24 décembre 2016

Jeux de langues

La langue est ce qu’on a trouvé de mieux pour exprimer la pensée. Mais cette dernière est si foisonnante et si insondable que la première se révèle pour la tâche, un outil bien rudimentaire. Celui qui sait manier plusieurs langues a sans doute un avantage. Non pas tant de savoir traduire des phrases d’un idiome à l’autre, mais surtout de pouvoir mieux mesurer à partir de plusieurs points de vues, la richesse de l’expression humaine.
C’est en quelque sorte à cette expérience que l’écrivain Michael Edwards tente de nous initier dans ses dialogues singuliers sur la langue française.
Il faut préciser tout de suite qu’élevé à Cambridge, il est tombé sous le charme de la France et du français qu’il maîtrise au moins aussi bien que sa langue maternelle. Preuve en est qu’il siège depuis quelques années à l’Académie Française !

Son domaine de prédilection, c’est la poésie qui est selon lui “le lieu où l’on devine tout le possible de la langue, tout ce qui demeure inexploré dans les échanges habituels.”
A partir son expérience personnelle, il propose ici une réflexion en forme de dialogue, qu’il mène tout seul, en se dédoublant pour la circonstance. Sa partie francophone est “moi”, sa partie anglophone est “me”. On pourrait trouver le procédé un tantinet artificiel et le fait est que certaines digressions semblent parfois se perdre en conjectures, agréables mais un peu exégétiques.
On trouve toutefois dans ces pages où l’érudition le dispute à l’esthétisme des considérations intéressantes. La comparaison du français avec l’anglais tout d’abord qui donne l’occasion de décrire le premier comme “une langue rangée, surveillée, où l’on se plaît à multiplier les difficultés.../… une langue mieux ordonnée que la réalité qu’elle tient  délicatement à distance”, tandis que l’anglais manifeste “une capacité à créer un sens complet et souvent complexe avec une grande économie de moyens.”
Evoquant les études linguistiques d’un certain Charles Bally, Michael Edwards, rappelle toutefois que “la construction française est restée souple voire capricieuse, rebelle aux règles inflexibles, accueillante pour les exceptions et les variétés susceptibles de rendre  les nuances délicates de la pensée…”
En un mot, plutôt flatteur, si l’anglais est “la langue universelle dans le sens grossier du mot (on la parle partout), le français est universel de manière bien plus noble. Affranchi des conjonctures, il domine dans l’ordre de l’idée, de l’esprit…”

Selon Michael Edwards, maîtriser une langue c’est voir à travers : “La langue disparaît comme intermédiaire. C’est écrit quand on ne voit plus la langue, seulement la chose dans toute sa netteté…”
Pourtant à force d’être précise la langue française frise parfois l’absurdité, notamment comme le fait remarquer Michael Edwards, lorsqu’elle entend faire “le partage de tous les objets du monde et de la pensée entre les genres masculin et féminin.” Cela tourne même à la manie lorsqu’on applique au langage les stupidités de l’idéologie égalitaire, en féminisant de manière affreuse tous les mots qui ne connaissaient qu’un genre qu’on aurait pu qualifier de “neutre” (professeure, auteure, sapeuse-pompière). L’Académie Française s’est d’ailleurs élevée contre cette mode, déniant même au gouvernement « le pouvoir de modifier de sa seule autorité le vocabulaire et la grammaire du français. »

Si la langue maternelle, qu’on imagine aussi naturelle que l’air qu’on respire, contribue à rendre familier tout ce qui nous entoure, l’acquisition d’un nouveau mode d’expression est comme un débarquement en terre inconnue. Cette sensation inspire à Michael Edwards une belle réflexion aux prolongements philosophiques : “Par le français, je suis entré avec bonheur dans l’étranger, mais aussi avec appréhension.../… C’est d’abord le vocabulaire qui bascule, les mots qui disparaissent pour être remplacés, alors qu’ils semblaient contenir toute la réalité ou presque.”
Lorsque la réalité perd son caractère intangible, c’est l’être lui-même qui vacille. Ainsi la langue nouvelle insinue l’étrangeté dans le moi :”Si l’on change en plongeant dans les eaux d’une autre langue, le moi n’est pas stable, on peut se demander qui l’on est.../… Nous habitons une planète qui ne parle pas notre langue. il suffit d’un changement d’optique pour que tout bascule.../…”

Méditer sur la langue mène très loin. Jusqu’à Dieu pourquoi pas, si l’on se réfère à l’évangile selon Saint-Jean qui stipule “qu’au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu.”
D’où cette conclusion en forme de questionnement panthéiste, attachant aussi bien le langage à l’homme que l’homme à Dieu, de manière pourrait-on dire consubstantielle :
  • “Quand Dieu créa l’univers, le ciel et la terre, la création se trouvait-elle en dehors de lui ?
  • Je nage complètement , ou plutôt je me noie dans ce qui me dépasse tout à fait, mais je présume que Dieu projeta  l’univers hors de lui.
  • Mais si Dieu est omniprésent, comment peut-il exister quelque chose en dehors de lui ? Où trouver un endroit qui soit hors de Dieu ?”

19 décembre 2016

Game Over

Les Historiens se pencheront sans doute objectivement sur les faits et actions marquant le double mandat de Barack Obama, qui fut à la tête des Etats-Unis de 2008 à 2016.

Porté par un élan confinant parfois à l’extase mystique, le “premier président noir” a-t-il été à la hauteur de ce que les foules enthousiastes attendaient de lui ?

Le moins que l’on puisse dire est que cette épopée annoncée un peu trop emphatiquement, s’achève en fiasco.

Le dernier discours du Président, révèle que même dans les mots, il n’est plus très efficace, lui qui savait si bien manier le verbe pour émouvoir le bon peuple.
Les médias pourtant si indulgents à son égard ont surtout retenu ses vaines piques vengeresses adressées à la Russie. Pourquoi donc, alors qu’il s’apprête à quitter la Maison Blanche, se lance-t-il ainsi dans une charge nécessairement dérisoire et potentiellement désastreuse à l’encontre d’un pays avec lequel son successeur aura la délicate tâche de composer ?


