité du peuple étant un fait établi, le roi faisait figure de père omnipotent, et omniscient. Son pouvoir absolu n’était “qu’un instrument dont il usait au profit de quelques millions d’hommes, ou pour mieux dire, d’enfants; car tous les Français étaient mineurs relativement à lui.”
“De fait, la royauté croyait bien faire en touchant à tout; elle imitait, dans la mesure de ses pauvres moyens, cette Providence d’en haut, qui surveille jusqu’aux infiniment petits du monde.” En dépit des injustices et des privilèges consubstantiels à l’ancien régime, “le bon vouloir des rois n’était pas douteux ; ils avaient un intérêt direct à faire la fortune de leurs peuples. C’est dans ce but qu’ils réglaient tout : le travail, le repos, la culture, l’industrie, les semailles, les récoltes, la production et le commerce, substituant leur prétendue sagesse à la prétendue incapacité des citoyens.”

Bien qu’elle ait aboli un système néfaste à bien des égards, la révolution n’apporta pas pour autant l’émancipation du peuple, déplore About, car elle “ne fit qu’en rétablir les excès sous une autre forme, sans amener davantage de prospérité.../… Il semble que le soleil ne soit apparu un instant que pour s’éclipser aussitôt” et en définitive, “le bilan de ces dix années que l’Europe nous envie à bon droit peut s’établir ainsi : dévouement, patriotisme, courage civil et militaire à discrétion; libertés politiques et économiques, néant.” Et pour finir, “le peuple est toujours dans le même embarras quand il fait une révolution, car les révolutions ramènent inévitablement la disette, et l’on a beau chercher, on ne met jamais la main sur les vrais accapareurs…”

En plus de s’attaquer aux systèmes qui, sous couvert de bonnes intentions, ne font qu’assujettir les citoyens, Edmond About flétrit la tendance naturelle des pouvoirs publics à protéger les privilèges, prérogatives, et autres sinécures.
Il montre entre autres les effets néfastes du protectionnisme, objectivant notamment le fait que loin d’être bienfaiteur, il mène le plus souvent à pérenniser des rentes de situation : “Le protectionnisme et les droits de douane ne sont que des moyens de protéger certains contre d’autres en tout égoïsme. Chacun en effet voudrait protéger son entreprise de la concurrence, mais dans le même temps, pouvoir acheter ce qu’il ne produit pas au meilleur prix. Au total, l’Etat sollicité de toute part, finit par décréter des droits sur tout, et par rétorsion les états voisins font de même.../… Au bout du compte ce sont les citoyens qui paient la facture et les plus pauvres qui en souffrent le plus."
Sur cette question comme sur tant d’autres, c’est le bon sens qui devrait s’imposer : “Le vrai système protecteur est celui qui permet au consommateur de s’approvisionner au meilleur prix possible, soit dans le pays, soit à l’étranger….”

Edmond About, au nom du principe de liberté, condamne donc toutes les formes d’étatisme, et notamment l’absolutisme monarchique autant que le socialisme, qu’il soit révolutionnaire ou bureaucratique.
A l’époque où il écrit, Edmond About, imagine toutefois de manière un peu trop optimiste, que beaucoup de leçons ont été tirées de l’histoire. A ses yeux, la monarchie semble définitivement abolie, et les Socialistes sont discrédités, apparaissant pour ce qu’ils sont : “des charlatans de l’économie politique”, “des vendeurs de pierre philosophale”, qui promettent le paradis sur terre...
Mieux même, il estime que “le socialisme, qu’on peut discuter aujourd’hui sans passion, a livré son dernier combat, sous nos yeux, en Juin 1848. Il est non seulement vaincu, mais désarmé par le progrès des lumières et le redressement des esprits.”

Hélas, après la révolution de 1848, cette idéologie ne fit que se développer à travers le monde, sous l’influence du marxisme naissant : le Manifeste du Parti Communiste est daté précisément de 1848, et Le Capital fut publié en 1867 ! Malgré les horreurs que cette doctrine engendra dans toutes ses applications, force est de reconnaître qu'elle a survécu, et que nombre de politiciens s’en réclament toujours, même s’ils sont heureusement bien obligés de la diluer dans la démocratie !