Sans doute est-il déçu de n’avoir pas réussi à faire triompher son ex-rivale et coreligionnaire Hillary Clinton; sans doute est-il quelque peu humilié par l’influence grandissante de Wladimir Poutine sur la scène internationale.
Mais y a-t-il encore un admirateur assez béat pour prendre au sérieux les accusations de piratage informatique, responsables paraît-il de la déstabilisation de la candidate démocrate au profit de Donald Trump ?

Si c’était vrai, ce serait la preuve d’une inquiétante faiblesse de l’Amérique, et d’une tragique impuissance des services de contre-espionnage. La CIA et la NSA seraient donc tombées si bas, qu’elles ne parviendraient même pas à contrer de bien banales cyber-attaques ?


Les menaces qu’aurait adressées Obama à Poutine, pour le contraindre à faire cesser ces agressions, relèvent de la tartarinade : « Je lui ai dit qu'il y aurait des conséquences sérieuses s'il ne le faisait pas... »
Hélas, le futur ancien président américain a beau monter sur ses grands chevaux virtuels, il ne convainc personne, et ses admonestations tournent à l’infantilisme, notamment lorsqu’il traite la Russie de « petit pays qui ne produit que du pétrole, du gaz et des armes... »

Une aussi stupide provocation ne peut que le couvrir de ridicule, à l’heure où l’Amérique fait si pâle figure face à la Russie, notamment en Syrie. Il est bien loin le temps où l’on qualifiait l’Amérique de George W. Bush d’hyperpuissance (Hubert Védrine).


Par son inaction, Barack Obama a laissé en toute connaissance de cause s’opérer d’épouvantables massacres. A côté de l’horrible guerre civile dont la tragédie d’Alep est le point d’orgue, on a vu proliférer un peu partout au Proche-Orient la gangrène du terrorisme islamique, étouffant les grandes espérances de liberté qu’avaient fait naître les printemps arabes.

De ce feu contagieux la Russie de Poutine est en train peu à peu de tirer les marrons, sans qu’on puisse dire où tout cela va mener. Pour l’heure, son influence grandit chaque jour tandis que celle des Etats-Unis s’étiole. Il y a lieu de s’inquiéter de cette évolution. Si les desseins de Poutine restent assez impénétrables, le fait est que sa politique n’a guère d’états d’âmes.

M. Obama tente de se défausser sur d’autres de ses propres erreurs et ses lâchetés et invoque des périls imaginaires. Il tente un peu naïvement de se construire une posture, mais elle fait de plus en plus penser à celle de Don Quichotte qui combattait les moulins à vent...

02 décembre 2016

Cul-de-sac

Les évènements se précipitent. Les échéances se succèdent. Et le grand nettoyage politique est à l’oeuvre.
Aujourd’hui François Hollande prend enfin une sage décision. Il renonce à se représenter à l’élection présidentielle !
Un soupir de soulagement parcourt le microcosme politique. Comme titre Le Figaro : “Le retrait de Hollande est unanimement salué !”

On ne voyait pas bien ce qu’il pouvait faire d’autre, au vu de la conjoncture, mais que d’atermoiements, pour en arriver là ! Que de longueurs dans ce feuilleton en forme de glauque soap-opera.

C’est évidemment un terrible aveu d’échec. Le Chef de l’Etat a beau d’une voix blanche, égrener les soi-disant réussites de son mandat et affirmer n’avoir qu’un seul regret (le débat en eau de boudin sur la déchéance de nationalité), c’est évidemment l’impression d’un monumental ratage qui s’impose.
Victime d’une impopularité précoce, profonde et durable, il n’a jamais réussi à incarner un vrai projet, donnant l’impression de mener le “pédalo” gouvernemental au jour le jour, sans but, sans boussole, avec le seul espoir de pouvoir à un moment ou un autre, profiter d’une bénéfique vague porteuse. Tout ça pour échouer lamentablement sur le banc de sable de la Primaire de la Gauche...

Au risque de passer pour partisan, on peut avant tout évoquer l’inanité de cette politique, errant entre socialisme à l’eau de rose et tiède social-démocratie. On peut considérer comme normal, que rien de bien ne soit sorti d’une telle accumulation de voeux pieux, de mesures à la Dubout, et d’a priori idéologiques surannés. Le Socialisme, ça ne marche décidément pas, comme le disait Giscard dans un éclair de lucidité.
En plus d’un défaut d’ambition politique, le personnage manque singulièrement de charisme et de panache. Il apparaît plus que jamais évident que son accession aux plus hautes marches du pouvoir ne fut que la conséquence d’un concours de circonstances. Divine surprise pour les uns, erreur de casting pour les autres
Sa lente décrépitude qui s’achève aujourd’hui n’a pas grand chose à voir avec le départ choisi et assumé du général De Gaulle, qui avait lié son sort au résultat d’un référendum. Hélas, François Hollande n’a pas l’occasion de partir avec dignité. C’est sur la foi de sondages désastreux et dans une ambiance pestilentielle qu’il est contraint de s’effacer piteusement.
Après son retrait, qui finit de le décrédibiliser, il persiste néanmoins à vouloir végéter encore cinq long mois, sans plus de légitimité qu'un acte notarial, dans le lugubre cul-de-sac dans lequel il s’est lui-même fourvoyé, et le pays avec. Triste fin...

Cela dit, s’il laisse un Parti Socialiste dévasté, cela n’empêchera pas ses coreligionnaires éparpillés “façon puzzle”, de tenter de nous resservir les mêmes plats, soit en rajoutant un peu de vinaigre de gauche, soit au contraire une pincée d’épices libérales.
Les Français auront-ils enfin un peu plus d’exigences; vont-ils montrer leur dégoût pour ces mixtures dégoulinant d’huile démagogique c’est là toute la question...

30 novembre 2016

En marche ?

La primaire de la Droite et du Centre a donc rebattu les cartes du jeu politique, qu’on croyait déjà distribuées…


Ce scrutin très ouvert, qui a passionné le pays s’est déroulé dans une ambiance un peu étrange mais somme toute très démocratique et rassurante pour l’avenir. Le pire n’est donc pas certain et c’est le grand mérite des organisateurs de cette confrontation, d’avoir relevé le défi. Thierry Solère en fut un des principaux artisans. Ses manières simples, sans emphase ni artifice, cachent évidemment une belle détermination. Elles révèlent également une nouvelle approche politique, marquée par le souci de dire les choses telles qu’elles sont et non telles qu’on voudrait que le peuple croie qu’elles soient.

François Fillon
a été désigné comme le nouveau porteur des espérances de celles et ceux qui se sont exprimés avec enthousiasme. Ils ne représentent qu’une partie du pays, mais n’en doutons pas, le succès de l’opération révèle une aspiration profonde. L’essai ne demande désormais qu’à être transformé.

La personne même de François Fillon semble taillée pour les épreuves à venir. Il a le calme et le sang froid des vieilles troupes. Il a une expérience trempée au feu de l’action, nul ne peut le contester, et il paraît savoir où il veut emmener le pays, ce qui n’est pas la moindre des qualités, en ces temps de trouble et de confusion.


S’agissant de son programme, il a de quoi séduire tout amoureux de la liberté. On entend évidemment déjà les voix de ceux qui crient à l’ultra-libéralisme, qui s’effarouchent par avance de la “casse sociale” qu’il serait susceptible de provoquer. La rengaine est si caricaturale, si éculée qu’elle devrait faire honte à ceux qui osent encore l'entonner.
Ces gens ont-ils donc de la m…. dans les yeux pour ne pas voir le lent dépérissement de la nation, pour être aveugle au malheur de toutes les personnes sans emploi ou qui végètent dans une misère entretenue par un Etat Providence déresponsabilisant ? Sont-ils donc pétris de mauvaise foi pour occulter les déchirements qui traversent notre société, pour réclamer toujours plus de bureaucratie, qui asphyxie les initiatives ?


Dans quel monde est-on lorsqu’on refuse aux gens la liberté de travailler comme bon leur semble ? Lorsqu’on ne voit d’autre perspective au problème de l’emploi que celle de la Fonction Publique ? Lorsqu’on n’imagine d’autre horizon pour l’éducation des enfants que celui de l’Etat ? Lorsqu’on ne parvient à penser l’assurance maladie autrement qu’à travers le dogme monolitihique de la Sécurité Sociale ? Lorsqu’on considère la famille comme une référence relevant du fascisme ?


Pour l’heure François Fillon veut échapper à cette gangue conservatrice confinant au gâtisme. Il veut avancer en éradiquant un à un les tabous idéologiques qui forment autant de mirages trompeurs sur le chemin du progrès.
On ne saurait toutefois se réjouir trop vite ayant tant été échaudés par le passé.
Il reste en effet à savoir dans quelle mesure il appliquera tout ce qu’il propose, et comment il fera passer la pilule amère à des Français drogués aux promesses et aux illusions...

22 novembre 2016

Le combat de trop

Ainsi s’achève donc la trajectoire politique de Nicolas Sarkozy...


Même s’il ne faut jamais jurer de rien en matière de politique, cette fois le destin national de l’ancien Président de la République paraît scellé pour un moment, si ce n’est pour toujours.
Ce parcours incandescent, brisé une première fois en 2012, s’achève donc abruptement ce 20 novembre 2016, à l’issue d’une primaire organisée par son propre parti, et dont il fut bon gré mal gré l’artisan ! Ce parti qu’il avait conquis, fasciné, mené à la victoire, puis sévèrement déçu, avant finalement de le sauver de l'auto-destruction, à l’occasion d’un improbable et risqué retour.
..

Si cette reconquête étonnante mais illusoire n’était pas sans rappeler les fameux cent-jours de Napoléon, le résultat du scrutin de cette “Primaire de la Droite et du Centre”, c’est en quelque sorte Waterloo et l’exil à Saint-Hélène...

L
es électeurs ont écarté leur champion d’un nouveau challenge présidentiel, et ce, sans ambiguïté ni ménagement.

Il faut croire que l’Histoire repasse rarement les plats. La chance qui a souri à Nicolas Sarkozy ce soir de mai 2007, où vainqueur de l’élection présidentielle il exultait sa joie, s’exclamant “Je ne vous trahirai pas”, “Je ne vous décevrai pas”, cette chance s’est obstinément refusée à lui pour une nouvelle aventure.


Derrière la meute des ennemis jurés, ni plus ni moins nombreux depuis 10 ans, l’ancien chef de l’Etat n’a pas vu celles et ceux qui se sont sentis trompés et trahis durant ce quinquennat trépidant mais désordonné, plein de fougue mais sans vraie ligne directrice, marqué par tant de renoncements, de contradictions et tant d’erreurs grossières de communication ! Il n’a pas vu que s’est imposée peu à peu dans beaucoup d’esprits, l’idée que chez lui, l’énergie et la volonté masquaient un manque quasi total de convictions.


Certes il y eut cette haine irrépressible, inextinguible, épidermique, inexplicable tant elle est irrationnelle, qui l’a poursuivi sans répit durant tout son quinquennat, et ce quoiqu’il fasse ou qu’il dise. Cette haine qui s’est accrochée à ses basques dès le début du marathon un peu fou qu'il avait entrepris pour tenter de revenir au premier plan.

Tout y passa, des insultes les plus viles aux accusations les plus extravagantes pour tenter de le discréditer. Le “Hollande bashing” contre lequel quelques chochottes enfarinées de la Gauche bobo font mine de s’émouvoir et qui fait gémir les Saintes-Nitouches “people” de la Socialie, n’est rien en comparaison de celui qui s’abattit sans discontinuer depuis de nombreuses années sur Sarko.
Il perdura jusqu’à ces derniers temps, où nombre de revanchards hystériques se déclaraient prêts à tout ou presque pour barrer la route au candidat républicain, y compris piétiner leur prétendu engagement idéologique, en allant voter pour le quelque peu rassis Juppé. Six-cent mille personnes ont cru bon d’accomplir cet obscur dessein, à ce qu’il paraît.


Le parti des Republicains peut dire merci à ces idiots utiles qui ont un peu renfloué ses caisses en même temps qu’ils ont précipité ce qui était devenu inéluctable !