Si Edmond About s’est quelque peu trompé en matière de prévision, on retiendra malgré tout la pertinence des concepts qu’il expose avec beaucoup de clarté. Et parmi les réflexions qui gardent tout leur sel aujourd’hui encore, qu’il soit permis d’en évoquer encore deux qu’on croirait tirées du débat actuel franco-français.
En bon libéral, About renvoie dos à dos les conservateurs et les socialistes : “Les premiers sont protectionnistes, les seconds sont utopistes, mais tous sont des ennemis de la concurrence et de la liberté économique.”
“L’Etat doit se charger des services indispensables à la sécurité. Il doit protéger les citoyens. Mais il ne doit pas se faire l’administrateur du travail et des échanges.”

A bon entendeur, salut et fraternité….

16 novembre 2014

Les dessous de l'affaire...

Pendant que le peuple souffre et qu’il lui est demandé sans cesse de nouveaux efforts, les grands commis de l’Etat se gobergent chez Ledoyen ! Et complotent peut-être à ce qu'il paraît....
On ne saura sans doute pas de sitôt ce qui s'est dit lors de cet étrange déjeuner du 24 juin 2014, réunissant dans un luxueux restaurant étoilé, messieurs Fillon, Jouyet et Gosset-Grainville, mais on connaîtra peut-être bientôt ce qu'en a dit M. Jouyet secrétaire général de l'Elysée, lors d'une interview donnée à deux journalistes du journal Le Monde en septembre dernier. Ces derniers se sont tellement vantés de tenir à la disposition de la justice l'enregistrement intégral de l'entretien, qu'il faudra bien qu'ils s'exécutent un jour ou l'autre. Ce d'autant que selon leur propre aveu, ils en ont déjà fait profiter quelques confrères...

Il est vrai que ces gens si tatillons sur le secret de l'instruction, la protection des sources, la présomption d'innocence et le toutim, n'ont pas lésiné sur les entorses à ces principes pour juger sans appel et sans preuve, l'ancien président de la république Nicolas Sarkozy. Faisant feu de tout bois, mélangeant des affaires sans suite et d’autres hypothétiques, ils ont joué à discréditer l’ancien chef de l’Etat et distillé le froid parfum de vengeance. On nous apprendrait que ces deux là sont en service commandé, pour tenter de ruiner les chances de retour de l’ancien président qu'on ne serait pas surpris. En tout état de cause, le titre racoleur de leur ouvrage placardé de manière agressive sur la couverture, dit à lui seul que nous sommes à mille lieues du journalisme d'investigation qu'ils prétendent incarner. Il paraît qu’ils fréquentent assidûment l’Elysée depuis la prise de fonction de celui que ses amis appellent affectueusement la Fraise des Bois. Il paraît qu’ils avaient la louable intention de faire en toute objectivité le journal du quinquennat ! Faut-il croire que les Français soient assez niais pour gober de telles balivernes ?

Dans cette nouvelle affaire éclaboussant un peu plus le calamiteux mandat de François Hollande, tout est ténébreux, tout sent la magouille et la machination. Déterminer qui manipule qui, apparaît dans ce contexte presque secondaire, l’essentiel étant de savoir qui rira le dernier...
Pour F. Fillon, le seul fait d’avoir accepté de se rendre à une telle rencontre pose problème. Soit il est tombé dans un traquenard, ce qui ferait douter de sa perspicacité, soit il est partie prenante d’un complot. Dans les deux cas il se disqualifie pour de futurs challenges électoraux.
Quant à JP Jouyet, la preuve est déjà faite qu’il ment, puisqu’il est capable à deux jours d’intervalle de soutenir deux versions diamétralement opposées. La première est démentie par ceux qui ont eu le privilège d’entendre la fameuse interview. La seconde accuse lourdement M. Fillon, mais ne dédouane pas pour autant le secrétaire général de l’Elysée qui ferait dès lors figure de complice.