Même si Sarkozy était encore capable de déployer une énergie admirable, même s’il émanait toujours de sa personne un charisme puissant, les ressorts étaient usés. La ligne stratégique était devenue franchement erratique, tellement difficile à comprendre que plus grand monde ne parvenait à la suivre.


Pourtant, les événements ne se sont pas vraiment déroulés comme prévu. La Gauche vindicative et le Centre équivoque ont eu la peau de Sarko mais, faisant involontairement d’une pierre deux coups, ils ont blackboulé par la même occasion celui qu’ils avaient désigné comme l’exécuteur de leurs basses oeuvres !

Mu par une intuition contagieuse et déjouant tous les pronostics, le “peuple de droite” a en effet anticipé la chute annoncée de son héros et s’est reporté massivement sur François Fillon, prenant à contrepied la stratégie machiavélique, un peu cousue de fil blanc. Résultat : Sarkozy entraîne dans sa chute Alain Juppé qui se croyait déjà en haut de l'affiche, et toute sa suite de courtisans, parfois de la dernière heure, alléchés par les juteuses prébendes qui se profilaient à l’horizon.


Mauvais perdant, mal conseillé, et obstiné jusqu’à l’absurde, Juppé “a décidé de continuer le combat” au nom du “rassemblement”. Largement distancé, il avait une belle occasion de faire cesser au contraire les hostilités inutiles, et de s’associer à cette nouvelle dynamique porteuse d’espoir pour son parti. Il préfère courir le risque d’ouvrir de nouvelles divisions dans lesquelles pourront s’engouffrer les adversaires de tout poil. Il prend également celui d’une défaite cuisante en deux temps, qui ne serait en définitive que justice face à tant de mesquinerie.


Quant à Nicolas, il s’est esquivé sur la pointe des pieds, rendant les armes avec panache et humilité, au terme d’une brève et touchante allocution. Ce dernier combat fut sans doute celui de trop, mais il lui donne l’occasion de prouver que derrière des manières parfois histrioniques, il y a un coeur sensible et une âme noble. Respect lui soit rendu...

12 novembre 2016

Réactionnite

Sans doute vaut-il mieux rire de ce concert de réactions pour le moins cocasses si ce n’est parfois franchement stupides qui font suite à l’élection de Donald Trump.
Dans ce feu d’artifice tous azimuts, on voit de tout...

D’abord, les mauvais perdants qui se font un devoir d’opposer à grands cris leur refus du verdict démocratique. A l’image de ces jeunes bécasses endoctrinées sur lesquelles le site web du journal Le Monde s’ouvrait, 3 jours après les résultats du scrutin !
“Not my president”, c’est le slogan qu’elles affichent sur leur front à la manière des peintures guerrières abêtissant les supporters de foot à l’entrée des stades. Les pauvresses, elles n’ont pas compris que le match était fini…

Et Le Monde de qualifier ces “quelques centaines de personnes” manifestant au pied de la Trump Tower, de “jeunesse libérale” ! Cela donne envie d’ironiser sur le mouvement de fond que ces groupuscules d’enragés représentent, et de s’interroger sur l’intérêt qu’il y a, alors que nous nous trouvons paraît-il en pleine panade démocratique, de leur donner un telle importance (qui fait passer au second plan tout le reste de l’actualité, dont la mort du chanteur Leonard Cohen). Cela fait naître aussi une certaine perplexité quant au sens du mot libéral utilisé en la circonstance. On imagine mal qu’il s’agisse de fans du fameux libéralisme si décrié en France, et dont M. Trump ferait plutôt figure d’incarnation diabolique…

Sans doute faut-il donc prendre le terme au sens anglo-saxon, ce qui signifierait plutôt gauchiste, c’est à dire ennemi de tout ce que la liberté suppose…


Passons sur ces peccadilles. Il y a plus grave. La France est une nouvelle fois en émoi.

En témoigne le sondage qui atteste (si tant est qu’un sondage puisse attester une réalité) que 83% des Français auraient une mauvaise opinion de Trump ! Belle unanimité qui démontre une fois encore que l’esprit critique a hélas déserté notre pays au profit d’un morne conformisme. Y a-t-il encore des repères dans ce marasme consensuel, dans lequel les gens ont perdu l'habitude de penser par eux-mêmes ? 

Plus trop manifestement lorsqu’on songe qu’avec 4% d’opinions favorables, François Hollande se croit toujours en position d’incarner le meilleur candidat de gauche à la présidentielle. De crise démocratique il est donc bien question…

Passons également sur le mélange de mauvaise foi chauvine et de méconnaissance crasse du système américain, qui fait dire tranquillement sur un plateau télé, à madame Royal, qu’en France Hillary Clinton serait élue, car elle totalise plus de voix populaires que son adversaire !

Passons sur la réaction incroyable de notre ambassadeur aux Etats-Unis, tweetant ses états d’âme au sujet de l’élection de Donald Trump, dans laquelle il voit "un monde [qui] s'effondre devant nos yeux" ! Sans doute imagine-t-il que cette contribution puisse améliorer les relations diplomatiques entre les 2 pays. A moins qu’il n’ait décidé comme nombre d’artistes et de prétendus intellectuels d’abandonner courageusement ses fonctions et de quitter les Etats-Unis...

Passons enfin sur les annonces catastrophistes au petit matin du 9 Novembre : “la chute des marchés boursiers s'accélère sur des craintes de victoire de Trump” (Figaro), vite démenties par le rebond “historique” de Wall Street…


Terminons donc sur les tentatives plus ou moins convaincantes de récupération du résultat de la présidentielle américaine par nos politiciens. Celle du front National bien sûr, qui n’a pas trop à se fatiguer puisque les enquêtes d'opinions affirment qu’il serait le principal bénéficiaire de “l’effet Trump”. Il y a pourtant fort à parier que contrairement aux idées reçues, les actions du futur dirigeant américain n’auront pas grand chose à voir avec celles préconisées par l’extrême droite française.