En l’occurrence, tous les protagonistes impliqués dans cette affaire risquent bien d'en sortir salis, que la justice parvienne ou pas à en démêler l’écheveau. Cela reste en effet très incertain car chacun pour l’heure semble prêt à se rétracter. François Fillon poursuivra-t-il en diffamation Jean-Pierre Jouyet, rien n’est moins sûr. Il y a fort à parier dès lors que ce dernier ne demandera pas son reste (il nie déjà avoir été informé qu'il était enregistré). Quant aux journaleux, ils seront trop heureux qu’on s’en tienne aux supputations…

Morale de l’histoire, et peut-être vraie justice en somme, ces manoeuvres aident paradoxalement Nicolas Sarkozy à se remettre en selle. Après son retour qualifié un peu rapidement de raté par la Presse, il bénéficie d’un début de rédemption face à cette infâme mêlée liguée contre lui, et il peut désormais prétendre rassembler tous ceux qui sont lassés de ces combines politiciennes. Il ne lui manque plus qu’un projet et des idées fortes pour relancer une espérance...

15 novembre 2014

Philaé



Si tant est qu'une comète
Fusant dans l'espace noir
Soit chargée du même espoir
Qu'un vibrionnant gamète

Si tant est que cette miette
De l’Univers puisse avoir
Un secret bon à savoir
Par l’Homme en sa pauvre tête

Alors, qu’en son parcours fou
La machinerie futile
Accrochée à son caillou

S’engloutisse comme une île
Et livre en forme d’adieux
Quelque signe merveilleux...

03 novembre 2014

Picasso embaumé par l'Etat


Confronté à une déconfiture généralisée, et plombé par une incapacité quasi totale à résoudre de manière pragmatique le moindre problème, certains ministres et leur piteux chef en tête, ont tenté de récupérer quelques miettes de la période faste que vient de traverser la culture made in France.
Las, ce fut une succession de gaffes et de pantalonnades !
Il n’y a pas à dire, comme le chantait Brassens, quand on l’est, on l’est bien…

Cela commençait de la meilleure façon pourtant avec les deux prix Nobel attribués à des Français. On ne voit pas ça tous les ans tout de même !
Mais premier raté, Jean Tirole, économiste distingué par le jury suédois quoique peu prisé du gratin médiatique, préconise des recettes exactement opposées à celles mises en oeuvre (si l'on peut dire...) par le gouvernement ! Les hommages surjoués des ministres apparurent dans ce contexte quelque peu déplacés.
Le pire fut toutefois de découvrir à l’occasion de l'attribution du prix de littérature à Patrick Modiano, que madame "la" ministre de la culture, n’avait jamais ouvert un livre de lui, avec qui elle avait pourtant déjeuné et “bien rigolé”, pour fêter ça. Ahurissant, mais seulement pour ceux qui imaginaient encore que ce ministère avait une quelconque utilité…

Nos dirigeants n’étant pas à un paradoxe près, ils offrirent au peuple un vrai festival, ne manquant aucune occasion de s’illustrer dans la catégorie ridicule.
On vit par exemple François Hollande, plastronner en compagnie du capitaine de la finance internationale et du luxe qu’est Bernard Arnault, pour inaugurer en fanfare la fondation Louis Vuitton à Boulogne. Elles sont bien loin les imprécations hargneuses du candidat socialiste néo-marxisant à la présidentielle de 2012 !
On vit sa même silhouette joviale et bedonnante parcourir avec une belle satisfaction bourgeoise, les stands délirants de la FIAC. On le vit s’enthousiasmer à la vue de ces installations insensées et défendre au nom de l’art n’importe quelle fadaise ou godemiché géant érigé triomphalement place Vendôme. Avec une verve touchant au sublime, il se lança même dans un vibrant plaidoyer du prétendu artiste gonflé-dégonflé : «La France sera toujours aux côtés des artistes comme je le suis aux côtés de Paul McCarthy, qui a été finalement souillé dans son oeuvre». On peut dire qu’en la circonstance, le Chef de l’Etat fit preuve, sans doute involontairement et c’est là le plus drôle, d’un délicieux sens de l’à propos : sait-il seulement qu’en plus de ses désormais fameux plugs anaux, l’artiste en question a exploré d’autres possibilités de sculptures similaires, en forme par exemple de monumentales piles d’excréments ?