Et surtout celle, délicieuse d’opportunisme, de Nicolas Sarkozy. On se souvient en effet que l’ancien chef de l’Etat ne faisait pas mystère de sa préférence : "Il se trouve que moi, je suis l'ami d'Hillary Clinton. Qu'est-ce que j'ai à voir avec monsieur Trump ?" clamait-il haut et fort. Il affichait même un vrai mépris pour ce dernier qu’il jugeait “populiste et vulgaire”, allant jusqu’à affirmer : “ce monsieur ne mérite pas tant d'intérêt que cela, je trouve effrayant que 30% des Américains puissent se reconnaître là-dedans…”


Le voici qui salue maintenant la victoire de Trump dans laquelle il voit “le refus de la pensée unique” !

En disant tout et son contraire, M. Sarkozy a parfois raison. Mais en l’occurrence, c’était lorsqu’il affirmait qu’il n’y avait pas grand chose de commun entre lui M. Trump. A part le charisme, tout les oppose en effet. Le futur hôte de la Maison Blanche est vraiment neuf en politique et jusqu’à ce jour, on peut dire qu’il s’oppose vraiment à la pensée unique. Cela lui a donné des arguments que Nicolas Sarkozy n’a plus quant à lui pour convaincre...

10 novembre 2016

La nuit américaine

Encore une fois l’Amérique a réservé au Monde une surprise dont elle a le secret, lors de cette folle nuit d’élections ! Donald Trump, le vilain canard, honni des médias qui croient faire l’opinion, a donc été élu ! Sans bavure. Sans appel...
L’improbable est donc devenu certitude devant les yeux médusés des légions de commentateurs et de sondeurs prétendus avisés, qui la veille encore, jouaient à prendre leurs désirs pour des réalités.

Avant même de s’intéresser à la personne du nouveau Président, comment ne pas évoquer le monumental échec de cette hallucinante orchestration destinée à le discréditer ? Comment ne pas parler de la claque magistrale donnée à tous les donneurs de leçons, ligues de vertu, artistes “engagés”, qui depuis de longs mois maudissaient le candidat portant les couleurs du parti républicain ? A tous ceux qui dénonçaient son mauvais goût, ses discours sans filtre et ses excès, et qui ne se rendaient même pas compte de leurs propres outrances et de leur sectarisme...

Hillary Clinton se plaisait à évoquer en ricanant le train des insultes proférées par Donald Trump, mais combien faudrait-il de wagons pour contenir tous les gens qui n’ont cessé de vomir leurs invectives sur lui ?
Le Peuple en a eu manifestement assez de ces petits dictateurs de la pensée et de leurs vociférations. Il a manifesté son ras le bol par cet ouragan démocratique. Tant mieux après tout, si tant est que la démocratie ait encore un sens... 
Qui peut soutenir qu'en démocratie, il soit normal que l'écrasante majorité des centaines d'organes de presse, aient choisi sans nuance de tirer à boulets rouges sur Trump, quand ils ne prenaient pas carrément position pour madame Clinton ? Qui peut voir sans s'interroger, la quasi totalité des plus de 300 récents sondages proclamer par avance la victoire d'Hillary Clinton ? Cet incroyable aveuglement à sens unique n'est hélas pas nouveau. On se souvient de 2004 lorsque cette folie moutonnière s'est abattue, pour des raisons à peine différentes, sur George W. Bush. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, cela n'empêcha nullement sa réelection....


Maintenant que Donald Trump est élu, il faudrait sans doute pouvoir répondre aux questionnements angoissés qui reviennent sans cesse dans tant de bouches. Trump est-il un clown ? Est-il un fou ? Est-il, tel le réchauffement climatique, dangereux pour la Planète ?
La réponse est évidemment non. D’abord parce que l’Amérique en a vu d’autres et que ses institutions ont fait la preuve de leur robustesse pour pallier l’inefficacité éventuelle ou les dérives de l’Exécutif. D’ailleurs en France n’a-t-on pas toujours considéré les dirigeants américains, à part quelques démagogues gauchisants, comme des crétins finis ? Cela n’a pas empêché les Etats-Unis de continuer leur petit bonhomme de chemin…

Au cours de cette campagne mémorable, il est indéniable que M. Trump usa et abusa de la provocation. Elle fut d’ailleurs parfois tellement énorme qu’on peut légitimement penser qu’il s’agissait d’une forme d’humour. Hélas, les prétendus Intelligents s’y sont manifestement montrés totalement étanches...
Cette pratique de l’hyperbole, de l’exagération systématique répondait sans doute à une stratégie mûrement réfléchie. Il fallait imprimer sa marque dans les esprits. M. Trump était pressé de tracer son sillon dans le champ de la politique, tout neuf pour lui. Avide d’une moisson rapide, il n’a pas hésité à rajouter à l’envi du fumier, du purin et même des excréments dont on connaît le pouvoir fertilisant.

Il ne fit certes pas dans la dentelle, et ça ne sentait pas la rose, mais son pari insensé s’est révélé gagnant.

Envers et contre presque tout, et en un temps record, il a fait main basse sur le Parti Républicain au service duquel il s’était rangé, bousculant au passage les caciques complètement déboussolés. Dans la foulée, au terme d'une campagne époustouflante, paradoxalement très sobre en dollars, il a conquis l’Amérique, les yeux dans les yeux.

Certes, il reste quelques incertitudes quant à la politique qu’il va mener, maintenant qu’il est sur le point d’investir la Maison Blanche. On ne saurait trop s’avancer, mais le passé de M. Trump suggère qu'il est  du genre pragmatique. Il a du charisme, il a le sens des affaires et des négociations, c’est un fait. Gageons qu’il ne sera pas pire qu’un autre en somme… 
Comme tout homme politique, c’est sur son action qu’on le jugera, plus que sur ses promesses. 
Pour l’heure, il a fait un carton plein puisque les Républicains sont majoritaires à la Chambre des Représentants et conservent le Sénat. Mais il n’a que deux ans pour convaincre...

Son premier discours, après les élections est un modèle de sobriété. C’est un des rares qu’on eut le privilège d’entendre en intégralité, contrairement aux extraits croustillants, choisis à dessein, avec lesquels on nous a si souvent bassinés, ou aux propos enregistrés à son insu, montés en épingle par les médias avec une délectation morbide.
Il a félicité sa rivale et rendu hommage à son courage, puis devant une haie étincelante de bannières étoilées a lancé un vibrant appel à l’union, en remerciant longuement celles et ceux qui l’avaient accompagné.
Quant aux autres, qui ne l’ont pas soutenu, “et il y en a...” il leur a tendu la main et les a appellés non sans un brin d’ironie, à l’aide...