Pour clore cette parenthèse enchantée, détonant sur une réalité si médiocre, M. Hollande, tel un moderne et infatigable Don Quichotte défiant le bon sens et la réalité, inaugura en grande pompe l’exposition permanente Picasso, sise dans les vénérables murs de l’Hôtel Salé, superbe immeuble baroque situé dans le quartier du Marais.
Cinq ans de travaux et plus de quarante millions d’euros pris aux contribuables, ont été nécessaires pour faire de ce bâtiment bien nommé, un écrin à la hauteur de la collection de l’artiste encensé par l’Etat.
François Hollande enivré par ses propres paroles, a qualifié ce musée d’un des plus beaux" et "des plus émouvants" du monde en inaugurant l'établissement nouvellement réouvert au public. Aussi généreux dans l’éloge gratuit qu’il peut l’être en distribuant l’argent qu’il ponctionne, il a qualifié l’auteur des “Demoiselles d’Avignon” de “peintre de la liberté”, qui "aimait la France, et avait choisi la France", en soulignant lourdement que "s'il n'en a jamais eu le passeport, Pablo Picasso, le républicain, le communiste, est la fierté de la France".

Il est vrai que comparé à Paul McCarthy et ses exhibitions porno-scato, Picasso ferait presque figure de peintre académique ! Il est d’ailleurs bien difficile de contester à ce dernier une originalité et un talent peu communs. Hélas, l’excessive profusion de ses oeuvres (près de 50.000 recensées) et le caractère répétitif des thèmes, tendraient à faire de lui une sorte de stakhanoviste de l’art bien plus qu’un démiurge inspiré, du genre de Michel-Ange.
On se plait généralement à louer les grandes capacités de dessinateur de Picasso, et à vanter son talent à nul autre pareil, pour créer des formes. Pourtant le moins qu’on puisse dire est que ces dernières ne flattent pas toutes l’oeil, et que même si l’on peut leur trouver parfois des qualités décoratives, elles sont en général assez loin de susciter ce sentiment indicible, ce trouble indéfinissable, qui nous envahit au spectacle de la beauté.

On pourrait même suggérer que ce qui le distingue de Michel-Ange, ou de Velasquez qui fut une de ses sources d’inspiration, c'est sans doute la propension à enlaidir tout ce qu’il touchait. On peut ne pas admettre ce point de vue puisque selon les philosophes, la beauté ne se prouve pas, elle s’éprouve. On pourrait tout aussi bien gloser sur les raisons qui poussèrent l’Andalou à déformer et à torturer ainsi la réalité en la transcrivant sur sa toile.
Ne serait-ce pas une sorte d’aveu d’impuissance face aux grands maîtres qui le précédèrent ? Ceux-ci ne reculaient certes pas devant la laideur - le fameux tableaux des Ménines en témoigne - mais ils mettaient tout leur art à la transcender, à en révéler la beauté cachée en quelque sorte. Pourquoi n’est-on pas choqué de voir traité par Rembrandt un boeuf écorché, pendu à l’étal d’un boucher, et pas davantage par une vulgaire chaise paillée ou même une paire de godillots peints par Van Gogh ?

Une des problématiques de l’art contemporain réside dans sa tendance à délaisser la quête du beau pour privilégier l’apparence formelle, avec le souci croissant de s’originaliser à tout prix, et d’imprimer sa marque de fabrique par n’importe quel moyen. Rançon de cette dérive, l’art devient une marchandise de pacotille que les badauds viennent certes voir en foule, mais mus par une curiosité relevant hélas souvent de l'attrait pour le morbide.
Il est étonnant que tant d’intellectuels éthérés, méprisant les triviales valeurs marchandes, et en froid avec l’argent et le profit, s’extasient de manière béate devant des artistes tel Picasso, préoccupés semble-t-il avant tout de faire commerce et gloriole de leur talent, quitte à le galvauder sans vergogne.

Le comble de cette perversion fut le fameux urinoir de Duchamp, daté de 1917, qui réduisit d’un coup l’entreprise artistique au pur néant.
Bien des années plus tard, en 1993, on se souvient qu’un certain Pierre Pinoncelli fit scandale au Carré d’Art de Nîmes, en urinant dans l’oeuvre exposée et en lui donnant un violent coup de marteau. Il fut condamné à un mois de prison avec sursis et 286 000 francs de dommages-intérêts ! Il justifia son geste en disant qu’il avait voulu rendre hommage à l'esprit dada, qui est l’irrespect. Juste retour de bâton en somme…

Depuis cet épisode, tout ce qui s’inscrit dans la démarche déconstructive de l’art, n’est que navrant rabâchage.
Il serait excessif de réduire Picasso à ces “foutages de gueules” pour parler trivialement, mais il est possible de voir en lui un précurseur, et on peut légitimement se demander si son oeuvre restera inscrite au firmament de l’Art. Il est permis d’avoir des doutes... Fallait-il en tout cas, que l’Etat consacre tant d’argent à la gloire d’un seul artiste, déjà si connu, si muséifié, et dont la fortune gigantesque, pourrait suffire à assurer la renommée, en même temps qu’elle garantira la prospérité de ses héritiers durant encore plusieurs générations. C’est là une vraie question...

20 octobre 2014

Baudruches

Qu’elle est plaisante cette histoire de gonflage-dégonflage express d’oeuvre d’art sur la Place Vendôme !
Tout commence jeudi 16 octobre avec l’érection d’un gigantesque machin ogival de 24 mètres de haut, en plastique vert-pomme, dans le cadre de la Foire Internationale de l’Art Contemporain (FIAC).
 Allez savoir pourquoi, sa forme suggestive, poétique et délicate de sex-toy genre “plug anal” ne parut pas enthousiasmer tout le monde.
La polémique partit même plus vite qu’un pet sur une toile cirée et les esprits s’enflammèrent tant et tant, que dès la nuit suivant l’installation, des trublions facétieux mais sans doute incultes s’en prirent méchamment à l’engin (ils croyaient paraît-il qu'il s'agissait d'un sapin de Noël !). Ils débranchèrent la pompe qui le gonflait et sectionnèrent quelques sangles le maintenant debout. Patatras, la belle oeuvre d’art du dénommé Paul Mc Carthy se retrouva raplapla sur le pavé en moins de temps qu’il ne faut pour le dire !
Dès le lendemain les gardiens du temple de l’art, mairesse de Paris et ministresse de la culture en tête, firent part de leur effroi, criant au scandale, et comparant peu ou prou l’acte de vandalisme à la brutalité nazie face à l’art dégénéré. Et voilà comment, à défaut de point G, on peut atteindre le point Godwin à partir de n’importe quoi par les temps qui courent !

Cette guéguerre cul-turelle est bien dommage en somme car ce truc avait une symbolique puissante. Gigantesque baudruche, il n’était pas sans évoquer le vide sidéral de la pensée contemporaine, et tout particulièrement la politique boursouflée de mots creux du gouvernement. Laissant voir ses grosses ficelles, il ne tenait pas davantage debout qu’elle. Au surplus la finalité de la chose représentée s’accordait plutôt bien avec la manière dont on prend le peuple en ce moment...
Finalement, à défaut de marquer l’Histoire de l’Art, le prétendu artiste n’est pas loin d’avoir atteint son but : cet épisode restera dans les annales...