09 novembre 2016

Turner en pleine lumière

La grâce artistique prend parfois des détours inattendus ou improbables pour s’exprimer. De la plus épaisse vulgarité naît parfois le talent, et de la trivialité la plus ordinaire s’élève parfois l’inspiration dans ce qu’elle a de plus ineffable.


Ainsi, au travers d’un film du cinéaste Mike Leigh retraçant la vie de Joseph Mallord William Turner (1775-1851), on peut découvrir derrière le fameux peintre britannique un personnage étonnant, fait de rudesse et d’âpre rusticité, peu gâté physiquement par la nature, sans allure, petit, bedonnant, le cou gras, la bouche lippue.
Et bien, c’est cet homme sans panache, d’humeur souvent chafouine, qui fut l’auteur de toiles, aux perspectives vastes et vaporeuses, inondées d’une lumière extatique noyant comme une pluie dorée les horizons évanescents.


Ce bonhomme à la face de gargouille comme il le disait lui-même, cette silhouette de péquenot parcourant infatigablement et par tous les temps, tel un géomètre, les paysages d’Europe, avec sa besace remplie de carnets de dessins, c’est ce bonhomme bien banal qui produisit une oeuvre comptant plus de 20.000 pièces dont on dit qu’elles ont ouvert la porte à toutes les folies impressionnistes, expressionnistes, symbolistes et autres abstractions lyriques qui constituent la peinture moderne !

Le personnage, tel qu’il apparaît au cinéma, n’est pas sans rappeler celui de Mozart vu par Milos Forman dans son film Amadeus, où il invitait le spectateur à se pencher sur le mystère de la création, en montrant un artiste déconcertant de paradoxes, grossier dans ses manières et si inspiré, si élevé dans sa musique.

On ne peut s’empêcher d’éprouver une étrange sympathie pour ces êtres dont le génie paraît par moments si vulgaire et par d’autres si coruscant. Ils vous touchent par leur simplicité, si proche de celle du commun des mortels, et vous fascinent par leur art tellement inaccessible.



Pour illustrer cette mystérieuse aporie, rien ne vaut dans le film sur Mr. Turner, ces scènes montrant les amateurs et éventuels acheteurs, venus rendre visite au peintre, lorsqu’ils passent émerveillés, de l’intérieur plutôt modeste et sombre de sa maison, à la clarté éblouissante de la salle dans laquelle il exposait ses oeuvres, sous une verrière laissant entrer à pleins flots la lumière à travers un dais de tissu tendu. On passe littéralement de la pénombre à la clarté. Tout à coup la misère du quotidien s’illumine, et tout devient subitement incandescent.


Pour comprendre la fulgurance du génie, on ne peut oublier non plus l’épisode de l’exposition à la Royal Academy, lorsque Turner humilia gentiment Constable, dont les hasards de l’exposition avaient placé un tableau à côté du sien. Voyant ce dernier peaufiner un magnifique paysage en rehaussant de touches carminées quelques détails du premier plan, voici Turner qui se met à barbouiller le sien, un marine élégant, en écrasant au beau milieu de la mer une grosse tache de peinture rouge vif.

  Étonnement si ce n’est stupéfaction des visiteurs devant un tel gâchis apparent, puis exclamations d’admiration lorsque après s’être absenté un instant, le peintre revient et transforme habilement avec ses ongles et son mouchoir, la tache en une bouée rouge, donnant un contraste inattendu et saisissant à la scène…



C’est cela Turner, une maîtrise extraordinaire pour donner consistance aux formes, pour suggérer sans avoir besoin de préciser, et pour faire vibrer la lumière comme jamais on ne le fit avant lui.
On dit que ses derniers mots furent pour évoquer le lien par lequel le soleil confine au divin : "The Sun is God." Tout est dit...

27 octobre 2016

Pataphysique Médicale

Sur le front de la santé publique, un débat s’est fait jour dernièrement, suite à la recommandation par les experts de la haute Autorité en Santé, d’arrêter le remboursement par la Sécurité Sociale des médicaments destinés à lutter contre la maladie d’Alzheimer.

Il apparaît en effet de plus en plus évident que ces produits s’avèrent très largement inefficaces pour enrayer la progression de cette terrible maladie, dont on ignore encore la cause précise. 
Quatre médicaments sont en cause : Ebixa, Aricept, Reminyl, Exelon.
Preuve implicite de leur action insuffisante, le taux de prise en charge par l’Assurance Maladie n’est à ce jour que de 15%. D'ailleurs, sur le nombre estimé de 850.000 malades en France, ils ne sont que 30 à 40.000 à recevoir ces traitements, ce qui coûte tout de même 130 millions d’euros à la collectivité. Et on estime à plus d’un milliard d’euros les dépenses remboursées depuis l’autorisation de mise sur le marché (AMM) de ces molécules !

Pis que tout, outre les nombreux effets indésirables induits par ces médicaments, une étude menée à grande échelle sur 10 000 personnes, objective que les patients qui les prennent auraient même un plus mauvais pronostic que les autres.


Croyez-vous que ces données édifiantes soient de nature à influencer les Pouvoirs Publics, au moins aussi soucieux de ne pas déplaire que d’être efficace ? Evidemment, non.
Aujourd’hui même, madame Touraine annonce « qu’Il n'y aura pas de déremboursement dans l'état actuel des choses. »
Fidèle à la détestable habitude des politiciens de botter en touche, surtout en période pré-électorale, elle explique qu’elle souhaite d'abord que soit mis en place «un protocole de soins élaboré par les scientifiques en lien avec les associations de patients... »


Est-ce pour répondre aux récriminations des associations de malades ou de certains médecins, tels le Dr Christophe Trivalle, gériatre à l’hôpital Paul Brousse de Villejuif, qui réclamait en 2011 le statu quo au motif que “Le danger de dérembourser est d’ignorer que ce qui est fait pour ces malades repose avant tout sur la mise en route d’un traitement spécifique. Supprimer le traitement, c’est courir le risque de voir disparaître les effets positifs des trois plans Alzheimer !”

Face à des évidences scientifiques criantes on patauge donc une fois encore dans la subjectivité qu’on peut résumer par cette remarque de dépit d’un chercheur en pharmacologie, au sujet du déremboursement des traitements inefficaces : « Ce serait une bonne décision, mais dure pour les patients qui auront un sentiment d'abandon. »

On peut également se demander à quoi servent toutes ces hautes autorités, et agences que l’Etat érige à grands frais comme des murailles destinées à empêcher les dérives, puisque lui-même se plaît à y creuser des brèches par ses atermoiements… Comme on l’a vu récemment avec l’affaire Biotrial, il impose aux autres de se référer au moindre problème et sans délai à ces succursales, tandis qu’il se plaît à les ridiculiser par son attitude inconséquente.


Pendant ce temps les hôpitaux se trouvent dépourvus pour financer certaines thérapeutiques innovantes, dont l’Etat et ses innombrables filiales tarde a reconnaître le bien fondé. Ainsi une pléïade d’anticorps monoclonaux, représentant une alternative immunologique prometteuse aux chimiothérapies classiques en cancérologie attendent leur AMM, ce qui interdit tout simplement leur prise en charge par l’Assurance maladie !
Parallèlement, l’Etat manifeste une mesquinerie incompréhensible en pénalisant les établissements dispensant à leurs patients des médicaments novateurs, d’efficacité prouvée, et dûment autorisés, mais hélas onéreux, en taxant chaque prescription d’une “réfaction”
arbitraire de 40 euros…

Il semble ainsi plus que jamais difficile dans notre pays d’aborder sans artifice idéologique la problématique pourtant incontournable du ratio coût-efficacité en santé publique.
Nous vivons décidément une époque formidable où le progrès fait rage mais où les mentalités restent crispées sur des a priori moyen-âgeux !

24 octobre 2016

La deuxième mort de Schiaparelli


L’échec de la mission martienne Schiaparelli, pilotée par l’Agence Spatiale Européenne (ESA) en lien avec son homologue russe Roscosmos, montre deux choses : le retard de l’Europe vis-à-vis des Etats-Unis d’une part, et la difficulté pour le vieux continent de reconnaitre la réalité, aussi désagréable soit-elle, d’autre part…
Rappelons que le premier engin ayant pleinement réussi son atterrissage sur la planète rouge date de 1976 et portait la bannière étoilée (Viking). Rappelons également que le premier rover américain, le petit Sojourner de la mission Pathfinder, y roula dès 1997. Depuis, de nombreux voyages  interplanétaires ont été planifiés, et à l’instant présent, deux véhicules sillonnent Mars, l’un d'eux depuis 4 ans (Curiosity) et l'autre depuis 12 ans (Opportunity) !

Qualifié de "succès à 96%" par ses promoteurs, le programme ExoMars est certes parvenu à mettre en orbite une petite station baptisée TGO (Trace Gas Orbiter). Mais il s’est hélas soldé par l’écrasement de son module, portant le nom de l’astronome italien Giovanni Schiaparelli (1835-1910), qui était destiné à se poser « en douceur ». C’était le but emblématique, et aussi un objectif essentiel, puisqu’il préparait le débarquement envisagé d’un rover en 2020.
Pour évaluer la mission, les responsables de l’Agence se sont livrés à un savant calcul. Ils ont considéré que la première partie (la mise sur orbite de la station TGO) représentait 80% des objectifs de la mission et qu’elle fut remplie à 100%. La seconde, qui selon eux ne comptait que pour 20%, fut qualifiée de « réussie » à 80%, car pendant toute sa descente, l’atterrisseur envoya des signaux et le point d’impact fut à peu de chose près celui qui était prévu… Au final: un succès à 96% !

Il s’agit d’une curieuse manière de se satisfaire, pour une mission qui coûta aux contribuables près de 1,2 milliards d’euros. On ose espérer que les critères eussent été un peu plus stricts s’il s’était agi d’une sonde habitée…

Lorsqu’un dysfonctionnement empêche une mission d’atteindre son but, la stratégie outre atlantique n’est pas de calculer un taux de succès relatif, mais de se mettre sans délai et sans concession au travail pour en trouver la ou les causes.

Cette curieuse incapacité à voir les choses de manière pragmatique explique sans doute, au moins en partie, les atermoiements, les reculades, les faiblesses de l’Union Européenne sur le théâtre international. L’Europe est forte de la grandeur passée de ses nations et des richesses qu’elles ont accumulées, mais elle ne parvient pas à s’inscrire dans l’avenir comme une fédération cohérente, avec un dessein partagé, une détermination forte et de vraies convictions.  

Au surplus, elle manifeste une défiance parfois incompréhensible vis à vis du monde qui l'entoure, tournant parfois à l'anti-mondialisation idéologique, d'essence suicidaire. On sait le sort qui fut réservé au projet hélas avorté de traité de facilitation des échanges commerciaux avec les Etats-Unis, dit TAFTA (pour lequel, le Premier Ministre français affirma "qu'il n'allait pas dans le bon sens...")
Peut-être est-ce aussi un peu à cause de cette indécision chronique et de ces hésitations pusillanimes qu’elle est en passe, en ce moment même, de décourager le Canada de signer l’accord prometteur de libre-échange, dit CETA...

Compte tenu des coûts exorbitants de la conquête spatiale, il est permis de s’interroger sur la multiplication des programmes, conduisant à disperser les efforts. Il y a bien ça et là quelques fructueuses collaborations, dont la station orbitale internationale ISS témoigne. Mais aujourd’hui, dans cette folle course, outre l’Amérique, la Russie, l’Europe, l’Inde, la Chine et le Japon se font un devoir de se positionner individuellement, au prix fort.
Il est difficile par exemple de comprendre pourquoi l’ESA doive faire l’apprentissage de toutes les étapes du processus d’atterrissage martien, alors qu’il semble bien maitrisé par la NASA. L’émulation est un excellent stimulant, sauf lorsqu’elle se transforme en une vaine compétition dans laquelle les forces de chacun s’épuisent. C’est à ce moment que la complémentarité devrait s’exercer…

Pour parler chic, ne serait-il pas temps de mettre en place une gouvernance mondiale dont l’exploration spatiale pourrait représenter un des premiers volets ?

15 octobre 2016

Last American Hero

A l'heure où plus rien ne semble émerger dans nos sociétés fatiguées par le bien-être matériel, hormis de sombres inquiétudes; où des masses informes de citoyens grégaires et désabusés s'abandonnent avec une béate veulerie à l'Etat Providence; où l'esprit critique bat en retraite un peu partout devant le flot des idées reçues et des a priori ronflants; il en reste au moins un qui continue de tracer sa route en toute indépendance et liberté.
Most likely you go your way and I'll go mine... Va ton chemin, j'irai le mien disait la chanson de Bob Dylan...

Indifférent en apparence, au tumulte vain de l'époque, à la gloire, à la fatigue, aux médias, aux discours, aux médailles, aux récompenses, aux louanges aussi bien qu'aux insultes, il sillonne sereinement le monde en semant dans le vent ses ritournelles.
Aujourd'hui le prix Nobel de littérature lui tombe dessus, sans crier gare, et sans qu'il fasse mine de s'en émouvoir. Tel est le personnage... Il boude aussi bien les embaumements que les offuscations.

Certains croient intéressant de polémiquer en invoquant l'incapacité qu'aurait un chanteur à mériter un tel prix. Ils s'arrogent le droit de remettre en cause la décision du jury, et tentent de ramener au niveau du caniveau les chansons célestes du beatnik errant. Ils n'ont rien compris les bougres !
C'est pour ça que Bob Dylan est grand.

C'est parce que son chant part du ras-des-pâquerettes qu'il peut s’élever si haut. C'est parce qu'il est léger et impalpable qu'il vous pénètre aussi profondément. C'est parce qu'il n'est fait que de mots anodins et de quelques notes de musique qui n’ont l’air de rien, qu’il reste en vous définitivement dès lors qu’il vous touche. C'est parce qu'il est inspiré, tout simplement...

Ils disent que ce n'est « pas un écrivain puisqu’il n’a pas de livre à son actif ». Comme si la littérature s’évaluait au poids des volumes produits ! Une telle cuistrerie quantitative rappelle la remarque d’un prétendu maître de musique, cherchant à disqualifier à l’oreille du roi une symphonie de Mozart, en affirmant qu’il y avait trop de notes…

Il est probable toutefois que cette “nobélisation” comme on dit, embarrasse plutôt notre homme. A dire vrai, il n’en a que faire pour sa gloire, et peut craindre qu’il s’agisse d’un boulet doré qu’on tente de lui attacher au pied, pour le faire rentrer dans le rang du conformisme. Depuis si longtemps, tant de vils flatteurs qui l’encensent attendent qu’il leur fasse un signe de sympathie, ou bien qu’il s’engage pour leurs causes plus ou moins foireuses.


Pour l’heure il manifeste sa joie par un silence imperturbable, qui semble dire : “I’m not there…
Il n’en reste pas moins vrai que s’agissant du choix du jury Nobel, on en connut de plus discutables…
Sans doute involontairement hélas, il signifie qu’en matière artistique, seule compte l’émotion. Tout le reste est littérature...

06 octobre 2016

Alep comme Carthage sera détruite...

“Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur, vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre…”


Cette sentence célèbre émanant de la bouche de Churchill après la accords de Munich en 1938 revient sinistrement en mémoire à l’évocation du désastre syrien et de l’agonie de la ville d’Alep, qui s’effondre sous les bombardements conjoints des Russes et de l’armée de Bachar El Assad.

Les Etats-Unis, et derrière eux, la Communauté Internationale porteront une lourde part de responsabilité dans cet atroce gâchis, dû en grande partie à leur irrésolution durant cet interminable conflit.
Cette incapacité à agir offre évidemment un contraste saisissant avec l’interventionnisme des années Bush.
En dépit des montagnes de critiques et des tonneaux d'insultes déversés sur l'ancien président, il faut espérer que l’histoire lui rende un jour justice. Lopération internationale menée sous l’égide des Américains à partir de 2003 en Irak était en passe d’ouvrir une vraie perspective de progrès au Proche Orient. La chute du tyran Saddam Hussein et l’installation d’un régime démocratique furent des acquis incontestables, quoique contestés par une foule d’ani-américains primaires. L’union sans faille de toutes les nations libres aurait probablement permis de conforter ce résultat et de lui donner des développements ultérieurs dans d’autres pays dont précisément la Syrie. La théorie des dominos était en l’occurrence applicable dans cette région .


Hélas, faute d’unanimité et la faute notamment à la France qui se désolidarisa lâchement et bruyamment de ses alliés, c’est le contraire qui se passa. La mauvaise conscience mina les esprits jusqu’à finir par transformer les acquis en échecs.
Résultat, avec l’avènement du lénifiant Obama, et la complaisance du jury du prix Nobel de la Paix, tout partit en capilotade. Comme à l’époque du Vietnam et du Cambodge, et avec les meilleures intentions du monde, les populations furent abandonnées à leur triste sort, c'est à dire livrées en toute conscience, à une atroce barbarie.


Dès lors, tous ces pays qui pouvaient entrevoir leur libération retombèrent dans le chaos. Pire, on assista à une poussée sans précédent d’un islamisme des plus rétrogrades dont le terrorisme constitue le fer de lance abominable.
Ainsi, force est de constater que l’histoire se répète. La faiblesse des uns profite à d’autres et dans la déconfiture générale les peuples sacrifiés sur l'autel du pharisaïsme, sont contraintes à l’exode. 


A côté de la barbarie du prétendu Etat Islamique dont la sauvagerie contribuera probablement à causer la perte, s’organise un contre-pouvoir à celui défaillant du monde occidental. Dans cet imbroglio stratégique la Russie est en train de tirer les marrons du feu, sans état d’âme, et avec une implacable détermination.
Nul ne sait jusqu’où la faillite des valeurs démocratiques va entraîner le monde et de quelle nature sera l’emprise des nouveaux maîtres du jeu. Une chose est certaine : au delà du drame humain qui s’étale chaque jour sous les caméras de télévision, c’est une vraie menace qui pèse sur l’avenir de la liberté...